L’Essentiel : Monsieur [H] [Y] a acquis un JEEP WRANGLER le 21 octobre 2019, mais a rapidement rencontré des dysfonctionnements majeurs. Un contrôle technique supplémentaire a révélé des défauts cachés, entraînant une expertise estimant les réparations à 2.627,64 €. Monsieur [H] [Y] a alors assigné Monsieur [G] [S] et la société de contrôle technique pour obtenir des indemnités et la résolution de la vente. Le tribunal a reconnu un vice caché, ordonnant la restitution du prix d’achat, tandis que les demandes d’indemnisation pour d’autres frais ont été rejetées, faute de preuve de connaissance des vices par Monsieur [G] [S].
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Exposé du litigeMonsieur [H] [Y] a acheté un véhicule JEEP WRANGLER le 21 octobre 2019 pour 18.500 €, avec un kilométrage de 161.000 km. Le véhicule a été soumis à un contrôle technique le même jour, où une défaillance mineure a été signalée. Trois jours plus tard, des dysfonctionnements ont conduit Monsieur [H] [Y] à effectuer un contrôle technique supplémentaire, révélant plusieurs défauts, dont des jantes non conformes et une usure excessive des rotules de suspension. Un contrôle ultérieur a confirmé ces défauts et a ajouté des problèmes de corrosion et d’échappement. Expertise et demandes de réparationLe garage Valllin a estimé le coût des réparations à 2.627,64 €. Une expertise judiciaire a été ordonnée, et après son rapport, Monsieur [H] [Y] a assigné Monsieur [G] [S] et la société Contrôle Technique 71 pour obtenir des indemnités pour ses préjudices. Il a demandé la résolution de la vente, la restitution du prix d’achat, et a mis en cause la responsabilité de la société de contrôle technique pour ne pas avoir détecté les vices. Arguments de Monsieur [H] [Y]Monsieur [H] [Y] soutient que les vices étaient cachés et que Monsieur [G] [S] en avait connaissance. Il a également mis en avant la responsabilité contractuelle de la société de contrôle technique, arguant qu’elle aurait dû détecter les défauts lors de l’examen. Il a demandé des indemnités pour des frais d’assurance inutiles, des frais de gardiennage et un préjudice de jouissance. Réponse de la société Contrôle Technique 71La société Contrôle Technique 71 a demandé le rejet des demandes de Monsieur [H] [Y], affirmant qu’elle n’avait pas commis de faute. Elle a soutenu que les défauts en question n’étaient pas détectables lors du contrôle technique et que les jantes non conformes avaient été fournies par le vendeur. Elle a également contesté le montant des demandes d’indemnisation. Arguments de Monsieur [G] [S]Monsieur [G] [S] a demandé que la société de contrôle technique soit responsable des préjudices subis par Monsieur [H] [Y]. Il a également proposé un partage de responsabilité, affirmant qu’il n’était pas un professionnel et qu’il avait agi de bonne foi en se fiant au contrôle technique. Décision du tribunalLe tribunal a conclu que le véhicule était affecté d’un vice caché au moment de la vente, entraînant la résolution de la vente et la restitution du prix d’achat à Monsieur [H] [Y]. Les demandes d’indemnisation pour les frais de gardiennage, d’assurance et de préjudice de jouissance ont été rejetées, car il n’a pas été prouvé que Monsieur [G] [S] connaissait les vices. La société de contrôle technique a également été déboutée des demandes de Monsieur [H] [Y]. Conséquences financièresMonsieur [G] [S] a été condamné à rembourser 18.500 € à Monsieur [H] [Y] et à payer des frais d’expertise judiciaire. Monsieur [H] [Y] a été condamné à verser 500 € à la société de contrôle technique au titre des frais de justice. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de la garantie des vices cachés selon le Code civil ?La garantie des vices cachés est régie par les articles 1641 à 1645 du Code civil. L’article 1641 dispose que : « Le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus. » Pour bénéficier de cette garantie, l’acheteur doit prouver plusieurs éléments : 1. **Existence d’un vice** : La chose vendue doit être affectée d’un vice. 2. **Antériorité du vice** : Le vice doit préexister à la vente. 3. **Caractère caché** : Le vice doit être indécelable pour un acquéreur profane. 4. **Impropérité à l’usage** : Le vice doit rendre la chose impropre à l’usage auquel elle était destinée. L’article 1642 précise que : « Le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même. » Ainsi, si l’acheteur a pu constater le vice avant l’achat, il ne pourra pas se prévaloir de cette garantie. Comment se manifeste la responsabilité du vendeur en cas de vice caché ?La responsabilité du vendeur en cas de vice caché est encadrée par l’article 1644 du Code civil, qui stipule que : « L’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix. » En cas de vice caché, l’acheteur peut donc demander la résolution de la vente, ce qui implique la restitution du bien et le remboursement du prix d’achat. L’article 1645 précise que : « Si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur. » En revanche, si le vendeur ignorait les vices, il ne doit être tenu qu’à la restitution du prix et à rembourser à l’acquéreur les frais occasionnés par la vente, conformément à l’article 1646. Dans le cas présent, il est essentiel de déterminer si Monsieur [G] [S] avait connaissance des vices au moment de la vente pour établir l’étendue de sa responsabilité. Quelles sont les obligations du centre de contrôle technique en matière de responsabilité ?La responsabilité du centre de contrôle technique peut être engagée sur le fondement de la responsabilité délictuelle, comme le prévoit l’article 1240 du Code civil : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Pour engager la responsabilité du centre de contrôle technique, il faut prouver qu’il a commis une faute lors de l’examen du véhicule. L’article 1241 précise que : « Celui qui cause un dommage à autrui est tenu de le réparer. » Dans le cas présent, il est nécessaire de démontrer que le centre de contrôle technique a manqué à ses obligations en ne détectant pas les vices lors du contrôle. L’expert a noté que certaines défaillances, comme la fissuration du système d’échappement, n’étaient pas visibles, ce qui pourrait exonérer le centre de sa responsabilité. Il est donc crucial d’examiner si les défauts étaient détectables au moment du contrôle technique pour établir la responsabilité du centre. Quels sont les recours possibles pour l’acheteur en cas de vice caché ?L’acheteur, en cas de vice caché, dispose de plusieurs recours, comme le stipule l’article 1644 du Code civil. Il peut choisir entre : 1. **Rendre la chose** : Cela implique la restitution du véhicule au vendeur. 2. **Se faire restituer le prix** : L’acheteur peut demander le remboursement du prix d’achat. 3. **Garder la chose** : L’acheteur peut également choisir de conserver le véhicule et demander une réduction du prix. Dans le cas de Monsieur [H] [Y], il a demandé la résolution de la vente, ce qui signifie qu’il souhaite rendre le véhicule et obtenir le remboursement du prix d’achat de 18 500 €. Il a également sollicité des dommages et intérêts pour les frais d’assurance, de gardiennage et de préjudice de jouissance, mais ces demandes doivent être justifiées par des éléments probants. Il est important de noter que si le vendeur n’était pas au courant des vices, il ne sera tenu qu’à la restitution du prix, sans dommages et intérêts, conformément à l’article 1646 du Code civil. |
MINUTE N° : 24/
DOSSIER N° : N° RG 23/00534 – N° Portalis DBWH-W-B7H-GIRX
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOURG-EN-BRESSE
CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT du 07 Janvier 2025
Dans l’affaire entre :
DEMANDEUR
Monsieur [H] [Y]
né le 06 Décembre 1972 à [Localité 6], demeurant [Adresse 1]
représenté par Me Adelaïde FREIRE MARQUES, avocat au barreau de BOURGOIN-JALLIEU, avocat plaidant et Me Cecile BERTON, avocat au barreau de l’AIN, vestiaire: 50, avocat postulant
DEFENDEURS
Monsieur [G] [S],
demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Solène THOMASSIN, avocat au barreau de l’AIN, vestiaire : T 75
S.A.R.L. CONTROLE TECHNIQUE 71,
immatriculée sous le n°440 327 542,
dont le siège social est sis [Adresse 7]
représentée par Me Eric ROZET, avocat au barreau d’AIN, vestiaire : T 4
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré :
PRÉSIDENT : Mme MASSON-BESSOU, Juge
GREFFIER : Madame LAVENTURE,
DÉBATS : à l’audience publique du 18 Novembre 2024
JUGEMENT : rendu par mise à disposition au greffe, en premier ressort et Contradictoire
Monsieur [H] [Y] a acquis le 21 octobre 2019 de Monsieur [G] [S] un véhicule JEEP WRANGLER immatriculé [Immatriculation 3] au prix de 18.500 €, le véhicule totalisant 161.000 kilomètres au compteur.
Le même jour et préalablement à la vente, celui-ci était présenté au contrôle technique, la société Contrôle technique 71, à [Localité 5] .
Le contrôleur technique relevait une défaillance mineure à savoir le règlement des feux de brouillard avant avec une mauvaise orientation horizontale d’un feu de brouillard avant gauche.
Trois jours plus tard, s’inquiétant de dysfonctionnements, Monsieur [H] [Y] effectuait un contrôle technique volontaire auprès du centre Auto Securitas qui relèvera deux autres défauts, à savoir des jantes non conformes et nuisant à la sécurité routière d’une part et une usure excessive des rotules de suspension d’autre part.
Un contrôle technique toujours effectué par le centre Auto Securitas le 28 octobre 2019 va confirmer ces défauts et relever également une corrosion du chassis, une entrée de fumées du moteur ou d’échappement.
Par la suite, le garage Valllin a chiffré le coût des réparations à la somme de 2 627,64 €, à raison de 1838,33 € pour les travaux sur les rotules et croisillons et 789,31 € pour les travaux concernant les odeurs d’échappement.
Une expertise a en définitive été ordonnée par ordonnance de référé du 5 janvier 2021 et confiée à Monsieur [X] , lequel a déposé son rapport le 15 juin 2021 .
A la suite du dépôt du rapport, Monsieur [H] [Y], par exploits des 3 et 7 février 2023, a assigné Monsieur [G] [S] et la société Contrôle technique 71 aux fins de les voir au principal condamner solidairement à lui payer différentes sommes en indemnisation de ses préjudices .
Dans ses dernières écritures, régularisées par RPVA le 6 novembre 2023, Monsieur [H] [Y] demande en définitive au tribunal de :
Vu les articles 1103, 1104, 1217, 1231-1, 1641 à1645, 1240 et 1241 du Code civil,
Ordonner l’application de la garantie des vices caché des articles 1641 et suivants du Code civil,
Juger que les désordres affectants le véhicule sont constitutifs d’un vice caché rendant la chose impropre àson usage, que Monsieur [S] avait nécessairement connaissance du vice affectant le bien en raison de la proximité entre la vente et l’apparition des désordres;
Ordonner la résolution de la vente portant sur le véhicule JEEP WRANGLER immatriculé [Immatriculation 3];
Condamner Monsieur [S] à lui restituer le prix du véhicule, soit la somme de 18 500€;
Condamner Monsieur [S] à venir récupérer le véhicule à ses frais et en tout lieu qu’il se trouve;
Juger que Monsieur [S] récupèrera le véhicule dans l’état dans lequel il se trouve sans recours possible contre Monsieur [Y];
Juger que la société Contrôle Technique 71 a manqué à ses obligations contractuelles en ne détectant pas les vices lors du contrôle technique, et que sa responsabilité est engagée, et juger à défaut qu’elle a commis une faute délictuelle de nature à engager sa responsabilité dans les désordres subis par Monsieur [Y];
Condamner in solidum Monsieur [G] [S] et la société Contrôle Technique 71 à lui verser les sommes de :
– 1 537,38 euros au titre de la cotisation inutile à l’assurance du véhicule durant la durée d’immobilisation, somme à parfaire au jour du jugement à intervenir,
– 27 324,50 euros au titre de son préjudice de jouissance, somme à parfaire au jour du jugement à intervenir, arrêtée pour l’instant au 6/11/2023,
– 11 820 euros correspondant aux frais de gardiennage du véhicule, somme à parfaire au jour du jugement à intervenir, arrêtée pour l’instant au 8/09/2023,
Débouter Monsieur [G] [S] et la société Contrôle Technique 71 de l’intégralitéde leurs demandes, fins et conclusions;
Condamner in solidum Monsieur [G] [S] et la société Contrôle Technique 71 à lui verser la somme de 4 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens qui comprendront les frais d’expertise judiciaire.
Monsieur [H] [Y] soutient que la responsabilité de Monsieur [G] [S] sur le fondement de la garantie des vices cachés est incontestable, aux motifs :
-que l’expert judiciaire a conclu que le véhicule était impropre à tout usage en l’état, notant principalement une fissuration du système de conduit d’échappement qui a généré les odeurs senties dans l’habitacle du véhicule, une dégradation des éléments constitutifs du train avant (érosion des rotules, du croisillon et de la transmission), et des jantes inadaptées au véhicule;
-qu’il a été reconnu que les vices étaient antérieurs à l’acquisition du véhicule et que la proximité entre l’achat et la révélation des désordres du véhicule ne laisse aucun doute sur le fait que Monsieur [G] [S] avait connaissance des vices affectant le véhicule;
Il retient également la responsabilité contractuelle du centre de contrôle technique, observant qu’en sa qualité d’ayant cause de Monsieur [S] pour avoir acquis le véhicule en cause , il est fondé à exercer les droits et actions de son vendeur à l’égard de son co-contractant et ce, en usant de l’action directe, et que celui ci est à défaut responsable sur un plan délictuel au visa des articles1240 et 1241 du Code civil.
A ce titre, il expose :
-qu’en application de la réglementation applicable, les centres de contrôle technique doivent examiner 133 points de contrôles regroupés en 8 catégories dont notamment la direction du véhicule, les essieux, roues et suspension, le châssis et les accessoires de châssis;
-que si dans son rapport, l’expert judiciaire note que le technicien du contrôle technique ne pouvait avoir un accès visuel sur la partie de l’échappement fissurée, il note en revanche que l’usure des rotules était en état de germe au moment du contrôle technique, et qu’ainsi l’expert n’exclut pas la responsabilité du centre de contrôle technique sur ce point .
S’agissant de l’indemnisation de son préjudice, le demandeur fait valoir :
-que si initialement il souhaitait le remboursement des travaux, il souhaite désormais la résolution de la vente et donc la condamnation du vendeur à lui restituer le prix de vente;
-qu’il est également fondé à solliciter le remboursement des frais d’assurance inutiles qui ont été réglés durant l’immobilisation du véhicule, de même que les frais de gardiennage, dès lors qu’il n’était pas en mesure de garder son véhicule à son domicile et sollicite également l’indemnisation de son préjudice de jouissance.
Aux termes de ses dernières écritures, régularisées par RPVA le 4 janvier 2024 la société Contrôle Technique 71 demande au Tribunal de :
Au principal :
Débouter purement et simplement Messieurs [H] [Y] et [G] [S] de l’ensemble de leurs demandes fins et conclusions à son encontre;
Au subsidiaire,
Les débouter de leurs demandes liées au gardiennage et à la non utilisation du véhicule;
Plus subsidiairement encore,
Dire n’y avoir lieu à condamnation in solidum d’une part et au cas où une condamnation interviendrait,
Dire que la part imputable au Centre de Contrôle Technique ne saurait être supérieure à 5 % du sinistre,
Condamner qui mieux le devra au paiement de la somme de 1.500,00 € au visa des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’en tous les dépens avec application au profit de la SELARL Bernasconi Rozet Monnet Suety Forest des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.
La société Contrôle Technique 71 soutient à titre principal qu’elle n’a pas engagé sa responsabilité, en ce que:
-il lui est reproché de n’avoir pas mentionné sur son procès-verbal du 21 octobre 2019 deux défaillances qui étaient la taille des jantes et l’usure excessive des rotules de suspension;
-en ce qui concerne la taille des jantes, le véhicule a été vendu par Monsieur [S] à Monsieur [Y] avec des jantes surdimensionnées, mais le vendeur a fourni à l’acheteur les jantes d’origine avec lesquelles levéhicule avait été présenté au contrôle technique, ce qui fait que le contrôleur technique ne pouvait pas savoir que les jantes n’étaient pas conformes;
-en ce qui concerne l’usure excessive des rotules de suspension, rien ne démontre qu’elle était détectable par le contrôle technique et l’expert ne relève aucune faute à ce titre;
-s’agissant enfin de l’échappement, il est clairement dit par l’expert dans son rapport que le centre de contrôle technique ne pouvait constater de défaut puisque le technicien ne pouvait pas avoir d’accès visuel sur la partie d’échappement fissuré.
A titre subsidiaire, elle observe, sur le quantum des demandes formées par Monsieur [H] [Y] :
-que les photographies figurant au contrôle d’expertise montrent les conditions d’entreposage du véhicule, stocké en partie sur un parking goudronné et en partie sur un talus en herbe, les roues de la face avant ayant été enlevées et le véhicule reposant depuis des années maintenant sur des vieux pneus;
-qu’aucun accord n’est jamais intervenu en ce qui concerne la somme de 10 euros par jour pour un entreposage dans de pareilles conditions;
-que s’agissant du préjudice de jouissance, le vendeur avait accepté de prendre en charge les réparations aux termes d’un protocole d’accord du 15 juillet 2020 à hauteur de 789,31€ et l’acheteur a refusé d’encaisser le chèque, préférant engager une procédure judiciaire dans le but manifeste de battre monnaie, alors que le vendeur avait parfaitement la possibilité de faire réparer le véhicule, les frais de réparation étant très faibles;
-qu’en sollicitant la restitution du prix du véhicule pour 18.500 €, 27.324,50 € de préjudice de jouissance, 11.820 € de frais de gardiennage, c’est-à-dire trois fois le prix du véhicule, le vendeur se met en position de s’acheter un véhicule neuf .
Dans ses dernières écritures, Monsieur [G] [S] demande au Tribunal de:
A titre principal :
Dire et juger que la société Contrôle Technique 71 est responsable des préjudices subis par Monsieur [H] [Y] et devra garantir Monsieur [G] [S] de toutes les condamnations qui pourraient intervenir à son encontre;
Subsidiairement :
Dire que Monsieur [G] [S] et la société Contrôle Technique 71 devront se partager la responsabilité des préjudices subis par Monsieur [Y] à hauteur de 1/3 pour Monsieur [S] et des 2/3 pour la société Contrôle Technique 71 ,
Fixer les frais de réparations du véhicule à la somme de 789,31 euros,
Réduire les frais de gardiennage d’immobilisation et de jouissance sollicités par Monsieur [Y] dans d’importantes proportions et statuer ce que de droit sur les dépens.
Il expose :
-qu’il a régularisé avec Monsieur [H] [Y] le 15 juillet 2020 un protocole d’accord selon lequel Monsieur [S] acceptait de prendre en charge les réparations à hauteur de 789,31 euros, qu’il lui a adressé par lettre recommandée le protocole signé et le chèque, mais que ce dernier s’est finalement rétracté au motif que la société Contrôle Technique 71 avait refusé de signer de son côté un protocole;
-que n’étant pas un professionnel, il ne pouvait avoir connaissance des vices affectant le véhicule et a fait confiance au contrôle technique, qui n’a conclu qu’à des défauts mineurs;
-que lorsqu’il a acquis le véhicule, les jantes querellées étaient déjà présentes, et qu’au moment de la vente, il a remis les jantes d’origine à Monsieur [H] [Y], ce qui n’est pas contesté ;
-que l’’intervention d’un professionnel aurait dû empêcher une telle situation, raison pour laquelle il demande que la société Contrôle Technique 71 le garantisse de toutes les condamnations qui pourraient être mises à sa charge.
A titre subsidiaire il sollicite un partage de responsabilité à hauteur de 1/3 pour lui et 2/3 pour la société Contrôle Technique 71 et précise ne pas être opposé à prendre en charge la somme de 789,31 euros initialementprévue et acceptée par le requérant lui-même.
S’agissant des demandes de Monsieur [H] [Y] , il fait valoir :
-que l’expert a chiffré les frais de réparation à 2 827,66 euros, outre 950 euros relative aux frais de contrôle global et de remise sur la route mais que ces frais ont augmenté par rapport au devis qui avait été fait en 2019 simplement parceque le temps s’est écoulé et donc que le véhicule s’est dégradé;
-que n’étant en rien responsable des délais écoulés alors qu’il avait accepté de prendre en charge les réparations à hauteur de 789,31 euros, c’est donc bien la somme de 789,31 euros qui devra être retenue;
-que de même, Monsieur [H] [Y] est responsable du délai de 20 mois qui s’est écoulé et ne saurait lui imputer les sommes conséquentes sollicitées à titre de frais de gardiennage et de son préjudice de jouissance dans leur intégralité, étant observé que ces frais dépassent largement le prix d’achat du véhicule;
Il convient de se reporter aux écritures des parties pour plus ample exposé, par application de l’article 455 du Code de procédure civile .
I : Sur l’action en garantie des vices cachés exercée à l’encontre de Monsieur [G] [S]
Aux termes de l’article 1641 du Code civil, le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l’usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquise, ou n’en aurait donné qu’un moindre prix, s’il les avait connus.
L’article 1642 du même code dispose quant à lui : “le vendeur n’est pas tenu des vices apparents et dont l’acheteur a pu se convaincre lui-même”.
Ainsi, en application de l’article 1353 du Code civil, il appartient à celui qui se prévaut de la garantie des vices cachés de démontrer :
-que la chose vendue est affectée d’un vice,
-que le vice préexistait à la vente,
-que le vice était caché, c’est à dire indécelable pour un acquéreur profane,
-que le vice rend la chose acquise impropre à l’usage auquel il était destiné, par rapport à l’usage normal que l’acheteur pouvait raisonnablement envisager (voire qu’il diminue tellement cet usage que l’acheteur ne l’aurait pas acquis ou l’aurait acquis à moindre prix s’il avait eu connaissance du vice)
En l’espèce, l’existence ou non d’un vice caché peut être appréciée à l’aune du rapport d’expertise judiciaire, au demeurant non contesté par les parties.
L’expert relate :
-que le 21 octobre 2019, le véhicule est présenté au contrôle technique, (Contrôle technique 71) qui ne relève qu’un seul défaut ne nécessitant pas de contre-visite (réglage du phare anti-brouillard) et que le même jour, après un essai routier, le véhicule est acquis par Monsieur [H] [Y] ;
-que sur le trajet du retour à son domicile, Monsieur [H] [Y] constate que la tenue du cap en virage est imprécise et qu’une odeur de gaz d’échappement envahie l’habitacle, raison pour laquelle le 24 octobre suivant, il présente par précaution le véhicule au contrôle technique Auto Securitas , l’opérateur relevant à cette occasion un jeu fonctionnel anormal au niveau des rotules de suspension et une taille de jantes inadaptée;
-qu’un nouvel examen est effectué au centre Auto Sécuritas le 28 octobre 2019 en présence du premier contrôleur technique, à l’issue duquel est relevé une entrée de fumée dans l’habitacle, une usure excessive de rotule de transmission et une usure excessive de la transmission;
-que le 16 mars 2020, après avoir démonté le véhicule (une partie du train avant et une partie de la chaine de transmission) lors d’une réunion contradictoire entre les parties, le garage Vallin a délivré un devis de réparation de 2 627,64 € et que par la suite un protocole d’accord a été rédigé entre les trois parties, Monsieur [G] [S] ayant envoyé le protocole signé accompagné d’un chèque correspondant au remplacement du filtre à particules mais qui n’a jamais été encaissé par Monsieur [H] [Y] ;
S’agissant des désordres, l’expert judiciaire relève :
-que les quatre roues installées sur le véhicule sont trop larges, dépassant leur logement initial, ce qui n’est pas conforme à un usage sécuritaire de la voie publique;
-que le filtre à particules est fendu au niveau de son raccordement et de sa réduction de section, ce qui a entraîné une évacuation partielle anormale des gaz d’échappement, à l’origine de l’odeur ressentie dans l’habitacle du véhicule, qu’il s’agit d’un phénomène ancien, (dépôts de suie au niveau de la tôle de protection pare-chaleur logée à proximité immédiate du filtre) et que le centre Contrôle technique 71 ne pouvait pas avoir un accès visuel sur la partie échappement fissurée et ne pouvait donc émettre une quelconque réserve;
-qu’il existe une dégradation des éléments constitutifs du train avant (érosion des rotules, du croisillon et de la transmission) , l’examen du croisillon de transmission mettant en exergue des traces de vieillissement et la destruction d’une cage à aiguilles (en partie détruite et oxydée), l’expert ajoutant que le jeu anormal de fonctionnement des articulations du train roulant, a conduit au défaut de tenue de cap du véhicule constaté par l’acheteur;
-que si l’usure des rotules était en état de germe au moment du contrôle technique, il est tout à fait possible que lors du contrôle technique réalisé en amont de la vente les jeux fonctionnels naissants étaient bien moins perceptibles par le technicien.
Selon l’avis de l’expert, ces défauts étaient présents ou en état de germe au moment de la transaction.
Il évalue les réparations à 2 827,66 € : remplacement des rotules, de la transmission et du filtre à particules, outre 950 € de frais de contrôle global et de remise en route après une longue période d’immobilisation du véhicule non préservé dans de bonnes conditions .
Ainsi, il ressort en substance de ce rapport très circonstancié qu’outre ses jantes inadaptées, le véhicule présentait bien différents désordres :
-un filtre à particules fendu, qui était à l’origine de l’odeur de gaz d’échappement ressentie dans l’habitacle du véhicule ;
-une dégradation des éléments constitutifs du train avant (érosion des rotules, du croisillon et de la transmission) , avec un jeu anormal de fonctionnement des articulations du train roulant, expliquant le défaut de tenue de cap du véhicule constaté par l’acheteur.
Ces vices étaient antérieurs à la vente dès lors que l’expert s’agissant de la fissuration du système de conduit d’échappement indique qu’il s’agit d’un phénomène ancien et qu’en ce qui concerne la dégradation des éléments constitutifs du train avant, il fait référence à un phénomène, notamment l’usure des rotules, en germe au moment du contrôle technique .
Par ailleurs, l’expert souligne , concernant le filtre à particules, l’impossibilité d’accès visuel sur la partie échappement fissurée, expliquant que le centre Contrôle Technique 71 ne pouvait donc émettre une quelconque réserve , et il ne peut qu’en être déduit que l’acheteur lui – même ne pouvait donc déceler ce désordre au moment de la vente et qu’il s’agissait bien d’un vice caché.
S’agissant de la dégradation des éléments constitutifs du train avant, notamment l’usure des rotules, l’expert relève un état de germe du désordre au moment du contrôle technique mais note qu’il est tout à fait possible que, lors de ce contrôle, les jeux fonctionnels naissants étaient bien moins perceptible par le technicien.
Il ne peut donc en être déduit, contrairement à ce que soutient le demandeur, que ce désordre était à l’évidence détectable lors du contrôle technique et aucun autre élément du rapport ni les pièces produites (notamment les autres rapports non judiciaires, qui procèdent par affirmation) ne permet de parvenir à cette conclusion, dans un contexte où au regard de son kilométrage, il n’était pas étonnant que le véhicule présente des usures en état de germe .
De la même façon, il en résulte que l’acheteur, dont la qualité de profane n’est pas contestée, ne pouvait déceler ce désordre et qu’il s’agissait bien d’un vice caché .
Enfin, il n’est pas contestable que Monsieur [H] [Y] , qui a acheté le véhicule litigieux pour un prix non négligeable alors que le contrôle technique n’avait pas relevé d’anomalie sérieuse et lui permettait de considérer que le véhicule était en état de rouler, a réalisé cette acquisition pour faire usage du véhicule acquis.
Or, au regard des désordres relevés par l’expert et plus précisément de leur nature, il apparaît que des réparations devaient être effectuées sur le véhicule pour qu’il puisse être utilisé sans risque pour la sécurité et au delà de façon pérenne .
L’expert évalue ces réparations à 2 827,66 € concernant le remplacement des rotules, de la transmission et du filtre à particules .
Dès lors, si, au regard de la nature et du prix des réparations à effectuer, il ne peut être considéré que le véhicule était impropre à l’usage auquel il était destiné, en revanche, il doit être retenu, au sens de l’article 1641 du Code civil précité, que dès lors que des réparations s’avéraient nécessaires pour que le véhicule soit en état de rouler pour un usage normal, la connaissance de l’état réel du véhicule aurait amené l’acheteur si ce n’est à stopper son acquisition, en tous cas à solliciter une réduction de prix .
Il ressort de l’ensemble de ces éléments que le véhicule acheté par Monsieur [H] [Y] était bien atteint d’un vice caché au jour de la vente, au sens de l’article 1641 du Code civil.
II : Sur l’action en responsabilité contractuelle et subsidiairement délictuelle de Monsieur [H] [Y] à l’encontre de la société Contrôle Technique 71
Aucun contrat ne liant Monsieur [H] [Y] à la société Contrôle Technique 71, la responsabilité de cette dernière ne peut qu’être une responsabilité délictuelle, étant observé que Monsieur [H] [Y] ne rapporte pas la preuve qu’il se trouve dans un cas énoncé à l’article 1341-3 du Code civil.
Il appartient en conséquence à Monsieur [H] [Y] , au sens de l’article 1241 du Code civil, de rapporter la preuve d’une faute de la société Contrôle Technique 71 commise à l’occasion du contrôle technique litigieux .
Or, il a été précédemment retenu :
-que le centre Contrôle technique 71 ne pouvait pas avoir un accès visuel sur la partie échappement fissurée et ne pouvait donc émettre une quelconque réserve;
-que concernant le train avant et l’usure des rotules, Il ne pouvait être considéré que ces désordres était à l’évidence détectables lors du contrôle technique, au regard des réserves de l’expert, selon lequel il était tout à fait possible que lors du contrôle les jeux fonctionnels naissants étaient bien moins perceptibles par le technicien, et aucun élément extérieur au rapport ne permettant de retenir une faute du centre de contrôle technique à ce titre .
Il s’en suit qu’en l’absence de faute établie, Monsieur [H] [Y] doit être débouté des demandes qu’il a présentées à l’encontre de la société Contrôle Technique 71 .
III )- Sur les conséquences du vice caché
Au cas où le vice caché serait retenu, l’article 1644 du code civil dispose que l’acheteur a le choix de rendre la chose et de se faire restituer le prix, ou de garder la chose et de se faire rendre une partie du prix.
En l’espèce, Monsieur [H] [Y] sollicite la résolution de la vente, et donc de rendre la chose et de se faire restituer le prix.
Dès lors que l’action en garantie pour vice caché diligentée par Monsieur [H] [Y] est déclarée fondée, il doit être fait droit à sa demande .
En conséquence, il y a lieu d’une part d’ordonner la résolution de la vente, le véhicule étant restitué à Monsieur [G] [S] selon les modalités exposées au dispositif du présent jugement et d’autre part de condamner Monsieur [G] [S] à restituer à Monsieur [H] [Y] le prix de vente, soit la somme de 18 500 € .
Il ressort par ailleurs des articles 1645 et 1646 du Code civil :
-que si le vendeur connaissait les vices de la chose, il est tenu, outre la restitution du prix qu’il en a reçu, de tous les dommages et intérêts envers l’acheteur.
-que si le vendeur ignorait les vices de la chose, il ne doit être tenu qu’à la restitution du prix, et à rembourser à l’acquéreur les frais occasionnés par la vente.
En l’espèce, Monsieur [H] [Y] sollicite les sommes de :
– 1 537,38 euros au titre de la cotisation inutile à l’assurance du véhicule durant la durée d’immobilisation,
– 27 324,50 euros au titre de son préjudice de jouissance,
– 11 820 euros correspondant aux frais de gardiennage du véhicule.
Pour autant, il n’existe pas d’éléments suffisants pour retenir que Monsieur [G] [S] connaissait les vices de la choses, dès lors qu’il a été précédemment retenu qu’il n’était pas établi que le Centre Contrôle Technique 71 était en mesure de les détecter, dans un contexte où Monsieur [G] [S] a pris le soin de faire procéder à un contrôle technique le jour de la vente, où ce contrôle n’a relevé que des défauts mineurs et où il ne peut lui être reproché de s’être limité à se fier au contrôle d’un spécialiste dont la fonction était de détecter les anomalies .
En conséquence, il n’y a pas lieu à applications des dispositions de l’article 1645 du Code civil et Monsieur [H] [Y] sera débouté de ses demandes de dommages et intérêts au titre des frais de gardiennage, des frais d’assurance et du préjudice de jouissance.
Il appartiendra en conséquence à Monsieur [H] [Y] de faire son affaire personnelle des frais de gardiennage, (dont il ne justifie en l’état que par des devis) étant observé que dans le cadre de son expertise, l’expert judiciaire indique expressément avoir autorisé Monsieur [H] [Y] à rapatrier son véhicule à son domicile afin de limiter les frais de stockage, ce qu’il n’a pas fait.
III)- Sur les demandes accessoires
Il convient de condamner Monsieur [G] [S], partie perdante aux dépens, qui comprendront les frais d’expertise judiciaire.
Monsieur [G] [S] sera également condamné à payer à Monsieur [H] [Y] une somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, justifiée en équité.
Monsieur [H] [Y] succombant en son action à l’encontre du Centre Contrôle Technique 71, est condamné à lui payer la somme de 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort,
Dit que le le véhicule de marque JEEP WRANGLER immatriculé [Immatriculation 3] était affecté d’un vice caché au moment de la vente conclue le 21 octobre 2019 entre Monsieur [H] [Y] et Monsieur [G] [S] ;
Prononce la résolution de la vente du 21 octobre 2019 ;
Dit que le véhicule de marque JEEP WRANGLER immatriculé [Immatriculation 3] doit être restitué par Monsieur [H] [Y] à Monsieur [G] [S], à charge pour Monsieur [G] [S] de le récupérer et d’assumer les frais de retour du véhicule;
Condamne Monsieur [G] [S] à payer à Monsieur [H] [Y] la somme de 18 500 Euros au titre du remboursement du prix d’achat du véhicule et dit que ce paiement devra intervenir dans les deux mois de la signification de la présente décision ;
Dit que Monsieur [G] [S] devra récupérer le véhicule dans le délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision;
Déboute Monsieur [H] [Y] de ses demande de dommages et intérêts ;
Déboute Monsieur [H] [Y] de ses demandes à l’encontre de la société Contrôle Technique 71 ;
Condamne Monsieur [G] [S] aux dépens, qui comprendront les frais d’expertise judiciaire;
Condamne Monsieur [G] [S] à payer à Monsieur [H] [Y] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
Condamne Monsieur [H] [Y] à payer au [Adresse 4] la somme de 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile;
Rejette toute autre demande plus ample ou contraire;
Rappelle que l’exécution provisoire est de droit, par application de l’article 514 du Code de procédure civile .
Le greffier Le président
copie exécutoire + ccc le :
à
Me Cecile BERTON
Me Eric ROZET
Me Solène THOMASSIN
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