L’Essentiel : Le 6 janvier 2025, le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé de placer Monsieur [W] [N] en rétention administrative, suite à une interdiction d’entrée sur le territoire français. Lors de son audition, Monsieur [N] a évoqué des problèmes de santé pour justifier son refus d’audition par les autorités marocaines. L’appel interjeté par son avocat a été jugé recevable, et le magistrat a confirmé la légalité de la rétention, soulignant que les conditions requises par le CESEDA étaient respectées. Les démarches auprès des autorités tunisiennes ont été considérées valables, malgré des doutes sur la nationalité de Monsieur [N].
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Contexte JuridiqueLes articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) encadrent la procédure de rétention administrative des étrangers en France. Dans ce cadre, une décision de placement en rétention a été prise par le préfet des Bouches-du-Rhône le 6 janvier 2025, suite à une condamnation antérieure de la cour d’appel d’Aix-en-Provence interdisant définitivement l’entrée sur le territoire français à Monsieur [W] [N]. Déclarations et AppelMonsieur [W] [N] a été placé en rétention et a comparu devant le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement. Il a déclaré que son refus d’audition par les autorités marocaines en octobre 2023 était dû à des problèmes de santé. Son avocat a présenté les arguments de l’appel interjeté le 11 janvier 2025, tandis que le représentant de la préfecture n’était pas présent. Recevabilité de l’AppelL’appel contre l’ordonnance du magistrat a été jugé recevable, sans contestation sur les éléments du dossier. Le signataire de l’arrêté préfectoral, M. [P] [G] [T], avait une délégation de signature valide, ce qui a permis de rejeter le moyen tiré de l’irrecevabilité de la requête préfectorale. Conditions de RétentionLe juge a examiné si les conditions de rétention étaient respectées, notamment en ce qui concerne le droit de l’étranger à faire valoir ses droits. Les dispositions du CESEDA stipulent qu’un registre doit être tenu pour documenter les conditions de rétention, et l’administration doit fournir des informations sur le placement de l’étranger. Diligences de l’AdministrationConcernant les diligences de l’administration, il a été établi que les autorités marocaines et algériennes n’avaient pas reconnu Monsieur [N] comme ressortissant. Les démarches entreprises auprès des autorités tunisiennes ont été jugées valables, et il n’a pas été conclu à une absence de perspectives raisonnables d’éloignement, malgré les doutes sur la nationalité marocaine de Monsieur [N]. Décision FinaleLa décision du magistrat a été confirmée, statuant que la rétention de Monsieur [W] [N] était justifiée et conforme aux exigences légales. Les parties ont été informées de leur droit de se pourvoir en cassation dans un délai de deux mois suivant la notification de l’ordonnance. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention ?La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention n’est pas contestée. Les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité. En effet, l’article R 741-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) précise que l’autorité compétente pour ordonner le placement en rétention administrative d’un étranger est le préfet de département, et à Paris, le Préfet de police. Il en résulte que le signataire d’un arrêté préfectoral, s’il n’est pas le préfet en personne, doit avoir agi en vertu d’une délégation de signature. Dans cette affaire, il est établi que M. [P] [G] [T], signataire de la saisine du juge délégué du tribunal judiciaire de Marseille, bénéficie d’une délégation de signature à cette fin, en sa qualité d’attaché, adjoint à la cheffe du BECA. Ainsi, le moyen tiré de l’absence de délégation de signature est infondé. De plus, l’article L743-9 du CESEDA stipule que le juge doit s’assurer, lors de l’examen de chaque demande de prolongation d’une mesure de rétention, que l’étranger a pu faire valoir ses droits, notamment selon les mentions du registre de rétention prévu à l’article L744-2 du CESEDA. Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le CESEDA ?L’article L741-3 du CESEDA dispose qu’un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration doit exercer toute diligence à cet effet. Il appartient au juge des libertés et de la détention, conformément à l’article L. 741-3, de rechercher concrètement les diligences accomplies par l’administration pour s’assurer que l’étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. Cela implique, sauf circonstances insurmontables, la production de pièces par l’administration qui établissent ces diligences, en fonction de la situation de l’étranger. Il est également important de noter que l’article R. 743-2, alinéa 2, du CESEDA précise que toute requête en prolongation de la rétention administrative d’un étranger doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L744-2. Dans le cas présent, M. [W] [N] ne précise pas les pièces justificatives qui feraient défaut, ce qui rend le moyen soulevé non fondé. Quelles sont les obligations de l’administration en matière de rétention administrative ?L’article L741-3 du CESEDA impose à l’administration d’agir avec diligence pour que la rétention d’un étranger ne dépasse pas le temps strictement nécessaire à son départ. Cela signifie que l’administration doit démontrer qu’elle a pris toutes les mesures nécessaires pour organiser le départ de l’étranger. En l’espèce, il a été constaté que les autorités marocaines et algériennes n’ont pas reconnu M. [N] comme étant un de leurs ressortissants, ce qui justifie les diligences effectuées auprès des autorités tunisiennes. Il est également souligné que, lors de la première prolongation de la rétention administrative, il ne peut être conclu à une absence de perspectives raisonnables d’éloignement, surtout compte tenu des doutes sur la nationalité marocaine revendiquée par M. [N]. Ainsi, l’ordonnance du premier juge, qui a fait une juste appréciation des faits, est confirmée. Quelles sont les voies de recours possibles après l’ordonnance rendue ?Les parties ont la possibilité de se pourvoir en cassation contre l’ordonnance rendue. Le délai pour former ce pourvoi est de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance. Le pourvoi doit être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation et doit être signé par un avocat au Conseil d’État ou de la Cour de cassation. Cette procédure est prévue pour garantir le respect des droits des parties et assurer un contrôle juridictionnel des décisions prises en matière de rétention administrative. |
CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative
ORDONNANCE
DU 13 JANVIER 2025
N° RG 25/00071
N° Portalis DBVB-V-B7J-BOGVZ
Copie conforme
délivrée le 13 Janvier 2025 par courriel à :
-l’avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention de [Localité 5] en date du 11 Janvier 2025 à 11h50.
APPELANT
Monsieur [W] [N]
né le 30 Avril 1998 à [Localité 6]
de nationalité Marocaine
comparant en visioconférence depuis le centre de rétention administrative de [Localité 5] en application des dispositions de la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024.
Assisté de Maître Olivia STROZZI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, commis d’office.
et de Mme [F], inscrit sur la liste des experts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.
INTIMÉE
LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE
Avisé et non représenté
MINISTÈRE PUBLIC
Avisé et non représenté
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DÉBATS
L’affaire a été débattue en audience publique le 13 Janvier 2025 devant M. Pierre LAROQUE, Conseiller à la cour d’appel délégué par le premier président par ordonnance, assisté de M. Corentin MILLOT, Greffier,
ORDONNANCE
Réputée contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 13 Janvier 2025 à 11H00,
Signée par M. Pierre LAROQUE, Conseiller et M. Corentin MILLOT, Greffier,
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;
Vu la condamnation de la cour d’appel d’Aix en Provence en date du 8 décembre 2021 portant interdiction définitive du territoire français;
Vu la décision de placement en rétention prise le 6 janvier 2025 par le préfet des Bouches du Rhône notifiée le 7 janvier 2025 à 11h26;
Vu l’ordonnance du 11 Janvier 2025 rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention décidant le maintien de Monsieur [W] [N] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;
Vu l’appel interjeté le 11 Janvier 2025 à 15h30 par Monsieur [W] [N] ;
Monsieur [W] [N] a comparu et a déclaré que son refus d’audition par les autorités marocaines en octobre 2023 était dû au fait qu’il était malade.
Son avocat a été régulièrement entendu et a développé oralement les termes de la déclaration d’appel.
Le représentant de la préfecture n’a pas comparu.
La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention n’est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité.
– Sur le moyen tiré de l’irrecevabilité de la requête préfectorale :
L’article R 741-1 du CESEDA dispose que l’autorité compétente pour ordonner le placement en rétention administrative d’un étranger est le préfet de département et, à Paris, le Préfet de police.
Il en résulte que le signataire d’un arrêté préfectoral, s’il n’est le préfet en personne, doit avoir agi en vertu d’une délégation de signature.
En l’espèce, il résulte du recueil des actes administratifs spécial n°13-2024-005 publié le 4 janvier 2025 que M. [P] [G] [T], qui est le signataire de la saisine du juge délégué du tribunal judiciaire de Marseille, bénéficie bien d’une délégation de signature à cette fin en sa qualité d’attaché, adjoint à la cheffe du BECA.
Il s’ensuit que le moyen tiré de l’absence de délégation de signature manque en fait.
Il résulte par ailleurs de l’article L743-9 du CESEDA que le juge s’assure, lors de l’examen de chaque demande de prolongation d’une mesure de rétention d’un étranger que, depuis sa précédente présentation, celui-ci a été placé en mesure de faire valoir ses droits, notamment d’après les mentions du registre de rétention prévu à l’article L744-2 du CESEDA.
L’article L. 744-2 du CESEDA, dispose qu’il est tenu, dans tous les lieux de rétention, un registre mentionnant l’état civil des personnes retenues, ainsi que les conditions de leur placement ou de leur maintien en rétention. Le registre mentionne également l’état civil des enfants mineurs accompagnant ces personnes ainsi que les conditions de leur accueil.
L’autorité administrative tient à la disposition des personnes qui en font la demande les éléments d’information concernant les date et heure du début du placement de chaque étranger en rétention, le lieu exact de celle-ci ainsi que les date et heure des décisions de prolongation.
L’article R. 743-2, alinéa 2, du CESEDA dispose que toute requête en prolongation de la rétention administrative d’un étranger doit, à peine d’irrecevabilité, être accompagnée de toutes les pièces justificatives utiles, notamment une copie du registre prévu à l’article L744-2 susvisé.
En l’espèce, M. [W] [N] ne précise pas les pièces justificatives qui feraient défaut.
Il s’ensuit que le moyen soulevé de ce chef n’apparaît pas fondé.
Il convient en conséquence de déclarer la requête du Préfet des Bouches-du-Rhône recevable.
Sur le moyen tiré du défaut de diligences
L’article L741-3 du CESEDA dispose qu’un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet.
Il appartient au juge des libertés et de la détention, en application de l’article L. 741-3 du CESEDA, de rechercher concrètement les diligences accomplies par l’administration pour permettre que l’étranger ne soit maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. Cela induit, sauf circonstances insurmontables, la production de pièces par l’administration qui établissent ces diligences, en fonction de la situation de l’étranger.
Par ailleurs, il convient de rappeler que la réalisation d’actes sans véritable effectivité n’est pas requis.
En l’espèce, il résulte du soit transmis adressé au consulat de Tunisie le 7 janvier 2025 que les autorités marocaines et algériennes n’ont pas reconnu M. [N] comme étant un de leurs ressortissants.
Il s’ensuit que les diligences effectuées auprès des autorités tunisiennes sont valablement justifiées au regard des réponses données antérieurement par les autorités marocaines et algériennes et en dépit du fait que M. [N] se prévaut de la nationalité marocaine.
Enfin, au stade de la première prolongation de la rétention administrative de M. [N], il ne peut d’ores et déjà être conclu à une absence de perspectives raisonnables d’éloignement, ceci d’autant plus que la nationalité marocaine dont se prévaut celui-ci est particulièrement sujette à caution.
Il convient en conséquence de confirmer l’ordonnance du premier juge qui a fait une juste appréciation des faits de la cause.
Statuant publiquement par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Confirmons l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention en date du 11 Janvier 2025.
Les parties sont avisées qu’elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.
Le greffier Le président
Reçu et pris connaissance le :
Monsieur [W] [N]
Assisté d’un interprète
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-11, Rétentions Administratives
Palais Verdun , bureau 443
Téléphone : [XXXXXXXX02] – [XXXXXXXX03] – [XXXXXXXX01]
Courriel : [Courriel 4]
Aix-en-Provence, le 13 Janvier 2025
À
– LE PREFET DES BOUCHES DU RHONE
– Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de [Localité 5]
– Monsieur le procureur général
– Monsieur le greffier du Juge des libertés et de la détention de MARSEILLE
– Maître Olivia STROZZI
NOTIFICATION D’UNE ORDONNANCE
J’ai l’honneur de vous notifier l’ordonnance ci-jointe rendue le 13 Janvier 2025, suite à l’appel interjeté par :
Monsieur [W] [N]
né le 30 Avril 1998 à [Localité 6]
de nationalité Marocaine
Je vous remercie de m’accuser réception du présent envoi.
Le greffier,
VOIE DE RECOURS
Nous prions Monsieur le directeur du centre de rétention administrative de bien vouloir indiquer au retenu qu’il peut se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation.
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