Responsabilité solidaire en matière de bail commercial et cession de fonds de commerce

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Responsabilité solidaire en matière de bail commercial et cession de fonds de commerce

L’Essentiel : La SCI MENHIR a conclu un bail commercial avec Monsieur [V] [C] en décembre 2015, incluant une clause résolutoire. En mars 2022, un commandement de payer a été délivré à la société NEXT PERMIS pour des loyers impayés, entraînant la résiliation du bail. Suite à la liquidation judiciaire de NEXT PERMIS en mai 2023, la SCI MENHIR a assigné la SARL SLALOM FORMATION pour obtenir le paiement de 13 412,53 euros. Le tribunal a validé la garantie de SLALOM FORMATION et l’a condamnée à verser 1 831,20 euros pour réparations, tout en déboutant la SCI de sa demande de paiement supplémentaire.

Contexte du litige

La SCI MENHIR a conclu un bail commercial avec Monsieur [V] [C] le 18 décembre 2015, pour une durée de 9 ans, avec un loyer annuel de 6 600 euros. Ce bail incluait une clause résolutoire en cas de non-paiement. Le fonds de commerce a été cédé à la société SLALOM FORMATION en 2018, puis à la société NEXT PERMIS en 2020.

Commandement de payer et résiliation du bail

En mars 2022, la SCI MENHIR a délivré un commandement de payer à la société NEXT PERMIS pour un montant de 2 017,20 euros, menaçant de résilier le bail. Le juge des référés a constaté la résiliation du bail à compter du 8 novembre 2021 et a ordonné l’expulsion de la société NEXT PERMIS, tout en condamnant cette dernière à verser une provision à la SCI MENHIR.

Liquidation judiciaire de NEXT PERMIS

Le tribunal de commerce a ouvert une liquidation judiciaire simplifiée de la SASU NEXT PERMIS le 2 mai 2023, et celle-ci a été radiée du registre du commerce le 22 mai 2024. La SCI MENHIR s’est désistée de son action contre NEXT PERMIS.

Demande de la SCI MENHIR contre SLALOM FORMATION

La SCI MENHIR a assigné la SARL SLALOM FORMATION pour obtenir le paiement de 13 412,53 euros, en raison des loyers impayés et des dégradations locatives. La SARL SLALOM FORMATION a contesté la validité de l’acte de cession du bail, arguant qu’elle n’avait pas été informée des défauts de paiement.

Arguments des parties

La SCI MENHIR a soutenu que la SARL SLALOM FORMATION était garante solidaire des dettes de NEXT PERMIS jusqu’au 31 octobre 2023. En revanche, la SARL SLALOM FORMATION a affirmé qu’elle n’était pas responsable en raison de l’absence de formalités dans l’acte de cession et du défaut d’information sur les paiements.

Décision du tribunal

Le tribunal a constaté le désistement de la SCI MENHIR à l’égard de NEXT PERMIS et a déclaré la garantie de la SARL SLALOM FORMATION valable. Il a condamné la SARL SLALOM FORMATION à verser 1 831,20 euros à la SCI MENHIR pour les réparations locatives, tout en déboutant la SCI MENHIR de sa demande de paiement supplémentaire. La SARL SLALOM FORMATION a également été condamnée à payer 1 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de la clause de garantie solidaire dans le cadre d’une cession de bail commercial ?

La clause de garantie solidaire est un élément essentiel dans le cadre d’une cession de bail commercial. Selon l’article L.145-16-1 du Code de commerce, si la cession du bail commercial est accompagnée d’une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, ce dernier doit informer le cédant de tout défaut de paiement du locataire dans un délai d’un mois à compter de la date à laquelle la somme aurait dû être acquittée par celui-ci.

Cette disposition vise à protéger le cédant en lui permettant d’agir rapidement pour éviter une aggravation de la situation financière du locataire.

Il est important de noter que l’absence d’information ne constitue pas une cause de nullité de la garantie, sauf si le cédant peut prouver un préjudice résultant de cette omission. Dans le cas présent, la SARL SLALOM FORMATION, en tant que cédante, demeure garante solidaire de la SAS NEXT PERMIS pour le paiement du loyer et l’exécution de toutes les conditions du bail pendant trois ans à compter de la cession.

Quelles sont les conséquences de l’absence d’état des lieux lors de la location ?

L’absence d’état des lieux a des conséquences significatives sur les obligations du locataire. Selon l’article 1731 du Code civil, s’il n’a pas été fait d’état des lieux, le preneur est présumé avoir reçu les locaux en bon état de réparations locatives et doit les rendre tels, sauf preuve du contraire.

Dans cette affaire, aucun état des lieux n’a été établi à l’entrée, ce qui signifie que la SCI MENHIR bénéficie de la présomption de bon état contre la SARL SLALOM FORMATION. Cela implique que la SARL SLALOM FORMATION doit prouver que les locaux étaient en bon état à la sortie de la SAS NEXT PERMIS pour échapper à sa responsabilité.

Le procès-verbal d’état des lieux établi par un commissaire de justice a révélé de nombreuses dégradations, ce qui renforce la position de la SCI MENHIR dans sa demande de réparation.

Comment se détermine la responsabilité du cédant en cas de dégradations locatives ?

La responsabilité du cédant en matière de dégradations locatives est encadrée par les dispositions du bail commercial et par le Code civil. En vertu de l’article 1731 du Code civil, le preneur doit rendre les lieux dans l’état où il les a reçus, sauf preuve du contraire.

Dans le cas présent, la SCI MENHIR a produit un état des lieux de sortie qui a mis en évidence des dégradations. En l’absence d’état des lieux à l’entrée, la SARL SLALOM FORMATION est présumée responsable des dégradations constatées.

La SCI MENHIR a également produit des documents pour évaluer le montant des réparations, ce qui lui permet de justifier sa demande de paiement. La SARL SLALOM FORMATION, en tant que cédante, est donc tenue de garantir les réparations nécessaires, dans la limite de sa responsabilité contractuelle.

Quelles sont les implications du désistement de la SCI MENHIR à l’égard de la SAS NEXT PERMIS ?

Le désistement de la SCI MENHIR à l’égard de la SAS NEXT PERMIS a des implications juridiques importantes. En effet, le désistement d’instance et d’action, tel que constaté par le tribunal, signifie que la SCI MENHIR renonce à toute action contre la SAS NEXT PERMIS, qui n’a pas constitué avocat et n’a pas présenté de défense au fond.

Cela entraîne la fin de toute procédure à l’encontre de la SAS NEXT PERMIS, et le tribunal déclare le désistement parfait. La SCI MENHIR ne pourra donc plus revendiquer de créances ou de réparations à l’encontre de la SAS NEXT PERMIS, ce qui limite ses recours à l’égard de la SARL SLALOM FORMATION, en tant que garante solidaire.

Quels sont les critères pour l’octroi d’une indemnité au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles exposés dans le cadre du litige.

Pour accorder une indemnité sur ce fondement, le juge doit prendre en compte plusieurs critères, notamment la situation financière des parties, la nature du litige, et le comportement des parties durant la procédure.

Dans cette affaire, la SARL SLALOM FORMATION a été condamnée à payer 1 000 euros à la SCI MENHIR au titre de l’article 700, en raison de sa position de partie perdante. En revanche, la demande de la SARL SLALOM FORMATION pour obtenir une indemnité sur le même fondement a été rejetée, car elle n’a pas réussi à justifier ses frais.

N° Minute :

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TOURS

PREMIERE CHAMBRE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT RENDU LE 14 JANVIER 2025

N° RG 23/01964 – N° Portalis DBYF-W-B7H-IWCD

DEMANDERESSE

S.C.I. MENHIR
(RCS de TOURS n° 422 869 891), dont le siège social est sis [Adresse 3]
représentée par Maître Laurent LALOUM de la SCP REFERENS, avocats au barreau de BLOIS,

DÉFENDERESSES

S.A.S. NEXT PERMIS
(RCS de TOURS n° 890 843 923), dont le siège social est sis [Adresse 2]
Non représentée

S.A.R.L. SLALOM FORMATION
(RCS de TOURS n° 798 634 077), dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Armand JAGOT-LACOUSSIERE, avocat au barreau de TOURS,

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame B. CHEVALIER, Vice-Présidente, siégeant comme Juge Unique en application des articles 812 et suivants du Code de procédure civile,

Assistée de V. AUGIS, Greffier, lors des débats et du prononcé du jugement.

DÉBATS :

A l’audience publique du 12 Novembre 2024 avec indication que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 14 Janvier 2025.

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte authentique du 18 décembre 2015, la SCI MENHIR a donné à bail commercial à Monsieur [V] [C] un local à usage commercial situé [Adresse 2] à [Localité 4], pour une durée de 9 ans commençant à courir le 18 décembre 2015, moyennant un loyer annuel de 6 600 euros hors taxes et charges payables mensuellement d’avance au 1er de chaque mois outre une provision sur charge mensuelle de 180 euros. Ce bail contenait une clause résolutoire prévoyant une résolution de plein droit à défaut de paiement d’un seul terme à son échéance et après un commandement de payer resté infructueux.

Le fonds de commerce a été cédé avec ledit bail à la société SLALOM FORMATION le 23 avril 2018, puis à la société NEXT PERMIS le 31 octobre 2020, par actes sous seing privé.

Par acte d’huissier du 23 mars 2022, la SCI MENHIR a délivré à la société NEXT PERMIS un commandement de payer d’un montant en principal de 2 017,20 euros, précisant qu’à défaut de régularisation dans un délai d’un mois la résiliation du bail serait encourue, par application de la clause résolutoire, dont les termes ont été rappelés.

Saisi par la SCI MENHIR et par ordonnance du 23 août 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Tours a :
– Constaté la résiliation du bail conclu entre les parties à compter du 8 novembre 2021 (lire 24 avril 2022) ;
– Dit que la SASU NEXT PERMIS devra libérer les lieux dans le délai d’un mois, à compter de la signification de son ordonnance ;
– Dit que faute pour le locataire de le faire à l’expiration de ce délai, le bailleur sera autorisé à faire procéder à son expulsion, ainsi qu’à celle de tous occupants de son chef, au besoin avec l’assistance de la force publique ;
– Condamné la SASU NEXT PERMIS à payer à la SCI MENHIR une provision de 1 784 euros ;
– Débouté la SCI MENHIR de sa demande d’indemnité d’occupation ;
– Condamné la SASU NEXT PERMIS à payer à la SCI une somme de 800 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– Condamné la SASU NEXT PERMIS aux entiers dépens, qui comprendront le coût du commandement de payer du 23 mars 2022.

Par actes d’huissier signifiés les 28 mars et 5 mai 2023, la SCI MENHIR a assigné la SASU NEXT PERMIS et la SARL SLALOM FORMATION devant le tribunal judiciaire de Tours pour les voir condamner in solidum à lui payer la somme de 13 412,53 euros au titre des loyers impayés, de l’indemnité d’occupation et des dégradations locatives.

La SASU NEXT PERMIS n’a pas constitué avocat.

Par jugement du 2 mai 2023, le tribunal de commerce de Tours a prononcé l’ouverture de la liquidation judiciaire simplifiée de la SASU NEXT PERMIS et a désigné Maître [I] [J] en qualité de liquidateur.

Par jugement du 21 mai 2024, le tribunal de commerce de Tours a prononcé la clôture pour insuffisance d’actif de la société NEXT PERMIS qui a été radiée du registre du commerce et des sociétés le 22 mai 2024.

Compte tenu de ces éléments et par conclusions notifiées par voie électronique le 12 juin 2024, la SCI MENHIR s’est désistée de son instance et de son action à l’encontre de la Société NEXT PERMIS.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 8 novembre 2024 et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la SCI MENHIR demande au tribunal, au visa des articles 784 du code de procédure civile et L145-16-1 du code de commerce, de :
– ORDONNER le rabat de la clôture ou à défaut ORDONNER le rejet des conclusions de la société SLALOM FORMATION,
– CONDAMNER la société SLALOM FORMATION à lui verser la somme de 13 412,53 euros au titre de l’ensemble des sommes dues par la société NEXT PERMIS au titre de l’arriéré locatif, de l’indemnité d’occupation et des dégradations locatives,
– CONDAMNER la société SLALOM FORMATION à lui payer la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure Civile,
– CONDAMNER la société SLALOM FORMATION aux entiers dépens de la présente procédure,
– DEBOUTER la société NEXT PERMIS de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

Elle expose en substance que la société SLALOM FORMATION est garante solidaire jusqu’au 31 octobre 2023 (trois ans à compter de la cession intervenue le 31 octobre 2020) des dettes de son cessionnaire la société NEXT PERMIS ; qu’en sa qualité de cédante, celle-ci ne peut se prévaloir de ses propres carences et lacunes dans l’établissement de l’acte de cession ; qu’elle doit sa garantie même si les dispositions de l’article L.14-16-1 du Code de commerce n’ont pas été respectées dès lors que le bailleur s’est montré diligent dans ses démarches pour éviter une aggravation de la dette. Elle ajoute que la société NEXT PERMIS a quitté les lieux le 1er décembre 2022 de sorte que l’indemnité d’occupation est dûe à compter du premier jour du mois qui a suivi la résiliation du bail donc du 1er mai 2022 jusqu’au 31 décembre 2022.

Par ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 27 octobre 2024 et auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, la SARL SLALOM FORMATION demande au tribunal, au visa de l’article L.145-16-1 du code de commerce, de :
– DEBOUTER la Société SCI MENHIR de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
– CONDAMNER la Société SCI MENHIR à lui verser la somme de 3.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Elle fait valoir pour l’essentiel qu’il y a lieu de s’interroger sur la validité de l’acte de cession du 31 octobre 2020 qui n’a pas fait intervenir le bailleur à l’acte et qui n’a pas été régularisé par acte authentique ; qu’elle ne doit aucune garantie car en violation des dispositions de l’article L.145-16-1 du Code du commerce, elle n’a jamais été informée du défaut de paiement de la société NEXT PERMIS alors qu’une telle information lui aurait permis de réduire la créance et d’empêcher les dégradations du local commercial.

Le tribunal renvoie aux écritures des parties par application des dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile et de l’article 768 du Code de procédure civile pour un exposé plus amplement détaillé de leurs argumentaires, dont l’essentiel sera repris à l’occasion de l’examen des moyens et prétentions qui y sont articulés.

L’ordonnance du juge de la mise en état du 21 mai 2024 a fixé la clôture de l’instruction au 29 octobre 2024 et a fixé l’affaire à l’audience de plaidoirie du 12 novembre 2024.

A l’audience du 12 novembre 2024, le tribunal a ordonné le rabat de l’ordonnance de clôture rendue le 21 mai 2024 par mention au dossier et a fixé la nouvelle clôture de l’instruction au 12 novembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur le désistement de la SCI MENHIR à l’égard de la SAS NEXT PERMIS :

Il y a lieu de constater le désistement d’instance et d’action de la SCI MENHIR à l’égard de la SAS NEXT PERMIS tel que formulé dans ses conclusions d’incident notifiées par voie électronique le 12 juin 2024.

La SAS NEXT PERMIS qui n’a pas constitué avocat n’a présenté aucune défense au fond. Le désistement sera en conséquence déclaré parfait à son égard.

Sur la garantie de la SARL SLALOM FORMATION :

L’article 1103 du Code civil dispose que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

En l’espèce, le bail commercial signé le 18 décembre 2015 entre la SCI MENHIR et Monsieur [V] [C] (pièce n°1 des productions de la SCI MENHIR) a été transmis avec le fonds de commerce cédé par l’EIRL [V] [C] à la SARL SLALOM FORMATION le 23 avril 2018 (pièce n°2) puis par la SARL SLALOM FORMATION à la SAS NEXT PERMIS le 31 octobre 2020 (pièce n°3).

Le bail commercial du 18 décembre 2015 prévoit en page 9 et 10 un paragraphe “CESSION-SOUS LOCATION” ainsi rédigé :
“Le « Preneur » ne pourra dans aucun cas et sous aucun prétexte céder son droit au bail ou sous louer en tout ou en partie les locaux loués, sans le consentement préalable et par écrit du « Bailleur » sous peine de nullité des cessions ou sous-locations consenties au mépris de cette clause, et même de résiliation des présentes.

Toutefois, il pourra, sans avoir besoin de ce consentement, consentir une cession du bail à son successeur dans le commerce.

Le « Preneur » demeurera garant solidaire de son cessionnaire pour le paiement du loyer et l’exécution de toutes les conditions du bail, et cette obligation de garantie s’étendra à tous les cessionnaires, et ce pendant trois années à compter de la cession. Cependant, en vertu des dispositions de l’article L622-15 du Code de commerce en cas de cession du bail par le liquidateur ou l’administrateur cette clause est réputée non écrite.
Toute cession ou sous-location devra être réalisée par acte authentique, auquel le “Bailleur » sera appelé. Une copie exécutoire par extrait lui sera remise, sans frais pour lui, dans le mois de la signature de l’acte de cession.

L`article L145-16-1 du Code de commerce dispose que si la cession du bail commercial est accompagnée d`une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, ce dernier doit informer le cédant de tout défaut de paiement du locataire dans le délai d’un mois à compter de la date à laquelle la somme aurait dû étre acquittée par celui-ci.”

Le contrat de cession de fonds de commerce conclu le 23 avril 2018 rappelle en page 6 les termes du bail commercial des locaux d’exploitation du [Adresse 2], notamment son paragraphe “Cession / sous- location” en ces termes :

“Cession/ sous-location : cession libre à son successeur dans le commerce, pas de formalisme particulier, avec garantie solidaire du Cédant pour le paiement du loyer et l’exécution de toutes les conditions du bail par le Cessionnaire, pendant 3 ans à compter de la cession. Toute cession devant avoir lieu par acte authentique, auquel le Bailleur doit être appelé et une copie exécutoire devant lui être remise sans frais pour lui dans le mois dela signature. Toute sous-location est interdite.”

La SARL SLALOM FORMATION “s’interroge sur la validité de l’acte”de cession qu’elle a conclu le 31 octobre 2020 et dont elle ne demande pas la nullité. Elle reproche à l’acte de ne pas être intervenu par acte authentique et de ne pas avoir fait intervenir la SCI MENHIR.
Il doit cependant être relevé que la SCI MENHIR n’avait pas à intervenir à l’acte de cession en application des dispositions sus-visées, s’agissant d’une cession de bail accessoire à la cession du fonds de commerce.
La SARL SLALOM FORMATION ne saurait en outre se soustraire à sa garantie en opposant à la SCI MENHIR l’absence de formalisme d’un contrat auquel cette dernière n’était pas partie.

Il résulte des dispositions du bail commercial signé le 18 décembre 2015 et cédé à la SARL SLALOM FORMATION le 23 avril 2018 que celle-ci demeure garante solidaire de son cessionnaire la SAS NEXT PERMIS pour le paiement du loyer et l’exécution de toutes les conditions du bail pendant trois années à compter de la cession.

L’article L.145-16-1 du Code de commerce dispose que si la cession du bail commercial est accompagnée d’une clause de garantie du cédant au bénéfice du bailleur, ce dernier informe le cédant de tout défaut de paiement du locataire dans le délai d’un mois à compter de la date à laquelle la somme aurait dû être acquittée par celui-ci.

Il y a lieu de constater que les dispositions de l’article L145-16-1 du code de commerce ne sont pas assorties de sanctions particulières, et ne sont au demeurant pas de nature à faire obstacle à la mise en oeuvre de la garantie du cédant, sauf à ce dernier à caractériser un préjudice tiré de cette absence d’information.

En l’espèce, il ressort du relevé de compte annexé au commandement de payer signifié le 17 mars 2022 que le premier impayé date du 1er février 2022. La SCI MENHIR a fait délivrer un commandement de payer au cessionnaire dès le 23 mars 2022, a ensuite fait délivrer une assignation devant le juge des référés de Tours 16 juin 2022 et a obtenu que de ce juge qu’il constate l’acquisition de la clause résolutoire à compter du 24 avril 2022.

Au regard de ces éléments, aucune négligence fautive ne peut être retenue à l’encontre du bailleur qui a agi dans les meilleurs délais. La SARL SLALOM FORMATION ne justifie de l’existence d’aucun préjudice tiré de cette absence d’information.

Compte tenu de ces éléments, la SARL SLALOM FORMATION est donc tenue de garantir solidairement la société NEXT PERMIS au titre du paiement du loyer et de l’exécution de toutes les conditions du bail.

Sur les demandes en paiement formées par la SCI MENHIR :

La SCI MENHIR sollicite du tribunal la condamnation de la SARL SLALOM FORMATION à lui payer la somme de 13 412,53 euros au titre de l’arriéré locatif, de l’indemnité d’occupation et des dégradations locatives.

Il résulte de l’article 1731 du code civil que s’il n’a pas été fait d’état des lieux, le preneur est présumé les avoir reçus en bon état de réparations locatives et doit les rendre tels sauf la preuve contraire.

En l’espèce, aucun état des lieux n’a été établi à l’entrée. La SCI MENHIR bénéficie en conséquence de la présomption de l’article précédent contre la SARL SLALOM FORMATION.

Pour établir le mauvais état des locaux à la sortie de la SAS NEXT PERMIS le 1er décembre 2022, la SCI MENHIR verse aux débats le procès-verbal d’état des lieux établi le 3 janvier 2023 par commissaire de Justice (pièce n°6) dont il ressort de nombreuses dégradations et un défaut d’entretien des locaux.

Pour estimer le montant des réparations, elle produit un document établi par l’agence immobilière en charge de la gestion locative du bien intitulé “Indemnités locatives – détail des retenues sur dépôt de garantie” en lien avec cet état des lieux.

Le montant total des réparations est estimé à la somme de 3 033 euros. Il convient de déduire de cette somme le montant du dépôt de garantie qui s’élève à la somme de 1 201,80 euros selon le “‘Compte de départ” établi par l’agence immobilière en charge de la gestion locative le 19 janvier 2023 (pièce n°8).

En conséquence il y a lieu de faire droit à la demande de la SCI MENHIR en paiement de la somme de 1 831,20 euros au titre des travaux de réparation du local commercial.

Il y a lieu de rappeler que si le cédant doit garantir l’entière exécution du bail, sa garantie prend fin à l’expiration du bail en cours et ne s’étend pas aux dettes extra-contractuelles ni à la faute quasi-délictuelle du cessionnaire qui se maintient indûment dans les lieux.

Les obligations du garant ne s’étendent donc pas au paiement de l’indemnité d’occupation qui serait dûe après résiliation du bail.

Par ordonnance du 23 août 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Tours a constaté la résiliation du bail conclu entre les parties à compter du mois suivant la signification du commandement de payer soit le 24 avril 2022 et a condamné la SASU NEXT PERMIS à payer à la SCI MENHIR une provision de 1 784 euros au titre des loyers impayés dus jusqu’au 24 avril 2022 en écartant la clause d’indexation et après imputation des paiements effectués par le preneur à bail les 19 avril et 19 mai 2022.

La SCI MENHIR sollicite également la condamnation de la SARL SLALOM FORMATION à lui payer le total des sommes figurant au “compte de départ”.

Ce document fait état de façon erronée de loyers qui seraient dûs jusqu’au 1er septembre 2022 alors que le bail a pris fin le 24 avril 2022 et qu’il s’agit dès lors d’indemnités d’occupation à compter de cette date.

Le document mentionne ensuite des indemnités mensuelles d’occupation, des frais de procédure (honoraires de gestion locative), une somme de 800 euros pour “article 700 du 23/08/2023 au 23/08/2023″, des honoraires d’état des lieux, des provisions pour charges, frais de transmission avocat et pénalités de retard pour un montant total de 11 581,33 euros (après déduction du montant des réparations du local et du dépôt de garantie ).

La demande de paiement des frais relatifs à l’article 700 du code de procédure civile de la procédure de référé sera rejetée car ces frais sont étrangers à la garantie du cédant. En outre, le juge des référés a déjà condamné la SARL SLAOLOM FORMATION à payer à la SCI MENHIR la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile dans son ordonnance du 23 août 2022.

La demande au titre des honoraires et des frais de gestion locative sera également rejetée car ces frais ne sont pas à la charge du locataire et ne relèvent donc pas de la garantie du cédant.

Enfin, la garantie de la SARL SLALOM FORMATION prenant fin à l’expiration du bail, soit le 24 avril 2022, les indemnités d’occupation et les charges postérieures à la fin du bail ne relèvent pas non plus de sa garantie.

La SARL SLALOM FORMATION sera en conséquence condamnée à payer à la SCI MENHIR la somme de 1 831,20 euros au titre de sa garantie.

La SCI MENHIR sera déboutée du surplus de sa demande en paiement.

Sur les autres demandes :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de la SCI MENHIR les frais irrépétibles non compris dans les dépens qu’elle a été contrainte d’exposer dans le cadre du présent litige. En conséquence, la SARL SLALOM FORMATION sera condamnée à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Partie perdante, la SARL SLALOM FORMATION sera déboutée de sa demande d’indemnité formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle sera en outre condamnée aux dépens.

Il sera rappelé qu’en vertu de l’article 514 du code de procédure civile, la présente décision est assortie de plein droit de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS :

Le tribunal judiciaire, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire en premier ressort :

Constate le désistement d’instance et d’action de la SCI MENHIR à l’égard de la société NEXT PERMIS ;

Le déclare parfait ;

Condamne la SARL SLALOM FORMATION à payer à la SCI MENHIR la somme de MILLE-HUIT-CENT-TRENTE-ET-UN EUROS ET VINGT CENTIMES (1 831,20 euros) en sa qualité de garant solidaire de la société NEXT PERMIS pour le paiement du loyer et l’exécution de toutes les conditions du bail ;

Déboute la SCI MENHIR du surplus de sa demande en paiement formée à ce titre à l’encontre de la SARL SLALOM FORMATION ;

Condamne la SARL SLALOM FORMATION à payer à la SCI MENHIR la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Déboute la SARL SLALOM FORMATION de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SARL SLALOM FORMATION aux dépens ;

Rappelle que l’exécution provisoire est de droit.

Ainsi fait, jugé et rendu par mise à disposition au Greffe les jour, mois et an que dessus.

LE GREFFIER,

V. AUGIS
LA PRÉSIDENTE,

B. CHEVALIER


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