Rétention administrative et droits individuels : Questions / Réponses juridiques

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Rétention administrative et droits individuels : Questions / Réponses juridiques

M. [P] [M], ressortissant tunisien, a été soumis à un arrêté d’obligation de quitter le territoire français et placé en rétention administrative. Le juge du tribunal judiciaire de Rouen a prolongé sa rétention pour vingt-six jours, décision qu’il a contestée. Dans son appel, il soulève plusieurs moyens, notamment l’irrégularité de l’interprétariat et l’absence d’attestation de conformité. Toutefois, le tribunal a jugé ces arguments non fondés, confirmant l’ordonnance de prolongation. Les diligences de l’administration ont été considérées rapides, et la possibilité d’assignation à résidence a été écartée en raison de l’absence de documents d’identité valides.. Consulter la source documentaire.

Sur l’irrégularité de l’interprétariat au cours de la garde à vue

L’article 706-71 alinéa 7 du Code de procédure pénale stipule que :

« En cas de nécessité, résultant de l’impossibilité pour un interprète de se déplacer, l’assistance de l’interprète au cours d’une audition, d’un interrogatoire ou d’une confrontation peut également se faire par l’intermédiaire de moyens de télécommunications. »

Dans le cas présent, M. [P] [M] a été interpellé le 19 novembre 2024 et ses droits lui ont été notifiés avec l’assistance d’un interprète par téléphone.

Aucune obligation n’impose aux services de police de rechercher un interprète physique si l’interprète à distance est disponible.

De plus, M. [P] [M] a sollicité l’assistance d’un avocat, ce qui démontre qu’il a compris les informations fournies.

Ainsi, bien qu’il ait déclaré ne pas savoir lire le français, l’intervention de l’interprète par téléphone a permis de traduire la notification de ses droits.

Par conséquent, aucun grief n’est établi, et le moyen sera rejeté.

Sur l’absence d’attestation de conformité de la procédure

Il est mentionné que le dossier ne comporte pas l’attestation de conformité requise pour une procédure numérique.

Cependant, M. [P] [M] n’a pas allégué de non-conformité ni justifié de grief à cet égard.

L’absence d’une telle attestation ne constitue pas en soi un motif d’irrecevabilité ou d’illégalité de la procédure.

Ainsi, le moyen sera également rejeté, car il n’y a pas de fondement juridique suffisant pour contester la validité de la procédure.

Sur la motivation de l’arrêté de placement en rétention administrative

L’article L.741-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile précise que le placement en rétention administrative est justifié lorsque l’individu ne présente pas de garanties de représentation suffisantes pour prévenir un risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement.

Le préfet a retenu plusieurs motifs pour justifier le placement en rétention, notamment :

– Une précédente mesure d’éloignement non exécutée.
– L’usage de documents d’identité contrefaits.
– L’absence de documents d’identité valides.
– L’absence de preuve d’une résidence stable.

Ces éléments justifient la décision de placement en rétention, et le moyen sera donc rejeté.

Sur l’erreur manifeste d’appréciation

L’article L.731-1 du même code stipule que l’autorité administrative peut décider d’assigner à résidence un étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire, mais dont l’éloignement est raisonnablement envisageable.

La décision de placement en rétention doit être fondée sur une appréciation correcte des faits.

Dans ce cas, le préfet a cité les textes applicables et a exposé les circonstances justifiant le placement en rétention.

Il a notamment souligné l’absence de documents d’identité valides et le risque de soustraction à l’exécution de la décision d’éloignement.

Ainsi, aucune erreur manifeste d’appréciation n’est constatée, et ce moyen sera également rejeté.

Sur la violation de l’article 8 de la CEDH

M. [P] [M] a soutenu que sa rétention portait atteinte à sa vie familiale, mais il n’a pas justifié de liens familiaux en France, se déclarant célibataire et sans enfant.

L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme protège le droit au respect de la vie privée et familiale, mais cette protection n’est pas absolue.

Les visites en centre de rétention et le caractère temporaire de la mesure atténuent l’atteinte à la vie familiale.

Par conséquent, l’atteinte à la vie personnelle et familiale n’est pas considérée comme disproportionnée, et le moyen sera rejeté.

Sur la tardiveté des diligences entreprises par l’administration française

Les autorités tunisiennes ont été saisies d’une demande d’identification le 21 novembre 2024, moins de 24 heures après le placement en rétention de M. [P] [M].

Les diligences entreprises par l’administration française ne peuvent donc pas être qualifiées de tardives.

Ainsi, ce moyen sera également rejeté, car les délais respectés par l’administration sont conformes aux exigences légales.

Sur la possibilité d’assignation à résidence

L’article L.731-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile stipule que l’assignation à résidence n’est envisageable que si l’individu dispose d’un passeport valide.

Dans le cas présent, M. [P] [M] ne possède pas de passeport valide, ce qui rend impossible l’assignation à résidence.

Par conséquent, ce moyen sera également rejeté.

Conclusion

En conséquence, l’ordonnance entreprise sera confirmée en toutes ses dispositions.

L’appel interjeté par M. [P] [M] est déclaré recevable, mais tous les moyens soulevés sont rejetés.

La demande en paiement de frais irrépétibles est également rejetée.


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