Responsabilité des vendeurs face aux vices cachés dans une transaction immobilière

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Responsabilité des vendeurs face aux vices cachés dans une transaction immobilière

L’Essentiel : Monsieur [Y] [P] a acquis un immeuble de Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] pour 290.000 euros. En janvier 2021, il a signalé des infiltrations, constatées par huissier plus tard dans l’année. Une expertise judiciaire a été ordonnée en juin 2022, révélant des malfaçons dans les travaux de couverture. En août 2023, Monsieur [Y] [P] a assigné les consorts [B] pour vices cachés. Le tribunal a finalement condamné les consorts à indemniser Monsieur [Y] [P] pour les travaux nécessaires, les frais engagés et un préjudice de jouissance, tout en les condamnant aux dépens.

Contexte de la vente

Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] épouse [B] ont vendu un immeuble à usage d’habitation à Monsieur [Y] [P] pour un montant de 290.000 euros, selon un acte notarié daté du 26 octobre 2020.

Apparition des désordres

Le 25 janvier 2021, Monsieur [Y] [P] a signalé à son assureur des désordres, notamment des infiltrations, qui ont été constatés par huissier les 30 juin et 1er décembre 2021, suite à leur aggravation.

Expertise judiciaire

Le juge des référés a ordonné une expertise judiciaire le 14 juin 2022, confiée à Monsieur [H] [C], dont le rapport a été rendu le 12 avril 2023.

Assignation en réparation

Monsieur [Y] [P] a assigné les consorts [B] en réparation le 31 août 2023, demandant la reconnaissance de leur responsabilité sur le fondement de la garantie des vices cachés et de la garantie décennale.

Demandes de Monsieur [Y] [P]

Dans ses conclusions du 7 mai 2024, Monsieur [Y] [P] a demandé des sommes pour les travaux de reprise, le remboursement de frais divers, un préjudice de jouissance, ainsi qu’une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Réponse des consorts [B]

Les consorts [B] ont contesté les demandes de Monsieur [Y] [P] dans leurs conclusions du 7 mars 2024, demandant le rejet de ses prétentions et la condamnation de ce dernier à leur verser une somme au titre de l’article 700.

Clôture de l’instruction

L’instruction a été clôturée le 28 juin 2024, et l’affaire a été fixée à plaider pour le 5 novembre 2024, avec une décision mise en délibéré au 7 janvier 2025.

Responsabilité des consorts [B]

Monsieur [Y] [P] a reproché aux consorts [B] d’avoir réalisé des travaux de maçonnerie et de couverture non conformes, entraînant des infiltrations, et a soutenu qu’il n’était pas en mesure de déceler ces vices lors de l’achat.

Expertise et constatations

L’expert a constaté des traces d’humidité et des malfaçons dans les travaux de couverture, ainsi que des fissures sur le mur de façade, attribuées à des défauts de construction antérieurs à la vente.

Conclusion de l’expert

L’expert a conclu que les travaux réalisés par les consorts [B] étaient en méconnaissance des règles de l’art, et que les vices étaient cachés et non connus de Monsieur [Y] [P] au moment de la vente.

Décision du tribunal

Le tribunal a condamné solidairement les consorts [B] à payer à Monsieur [Y] [P] des sommes pour la reprise des travaux, le remboursement de frais, et un préjudice de jouissance, tout en les condamnant aux dépens et à une indemnité au titre de l’article 700.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de la garantie des vices cachés selon le Code civil ?

La garantie des vices cachés est régie par les articles 1641 à 1645 du Code civil.

L’article 1641 dispose que :

« Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. »

Cet article établit que pour qu’un vice soit considéré comme caché, il doit rendre le bien impropre à son usage ou diminuer son usage de manière significative.

L’article 1643 précise que :

« Le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie. »

Cela signifie que même si le vendeur n’était pas au courant des vices, il en est responsable, sauf s’il a expressément exclu sa garantie.

Enfin, l’article 1645 indique que :

« Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur. »

Ainsi, la connaissance des vices par le vendeur entraîne une responsabilité accrue.

En résumé, pour que la garantie des vices cachés soit applicable, il faut prouver l’existence d’un vice caché, que ce vice soit antérieur à la vente, et que l’acheteur ne pouvait pas le déceler au moment de l’achat.

Comment la responsabilité des consorts [B] est-elle engagée au titre de la garantie décennale ?

La garantie décennale est régie par les articles 1792 et suivants du Code civil.

L’article 1792 stipule que :

« Tout constructeur d’un ouvrage est responsable de plein droit envers le maître de l’ouvrage, à raison des vices de construction qui compromettent la solidité de l’ouvrage ou qui le rendent impropre à sa destination. »

Cet article établit la responsabilité des constructeurs pour les vices affectant la solidité ou l’usage de l’ouvrage.

L’article 1792-1 précise que :

« La responsabilité prévue à l’article 1792 est engagée même en l’absence de faute de la part du constructeur. »

Cela signifie que la responsabilité est objective et ne dépend pas de la preuve d’une faute.

L’article 1792-2 ajoute que :

« La garantie décennale est due pendant une durée de dix ans à compter de la réception de l’ouvrage. »

Ainsi, les consorts [B], en tant que vendeurs ayant réalisé des travaux, peuvent être tenus responsables sur le fondement de la garantie décennale si les vices constatés compromettent la solidité de l’immeuble.

En l’espèce, les travaux réalisés par les consorts [B] ont été jugés non conformes aux règles de l’art, entraînant des désordres affectant la solidité de l’ouvrage, ce qui engage leur responsabilité au titre de la garantie décennale.

Quels sont les recours possibles pour l’acheteur en cas de vices cachés ?

L’article 1644 du Code civil prévoit les recours possibles pour l’acheteur en cas de vices cachés.

Il dispose que :

« Dans le cas des articles 1641 et 1643, l’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix. »

Cela signifie que l’acheteur peut choisir entre deux options :

1. Rendre le bien et obtenir le remboursement du prix d’achat.
2. Conserver le bien tout en demandant une réduction du prix en fonction de la valeur du bien affecté par les vices.

L’article 1645 précise que :

« Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur. »

Dans ce cas, l’acheteur peut également demander des dommages-intérêts en plus de la restitution du prix.

En résumé, l’acheteur a le choix entre rendre le bien ou le conserver avec une réduction de prix, et peut également demander des dommages-intérêts si le vendeur connaissait les vices.

Comment sont évalués les préjudices subis par l’acheteur en raison des vices cachés ?

L’évaluation des préjudices subis par l’acheteur en raison des vices cachés repose sur plusieurs principes juridiques.

L’article 1644 du Code civil, déjà cité, permet à l’acheteur de demander une réduction du prix en fonction des vices cachés.

Pour évaluer les préjudices, le tribunal se base sur les conclusions de l’expert judiciaire, qui doit établir le coût des travaux nécessaires pour remédier aux vices.

Dans le cas présent, l’expert a évalué le coût des travaux de reprise à 63.526,27 euros, ce qui a été retenu par le tribunal comme montant dû par les consorts [B].

En ce qui concerne les frais engagés par l’acheteur, l’article 1645 du Code civil permet également de demander des dommages-intérêts si le vendeur connaissait les vices.

Monsieur [Y] [P] a ainsi demandé le remboursement de 1.824 euros pour les frais engagés en raison des vices, ce qui a été accepté par le tribunal.

Enfin, pour le préjudice de jouissance, le tribunal a évalué le montant à 4.000 euros, en tenant compte de l’impossibilité d’utiliser le bien pendant une période déterminée.

En résumé, les préjudices sont évalués sur la base des travaux nécessaires, des frais engagés et du préjudice de jouissance, en s’appuyant sur les expertises et les preuves fournies par l’acheteur.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Chambre 02
N° RG 23/08326 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XPF5

JUGEMENT DU 07 JANVIER 2025

DEMANDEUR :

M. [Y] [P]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représenté par Me Guillaume DERRIEN, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEURS :

M. [T] [B]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représenté par Me Benjamin MILLOT, avocat au barreau de LILLE

Mme [D] [K] épouse [B]
[Adresse 2]
[Localité 3]
représentée par Me Benjamin MILLOT, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Maureen DE LA MALENE, Juge, statuant en qualité de Juge Unique, en application de l’article R 212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire,

Greffier : Dominique BALAVOINE, Greffier

DÉBATS :

Vu l’ordonnance de clôture en date du 28 Juin 2024 ;

A l’audience publique du 05 Novembre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré, les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 07 Janvier 2025.

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 07 Janvier 2025, et signé par Maureen DE LA MALENE, Présidente, assistée de Dominique BALAVOINE, Greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte notarié en date du 26 octobre 2020, Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] épouse [B] (ci-après les consorts [B]) ont vendu à Monsieur [Y] [P] un immeuble à usage d’habitation sis [Adresse 1] à [Localité 3] moyennant la somme de 290.000 euros.

Le 25 janvier 2021, Monsieur [Y] [P] a déclaré à son assureur l’apparition de désordres, constitués en partie d’infiltrations, qu’il a fait constater par huissier suivant procès-verbaux des 30 juin et 1er décembre 2021, suite à leur aggravation.

Par ordonnance en date du 14 juin 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille a ordonné une expertise judiciaire à la demande de Monsieur [Y] [P] et l’a confiée à Monsieur [H] [C].

L’expert a rendu son rapport le 12 avril 2023.

* * *

Par acte d’huissier en date du 31 août 2023, Monsieur [Y] [P] a assigné en réparation les consorts [B] devant le tribunal judiciaire de Lille.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 7 mai 2024, il demande au tribunal, au visa des articles 1641 et suivants et 1792 et suivants du code civil, de :
– dire et juger que la responsabilité des consorts [B] est engagée à son encontre en leurs qualités de vendeurs sur le fondement de la garantie des vices cachés et, subsidiairement, en leurs qualités de constructeurs sur le fondement de la garantie décennale ;
En conséquence,
– condamner solidairement les consorts [B] à lui payer les sommes suivantes :
– 63.526,27 euros au titre des travaux de reprise,
– 1.824 euros au titre du remboursement des frais divers engagés,
– 13.250 euros au titre du préjudice de jouissance de février 2021 à avril 2024, date des présentes conclusions, puis 250 euros par mois à compter de mai 2024 jusqu’à la date du jugement à intervenir,
– 2.800 euros au titre du préjudice de jouissance durant la période de réalisation des travaux ;
– condamner solidairement les consorts [B] à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner solidairement les consorts [B] aux entiers frais et dépens de l’instance, en ce compris les frais d’expertise judiciaire ;
– rappeler l’exécution provisoire de droit du jugement à intervenir.

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 7 mars 2024, Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] épouse [B] demandent au tribunal de :
– rejeter l’ensemble des demandes, fins et prétentions de Monsieur [Y] [P] ;
– laisser à sa charge l’ensemble des frais et dépens en ce compris les frais d’expertise exposés en l’espèce ;
– condamner Monsieur [Y] [P] à leur verser la somme de 2.500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, le tribunal se réfère expressément à leurs dernières écritures, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 28 juin 2024 et l’affaire a été fixée à plaider à l’audience du 5 novembre 2024.

La décision a été mise en délibéré au 7 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR LES DEMANDES DE CONDAMNATION FORMEES PAR MONSIEUR [Y] [P]

Monsieur [Y] [P] sollicite la condamnation solidaire des consorts [B] au paiement de différentes sommes en raison des désordres entachant le bien acquis, sur le fondement de la garantie des vices cachés des articles 1641 et suivants du code civil à titre principal, et sur le fondement de la garantie décennale des articles 1792 et suivants de ce même code à titre subsidiaire.

Sur la responsabilité des vendeurs au titre de la garantie des vices cachés :

Au soutien de son action en condamnation fondée sur la garantie des vices cachés, Monsieur [Y] [P] reproche aux consorts [B] d’avoir exécuté eux-mêmes des travaux de maçonnerie de la façade du mur du jardin et de couverture en méconnaissance des règles de l’art applicables en la matière, à l’origine de différents désordres, et notamment d’infiltrations dans son habitation.
Il précise qu’en tant que non professionnel de la construction, il n’était pas en mesure de déceler ces vices lors de l’achat, et ajoute que les vendeurs, en leur qualité de constructeurs des travaux litigieux, ne peuvent pas se prévaloir de la clause exonératoire de garantie des vices cachés prévue à l’acte notarié de vente.
Subsidiairement, Monsieur [Y] [P] soutient que la mauvaise foi des vendeurs est établie dans la mesure où ils se sont volontairement abstenus de faire mention des travaux litigieux lors de l’établissement de l’acte de vente, et qu’ils ont repeint et réenduit les murs et façades postérieurement à ceux-ci.

Les consorts [B] reprochent à Monsieur [Y] [P] de ne pas rapporter la preuve qu’ils avaient non seulement connaissance des désordres dénoncés et qu’ils ont donc cherché à les dissimuler, mais également qu’ils étaient antérieurs à la vente, dans la mesure où les fissures dont il est fait état étaient déjà présentes à ce moment-là.
S’agissant des travaux de toiture, ils ajoutent que les infiltrations dont ils ne contestent pas la matérialité sont en revanche dues à la vétusté de l’ouvrage, les travaux datant de 2010.

L’article 1641 du code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage, que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.

Aux termes de l’article 1643, le vendeur est tenu des vices cachés, quand même il ne les aurait pas connus, à moins que, dans ce cas, il n’ait stipulé qu’il ne sera obligé à aucune garantie.

Toutefois, en application de ce dernier article, le vendeur professionnel, auquel est assimilé le vendeur qui a réalisé lui-même les travaux à l’origine des vices de la chose vendue, est tenu de les connaître et ne peut se prévaloir d’une clause limitative ou exclusive de garantie des vices cachés.

L’article 1644 du code civil énonce par ailleurs que dans le cas des articles 1641 et 1643, l’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.

L’article 1645 du code civil ajoute toutefois que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.

Ainsi, la garantie des vices cachés suppose la démonstration d’un vice inhérent à la chose et compromettant son usage, nécessairement caché, c’est-à-dire non apparent et non connu de l’acheteur, et dont la cause est antérieure à la vente.

En l’espèce, l’expert judiciaire a constaté à l’occasion de ses opérations les éléments suivants :
– présence de traces d’humidité par auréoles au niveau du puits de lumière situé dans la cuisine,
– un haut taux d’humidité (supérieur à 90 %) sur le plafond du bureau,
– la présence de traces d’humidité dans la pièce donnant sur jardin,
– un taux d’humidité de 30 à 40 % dans la salle de bains,
– la présence d’auréoles à l’étage.

Il explique ces traces d’humidité dues à des infiltrations d’eau par des malfaçons qui entachent la couverture, à savoir une pente trop faible (de 1,4 % à 2,1 % au lien de 5 % à 25 %) entraînant des stagnations d’eau en cas de mauvais temps, l’absence de ventilation de la sous face de la couverture zinc, l’absence de protection ou l’inefficacité des liaisons avec les murs voisins, l’absence d’achèvement de la sortie d’eau (présence de vide autour du zinc) et par le manque d’étanchéité des gouttières et des menuiseries.

L’expert conclut que les travaux de couverture ont été effectués en méconnaissance des règles de l’art applicables en la matière.

L’expert judiciaire a également relevé :
– « des fissures globalement horizontales d’importante amplitude » sur le mur de façade sur jardin justifiant la mise en place par Monsieur [Y] [P] d’un système d’étayage,
– une déformation anormale de ce même mur au niveau de la fenêtre de la salle de bains et de la porte-fenêtre,
– la présence d’une fissure à la liaison avec le mur voisin perpendiculaire,
– la fissuration de la liaison avec le mur de clôture.

Il explique ces fissurations par l’absence de liaison rigide entre les deux structures composées de la façade et des murs de clôture, travaux réalisés en non-conformité avec les règles de l’art, s’agissant notamment des linteaux au dessous des deux ouvertures.

Ces vices étaient nécessairement non apparents au moment de la signature du contrat de vente pour un acquéreur non professionnel, ce qui ressort notamment des dires des consorts [B] lors des opérations d’expertise ; « les vendeurs et l’acheteur déclarent qu’aucun désordre n’était apparent lors de la transaction ».

En conséquence, Monsieur [Y] [P] démontre bien que les malfaçons entachant les travaux de couverture et de maçonnerie, constitutives d’un vice inhérent à la chose, étaient existantes, cachées et non connues de lui au moment de la signature de l’acte de vente.

Par ailleurs, l’expert judiciaire conclut que ces vices sont imputables à l’intervenant qui a réalisé les travaux de couverture et de maçonnerie du mur en façade qui datent d’avant la vente.

Or, Monsieur [Y] [P] rapporte également la preuve que ces vices sont du fait des consorts [B], avant la revente de leur bien.

Si les consorts [B] contestent en effet en être les auteurs, le tribunal relève toutefois que non seulement il ressort de l’expertise judiciaire faite au contradictoire des défendeurs que ces derniers ont déclaré avoir réalisé ces travaux « eux-mêmes en auto construction en 2010 » et pour lesquels ils ont transmis des factures d’achat de matériaux aux cours des opérations expertales, mais encore que ces travaux n’ont fait l’objet d’aucune déclaration lors de l’établissement de l’acte notarié du 26 octobre 2020. Aux termes des dispositions relatives à la construction dudit acte, les vendeurs se sont en effet contentés de faire état de l’existence de travaux de remplacement de l’habillage des chéneaux en 2015 et d’un lamier en 2017, sans rapport avec les présents vices dont il est aujourd’hui demandé réparation. Ils n’ont pas davantage produit aux débats des factures démontrant qu’ils auraient confié ces travaux à un quelconque professionnel.

Aussi, en leur qualité de vendeur – constructeur, les consorts [B] sont assimilés à un vendeur professionnel si bien qu’ils restent tenus à la garantie des vices cachés même en présence de la clause exclusive de garantie prévue à l’acte notarié du 26 octobre 2020, et ne peuvent donc se prévaloir des dispositions de l’article 1643 du code civil.

Monsieur [Y] [P] est donc bien-fondé à agir en réparation à l’encontre des consorts [B] au titre des vices cachés affectant la couverture et la façade.

Sur la réparation des préjudices :

Sur les travaux de reprise :

Monsieur [Y] [P] sollicite la condamnation solidaire des consorts [B] au paiement de la somme de 63.526,27 euros au titre de la reprise des désordres affectant la couverture et la façade, demande qu’il convient d’analyser comme une action en réduction du prix. Il s’appuie sur les conclusions de l’expert judiciaire pour justifier ce montant.

Les consorts [B] ne formulent aucune observation sur ce chiffrage.

La réduction de prix prévue à l’article 1644 du code civil permet de replacer l’acheteur dans la situation où il se serait trouvé si la chose vendue n’avait pas été atteinte des vices cachés.

En l’espèce, l’expert judiciaire préconise dans son rapport, s’agissant de la reprise du mur de façade côté jardin, de mettre en œuvre des protections et étaiements, de déconstruire la maçonnerie, d’enlever les menuiseries, puis de les reconstruire et les reposer dans le respect des règles de l’art.

S’agissant de la couverture, il préconise de la retirer intégralement et de reposer une nouvelle couverture soit en zinc avec une pente minimale de 5 %, soit avec une étanchéité auto-protégée.

L’expert a ainsi évalué le coût total de la reprise de ces travaux à la somme de 63.526,27 euros TTC, en se basant sur quatre devis transmis par Monsieur [Y] [P] et modifiés et retranchés par ses soins.

Il y a donc lieu de retenir le chiffrage préconisé par l’expert, qui permet une réparation intégrale du préjudice subi par le demandeur et de mettre un terme définitif aux vices.

En conséquence, il y a lieu de condamner solidairement les consorts [B] à payer à Monsieur [Y] [P] la somme de 63.526,27 euros au titre des frais de reprise des vices affectant les travaux de couverture et de maçonnerie.

Sur le remboursement des frais engagés :

Monsieur [Y] [P] sollicite le paiement de la somme de 1.824 euros correspondant au remboursement de différents frais qu’il a dû engager en raison des vices dont il demande aujourd’hui réparation, à savoir l’intervention d’un couvreur aux fins de mise en sécurité de la toiture, celle d’un expert amiable, celle d’un sapiteur dans le cadre des opérations expertales et les frais relatifs aux deux constats d’huissier, et produit les factures afférentes.

Les consorts [B] ne formulent aucune observation sur ce chiffrage.

En l’espèce, Monsieur [Y] [P] rapportent bien la preuve d’avoir dû engager ces différents frais en raison uniquement de l’existence des vices cachés imputables aux vendeurs.

Dès lors, il y a lieu de condamner les consorts [B] à payer à Monsieur [Y] [P] la somme totale de 1.824 euros au titre du remboursement de ces frais.

Sur le préjudice de jouissance :

Enfin, Monsieur [Y] [P] demande au tribunal la condamnation solidaire des consorts [B] au paiement des sommes de :
– 13.250 euros au titre de son préjudice de jouissance entre février 2021 et avril 2024,
– 250 euros par mois à ce même titre entre avril 2024 et la date du présent jugement,
– 2.800 euros au titre de son préjudice de jouissance en raison des travaux de reprise.

Les consorts [B] ne formulent aucune observation particulière sur ce chiffrage.

Il est constant que le trouble de jouissance s’analyse comme l’impossibilité dans laquelle s’est trouvé le demandeur d’utiliser le bien pendant une période déterminée.

En l’espèce, l’expert judiciaire a évalué le préjudice de jouissance à 250 euros par mois à compter de février 2021, outre la somme de 2.800 euros en raison des travaux de reprise, sans plus de précisions.

Si l’existence des vices affectant la couverture et la maçonnerie ont nécessairement entraîné un préjudice de jouissance dont Monsieur [Y] [P] est bien-fondé à demander réparation, force est de constater que celui-ci reste toutefois limité, faute pour le demandeur d’établir qu’il aurait été privé de la jouissance d’une partie de son bien du fait de ces vices.

En l’absence de démonstration juridique plus précise, notamment s’agissant de la durée des travaux de reprise, il y a lieu d’évaluer le préjudice de jouissance subi par Monsieur [Y] [P] aux sommes suivantes :
– 2.500 euros au titre du préjudice de jouissance subi du fait de l’existence des vices,
– 1.500 euros au titre du préjudice de jouissance subi du des travaux de reprise.

Dès lors, les consorts [B] seront solidairement condamnés à payer à Monsieur [Y] [P] la somme totale de 4.000 euros en raison de son préjudice de jouissance.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

Sur les dépens :

L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, les consorts [B], parties perdantes, seront condamnés in solidum aux dépens, en ce compris le coût de l’expertise.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :

En vertu de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

En l’espèce, les consorts [B], parties perdantes, seront condamnés in solidum à payer à Monsieur [Y] [P] la somme de 2.500 euros à ce titre, et seront déboutés de leur demande formée à ce même titre.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe de la juridiction, par jugement contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE solidairement Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] épouse [B] à payer à Monsieur [Y] [P] la somme de 63.526,27 euros au titre de la reprise des vices affectant les travaux de couverture et de maçonnerie ;

CONDAMNE solidairement Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] épouse [B] à payer à Monsieur [Y] [P] la somme de 1.824 euros au titre du remboursement des frais divers engagés ;

CONDAMNE solidairement Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] épouse [B] à payer à Monsieur [Y] [P] la somme totale de 4.000 euros au titre de son préjudice de jouissance ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] épouse [B] aux dépens, en ce compris le coût de l’expertise ;

CONDAMNE in solidum Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] épouse [B] à payer à Monsieur [Y] [P] la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE Monsieur [T] [B] et Madame [D] [K] épouse [B] de leur demande de condamnation formée à l’encontre de Monsieur [Y] [P] au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

Dominique BALAVOINE Maureen DE LA MALENE


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