Responsabilité médicale et indemnisation : enjeux de la solidarité nationale face aux fautes professionnelles.

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Responsabilité médicale et indemnisation : enjeux de la solidarité nationale face aux fautes professionnelles.

L’Essentiel : Mme [G] [V] épouse [D] souffrait d’endométriose depuis 2008, avec des lésions résistantes aux traitements. En 2014, une chirurgie a été réalisée, mais elle a quitté l’hôpital avec des complications, notamment une vessie neurologique nécessitant des auto-sondages. En 2016, elle a saisi la Commission de conciliation et d’indemnisation (CCI) pour obtenir réparation, qui a reconnu une faute du professeur [X]. Malgré cela, l’assureur a refusé d’indemniser, entraînant une action en justice. Le tribunal a finalement rejeté ses demandes, affirmant que la responsabilité du professionnel de santé excluait l’indemnisation par la solidarité nationale.

Contexte médical de Mme [G] [V] épouse [D]

Mme [G] [V] épouse [D] souffrait d’endométriose depuis 2008, avec des lésions résistantes aux anti-inflammatoires. En 2013, une IRM a révélé une endométriose pelvienne profonde et des adhérences recto-sigmoïdiennes. Des examens ultérieurs ont confirmé la présence d’une endométriose ovarienne et d’une adénomyose utérine diffuse.

Interventions chirurgicales et complications

Le 11 juin 2014, Mme [D] a subi une chirurgie pour traiter son endométriose, mais a quitté l’hôpital avec des complications, notamment l’absence de mictions spontanées. En septembre 2015, un bilan a révélé une vessie neurologique nécessitant des auto-sondages quotidiens, attribués à la chirurgie.

Procédure d’indemnisation

Le 23 septembre 2016, Mme [D] a saisi la Commission de conciliation et d’indemnisation (CCI) pour obtenir une indemnisation. Après plusieurs expertises, la CCI a conclu à une faute du professeur [X] pour des actes chirurgicaux inappropriés, évaluant la perte de chance à 60%.

Refus d’indemnisation et substitution

L’assureur du professeur [X], BHIL, a refusé de donner suite à l’avis de la CCI. En 2020, Mme [D] a demandé la substitution d’un autre assureur, qui a procédé à une indemnisation partielle. Mme [D] a ensuite saisi le tribunal judiciaire de Paris pour obtenir une indemnisation supplémentaire.

Arguments des parties en litige

Mme [D] a demandé au tribunal de reconnaître la recevabilité de son action et de condamner l’assureur à verser des indemnités. L’assureur a contesté l’application de l’article L. 1142-15 du code de la santé publique dans le cadre d’une action contentieuse.

Décision du tribunal

Le tribunal a rejeté les demandes de Mme [D], affirmant que la responsabilité du professionnel de santé était engagée, ce qui excluait l’indemnisation au titre de la solidarité nationale. Les dépens ont été mis à la charge de Mme [D].

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article L. 1142-15 du code de la santé publique dans le cadre d’une action contentieuse ?

L’article L. 1142-15 du code de la santé publique stipule que, en cas de silence ou de refus explicite de l’assureur de faire une offre d’indemnisation, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux (ONIAM) peut se substituer à l’assureur.

Cet article précise que les dispositions relatives à l’offre d’indemnisation et au paiement des indemnités s’appliquent à l’ONIAM, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’État.

Il est important de noter que cette substitution est prévue dans le cadre d’un dispositif amiable de règlement des accidents médicaux, et non dans le cadre d’une action contentieuse.

Ainsi, dans le cadre d’une action en justice, la responsabilité du professionnel de santé doit être établie, et les demandes d’indemnisation ne peuvent pas être fondées sur l’article L. 1142-15.

En conséquence, le tribunal a jugé que les demandes de Madame [D] sur ce fondement devaient être rejetées, car elles ne s’appliquent pas dans un contexte contentieux.

Quelles sont les conditions d’indemnisation au titre de la solidarité nationale selon l’article L. 1142-1 du code de la santé publique ?

L’article L. 1142-1 du code de la santé publique établit les conditions dans lesquelles un patient peut bénéficier d’une indemnisation au titre de la solidarité nationale.

Il précise que, hors le cas où la responsabilité d’un professionnel de santé est engagée en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute.

De plus, lorsque la responsabilité d’un professionnel n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à réparation des préjudices du patient, à condition que ces préjudices soient directement imputables à des actes de soins et qu’ils aient des conséquences anormales au regard de l’état de santé du patient.

Les préjudices doivent également présenter un caractère de gravité, apprécié selon un barème spécifique fixé par décret, qui prend en compte le taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique.

Ainsi, pour bénéficier de l’indemnisation au titre de la solidarité nationale, il est nécessaire de prouver l’absence de responsabilité du professionnel de santé et que les préjudices subis sont directement liés à un acte médical.

Comment la responsabilité du professionnel de santé est-elle déterminée dans le cadre d’une action en justice ?

La responsabilité du professionnel de santé est déterminée selon les principes généraux de la responsabilité civile, notamment en matière de faute.

L’article L. 1142-1 du code de la santé publique précise que les professionnels de santé ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de soins qu’en cas de faute.

Cela signifie qu’il appartient à la victime de prouver que le professionnel a commis une faute dans l’exercice de ses fonctions, ce qui a entraîné un dommage.

Dans le cas présent, la Commission de conciliation et d’indemnisation (CCI) a retenu une faute médicale du docteur [X], consistant en l’ablation de structures anatomiques qui ont causé des préjudices à Madame [D].

Cette faute a été déterminée par l’expertise médicale qui a conclu à l’absence d’indication pour l’acte chirurgical réalisé.

Ainsi, la responsabilité du professionnel de santé a été engagée, ce qui a conduit à l’indemnisation des préjudices subis par la patiente.

Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal sur les demandes d’indemnisation de Madame [D] ?

La décision du tribunal a des conséquences significatives sur les demandes d’indemnisation de Madame [D].

En rejetant ses demandes, le tribunal a confirmé que les conditions d’indemnisation au titre de la solidarité nationale n’étaient pas réunies, car la responsabilité du professionnel de santé avait été établie.

Cela signifie que Madame [D] ne peut pas prétendre à une indemnisation au titre de la solidarité nationale, car les préjudices subis sont directement imputables à une faute médicale.

De plus, le tribunal a mis à la charge de Madame [D] les dépens de l’instance, ce qui implique qu’elle devra supporter les frais liés à la procédure judiciaire.

Cette décision souligne l’importance de la responsabilité professionnelle dans le cadre des actions en justice liées aux accidents médicaux et la nécessité pour les victimes de prouver la faute pour obtenir réparation.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

19ème contentieux médical

N° RG 23/03484

N° MINUTE :

Assignation du :
07 Mars 2023

DEBOUTE

PLL

JUGEMENT
rendu le 25 Novembre 2024
DEMANDERESSE

Madame [G] [V] épouse [D]
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représentée par Maître Anne GRAPPOTTE-BENETREAU, avocat associé de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #K0111 et par la SELARL SIAM CONSEIL, société d’avocats inscrite au Barreau de BREST, représentée par Maître Gildas JANVIER, avocat au barreau de BREST, avocat plaidant

DÉFENDERESSE

L’[6] ([6])
[Adresse 7]
[Adresse 1]
[Localité 4]

Représenté par la SCP UGGC Avocats agissant par Maître Sylvie WELSCH, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0261

Expéditions
exécutoires
délivrées le :

Décision du 25 Novembre 2024
19ème contentieux médical
RG 23/03484

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Monsieur Pascal LE LUONG, Premier Vice-Président
Monsieur Olivier NOËL, Vice-Président
Monsieur Maurice RICHARD, Magistrat honoraire

Assistés de Madame Erell GUILLOUËT, Greffière, lors des débats et au jour de la mise à disposition au greffe.

DEBATS

A l’audience du 23 Septembre 2024 présidée par Monsieur Pascal LE LUONG tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 25 Novembre 2024.

JUGEMENT

– Contradictoire
– En premier ressort
– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, les parties en ayant été avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Mme [G] [V] épouse [D] souffrait depuis 2008 de lésions d’endométriose résistantes aux anti-inflammatoires. Une IRM réalisée en 2013 a mis en évidence une endométriose pelvienne profonde avec des adhérences serrées recto-sigmoïdiennes. Le 18 mars 2013, une coloscopie basse et une écho-endoscopie colorectale permettent de conclure à une endométriose ovarienne gauche de 6cm avec présence d’adhérences péri ovariennes, attraction de la paroi digestive vers l’avant, et vraisemblablement, nodule d’endométriose digestive de 15mm sur 5mm du haut rectum.

Le 19 mars 2013, une échographie pelvienne conclut à une adénomyose utérine diffuse, à une endométriose profonde postérieure avec infiltration digestive de la jonction recto-sigmoïdienne et des adhérences ovariennes bilatérales avec endométriomes ovariens gauches.

Le 8 avril 2014, elle consulte le professeur [X] au sein de l’hôpital [5]. L’indication d’une exérèse sigmoïdo-rectale avec anastomose colorectale basse, coplectomie partielle avec exérèse des deux ligaments utéro sacrés, exérèse du paramètre gauche et de la lame sacro génito pubienne gauche avec annexectomie gauche est posée le 15 mai 2014. Le 11 juin 2014, une cure d’endométriose profonde par laparotomie est réalisée. La patiente regagne son domicile le 26 juin 2014 avec la réalisation d’un calendrier mictionnel et six auto-sondages par jour.

Le 23 octobre 2014, Mme [V] est adressée par le professeur [X] au docteur [S], urologue, en raison de l’absence de reprise des mictions spontanées liées à une dénervation pelvienne.

Le 4 septembre 2015, à l’occasion d’un bilan urodynamique, Mme [V] rapporte des douleurs persistantes depuis le mois de juin 2014 ainsi que des infections urinaires. Le 6 septembre 2016, il est conclu à une vessie neurologique nécessitant plusieurs auto-sondages quotidiens secondaires à la chirurgie d’endométriose réalisée le 11 juin 2014.

C’est dans ce contexte que Madame [D] a saisi, aux fins d’indemnisation, la Commission de conciliation et d’indemnisation (CCI) de la région Ile de France le 23 septembre 2016. Une expertise a été diligentée et confiée au docteur [N], chirurgien, qui a déposé son rapport le 18 mars 2018. Par avis du 24 mai 2018, la CCI d’Ile de France a mis hors de cause l’AP-HP et a ordonné une contre-expertise confiée au docteur [Y], chirurgien gynécologue. Ce dernier a déposé son rapport le 21 janvier 2019. Par avis du 14 mars 2019 la CCI a retenu que la responsabilité pour faute du praticien était engagée dès lors qu’il résultait du rapport d’expertise qu’il n’y avait aucune indication à pratiquer une exérèse du paramètre gauche et du nerf hypogastrique gauche qui est responsable de la symptomatologie urinaire et digestive de la patiente. La Commission a ainsi estimé que la faute du professeur [X] dans la réalisation de l’acte avait fait perdre à la patiente la possibilité d’éviter la réalisation d’une atteinte à son intégrité physique.

Compte tenu de l’état antérieur de Madame [D] et des risques liés à l’intervention, la Commission a évalué la perte de chance à 60% et a mis à la charge de l’assureur du praticien, l’indemnisation des préjudices dans ces proportions. Par un nouvel avis du 17 décembre 2022, la CCI, saisie par Monsieur [T] [D] agissant en son nom propre et en qualité de représentant légal de leurs fils mineurs [B] [D] et [I] [D], a fait droit à sa demande et a mis à la charge de BHIL, assureur du professeur [X] l’indemnisation des victimes indirectes, à hauteur de 60%.

Par courrier du 4 juillet 2019, la société BHIL, assureur du professeur [X], a refusé de donner suite à l’avis de la CCI.

Par courrier du 25 septembre 2020, Madame [D] et son époux ont, par le biais de leur conseil, sollicité la substitution de l’[6]. L’[6] s’est substitué à BHIL assureur du docteur [X] et a procédé en ses lieu et place à l’indemnisation des préjudices des consorts [D] et leur a versé les sommes suivantes :

– 6 729 euros en réparation du déficit fonctionnel temporaire et du préjudice sexuel de Madame [G] [D], à hauteur de 60 % au titre d’un protocole d’indemnisation transactionnel partiel signé le 14 juin 2022 ;

– 7 500 euros en réparation du préjudice sexuel de Monsieur [T] [D], époux, à hauteur de 60 %, au titre d’un protocole d’indemnisation transactionnel définitif signé le 14 juin 2022. Par la suite, PACIFICA a versé à Madame [D] la somme de 82.125 € au titre d’un contrat garantie accident de la vie.

Madame [D] a ainsi saisi l’[6] en substitution pour obtenir l’indemnisation des postes de préjudices non indemnisés par PACIFICA. L’[6] a, formulé une offre d’indemnisation de 18.700,00 € à Madame [D] au titre de l’incidence professionnelle et des frais d’assistance, que cette dernière a refusé.

Madame [D] a saisi le tribunal judiciaire de Paris, par voie
d’assignation délivrée à l’[6] le 7 mars 2023, pour obtenir la condamnation de l’[6] au paiement de la somme de 77 359,45 € en indemnisation des préjudices subis outre 3 000 € au titre des frais irrépétibles et aux entiers dépens.

Elle demande au tribunal de :

Déclarer l’action de Madame [D] à l’égard de l’[6] recevable et bien fondée ;
Condamner l’[6] à verser à Madame [D] la somme de 77 359,45€ en indemnisation de ses préjudices outre celle de 3 000€ au titre de l’article 700 du Code de procédure civile

Elle considère notamment que les dispositions de l’article L. 1142-15 du code de la santé publique s’appliquent dans le cadre d’une action contentieuse.

L’[6] estime que les dispositions de l’article L. 1142-15 du code de la santé publique – qui prévoient la substitution de l’[6] lorsque les professionnels de santé dont la responsabilité a été retenue par la commission de conciliation et d’indemnisation (CCI) n’ont pas fait d’offre d’indemnisation dans le cadre du dispositif amiable mis en place par les dispositions des articles 1142-2 et suivants du code de la santé publique issus de la loi n°2002-303 du 4 mars 2002 –, ne trouvent en aucun cas à s’appliquer dans le cadre d’une action contentieuse.

L’[6] demande au tribunal :

À titre principal,

De constater, dire et juger que l’article L. 1142-15 du code de la santé publique ne s’applique pas en matière contentieuse mais simplement dans le cadre du dispositif administratif de règlement amiable des accidents médicaux prévu aux articles L. 1142-15 du code de la santé
publique,

En conséquence,

De débouter Madame [D] de ses demandes en ce qu’elles seraient formulées à l’encontre de l’[6] sur le fondement de l’article L. 1142-15 du code de la santé publique,

En tout état de cause,

De constater, dire et juger que les conditions d’indemnisation au titre de la solidarité nationale sur le fondement de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique ne sont pas réunies et de la débouter de l’intégralité de ses demandes formulées à l’encontre de l’[6], et de la condamner aux dépens.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties quant à l’exposé détaillé de leurs prétentions et moyens.

Toutes les parties ayant constitué avocat, la décision sera contradictoire.

L’ordonnance de clôture était rendue le 4 mars 2024 et l’audience de plaidoiries se tenait le 23 septembre 2024. La décision était mise en délibéré au 25 novembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l’article L 1142-22 du code de la santé publique, l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales est un établissement public à caractère administratif de l’Etat, placé sous la tutelle du ministre chargé de la santé. Il est chargé de l’indemnisation au titre de la solidarité nationale, dans les conditions définies au II de l’article L. 1142-1, à l’article L. 1142-1-1 et à l’article L. 1142-17, des dommages occasionnés par la survenue d’un accident médical, d’une affection iatrogène ou d’une infection nosocomiale ainsi que des indemnisations qui lui incombent, le cas échéant, en application des articles L. 1142-15, L. 1142-18, L. 1142-24-7 et L. 1142-24-16.

Aux termes de l’article L 1142-1 du même code, I. – Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute.

Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère.

II. – Lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d’un producteur de produits n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu’ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l’évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique, de la durée de l’arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.

Ouvre droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale un taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique supérieur à un pourcentage d’un barème spécifique fixé par décret ; ce pourcentage, au plus égal à 25 %, est déterminé par ledit décret.

Et, aux termes de l’article L 1142-15 du même code, en cas de silence ou de refus explicite de la part de l’assureur de faire une offre, ou lorsque le responsable des dommages n’est pas assuré ou la couverture d’assurance prévue à l’article L. 1142-2 est épuisée ou expirée, l’office institué à l’article L. 1142-22 est substitué à l’assureur.

Dans ce cas, les dispositions de l’article L. 1142-14, relatives notamment à l’offre d’indemnisation et au paiement des indemnités, s’appliquent à l’office, selon des modalités déterminées par décret en Conseil d’Etat.

L’acceptation de l’offre de l’office vaut transaction au sens de l’article 2044 du code civil. La transaction est portée à la connaissance du responsable et, le cas échéant, de son assureur ou du fonds institué à l’article L. 426-1 du code des assurances.

L’office est subrogé, à concurrence des sommes versées, dans les droits de la victime contre la personne responsable du dommage ou, le cas échéant, son assureur ou le fonds institué à l’article L. 426-1 du même code. Il peut en outre obtenir remboursement des frais d’expertise.

En cas de silence ou de refus explicite de la part de l’assureur de faire une offre, ou lorsque le responsable des dommages n’est pas assuré, le juge, saisi dans le cadre de la subrogation, condamne, le cas échéant, l’assureur ou le responsable à verser à l’office une somme au plus égale à 15 % de l’indemnité qu’il alloue.

Lorsque l’office transige avec la victime, ou ses ayants droit, en application du présent article, cette transaction est opposable à l’assureur ou, le cas échéant, au fonds institué au même article L. 426-1 du code des assurances ou au responsable des dommages sauf le droit pour ceux-ci de contester devant le juge le principe de la responsabilité ou le montant des sommes réclamées. Quelle que soit la décision du juge, le montant des indemnités allouées à la victime lui reste acquis.

Il résulte de ces dispositions que la victime conserve le droit d’agir en justice devant la juridiction compétente contre un établissement public de santé, si elle estime que sa responsabilité est engagée, ou contre l'[6] qui s’est substitué à l’assureur de l’établissement de santé, si elle estime que son dommage est indemnisable au titre de la solidarité nationale, à défaut d’acceptation de l’offre par la victime.

En tout état de cause, la faculté de substitution de l’[6] à l’assureur,
prévue à l’article L. 1142-15, relève de la procédure spécifique de règlement amiable et ne saurait étendre le champ de la solidarité nationale au-delà des dispositions fixées par l’article L. 1142-1, II sus-mentionné.

En conséquence, les dommages qui engagent la responsabilité d’un professionnel ou établissement de santé ne sauraient être indemnisés par la solidarité nationale, mais uniquement par le professionnel ou l’établissement responsable, les dispositions de l’article L. 1142-15 ne s’appliquant pas dans le cadre d’un contentieux où le juge est à même de statuer sur la responsabilité des professionnels de santé dont il est rappelé qu’elle est exclusive de toute indemnisation au titre de la solidarité nationale. Ainsi, la demande de condamnation de l’[6] sur le fondement de l’article L. 1142-15 du code de la santé publique sera rejetée.

En outre, il convient de rappeler que pour bénéficier d’une indemnisation au titre de la solidarité nationale, il doit être justifié, de l’absence de responsabilité du professionnel de santé, et de ce que les préjudices subis sont directement imputables à un acte de prévention, de diagnostic ou de soins, que ces préjudices ont eu pour le demandeur des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l’évolution prévisible de celui-ci, et qu’ils présentent un caractère de gravité, fixé par décret apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles mesurées en tenant compte notamment du taux d’atteinte permanente à l’intégrité physique ou psychique, de la durée de l’arrêt temporaire des activités professionnelles ou de celle du déficit fonctionnel temporaire.

Or, il est incontestable que la CCI et l’expert ont, non seulement, retenu un défaut d’information mais également une faute médicale de la part du docteur [X] consistant en l’ablation par ce dernier, chez Madame [D] de la lame sacro génito pubienne et du nerf hypogastrique gauche qui est responsable de la symptomatologie urinaire présentée par cette dernière.

Il convient, en conséquence, de débouter Madame [D] de l’intégralité de ses demandes.

Les dépens seront mis à la charge de Madame [D], partie succombante.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire mis à disposition au greffe et rendu en premier ressort,

REJETTE les demandes de Madame [G] [V] épouse [D] ;

LAISSE les dépens de l’instance à la charge de Madame [G] [V] épouse [D].

Fait et jugé à Paris le 25 Novembre 2024.

La Greffière Le Président

Erell Guillouet Pascal Le Luong


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