L’Essentiel : La société [5] a contesté une décision de la CPAM de l’Allier attribuant un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 10% à Monsieur [B] [P] suite à un accident de travail. Lors de l’audience du 29/11/2024, la société a demandé une réduction à 6%, s’appuyant sur un rapport médical. Le tribunal a ordonné une consultation médicale, qui a évalué les séquelles à 15%, mais a finalement jugé que 6% était plus approprié. Le 20 janvier 2025, le tribunal a réformé la décision de la CPAM, fixant le taux d’IPP à 6% et condamnant la CPAM aux dépens.
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Contexte du litigeLa société [5] a introduit un recours devant le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de Lyon le 09/11/2022, contestation d’une décision de la CPAM de l’Allier datée du 22/03/2022. Cette décision attribuait un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 10% à Monsieur [B] [P], suite à un accident de travail survenu le 12/07/2018, entraînant des douleurs et une raideur au genou droit. La date de consolidation des séquelles a été fixée au 12/02/2022. Audience et conclusions des partiesLors de l’audience publique du 29/11/2024, la société [5], représentée par Me HAMOUMOU, a demandé une réduction du taux d’IPP à 6%, s’appuyant sur un rapport médical du Docteur [Z]. Ce rapport mentionne un état antérieur significatif et une limitation de la flexion à 90°, sans autres anomalies. La CPAM de l’Allier n’a pas comparu, se remettant à l’appréciation du tribunal. Consultation médicale et évaluation du taux d’IPPLe tribunal a ordonné une consultation médicale sur pièces, confiée au Professeur [O] [N]. Ce dernier a constaté une flexion limitée à 90° et a évalué les séquelles à un taux de 15%, en déduisant les 9% déjà attribués pour le même genou. Le Professeur a rejoint l’avis du Docteur [Z] et a proposé un taux de 15%, mais a finalement jugé que le taux de 6% était plus justifié. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré le recours recevable et a réformé la décision de la CPAM, fixant le taux d’IPP à 6% à compter de la date de consolidation. Il a également ordonné l’exécution provisoire de la décision, en raison de l’ancienneté du litige, et a condamné la CPAM de l’Allier aux dépens. Le jugement a été rendu le 20 janvier 2025. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la recevabilité du recoursLa recevabilité du recours est un point essentiel dans le cadre des litiges relatifs à l’incapacité permanente partielle (IPP). Selon l’article 125 du Nouveau Code de Procédure Civile (NCPC), il est impératif d’exercer un recours administratif préalable avant de pouvoir introduire un recours contentieux. En l’espèce, il est établi que l’employeur a bien contesté la décision de la CPAM devant la Commission Médicale de Recours Amiable (CMRA) le 09/05/2022, ce qui a été confirmé par l’accusé de réception du 11/05/2022. Ainsi, le recours contentieux a été introduit le 09/11/2022, respectant les délais et les procédures nécessaires. Par conséquent, le tribunal a déclaré le recours recevable, conformément à l’article L142-4 du Code de la Sécurité Sociale, qui stipule que les litiges relatifs à l’incapacité permanente résultant d’accidents du travail ou de maladies professionnelles doivent suivre cette procédure. Sur l’évaluation du taux médical d’IPPL’évaluation du taux d’incapacité permanente partielle est régie par l’article L434-2 du Code de la Sécurité Sociale. Cet article précise que le taux d’incapacité est déterminé en tenant compte de plusieurs facteurs, notamment la nature de l’infirmité, l’état général de la victime, son âge, ainsi que ses facultés physiques et mentales. Dans cette affaire, le Professeur [O] [N], médecin consultant, a noté une flexion du genou limitée à 90° et a proposé un taux de 15% d’incapacité, en déduisant les 9% déjà attribués pour des séquelles au même genou. Le tribunal a donc dû examiner les éléments médicaux fournis, y compris les rapports du médecin conseil de la CPAM et du médecin désigné par l’employeur. En application du barème indicatif d’invalidité, le tribunal a conclu que le taux de 6% était plus justifié, en raison des constatations médicales objectives et des prescriptions du barème. Ainsi, le tribunal a réformé la décision de la CPAM, fixant le taux d’IPP à 6% à compter de la date de consolidation, conformément aux dispositions de l’article L434-2 du Code de la Sécurité Sociale. Sur l’exécution provisoire de la décisionL’exécution provisoire est une mesure qui permet de rendre une décision exécutoire immédiatement, même si celle-ci peut faire l’objet d’un appel. Dans ce cas, le tribunal a ordonné l’exécution provisoire de sa décision, en raison de l’ancienneté du litige. L’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale, introduit par la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019, précise que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l’audience sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie. Cette disposition vise à garantir que les frais engagés pour les consultations médicales dans le cadre des litiges relatifs à l’IPP soient pris en charge par la CPAM, ce qui est également un élément à considérer dans le cadre de l’exécution provisoire. Ainsi, le tribunal a condamné la CPAM de l’Allier aux dépens exposés à compter du 1er janvier 2019, renforçant ainsi la décision rendue. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LYON
POLE SOCIAL
Jugement du 20 Janvier 2025
Minute n° :
Audience du : 29 novembre 2024
Salarié : M. [B] [P]
Requête n° : N° RG 22/02345 – N° Portalis DB2H-W-B7G-XPWE
PARTIES EN CAUSE
partie demanderesse
Société [5]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Julien TSOUDEROS, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me HAMOUMOU, avocat
partie défenderesse
CPAM DE L’ALLIER
[Adresse 4]
[Localité 1]
non comparante, ni représentée
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats tenus en audience publique et du délibéré :
Présidente : Justine AUBRIOT
Assesseur collège employeur : Jean-Jacques SARKISSIAN
Assesseur collège salarié : Fabienne PERRET
Assistés lors des débats et du délibéré de : Isabelle BELACCHI, Greffiere
Notification le :
Une copie certifiée conforme à :
Société [5] ; CPAM DE L’ALLIER ; Me Julien TSOUDEROS,
Une copie certifiée conforme au dossier
Par une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 09/11/2022, la société [5] a formé un recours devant le Pôle Social du Tribunal Judiciaire de LYON à l’encontre d’une décision de la CPAM de l’Allier notifiée le 22/03/2022, confirmée implicitement par la Commission Médicale de Recours Amiable et qui attribue un taux d’incapacité permanente partielle (IPP) de 10% au profit de Monsieur [B] [P] à compter de la date de consolidation fixée le 12/02/2022, en raison d’un accident de travail du 12/07/2018, dont les séquelles sont décrites de la manière suivante : «douleur et raideur du genou droit».
Le greffe de la juridiction a convoqué les parties, conformément à l’article R142-10-3 du Code de la sécurité sociale, pour l’audience du 29/11/2024.
À cette date, en audience publique :
La société [5] représentée par Me HAMOUMOU conclut oralement à la diminution du taux d’IPP médical à 6% attribué à Monsieur [B] [P]. Elle se fonde sur le rapport médical du Docteur [Z] qui fait valoir un important état antérieur, une limitation de la flexion à 90°, sans atteinte de l’extension, sans déformation, sans amyotrophie quadricipale, sans mouvements anormaux, sans signes inflammatoires du genou. Il évalue les séquelles à un taux global de 15%, dont il faut déduire les 9% déjà attribués pour des séquelles au genou.– La CPAM de l’Allier n’a pas comparu ni sollicité de dispense. Elle adressait un courrier en date du 03/03/2023 avec les pièces du dossier et indiquait s’en remettre à l’appréciation du tribunal.
En raison de la nature du litige, le tribunal a ordonné une consultation médicale sur pièces confiée au Professeur [O] [N], mesure qui a été exécutée sur-le-champ.
A l’issue de cette consultation, le médecin consultant, commis conformément aux dispositions des articles R 142-16 et suivants du Code de la sécurité sociale, après avoir pris connaissance du dossier médical de Monsieur [B] [P] a exposé oralement la synthèse de ses constatations médicales.
Les conclusions écrites du médecin consultant du tribunal sont jointes à la minute du présent jugement.
Puis, le tribunal s’est retiré et a délibéré de l’affaire conformément à la loi, avant de rendre son jugement par mise à la disposition au greffe le 20/01/2025.
Sur la recevabilité du recours
La recevabilité du recours n’est pas discutée par la caisse. Il appartient néanmoins au juge de la vérifier d’office, l’exercice d’un recours administratif préalable conditionnant le recours contentieux en vertu de l’article 125 du NCPC et de l’article L142-4 du Code de la sécurité sociale (visant les litiges relatifs à l’incapacité permanente résultant d’accident du travail ou maladie professionnelle), applicable aux décisions notifiées à compter du 1er janvier 2020.
En l’espèce il ressort des pièces communiquées que l’employeur a bien contesté la décision de la CPAM devant la CMRA le 09/05/2022 qui en a accusé réception le 11/05/2022. Il a introduit son recours contentieux le 09/11/2022.
Le recours est déclaré recevable.
Sur l’évaluation du taux médical d’IPP
La juridiction saisie du recours, doit vérifier l’application du barème et des dispositions de l’article L 434-2 du Code de la Sécurité Sociale, l’employeur soutenant une réduction du taux notifié à 6% et la CPAM le maintien du taux de 10%.
En application de l’article L.434-2 du Code de la Sécurité Sociale, le taux d’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, d’après ses aptitudes et qualifications professionnelles, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.
Le Professeur [O] [N], médecin consultant, note une fracture du fémur droit, au-dessus d’une prothèse totale du genou. Il relève à la date de consolidation une flexion du genou limitée à 90°. Il indique que cette séquelle est indemnisable avec un taux de 15%. Il n’observe pas d’autre anomalie rapportée. Le médecin consultant rejoint l’avis du docteur [Z] et propose un taux de 15% en retranchant les 9% attribués pour le même genou.
Compte tenu de ces constations et des prescriptions du barème, le taux de 6% lui paraît plus justifié.
Ainsi en l’état des éléments médicaux objectifs, spécialement ceux retenus lors de l’examen clinique et figurant dans le rapport du médecin conseil de la caisse, dans l’avis du médecin désigné par l’employeur et dans le rapport de l’expert consulté par la juridiction, les séquelles qualifiées dans la décision attaquée et en rapport avec l’accident du travail justifient un taux médical de 6% à compter de la date de consolidation, en application du barème indicatif et des dispositions de l’article L 434-2 du Code la Sécurité Sociale.
En conséquence, le tribunal considère qu’il dispose de suffisamment d’éléments pour déclarer que le taux d’incapacité permanente partielle opposable à l’employeur doit être abaissé à 6%. La décision contestée est donc réformée en ce sens.
Il convient par ailleurs d’ordonner l’exécution provisoire compte tenu de l’ancienneté du litige.
Le tribunal, statuant publiquement par jugement contradictoire en premier ressort,
DÉCLARE recevable en la forme le recours formé par la société [5].REFORME la décision de la CPAM de l’Allier du 22/03/2022 et FIXE à 6% le taux opposable à l’employeur au titre de l’incapacité permanente partielle (IPP) de Monsieur [B] [P] à compter de la date de consolidation fixée le 12/02/2022, en raison d’un accident de travail du 12/07/2018.RAPPELLE, en application de l’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale introduit par l’article 61 (VII) de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l’audience sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie.ORDONNE l’exécution provisoire de la décision.CONDAMNE la CPAM de l’Allier aux dépens exposés à compter du 1er/01/2019 .Jugement rendu par mise à la disposition au greffe le 20 janvier 2025 dont la minute a été signée par la Présidente et la Greffière.
La Greffière La Présidente
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