Rétention administrative et appréciation des garanties de représentation des étrangers en situation irrégulière

·

·

Rétention administrative et appréciation des garanties de représentation des étrangers en situation irrégulière

L’Essentiel : [F] [G] [T], jeune pakistanais, a été placé en rétention administrative le 26 décembre 2024 par le préfet de l’Oise, suite à une obligation de quitter le territoire. Il a contesté cette décision le 28 décembre, mais le tribunal a rejeté son recours et prolongé sa rétention le 1er janvier 2025. En appel, [F] [G] [T] a soutenu une erreur d’appréciation et un manque de diligence de l’administration. Toutefois, le tribunal a jugé que le préfet n’avait pas commis d’erreur manifeste, confirmant ainsi la prolongation de la rétention, avec les dépens à la charge de l’État.

Placement en rétention administrative

[F] [G] [T], un jeune de nationalité pakistanaise, a été placé en rétention administrative par le préfet de l’Oise le 26 décembre 2024, suite à une obligation de quitter le territoire français. Cette décision a été notifiée le même jour, peu avant 20h.

Contestation de la décision

Le 28 décembre 2024, [F] [G] [T] a contesté la régularité de son placement en rétention en saisissant le tribunal judiciaire de Boulogne sur Mer. Par la suite, le 30 décembre, l’autorité administrative a demandé une prolongation de la rétention pour 26 jours supplémentaires.

Ordonnance du tribunal

Le 1er janvier 2025, le tribunal a ordonné la jonction des deux instances, rejeté le recours de [F] [G] [T] et prolongé sa rétention administrative. Ce jugement a été notifié le même jour.

Appel de la décision

Le 2 janvier 2025, [F] [G] [T] a interjeté appel de l’ordonnance, arguant d’une erreur manifeste d’appréciation concernant son placement en rétention et d’un manque de diligences de l’administration pour justifier la prolongation de sa rétention.

Recevabilité de l’appel

L’appel a été déclaré recevable, car il a été interjeté dans les formes et délais légaux.

Évaluation du placement en rétention

Le tribunal a examiné la légalité de l’arrêté de placement en rétention, concluant qu’il n’y avait pas d’erreur manifeste d’appréciation de la part du préfet, notamment en raison du rejet antérieur de la demande d’asile de [F] [G] [T].

Prolongation de la rétention

Concernant la prolongation de la rétention, le tribunal a constaté que l’administration avait pris des mesures appropriées pour organiser l’éloignement de [F] [G] [T], ce qui justifiait le maintien de la rétention.

Confirmation de la décision

En conséquence, le tribunal a confirmé l’ordonnance de prolongation de la mesure de rétention administrative, laissant les dépens à la charge de l’État.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel du requérant

L’appel interjeté par [F] [G] [T] a été déclaré recevable car il a été formé dans les délais et les formes légales.

Selon l’article R. 743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, l’appel doit être formé dans un délai de 15 jours à compter de la notification de la décision contestée.

En l’espèce, l’ordonnance de prolongation de la rétention administrative a été notifiée le 1er janvier 2025, et l’appel a été interjeté le 2 janvier 2025, respectant ainsi le délai imparti.

De plus, l’article 612 du Code de procédure civile précise que l’appel doit être formé par déclaration écrite, ce qui a également été respecté.

Ainsi, la cour a confirmé la recevabilité de l’appel.

Sur l’arrêté de placement en rétention administrative

L’article L 741-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile stipule que l’autorité administrative peut placer un étranger en rétention administrative dans des cas précis.

Ces cas incluent notamment l’absence de garanties de représentation suffisantes pour prévenir le risque de fuite, comme le précise l’article L 612-3.

En l’espèce, le préfet de l’Oise a justifié le placement en rétention de [F] [G] [T] par le rejet de sa demande d’asile par l’OFPRA, ce qui a été considéré comme un motif valable.

L’erreur manifeste d’appréciation doit être évaluée sur la base des éléments connus au moment de la décision, et non sur des éléments postérieurs.

Ainsi, la cour a rejeté le moyen relatif à l’erreur manifeste d’appréciation, confirmant la légitimité de l’arrêté de placement en rétention.

Sur la prolongation de la mesure de rétention administrative

L’article L. 741-3 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile impose à l’administration de justifier avoir effectué toutes les diligences utiles pour réduire au maximum la période de rétention.

La directive « Retour » n° 2008-115/CE, en son article 15 §1, précise que la rétention doit être aussi brève que possible et maintenue uniquement tant que le dispositif d’éloignement est en cours.

Dans le cas présent, les autorités françaises ont pris contact avec les autorités consulaires pakistanaises dès le 26 décembre 2024, et une demande de routage a été effectuée le 27 décembre 2024.

Ces actions démontrent que des diligences ont été entreprises rapidement, ce qui est conforme aux exigences légales.

Par conséquent, la cour a rejeté le moyen relatif à la prolongation de la rétention, confirmant ainsi la décision du magistrat.

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre des Libertés Individuelles

N° RG 25/00003 – N° Portalis DBVT-V-B7J-V6JU

N° de Minute : 13

Ordonnance du vendredi 03 janvier 2025

République Française

Au nom du Peuple Français

APPELANT

M. [F] [G] [T] né le 15 Avril 2005 au PAKISTAN de nationalité Pakistanaise

déclarant être né le 1er décembre 2002

Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 2]

dûment avisé, comparant en personne par visioconférence

assisté de Me Orlane REGODIAT, avocat au barreau de DOUAI, avocat (e) commis (e) d’office et de M. [C] [S] [X] interprète assermenté en langue ourdou, tout au long de la procédure devant la cour

INTIMÉ

M. LE PREFET DE L’OISE

dûment avisé, absent non représenté

PARTIE JOINTE

M. le procureur général près la cour d’appel de Douai : non comparant

MAGISTRAT(E) DELEGUE(E) : Vincent NAEGELIN, Vice-président placé à la cour d’appel de Douai désigné(e) par ordonnance pour remplacer le premier président empêché

assisté(e) de Véronique THÉRY, greffière

DÉBATS : à l’audience publique du vendredi 03 janvier 2025 à 13 h 00

Les parties comparantes ayant été avisées à l’issue des débats que l’ordonnance sera rendue par mise à disposition au greffe

ORDONNANCE : rendue à Douai par mise à disposition au greffe le vendredi 03 janvier 2025 à 16 h 55

Le premier président ou son délégué,

Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) et spécialement les articles R 743-18 et R 743-19 ;

Vu l’aricle L 743-8 et L 922-3 al 1 à 4 du CESEDA ;

Vu l’ordonnance du juge du tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER en date du 01 janvier 2025 prolongeant la rétention administrative de M. [F] [G] [T] ;

Vu l’appel interjeté par M. [F] [G] [T] par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de ce siège le 02 janvier 2025 à 11 h 05 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative ;

Vu le procès-verbal des opérations techniques de ce jour ;

Vu l’audition des parties, les moyens de la déclaration d’appel et les débats de l’audience ;

EXPOSÉ DU LITIGE

[F] [G] [T], né le 15 avril 2005 au Pakistan, de nationalité pakistanaise, a fait l’objet d’un placement en rétention administrative ordonné par le préfet de l’Oise 26 décembre 2024 et notifié le même jour à 19h40, dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire, sur la base d’une obligation de quitter le territoire français prise le 26 décembre 2024 par la même autorité qui lui a été notifiée le même jour à 19h00.

Par requête du 28 décembre 2024, reçue à 17h21, [F] [G] [T] a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Boulogne sur Mer d’une contestation de la régularité de l’arrêté de placement en rétention administrative.

Par requête du 30 décembre 2024, reçue à 15h19, l’autorité administrative a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Boulogne sur Mer aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée supplémentaire de 26 jours.

Par ordonnance du 1er janvier 2025, notifiée à 10h43, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Boulogne sur Mer a a :

– ordonné la jonction des deux instances ;

– rejeté le recours en annulation de l’arrêté de placement en rétention ;

– ordonné la prolongation de la rétention administrative de [F] [G] [T] pour une durée supplémentaire de 26 jours.

[F] [G] [T] a interjeté appel de cette ordonnance le 2 janvier 2025 à 11h05.

Au soutien de son appel, [F] [G] [T] soutient les moyens suivants :

– concernant la décision de placement en rétention, l’erreur manifeste d’appréciation de l’autorité administrative ;

– concernant la prolongation de la rétention administrative, l’administration n’a pas accompli les diligences suffisantes justifiant un maintien en rétention en vue de son éloignement.

MOTIFS

I – Sur la recevabilité de l’appel du requérant :

L’appel du requérant ayant été interjeté dans les formes et les délais légaux sera déclaré recevable.

II – Sur l’arrêté de placement en rétention administrative :

Il ressort des dispositions des articles L 741-1 renvoyant à l’article L 612-3, L 751-9 et L 753-2 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’autorité administrative ne peut placer un étranger en situation irrégulière en rétention administrative que dans les cas et conditions des dits articles après prise en compte de son état éventuel de vulnérabilité :

1) Lorsque, de manière générale, l’étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes pour prévenir le risque de se soustraire à l’application du titre d’éloignement dans les cas prévus par l’article L. 612-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit ou au regard de la menace pour l’ordre public que l’étranger représente.

2) Lorsque, dans le cas spécifique d’un étranger faisant l’objet d’une prise ou d’une reprise en charge par un autre pays de l’Union Européenne selon la procédure dite ‘Dublin III’, il existe ‘un risque non négligeable de fuite’ tel que défini par l’article L 751-10 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile et lorsque dans cette hypothèse le placement en rétention administrative est proportionné.

3) Lorsque, s’agissant d’un étranger qui a déposé une demande d’asile en France avant toute privation de sa liberté, il existe des raisons impérieuses de protection de l’ordre public ou de la sécurité nationale.

L’erreur manifeste d’appréciation doit s’apprécier par rapport aux éléments de fait dont disposait l’autorité préfectorale au moment où l’arrêté de placement en rétention a été adopté et non au regard des éléments ultérieurement porté à la connaissance de la cour.

En l’espèce, c’est par de justes motifs, qui seront adoptés par la cour, que le premier juge a caractérisé l’absence d’erreur manifeste d’appréciation du préfet de l’Oise dans sa décision de placement en rétention de [F] [G] [T] au regard du fait que sa demande d’asile avait été rejetée par l’OFPRA le 7 mars 2023 et qu’en conséquence, l’absence de mention d’un tel rejet était indifférent.

Dès lors, cette décision étant motivée, ce moyen sera rejeté.

III – Sur la prolongation de la mesure de rétention administrative :

Selon la directive dite « Retour » n° 2008-115/CE du 16 décembre 2008, en son article 15 §1, ‘toute rétention est aussi brève que possible et n’est maintenue qu’aussi longtemps que le dispositif d’éloignement est en cours et exécuté avec toute la diligence requise’.

Il ressort de l’article L. 741-3 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile que l’administration doit justifier avoir effectué toutes les ‘diligences utiles’ suffisantes pour réduire au maximum la période de rétention de l’étranger.

En l’espèce, les services de la préfecture ont pris attache le 26 décembre 2024 avec les autorités consulaires de l’Etat pakistanais dont [F] [G] [T] revendique la nationalité et ont effectué une demande de routage le 27 décembre 2024.

Ainsi, des diligences ont été entreprises par les autorités françaises dès le jour de placement en rétention de [F] [G] [T], ce qui constitue un délai raisonnable.

Dès lors, ce second moyen sera rejeté.

Par ailleurs, [F] [G] [T] ne développe aucun autre moyen au soutien de son appel.

Par conséquent, l’ordonnance de prolongation de la mesure de rétention administrative de [F] [G] [T] sera confirmée.

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l’appel formé par [F] [G] [T] ;

Confirmons l’ordonnance de prolongation de la mesure de rétention administrative de [F] [G] [T] rendue par le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Boulogne sur Mer le 1er janvier 2025.

Disons que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;

Disons que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à M. [F] [G] [T] par l’intermédiaire du greffe du centre de rétention administrative par truchement d’un interprète en tant que de besoin, à son conseil et à l’autorité administrative ;

Laissons les dépens à la charge de l’État.

Véronique THÉRY, greffière

Vincent NAEGELIN, Vice-président placé

A l’attention du centre de rétention, le vendredi 03 janvier 2025

Bien vouloir procéder à la notification de l’ordonnance en sollicitant, en tant que de besoin, l’interprète intervenu devant le premier président ou le conseiller délégué : M. [C] [S] [X]

Le greffier

N° RG 25/00003 – N° Portalis DBVT-V-B7J-V6JU

REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE 13 DU 03 Janvier 2025 ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS (à retourner signé par l’intéressé au greffe de la cour d’appel de Douai par courriel – [Courriel 3]) :

Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R. 743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile

Pour information :

L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.

Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.

Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.

Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.

Reçu copie et pris connaissance le

– M. [F] [G] [T]

– par truchement téléphonique d’un interprète en tant que de besoin

– nom de l’interprète (à renseigner) :

– décision transmise par courriel au centre de rétention de pour notification à M. [F] [G] [T] le vendredi 03 janvier 2025

– décision transmise par courriel pour notification à M. LE PREFET DE L’OISE et à Maître Orlane REGODIAT le vendredi 03 janvier 2025

– décision communiquée au tribunal administratif de Lille

– décision communiquée à M. le procureur général

– copie au de [Localité 1]

Le greffier, le vendredi 03 janvier 2025

N° RG 25/00003 – N° Portalis DBVT-V-B7J-V6JU


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon