Rupture abusive du contrat d’agence

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Rupture abusive du contrat d’agence

L’Essentiel : Une agence de publicité a intenté une action contre Montres Tudor pour rupture brutale de relations commerciales, malgré une clause de compétence attribuant les litiges aux tribunaux de Genève. Le tribunal a jugé qu’il était incompétent, se fondant sur le droit suisse et la volonté des parties de soumettre leurs différends à ce cadre juridique. Selon le Code Suisse des Obligations, la nature contractuelle de l’action a été reconnue, rejetant ainsi la compétence des juridictions françaises. La Convention de Lugano a également été appliquée, confirmant la compétence exclusive des tribunaux de Genève pour ce litige.

Rupture brutale de relations commerciales établies

Une agence de publicité en charge de la réalisation de campagnes de communications de prestige pour des marques de luxe a poursuivi la société Montres Tudor (société suisse filiale du groupe) en rupture brutale de relations commerciales établies devant le tribunal de commerce de Paris. La relation des parties avait été formalisée par un contrat cadre stipulant une clause attributive de compétence aux tribunaux du canton de Genève.

Droit applicable et For

Bien que la clause attributive de juridiction du contrat cadre ne visait pas le cas d’une rupture brutale des relations commerciales, la « responsabilité extracontractuelle » de l’auteur de la rupture relevait bien du droit suisse. La société Tudor a obtenu du tribunal de se déclarer incompétent en application du contrat cadre conforme à la Convention de Lugano.

La volonté commune des parties a bien été de soumettre toute contestation les opposant au droit suisse : « le présent contrat est soumis au droit suisse ; tout litige résultant de l’interprétation ou de l’exécution du présent contrat est soumis à la compétence exclusive des tribunaux du canton de Genève, Suisse ».  Le terme « d’exécution du présent contrat » incluait  nécessairement les conditions dans lesquelles la dite exécution cesse quelles qu’en soient les circonstances, et ce y compris les faits de rupture brutale.

Code Suisse des Obligations

La détermination de la clause de for en droit international dans le cadre de l’action en rupture brutale d’une relation commerciale établie impose de tenir compte de la volonté des parties, laquelle était  de faire application du droit Suisse et de la compétence des tribunaux du canton de Genève.  La clause litigieuse a été comprise au regard du droit suisse, comme s’appliquant notamment à une action en dommages et intérêts d’une partie, liée à la résiliation du contrat. Aux termes du Code Suisse des Obligations, (article 18 alinéa 1) « pour apprécier la forme et les clauses d’un contrat, il y a lieu de rechercher la réelle et commune intention des parties, sans s’arrêter aux expressions ou dénominations inexactes dont elles ont pu se servir, soit par erreur, soit pour déguiser la nature véritable de la convention ». La nature contractuelle de l’action en droit suisse conduit au rejet de la revendication de compétence de la juridiction du lieu du fait dommageable tant sur le fondement de l’article 46 du Code de procédure civile qu’au visa de l’article 5.3 de la Convention de Lugano.

Application de la Convention de Lugano

Les parties étant convenues d’une clause de for, la société Tudor a soutenu à bon droit l’ application de l’article 23.1 (section 7) de la Convention de Lugano relatif à la prorogation de compétence, selon lequel « Si les parties, dont l’une au moins à son domicile sur le territoire d’un État lié par la présente Convention, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un État lié par la présente Convention pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. Cette convention attributive de juridiction est conclue :a) par écrit… »

Les parties étant convenues d’une prorogation de compétence exclusive au profit des juridictions de Genève, les dispositions impératives constitutives de lois de police françaises fussent-elles applicables au fond du litige ne pouvant valablement combattre la clause attributive de compétence applicable au litige, c’est exactement que le tribunal s’est déclaré incompétent.

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Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la nature de la relation entre l’agence de publicité et la société Montres Tudor ?

L’agence de publicité était en charge de la réalisation de campagnes de communication pour des marques de luxe, et elle avait établi une relation commerciale avec la société Montres Tudor, une filiale suisse.

Cette relation était formalisée par un contrat cadre qui stipulait une clause attributive de compétence aux tribunaux du canton de Genève. Cela signifie que toute contestation liée à cette relation devait être traitée selon les lois suisses et devant les tribunaux de Genève.

Quel est le rôle de la clause attributive de compétence dans ce litige ?

La clause attributive de compétence est essentielle dans ce litige car elle détermine quel tribunal est compétent pour traiter les différends entre les parties.

Dans ce cas, bien que la clause ne mentionne pas explicitement la rupture brutale des relations commerciales, elle a été interprétée comme incluant cette situation. La société Tudor a donc pu demander au tribunal de se déclarer incompétent, en se basant sur cette clause et sur la Convention de Lugano.

Comment le droit suisse s’applique-t-il à cette affaire ?

Le droit suisse s’applique à cette affaire en raison de la volonté commune des parties, qui ont convenu que tout litige serait soumis au droit suisse.

Le Code Suisse des Obligations stipule que pour apprécier les clauses d’un contrat, il faut rechercher l’intention réelle des parties. Cela inclut les circonstances de la rupture des relations commerciales, ce qui renforce l’application du droit suisse dans ce contexte.

Quelles sont les implications de la Convention de Lugano dans ce cas ?

La Convention de Lugano joue un rôle déterminant dans ce litige, car elle régit la compétence judiciaire dans les affaires transfrontalières entre les États membres.

L’article 23.1 de cette convention stipule que si les parties ont convenu d’un tribunal pour résoudre leurs différends, ce tribunal est compétent. Dans ce cas, les parties ont convenu de la compétence exclusive des juridictions de Genève, ce qui a conduit le tribunal à se déclarer incompétent pour traiter l’affaire.

Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal de commerce de Paris ?

La décision du tribunal de commerce de Paris de se déclarer incompétent a des conséquences significatives pour les parties.

Cela signifie que le litige devra être résolu devant les tribunaux du canton de Genève, conformément à la clause de compétence convenue. Cette décision renforce l’importance des clauses attributives de compétence dans les contrats internationaux et souligne la nécessité de respecter les accords pris par les parties.


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