L’Essentiel : La société Mondex Corporation, spécialisée dans la restitution des œuvres spoliées, a été victime de diffamation. Le journal des arts a accusé Mondex de pratiques immorales, évoquant des « formes de harcèlement des ayants droit ». Cependant, un propriétaire d’œuvre a contredit ces allégations, affirmant n’avoir jamais subi de pressions et avoir été agréablement surpris par le soutien de Mondex. Les auteurs de l’article n’ont pas fourni de base factuelle suffisante pour étayer leurs accusations, ce qui a conduit à la conclusion que la diffamation était avérée, et la bonne foi de l’éditeur ne pouvait être retenue. |
La diffamation publique a été retenue contre la société Mondex Corporation (spécialisée dans la restitution des biens juifs confisqués pendant la guerre), à laquelle étaient imputées des pratiques contraires à la morale, se traduisant par des « formes de harcèlement des ayants droit ». Affaire Le journal des artsLe journal des arts avait présenté l’activité de la société et la recherche d’oeuvres spoliées et leur restitution aux ayants droit légitimes, comme une activité de plus en plus commerciale avec «des pratiques pas toujours morales. Les passages en cause imputaient à la société, qui se présenterait comme un « chevalier blanc », des pratiques contraires à la morale, se traduisant par des « formes de harcèlement des ayants droit », telles que des ‘pressions incessantes’, comportement consistant en des conduites abusives portant atteinte à la dignité ou à l’intégrité morale de la personne, dans le but de la déséquilibrer psychologiquement ; ces propos, qui portent nécessairement atteinte à l’honneur et à la considération de la société Mondex sont donc diffamatoires. Bonne foi inopéranteL’éditeur du titre de presse a soulevé en vain sa bonne foi: si le sujet d’intérêt général n’était pas contestable, s’agissant de la recherche et de la restitution d’oeuvres spoliées à leurs légitimes propriétaires, et qu’il n’est pas justifié d’une quelconque animosité personnelle, les conditions relatives à la base factuelle et à la prudence ou mesure dans l’expression n’étaient pas remplies. Base factuelle insuffisanteEn effet, alors qu’il était imputé à la société Mondex d’avoir recours à des « pratiques pas toujours morales » et à des « formes de harcèlement », les auteurs, pour justifier leur propos s’appuient sur l’exemple du propriétaire d’un tableau de Modigilani dont la femme aurait dénoncé « les pressions incessantes dont sa famille faisait l’objet ». Or, dans une attestation, le propriétaire de l’œuvre déclarait «ne jamais avoir été harcelé afin de signer un contrat avec la société Mondex et avoir, au contraire, été agréablement surpris d’apprendre que les frais de sa défense seraient intégralement pris en charge par la société. Il ajoutait ne jamais avoir eu à connaître d’un quelconque chantage et s’être demandé, à la lecture de l’article du Journal des Arts, si le journaliste et lui-même parlaient de la même personne». Il apparaissait donc que les auteurs de l’article ont manqué de mesure en imputant les propos litigieux et qu’ils ne justifiaient pas d’une base factuelle suffisante pour affirmer l’existence de pratiques contraires à la morale, se traduisant par des « formes de harcèlement des ayants droit ». Il s’ensuit que le bénéfice de la bonne foi ne pouvait pas être accordé. Périmètre de la diffamationL’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881 définit la diffamation comme ‘toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé’. Il doit s’agir d’un fait précis, susceptible de faire l’objet d’un débat contradictoire sur la preuve de sa vérité, ce qui distingue ainsi la diffamation, d’une part, de l’injure -caractérisée, selon le deuxième alinéa de l’article 29, par ‘toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l’imputation d’aucun fait’- et, d’autre part, de l’expression subjective d’une opinion ou d’un jugement de valeur, dont la pertinence peut être librement discutée dans le cadre d’un débat d’idées mais dont la vérité ne saurait être prouvée ; L’honneur et la considération de la personne ne doivent pas s’apprécier selon les conceptions personnelles et subjectives de celle-ci, mais en fonction de critères objectifs et de la réprobation générale provoquée par l’allégation litigieuse, que le fait imputé soit pénalement répréhensible ou manifestement contraire aux règles morales communément admises. La diffamation, qui peut se présenter sous forme d’allusion ou d’insinuation, doit être appréciée en tenant compte des éléments intrinsèques et extrinsèques au support en cause, à savoir tant du contenu même des propos que du contexte dans lequel ils s’inscrivent. |
Q/R juridiques soulevées : Quelles accusations ont été portées contre la société Mondex Corporation ?La société Mondex Corporation a été accusée de diffamation publique, en raison de pratiques jugées contraires à la morale. Ces accusations incluent des « formes de harcèlement des ayants droit », ce qui implique que la société aurait exercé des pressions abusives sur les personnes ayant des droits sur des œuvres d’art spoliées. Ces allégations ont été formulées dans un article du journal des arts, qui a décrit l’activité de Mondex comme de plus en plus commerciale, insinuant que ses méthodes n’étaient pas toujours éthiques. Les accusations précises portées contre Mondex incluent des comportements qui portent atteinte à la dignité et à l’intégrité morale des ayants droit, ce qui a conduit à des atteintes à l’honneur et à la considération de la société.Comment le journal des arts a-t-il justifié ses propos ?Le journal des arts a justifié ses propos en se basant sur des exemples concrets, notamment en citant le cas d’un propriétaire d’une œuvre de Modigliani. Ce propriétaire aurait rapporté que sa famille subissait des « pressions incessantes » de la part de Mondex. Cependant, cette justification a été contestée par le propriétaire lui-même, qui a déclaré dans une attestation qu’il n’avait jamais été harcelé pour signer un contrat avec Mondex. Au contraire, il a été agréablement surpris d’apprendre que les frais de sa défense seraient pris en charge par la société. Cette contradiction met en lumière le manque de base factuelle suffisante pour soutenir les accusations portées par le journal des arts, ce qui a conduit à la conclusion que les auteurs de l’article n’ont pas agi avec la mesure requise.Quelles sont les conditions pour établir la diffamation selon la loi ?Selon l’article 29 alinéa 1 de la loi du 29 juillet 1881, la diffamation est définie comme toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération d’une personne. Pour qu’une déclaration soit considérée comme diffamatoire, elle doit être précise et susceptible d’être prouvée. Il est important de noter que la diffamation se distingue de l’injure, qui est caractérisée par des expressions outrageantes sans imputation d’un fait. De plus, la diffamation ne doit pas être confondue avec l’expression d’une opinion, qui peut être discutée librement dans un débat d’idées. Les critères d’appréciation de la diffamation doivent être objectifs, basés sur la réprobation générale que l’allégation peut provoquer, et non sur des perceptions subjectives de la personne concernée.Pourquoi la bonne foi de l’éditeur a-t-elle été jugée inopérante ?L’éditeur du journal des arts a tenté de défendre sa bonne foi en arguant que le sujet de l’article, à savoir la recherche et la restitution d’œuvres spoliées, était d’intérêt général. Cependant, cette défense a été jugée inopérante. La cour a estimé que, bien que le sujet soit légitime, les conditions relatives à la base factuelle et à la prudence dans l’expression n’étaient pas respectées. En d’autres termes, les auteurs de l’article n’ont pas fourni suffisamment de preuves pour soutenir leurs accusations de pratiques immorales. Ainsi, même si l’intention de l’éditeur n’était pas malveillante, le manque de fondement factuel a conduit à la conclusion que la bonne foi ne pouvait pas être invoquée pour justifier les propos diffamatoires. |
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