Rétablissement personnel face à l’impossibilité financière : enjeux et implications.

·

·

Rétablissement personnel face à l’impossibilité financière : enjeux et implications.

L’Essentiel : Le 11 mars 2024, M. [T] [P] a sollicité la Commission de Surendettement des particuliers du Pas de Calais, ayant déjà bénéficié de mesures pendant 24 mois. Sa demande a été jugée recevable le 28 mars 2024. Le 27 juin, la Commission a recommandé un rééchelonnement de créances sur 60 mois, avec un effacement de dette de 3 896,50 euros. Contestant cette décision, M. [T] [P] a argué de son impossibilité à assumer la mensualité de 148,42 euros. Le juge a finalement prononcé un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, effaçant toutes les dettes antérieures, sauf certaines créances spécifiques.

Exposé du litige

Le 11 mars 2024, M. [T] [P] a sollicité la Commission de Surendettement des particuliers du Pas de Calais pour examiner sa situation de Surendettement, ayant déjà bénéficié de mesures pendant 24 mois. Sa demande a été jugée recevable le 28 mars 2024. Lors de la séance du 27 juin 2024, la Commission a recommandé un rééchelonnement de certaines créances sur 60 mois à un taux de 0,00%, avec une mensualité de 148,42 euros et un effacement de dette de 3 896,50 euros à l’issue du plan. Cette décision a été notifiée le 3 juillet 2024. M. [T] [P] a contesté ces mesures par courrier recommandé le 25 juillet 2024, arguant qu’il ne pouvait assumer la mensualité en raison de sa situation financière. Les parties ont été convoquées à l’audience du 7 novembre 2024, où M. [T] [P] a expliqué sa situation professionnelle et financière. Les créanciers n’étaient pas présents. La décision a été mise en délibéré pour le 9 janvier 2025.

Sur la recevabilité

Selon les articles L.733-10 et R.733-6 du code de la consommation, une partie peut contester les mesures de la commission dans les trente jours suivant leur notification. Dans ce cas, les mesures ont été formulées le 27 juin 2024 et notifiées le 3 juillet 2024. M. [T] [P] a exercé son recours le 25 juillet 2024, ce qui rend son recours recevable en la forme.

Sur le fond

L’article L.724-1 du code de la consommation stipule que si les ressources ou l’actif réalisable du débiteur le permettent, la commission peut prescrire des mesures de traitement. Cependant, si le débiteur est dans une situation irrémédiablement compromise, la commission peut imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire. M. [T] [P] perçoit 589 euros par mois d’allocation spécifique de solidarité, tandis que ses charges mensuelles s’élèvent à 850 euros, ce qui indique une capacité de remboursement nulle. Son endettement total est de 12 467,16 euros. Il est donc établi qu’il se trouve dans l’impossibilité manifeste de faire face à ses dettes, n’ayant que des biens meublants nécessaires à sa vie courante. Les mesures de traitement du Surendettement sont jugées inadaptées, et sa situation est considérée comme irrémédiablement compromise, entraînant un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

Décision du juge

Le juge des contentieux de la protection a déclaré recevable le recours de M. [T] [P] et a constaté que sa situation est irrémédiablement compromise. Il a prononcé le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, entraînant l’effacement de toutes les dettes antérieures, à l’exception de certaines créances spécifiques. Le juge a également ordonné la mainlevée des saisies et des procédures d’exécution en cours concernant les créances effacées. Une inscription au fichier des incidents de remboursement sera effectuée pour une durée de cinq ans. La décision sera notifiée aux parties et publiée au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales, avec un délai de deux mois pour les créanciers non avisés pour former opposition. Les dépens sont laissés à la charge du Trésor public.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité du recours de M. [T] [P] ?

Le recours de M. [T] [P] est recevable en vertu des articles L.733-10 et R.733-6 du code de la consommation.

Ces articles stipulent que :

– **Article L.733-10** : « Le débiteur peut contester devant le juge des contentieux de la protection les mesures imposées par la commission dans un délai de trente jours à compter de la notification qui lui en est faite. »

– **Article R.733-6** : « La contestation est formée par déclaration au greffe du tribunal judiciaire. »

Dans le cas présent, les mesures ont été notifiées à M. [T] [P] le 3 juillet 2024, et il a exercé son recours le 25 juillet 2024, respectant ainsi le délai de trente jours.

Par conséquent, son recours est déclaré recevable en la forme.

Quelles sont les conditions pour prononcer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ?

Le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire est prévu par l’article L.724-1 du code de la consommation.

Cet article précise que :

– **Article L.724-1, alinéa 1** : « Lorsque l’examen de la demande de traitement de la situation de Surendettement révèle que les ressources ou l’actif réalisable du débiteur le permettent, la commission prescrit des mesures de traitement. »

– **Article L.724-1, alinéa 2** : « Lorsque le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise, caractérisée par l’impossibilité manifeste de mettre en œuvre des mesures de traitement, la commission peut imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire. »

Dans le cas de M. [T] [P], il perçoit des ressources mensuelles de 589 euros, tandis que ses charges mensuelles s’élèvent à 850 euros.

Cela signifie qu’il n’a pas de capacité de remboursement, et son endettement total est de 12 467,16 euros.

Ainsi, sa situation est considérée comme irrémédiablement compromise, justifiant le prononcé d’un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire.

Quelles sont les conséquences du rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ?

Les conséquences du rétablissement personnel sans liquidation judiciaire sont énoncées dans les articles L.741-2, L.711-4, L.711-5, et L.733-4, 2° du code de la consommation.

Ces articles stipulent que :

– **Article L.741-2** : « Le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire entraîne de plein droit l’effacement de toutes les dettes, professionnelles et non professionnelles, antérieures à la décision. »

– **Article L.711-4** : « Les dettes alimentaires, les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d’une condamnation pénale, et d’autres dettes spécifiques ne sont pas effacées. »

– **Article L.711-5** : « Les dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses, ainsi que certaines dettes fiscales, ne sont pas concernées par l’effacement. »

Dans le cas de M. [T] [P], toutes ses dettes antérieures à la décision seront effacées, sauf celles mentionnées ci-dessus.

Cela lui permettra de retrouver une situation financière plus saine, sans le poids de ses anciennes dettes.

Quelles sont les obligations de M. [T] [P] après le jugement ?

Après le jugement, M. [T] [P] a certaines obligations, notamment en vertu de l’article R.722-1 du code de la consommation.

Cet article stipule que :

– **Article R.722-1** : « Il incombe à chacune des parties, et notamment au débiteur, d’informer le secrétariat de la commission de Surendettement des particuliers de tout changement d’adresse en cours de procédure. »

Cela signifie que M. [T] [P] doit veiller à tenir la commission informée de tout changement d’adresse pour garantir la bonne marche de la procédure.

De plus, il doit être conscient que son inscription au fichier prévu à l’article L.752-3 du code de la consommation sera effective pour une durée de cinq ans, ce qui peut avoir des implications sur sa capacité à obtenir des crédits futurs.

N° RG 24/01417 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-757Y3 /

Tribunal de Proximité
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 5]
tel : [XXXXXXXX01]
[Courriel 17]

Références : N° RG 24/01417 – N° Portalis DBZ3-W-B7I-757Y3
N° minute :

JUGEMENT

DU : 09 Janvier 2025

[T] [P]

C/

Société [14] / 474098/59
Société [12] / 514749804/V022974330
Mutuelle [8] / PI 105383783
Société [15] / PC06016550

Copie certifiée conforme délivrée
à :

le :

Formule exécutoire délivrée
à :

le :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe le 09 janvier 2025 ;

par Charles DRAPEAU, Juge des contentieux de la protection, assisté d’ Amandine PACOU, Greffière, à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire;

Après débats à l’audience publique du 07 Novembre 2024 , le jugement suivant a été rendu, les parties ayant été avisées que le jugement serait prononcé par sa mise à disposition au greffe conformément à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Sur la contestation formée à l’encontre des mesures imposées par la commission de Surendettement des particuliers du PAS DE CALAIS pour traiter le Surendettement de :

DÉBITEUR(S)

M. [T] [P]
demeurant [Adresse 2]
comparant

envers :

CRÉANCIER(S)

[14]
demeurant SIEGE SOCIAL [Adresse 7]
non comparante

ENGIE
demeurant Chez [13]
[Adresse 16]
[Localité 4]
non comparante

Mutuelle [8]
demeurant [Adresse 3]
non comparante

[15]
demeurant Chez [10] [Adresse 6]
non comparante

EXPOSE DU LITIGE

Le 11 mars 2024, M. [T] [P] a saisi la Commission de Surendettement des particuliers du Pas de Calais d’une demande tendant à l’examen de sa situation de Surendettement.

Antérieurement, il a bénéficié de mesures pendant 24 mois.

Sa demande a été déclarée recevable par la commission le 28 mars 2024.

Lors de sa séance du 27 juin 2024, la Commission a préconisé les mesures suivantes : rééchelonnement d’une partie des créances sur une durée maximale de 60 mois au taux de 0,00%, moyennant une mensualité de remboursement à hauteur de 148,42 euros et l’effacement de la dette à l’issue du plan à hauteur de 3 896,50 euros.

Cette décision lui a été notifiée par lettre recommandée avec demande d’avis de réception le 3 juillet 2024.

Par courrier recommandé en date du 25 juillet 2024, M. [T] [P] a contesté ces mesures, indiquant qu’il ne pouvait assumer la mensualité prévue par la commission au regard de sa situation financière.

Les parties ont été dument convoquées à l’audience du 7 novembre 2024.

M. [T] [P], qui comparaît en personne, justifie avoir travaillé pendant 3 ans en qualité d’agent de sécurité et avoir été déclaré inapte suite à un accident du travail. Il perçoit dorénavant des ressources mensuelles à hauteur de 589 euros au titre de l’allocation spécifique de solidarité contre des charges mensuelles d’environ 850 euros.

Les créanciers n’ont pas comparu.

La décision a été mise en délibéré au 9 janvier 2025 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DECISION

I – Sur la recevabilité

En vertu des articles L.733-10 et R.733-6 du code de la consommation, une partie peut contester devant le juge des contentieux de la protection, les mesures imposées par la commission en application des articles L.733-1, L.733-4 ou L.733-7, dans les trente jours de la notification qui lui en est faite.

En l’espèce, les mesures imposées ont été formulées le 27 juin 2024, et notifiées à M. [T] [P] le 3 juillet 2024.

M. [T] [P] a exercé son recours le 25 juillet 2024.

Son recours est donc recevable en la forme.

II – Sur le fond

Aux termes de l’article L.724-1 alinéa premier du code de la consommation, lorsqu’il ressort de l’examen de la demande de traitement de la situation de Surendettement que les ressources ou l’actif réalisable du débiteur le permettent, la commission prescrit des mesures de traitement dans les conditions prévues aux articles L. 732-1, L. 733-1, L. 733-4 et L. 733-7.

L’alinéa 2 du même article précise que lorsque le débiteur se trouve dans une situation irrémédiablement compromise caractérisée par l’impossibilité manifeste de mettre en œuvre des mesures de traitement mentionnées au premier alinéa, la commission peut, dans les conditions du présent livre imposer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire si elle constate que le débiteur ne possède que des biens meublants nécessaires à la vie courante et des biens non professionnels indispensables à l’exercice de son activité professionnelle, ou que l’actif n’est constitué que de biens dépourvus de valeur marchande ou dont les frais de vente seraient manifestement disproportionnés au regard de leur valeur vénale.

En l’espèce, M. [T] [P] justifie percevoir des ressources mensuelles à hauteur de 589 euros par mois, au titre de l’allocation spécifique de solidarité.

Ses charges mensuelles sont évaluées par la commission de Surendettement à 854 euros.

La capacité de remboursement de M. [T] [P] est donc nulle.

L’endettement, selon décompte arrêté au 29 septembre 2024, est de 12 467,16 euros.

Il en résulte que le débiteur, de bonne foi, se trouve dans l’impossibilité manifeste de faire face à l’ensemble de ses dettes exigibles ou à échoir, ce d’autant plus que M. [T] [P] n’a aucun patrimoine permettant de les régler, à l’exception des biens meublants nécessaires à sa vie courante.

Il résulte de ce qui précède que les mesures de traitement du Surendettement prévues aux articles L.732-1, L.733-1, L.733-4 et L.733-7 du code de la consommation sont manifestement impuissantes à permettre un apurement du passif et que la situation de M. [T] [P] est irrémédiablement compromise au sens de l’article L.724-1 alinéa 2 du code de la consommation.

En conséquence, il y a lieu de prononcer un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire à son profit avec les conséquences rappelées au dispositif de la présente décision.

PAR CES MOTIFS

Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe ;

DÉCLARE recevable en la forme le recours de M. [T] [P] en contestation des mesures imposées par la Commission de Surendettement du Pas de Calais ;

CONSTATE que la situation personnelle de M. [T] [P] est irrémédiablement compromise ;

PRONONCE le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire de M. [T] [P] ;

RAPPELLE que conformément aux articles L.741-2, L.711-4, L.711-5, et L.733-4, 2° du code de la consommation, le rétablissement personnel sans liquidation judiciaire entraîne de plein droit l’effacement de toutes les dettes, professionnelles et non professionnelles, de M. [T] [P] antérieures à la présente décision, à l’exception :
– de celles de ces créances dont le montant a été payé au lieu et place du débiteur par la caution ou le coobligé, personnes physiques,
– des dettes alimentaires ;
– des réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d’une condamnation pénale ;
– des dettes ayant pour origine des manœuvres frauduleuses commises au préjudice des organismes de protection sociale énumérés à l’article L.114-12 du code de la sécurité sociale ;
– des dettes fiscales dont les droits dus ont été sanctionnés par les majorations non rémissibles mentionnées au II de l’article 1756 du code général des impôts et les dettes dues en application de l’article 1745 du même code et de l’article L. 267 du livre des procédures fiscales ;
– des dettes issues de prêts sur gage souscrits auprès des caisses de [11] en application de l’article L.514-1 du code monétaire et financier ;

ORDONNE en tant que de besoin la mainlevée des saisies rémunérations et de toutes procédures d’exécution forcée actuellement en cours concernant les créances effacées par l’effet du rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ;

RAPPELLE que les personnes ayant bénéficié de la procédure de rétablissement personnel font l’objet, à ce titre, d’une inscription au fichier prévu à l’article L.752-3 du code de la consommation (FICP), pour une période de cinq (5) ans ;

DIT que la décision sera notifiée par lettre recommandée avec avis de réception aux parties, et par lettre simple à la commission de Surendettement des particuliers du Pas de Calais ;

DIT que, conformément aux dispositions de l’article R.741-13 du code de la consommation, un avis de la présente décision sera adressé par le greffe, pour publication au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales ;

RAPPELLE que les créanciers qui n’auraient pas été avisés de la présente procédure disposent d’un délai de deux mois à compter de la publication au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales pour former tierce opposition à l’encontre du présent jugement, faute de quoi les créances dont ils sont titulaires seront éteintes ;

RAPPELLE qu’en vertu de l’article R.722-1 du code de la consommation, il incombe à chacune des parties, et notamment à M. [T] [P] d’informer le secrétariat de la commission de Surendettement des particuliers de tout changement d’adresse en cours de procédure ;

LAISSE les dépens, en ce compris les frais de publication de la présente décision, à la charge du Trésor public.

AINSI JUGÉ ET MIS À DISPOSITION LE 09 JANVIER 2025 .

LE GREFFIER LE JUGE DES CONTENTIEUX ET DE LA PROTECTION
Amandine PACOU Charles DRAPEAU


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon