Responsabilité contractuelle et restitution des dépôts dans le cadre d’un bail professionnel

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Responsabilité contractuelle et restitution des dépôts dans le cadre d’un bail professionnel

L’Essentiel : Le 16 avril 2012, un bail professionnel a été signé entre Monsieur [R] [K], son épouse, et Madame [L] [E] pour des locaux destinés à un « lieu d’expression corporelle ». D’une durée de 6 ans, le loyer annuel s’élevait à 26.400 euros. En raison d’arriérés, des commandements de payer ont été signifiés, entraînant des saisies-attributions. Monsieur [N] a contesté ces saisies, mais le tribunal a rejeté ses demandes. Les époux [K] ont ensuite assigné les défendeurs pour obtenir des réparations. Le tribunal a partiellement rejeté les demandes reconventionnelles, ordonnant la restitution d’un trop-perçu de 8.573,81 euros.

Constitution du bail professionnel

Par acte authentique signé le 16 avril 2012, Monsieur [R] [K] et son épouse, Madame [S] [D], ont conclu un bail professionnel avec Madame [L] [E] pour des locaux à usage de « lieu d’expression corporelle, notamment lieu de danse ». Le bail, d’une durée de 6 ans, stipule un loyer annuel de 26.400 euros, avec un dépôt de garantie de 6.600 euros.

Commandements de payer et arriérés locatifs

En raison d’arriérés locatifs, des commandements de payer ont été signifiés à Madame [E] et à la S.A.R.L. [L] LES SALONS, respectivement pour des montants de 7.704,73 euros et 18.100,67 euros. Un état des lieux de sortie a été réalisé le 2 juillet 2020, suivi de saisies-attributions sur les comptes bancaires de la S.A.R.L. et de Monsieur [N].

Procédure judiciaire et jugement

Monsieur [N] a contesté les saisies-attributions devant le tribunal, mais le juge a rejeté ses demandes et a condamné les défendeurs à verser 200 euros aux bailleurs. Par la suite, les époux [K] ont assigné les défendeurs pour obtenir des réparations et des indemnités.

Demandes reconventionnelles des défendeurs

Madame [E] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS ont demandé le remboursement du dépôt de garantie et des indemnités pour exécution déloyale du contrat de bail. Elles ont également contesté les demandes des bailleurs concernant les frais de remise en état des locaux.

Évaluation des dommages et décisions du tribunal

Le tribunal a examiné les demandes de remise en état et a constaté que les bailleurs n’avaient pas prouvé le préjudice allégué. Les demandes reconventionnelles des défendeurs ont également été partiellement rejetées, bien que le tribunal ait ordonné la restitution d’un trop-perçu de 8.573,81 euros aux défendeurs.

Condamnations et frais de justice

Monsieur [K] et Madame [D] ont été condamnés aux dépens et à verser des sommes à Monsieur [N] et à Madame [E] ainsi qu’à la S.A.R.L. [L] LES SALONS au titre des frais de justice. Le tribunal a également décidé de ne pas écarter l’exécution provisoire de la décision.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure à suivre pour contester une créance dans le cadre d’une liquidation judiciaire ?

La contestation d’une créance dans le cadre d’une liquidation judiciaire est régie par les dispositions du Code de commerce, notamment l’article L. 622-24. Cet article stipule que :

« Le créancier dont la créance a été déclarée peut, dans un délai de deux mois à compter de la publication de l’état des créances, contester l’admission de sa créance. »

Il est important de noter que la contestation doit être faite devant le juge commissaire, qui est compétent pour statuer sur les litiges relatifs aux créances déclarées.

En l’espèce, la Caisse de Crédit Mutuel a contesté l’admission de la créance de Mme [B] en se fondant sur des éléments de preuve, notamment l’absence de documents justifiant la créance.

La procédure de contestation doit être diligentée dans les délais impartis, et le créancier doit fournir des éléments probants pour soutenir sa demande.

Quels sont les effets de la décision du juge commissaire sur les créances déclarées ?

La décision du juge commissaire sur l’admission ou le rejet des créances a des effets significatifs sur la procédure de liquidation judiciaire. Selon l’article L. 622-26 du Code de commerce :

« L’état des créances est arrêté par le juge commissaire. Les créances qui n’ont pas été déclarées dans le délai prévu ne peuvent plus être admises. »

Cela signifie que les créances qui ne sont pas déclarées dans le délai imparti ne peuvent pas être prises en compte dans le cadre de la liquidation.

Dans le cas présent, le juge commissaire a admis la créance de Mme [B] initialement, mais a ensuite rejeté cette créance suite à la contestation de la Caisse de Crédit Mutuel.

Cette décision a pour effet de rendre la créance de Mme [B] inopposable dans le cadre de la liquidation, ce qui limite ses droits en tant que créancière.

Quelles sont les conditions de recevabilité d’un appel en matière de liquidation judiciaire ?

Les conditions de recevabilité d’un appel en matière de liquidation judiciaire sont régies par le Code de procédure civile, notamment l’article 905-2. Cet article précise que :

« Le président de chambre a compétence pour statuer sur la fin de non-recevoir tirée de l’irrecevabilité de l’appel, sur la caducité de celui-ci ou sur l’irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure. »

Il est essentiel que l’appel soit interjeté dans les délais légaux et que les motifs d’appel soient clairement énoncés.

Dans le cas de Mme [B], son appel a été déclaré irrecevable par la Caisse de Crédit Mutuel, qui a soutenu que les conditions de recevabilité n’étaient pas remplies.

Le juge doit examiner si l’appel a été formé dans les délais et si les conditions de fond sont respectées pour qu’il soit recevable.

Quels sont les recours possibles en cas de rejet d’une créance dans une procédure de liquidation judiciaire ?

En cas de rejet d’une créance dans une procédure de liquidation judiciaire, le créancier a plusieurs recours possibles. Selon l’article L. 622-26 du Code de commerce :

« Le créancier dont la créance a été rejetée peut, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision, saisir le tribunal de grande instance. »

Ce recours doit être exercé dans le délai imparti et doit être motivé par des éléments nouveaux ou des erreurs dans l’appréciation des faits par le juge commissaire.

Dans le cas de Mme [B], elle a interjeté appel de la décision de rejet de sa créance, ce qui est un recours prévu par la loi.

Il est crucial que le créancier présente des arguments solides et des preuves pour soutenir sa demande lors de l’appel, afin d’augmenter ses chances de succès.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] C.C.C. + C.C.C.F.E.
délivrées le :
à Me CLEMENCEAU (C1401)
Me NATAF (C1425)
C.C.C.
délivrée le :
à Me BOUVET (156)

18° chambre
2ème section

N° RG 22/09662
N° Portalis 352J-W-B7G-CXLRS

N° MINUTE : 2

Assignation du :
06 Juillet 2022

JUGEMENT
rendu le 08 Janvier 2025
DEMANDEURS

Monsieur [R] [K]
[Adresse 1]
[Localité 6]

Madame [S] [D] épouse [K]
[Adresse 1]
[Localité 6]

représentés par Me Pauline BOUVET, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, avocat plaidant, vestiaire #156

DÉFENDEURS

Monsieur [X] [N]
[Adresse 2]
[Localité 5]

représenté par Maître Simon CLEMENCEAU de l’AARPI SIANO AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C1401

Décision du 08 Janvier 2025
18° chambre 2ème section
N° RG 22/09662 – N° Portalis 352J-W-B7G-CXLRS

Madame [L] [E]
chez Madame [J] [F]
[Adresse 4]
[Localité 5]

S.A.R.L. [L] LES SALONS (RCS de PARIS n°753 717 222)
[Adresse 3]
[Localité 7]

représentées par Me Estelle NATAF, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #C1425

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Par application des articles R.212-9 du code de l’organisation judiciaire et 812 du code de procédure civile, l’affaire a été attribuée au juge unique.

Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.

Maïa ESCRIVE, Vice-présidente, statuant en juge unique, assistée de Paulin MAGIS, Greffier.

DÉBATS

A l’audience du 13 Novembre 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 08 Janvier 2025.

JUGEMENT

Rendu publiquement
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte authentique signé le 16 avril 2012, Monsieur [R] [K] et son épouse, Madame [S] [D], ont consenti un bail professionnel à Madame [L] [E] portant sur des locaux situés [Adresse 3] à [Localité 7] à usage exclusif de “lieu d’expression corporelle, notamment lieu de danse” sous l’enseigne [L] LES SALONS ECOLE DE DANSE.

Le bail a été conclu pour une durée de 6 années à compter du 16 avril 2012 et moyennant le versement d’un loyer annuel de 26.400 euros, payable mensuellement le 1er de chaque mois, outre une provision sur charges mensuelle de 200 euros.

Un dépôt de garantie de 6.600 euros a été remis aux bailleurs.

Monsieur [X] [N], époux de Madame [E] (le divorce ayant été depuis prononcé), est intervenu à l’acte en qualité de caution personnelle et solidaire du paiement des loyers, charges, accessoires, intérêts, dommages et intérêts, indemnités dues au titre de la clause pénale, indemnité d’occupation et de toutes les sommes dues en cas de condamnation judiciaire.

En outre, les bailleurs ont bénéficié d’une caution bancaire de 6.600 euros donnée par la BRED BANQUE POPULAIRE.

Par courrier recommandé du 10 décembre 2012, Madame [E] a indiqué aux bailleurs sa volonté d’activer la clause de substitution du bail au profit de la S.A.R.L. [L] LES SALONS.

Par acte extrajudiciaire en date du 16 janvier 2020, Monsieur [K] et Madame [D] ont signifié à Madame [E] épouse [N] un commandement de payer visant la clause résolutoire portant sur la somme de 7.704,73 euros au titre d’un arriéré locatif arrêté au 10 janvier 2020, outre le coût de l’acte.

Par acte extrajudiciaire en date du 23 juin 2020, Monsieur [K] et Madame [D] ont signifié à la S.A.R.L. [L] LES SALONS un commandement de payer visant la clause résolutoire portant sur la somme de 18.100,67 euros au titre d’un arriéré locatif arrêté au 16 juin 2020, outre le coût de l’acte.

L’état des lieux de sortie a été réalisé de manière contradictoire le 2 juillet 2020.

Par acte extrajudiciaire en date du 2 octobre 2020, Monsieur [K] et Madame [D] ont procédé à une saisie-attribution sur le compte bancaire de la S.A.R.L. [L] LES SALONS ouvert auprès de la BRED BANQUE POPULAIRE à hauteur de 770,54 euros.

Par acte extrajudiciaire en date du 2 octobre 2020, Monsieur [K] et Madame [D] ont procédé à une saisie-attribution sur le compte bancaire de Monsieur [N] ouvert auprès de la BRED BANQUE POPULAIRE à hauteur de 18.100,67 euros.

Monsieur [N] a fait assigner Monsieur [K] et Madame [D] devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bobigny afin de contester la saisie-attribution pratiquée sur son compte. Madame [E] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS sont intervenues volontairement à cette procédure.

Par jugement en date du 7 octobre 2021, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Bobigny a rejeté les demande de nullité et de mainlevée des saisies-attribution, rejeté la demande reconventionnelle de condamnation formée par Monsieur [K] et Madame [D] et condamné in solidum Monsieur [N], Madame [E] et la société [L] LES SALONS à verser à Monsieur [K] et Madame [D] la somme de 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens.

Par actes délivrés le 6 juillet 2022, Monsieur [R] [K] et Madame [S] [D] épouse [K] ont fait assigner Monsieur [X] [N], Madame [L] [E] divorcée [N] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS devant ce tribunal aux fins de :

Vu le jugement du juge de l’exécution de Bobigny du 7 octobre 2021,

– Condamner solidairement les défendeurs à leur verser la somme de 7.583,40 euros au titre des frais de remise en état du local professionnel,
– Les condamner en outre à leur verser la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile incluant les frais de constat,
– Dire que cette condamnation sera conjointe et solidaire entre Monsieur [X] [N], Madame [L] [E] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS,
– Condamner solidairement les défendeurs aux dépens.

Aux termes de leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 3 avril 2023, Madame [L] [E] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS demandent au tribunal de :

A titre principal,

– Débouter les consorts [K] de leur demande de condamnation en paiement à l’encontre des défendeurs au titre du devis de réparation des locaux ;

A titre reconventionnel,

– Condamner les consorts [K] à rembourser à la S.A.R.L. [L] LES SALONS le dépôt de garantie de 6.600 euros avec intérêts légaux à compter du 2 septembre 2020 ;
– Soit après compensation des créances entre les parties et compte tenu des versements déjà opérés par saisie au profit des époux [K], condamner les consorts [K] à leur verser la somme de 9.302 euros, sous réserve des intérêts légaux à courir sur le dépôt de garantie jusqu’au parfait paiement ;
– Dire et juger que cette somme portera intérêt légaux capitalisés à compter du jugement à intervenir ;
– Condamner les consorts [K] à verser à Madame [E] et à la S.A.R.L. [L] LES SALONS une indemnité de 10.000 euros en application de l’article 1104 du code civil, pour exécution déloyale du contrat de bail professionnel ;
– Condamner les consorts [K] à payer à Madame [E] et à la S.A.R.L. [L] LES SALONS une indemnité de 5.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner les consorts [K] aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 4 avril 2023, Monsieur [X] [N] demande au tribunal de :

– Débouter Monsieur [R] [K] et Madame [S] [D] de leur demande de condamnation en paiement à l’encontre des défendeurs au titre du devis de réparation des locaux;
– Condamner Monsieur [R] [K] et Madame [S] [D] à verser à Monsieur [N] la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

* * *

Ainsi que le permet l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé aux dernières conclusions des parties pour l’exposé de leurs prétentions et de leurs moyens.

La clôture de la mise en état a été prononcée le 2 octobre 2023.

L’affaire a été appelée pour plaidoiries à l’audience tenue en juge unique du 13 novembre 2024 et mise en délibéré à la date de ce jour.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande au titre des frais de remise en état du local professionnel

A l’appui de leur demande, Monsieur [K] et Madame [D] soutiennent que lors de la conclusion du bail, les locaux étaient en parfait état et qu’il ressort de l’état des lieux de sortie qu’ils ont été restitués avec des trous non rebouchés, des spots manquants ou ne fonctionnant pas dans la salle de bains, des trous non rebouchés et le faux plafond partiellement effondré dans la cuisine. Ils communiquent un devis en date du 4 août 2020 de la société LMJC CONSTRUCTIONS d’un montant de 6.894 euros hors taxes, soit 7.583,40 euros TTC. Ils font valoir qu’aux termes des clauses du bail, le locataire est responsable des dégradations des lieux loués et des dégâts des eaux, relevant que le document transmis par la locataire fait état d’une déclaration de sinistre en 2014 et d’une clôture du dossier par l’assureur sans versement d’une indemnité.

Madame [E] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS concluent au rejet de cette demande faisant valoir qu’il ressort de l’état des lieux d’entrée comparé à l’état des lieux de sortie que les locaux ont été rendus en parfait état d’usage, voire dans un état meilleur, d’importants travaux d’embellissement et d’entretien ayant été réalisés notamment en 2018 (vitrification du parquet, peinture des murs). Elles relèvent que l’effondrement du plafond dans la cuisine résulte d’un dégât des eaux intervenu au tout début de la prise à bail en mai / juin 2014, signalé au bailleur et déclaré à l’assurance ; que le bailleur dispose tant de la déclaration de sinistre que des références du dossier auprès de l’assureur. Elles ajoutent que ce n’est que très tardivement, et bien après les deux mois prévus à l’article 5 du bail, que les bailleurs ont réclamé une somme au titre des prétendus travaux de remise en état du local, dont ils ne justifient ni de leur nécessité pour relouer, ni de leur réalisation. Elles considèrent que les bailleurs sont de mauvaise foi, et que le devis communiqué est particulièrement élevé et manifestement complaisant.

Monsieur [N] conclut également au rejet de la demande au motif que les bailleurs ne justifient ni de leur intérêt à agir ni de la responsabilité du locataire ou de Madame [E].

L’article 1730 du code civil énonce que s’il a été fait un état des lieux entre le bailleur et le preneur, celui-ci doit rendre la chose telle qu’il l’a reçue, suivant cet état, excepté ce qui a péri ou a été dégradé par vétusté ou force majeure. Selon l’article 1732 du code civil, le preneur répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu’il ne prouve qu’elles ont eu lieu sans sa faute.

En application de l’article 1755 du code civil, aucune des réparations réputées locatives n’est à la charge des locataires quand elles ne sont occasionnées que par vétusté ou force majeure.

En vertu de l’article 1147 dudit code dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 et applicable en l’espèce, s’agissant d’un bail conclu le 16 avril 2012, le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part.

Selon l’article 1149 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance précitée, et le principe de la réparation intégrale du préjudice, les dommages et intérêts dus au créancier sont de la perte qu’il a faite et du gain dont il a été privé sans qu’il en résulte pour lui ni perte ni profit.
Décision du 08 Janvier 2025
18° chambre 2ème section
N° RG 22/09662 – N° Portalis 352J-W-B7G-CXLRS

Il résulte de la combinaison de ces textes et principe que le locataire qui restitue les locaux dans un état non conforme à ses obligations découlant de la loi ou du contrat commet un manquement contractuel et doit réparer le préjudice éventuellement subi de ce chef par le bailleur. Ce préjudice peut comprendre le coût de la remise en état des locaux, sans que son indemnisation ne soit subordonnée à l’exécution des réparations ou à l’engagement effectif de dépenses.

Tenu d’évaluer le préjudice à la date à laquelle il statue, le tribunal doit prendre en compte, lorsqu’elles sont invoquées, les circonstances postérieures à la libération des locaux, telles la relocation.

Il est constant qu’il appartient à celui qui sollicite l’indemnisation d’un dommage de prouver tant la faute qui en est à l’origine, que ledit dommage et le lien de causalité entre ceux-ci.

Or, en l’espèce, il ressort d’une part de l’état des lieux d’entrée, que des trous de chevilles étaient déjà présents et que des spots ne fonctionnaient pas. Par ailleurs, il n’est pas contesté que l’effondrement partiel du faux plafond dans la cuisine est dû à un dégât des eaux déclaré à son assureur par la locataire. Or, compte tenu de sa localisation, il peut difficilement être lié à une négligence de la preneuse. En tout état de cause, il résulte de la lecture de l’assignation délivrée par les bailleurs qu’“Ils ont reloué les locaux en l’état (…)” (page 5), donc sans effectuer de travaux et n’allèguent pas d’une diminution du loyer qui aurait été consentie en considération de l’état des locaux.

Dès lors, Monsieur [K] et Madame [D] n’apportent pas la preuve du préjudice allégué. Leur demande au titre du coût des travaux de remise en état sera donc rejetée.

Sur les demandes reconventionnelles de Madame [E] et de la S.A.R.L. [L] LES SALONS

– Sur la demande de restitution d’un trop perçu

La S.A.R.L. [L] LES SALONS et Madame [E] demandent la condamnation des époux [K] à leur restituer la somme de 9.302 euros. La S.A.R.L. [L] LES SALONS reconnaît être redevable de 7 mois de loyers (24.477,09 euros) et de 268 euros au titre des charges de 2020 calculées au prorata temporis, soit 24.754,09 euros. Elles exposent que doivent venir en déduction la régularisation de charges de 4.880,96 euros, le coût du miroir laissé sur place à la demande des bailleurs, soit 4.542,24 euros ainsi que les sommes versées ou saisies, soit 1.500 + 18.100 = 19.600 euros, et enfin le dépôt de garantie de 6.600 euros et les intérêts ayant couru faute de restitution depuis le 2 septembre 2020 et jusqu’à la fin du 1er semestre 2023) (652,75 euros)

Monsieur [K] et Madame [D] ne répondent pas à cette demande.

Il ressort du décompte communiqué que le compte de la locataire présente un solde débiteur de 18.100,67 euros au 16 juin 2020, échéance de juin 2020 incluse et que le solde était débiteur avant le mois de décembre 2019, sans que la locataire ne conteste spécifiquement ce point ni le quantum.

Le décompte n’est critiqué par la locataire qu’au regard des provisions sur charges appelées en 2020, qu’elle demande de calculer sur la base des régularisations effectuées pour les années antérieures puisque les provisions sur charges appelées sont supérieures aux charges régularisées. Cette demande est justifiée, les charges réelles s’élevant en moyenne entre 2013 (1ère année complète) et 2019 à 602 euros par an alors qu’une provision sur charges mensuelle de 135 euros était appelée entre janvier et juin 2020 et que les bailleurs ne communiquent pas la régularisation des charges pour cette année 2020 alors qu’elle est nécessairement intervenue à ce jour. Il convient donc de déduire du décompte les provisions appelées en 2020 pour un montant de 135 € x 6 = 810 euros et de fixer les charges pour l’année 2020 à 602/12 x 6 = 301 euros.

Il est relevé que le décompte prend en compte les régularisations de charges des années 2012 à 2019 selon les montants indiqués dans le tableau communiqué en pièce 22 par le gestionnaire de biens des bailleurs de sorte qu’il n’y a pas lieu de les déduire à nouveau, à l’exception de l’année 2016 où il existe un différentiel non expliqué (crédit de 394,27 euros sur le décompte alors qu’il est de 788,54 euros dans le tableau).

S’agissant du miroir laissé sur place, la demande de paiement de son prix ne peut prospérer dès lors que le bail conclu entre les parties prévoit que “tous travaux, embellissements, améliorations, installations et décors qui seraient faits dans les lieux mis à disposition par le “Preneur”, même avec autorisation du “Bailleur”, deviendront en fin des présentes, de quelque manière et à quelque époque qu’elle arrive, la propriété du “Bailleur” sans aucune indemnité. Pour les travaux qu’il aura autorisés le “Bailleur” ne pourra exiger le rétablissement des lieux loués dans leur état primitif.
Pour les travaux effectués sans son autorisation, le “Bailleur” aura toujours le droit d’exiger le rétablissement des lieux dans leur état primitif, aux frais exclusifs du “Preneur””. En réponse à un message de Madame [E] demandant si le nouveau locataire était intéressé par les barres de danse, Madame [Y] [K] a répondu le 25 juin (2020) : “après réflexion avec Madame [K], merci de laisser les grands miroirs”. Pour autant, au regard des clauses liant les parties, aucune indemnité n’est due en contrepartie.

Il ressort de ce qui précède qu’à la date de libération des locaux, la S.A.R.L. [L] LES SALONS était redevable de la somme de :
18.100,67 – 810 + 301 + 394,27 – 788,54 = 17.197,40 euros.

Aux termes de l’article 5 du bail professionnel conclu entre les parties, le dépôt de garantie “sera restitué dans un délai maximal de deux mois à compter du départ du “Preneur” déduction faite, le cas échéant des sommes restant dues au “Bailleur” et des sommes dont celui-ci pourrait être tenu aux lieu et place du “Preneur”, ainsi que des sommes nécessaires à la remise en état des lieux, le tout sous réserve qu’elles soient dûment justifiées”.

Dès lors, il était justifié que les bailleurs conservent le dépôt de garantie de 6.600 euros qui n’a pas lieu d’être restitué et doit venir en déduction du solde débiteur. La demande de ce chef ainsi que celle au titre des intérêts seront rejetées.

En outre, il convient de déduire du solde les sommes saisies, soit 770,54 euros le 28 septembre 2020 et 18.100,67 euros le 8 novembre 2020, et le règlement de 300 euros intervenu le 28 septembre 2020.

Il résulte de ce qui précède que les comptes entre les parties sont les suivants :
17.197,40 – 6.600 – 770,54 – 300 – 18.100,67= – 8.573,81 euros.

Monsieur [K] et Madame [D] sont condamnés à restituer à la S.A.R.L. [L] LES SALONS et à Madame [E] la somme de 8.573,81 euros trop-perçue. Cette condamnation est assortie des intérêts au taux légal à compter de la présente décision et les intérêts pourront être capitalisés dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil.

– Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de bail professionnel

Madame [E] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS sollicitent la condamnation des époux [K] à leur verser une indemnité de 10.000 euros en application de l’article 1104 du code civil arguant d’une exécution déloyale du contrat de bail professionnel. A l’appui de cette demande, elles exposent qu’il résulte des courriers échangés avec les bailleurs que la gestion locative du bail a été défaillante ; que pendant plusieurs années, la locataire a été contrainte de payer des provisions sur charges entre deux et trois fois supérieures aux charges locatives récupérables réelles, ce que les bailleurs ne pouvaient ignorer ; que la régularisation des charges de 2012 à 2019 n’est intervenue que le 1er janvier 2020, après la notification du congé par la locataire, avec pour compenser ces régularisations ajoutées au crédit du décompte établi le 16 juin 2020 à l’issue du bail, des frais divers de relance et autres. Elles ajoutent que malgré leurs demandes répétées, elles n’ont pas reçu de solde de tout compte mentionnant le dépôt de garantie et la valeur du miroir laissé sur place, les bailleurs procédant à des saisies le 28 septembre 2020. Elles concluent que ce comportement déloyal est fautif, et qu’il leur a causé un préjudice moral et financier incontestable.

Monsieur [K] et Madame [D] n’ont pas conclu sur cette demande.

Il est constant qu’il appartient à celui qui sollicite l’indemnisation d’un dommage de prouver tant la faute qui en est à l’origine, que ledit dommage et le lien de causalité entre ceux-ci.

Or, en l’espèce, s’il ressort des courriers échangés et versés au débat que Monsieur et Madame [K] ont reconnu des manquements de la part de leur gestionnaire de biens lorsqu’ils ont eu connaissance des réclamations de la locataire en octobre 2019, ils paraissent ensuite avoir fait le nécessaire puisque la régularisation des charges a été effectuée le 28 février 2020. En tout état de cause, il n’est pas justifié d’un préjudice moral ou financier dès lors que les défenderesses reconnaissent que la société [L] LES SALONS a subi des pertes considérables pendant la période de la crise sanitaire, ce que le décompte communiqué démontre, la dette locative étant bien supérieure au montant des régularisations de charges à son crédit de 4.880,96 euros au total.

Dès lors, Madame [E] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS n’apportent pas la preuve du préjudice allégué. Leur demande de dommages-intérêts sera donc rejetée.

Sur les demandes accessoires

Succombant en leurs demandes, Monsieur [K] et Madame [D] sont condamnés aux dépens de la présente instance et déboutés de leur demande au titre des frais irrépétibles.

Ils sont condamnés à verser d’une part à Monsieur [N] la somme de 1.500 euros et d’autre part à Madame [E] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Enfin aucun motif ne conduit à écarter l’exécution provisoire de droit.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par jugement contradictoire et rendu en premier ressort,

Déboute Monsieur [R] [K] et Madame [S] [D] épouse [K] de leurs demandes au titre des frais de remise en état du local et de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [R] [K] et Madame [S] [D] épouse [K] à restituer à la S.A.R.L. [L] LES SALONS et à Madame [E] la somme de 8.573,81 euros (huit mille cinq cent soixante-treize euros et quatre-vingt-un centimes) trop-perçue, avec intérêts au taux légal à compter de la présente décision lesquels pourront être capitalisés dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil,

Déboute la S.A.R.L. [L] LES SALONS et à Madame [E] du surplus de leur demande indemnitaire et de leur demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de bail professionnel,

Condamne Monsieur [R] [K] et Madame [S] [D] épouse [K] aux dépens de la présente instance,

Condamne Monsieur [R] [K] et Madame [S] [D] épouse [K] à verser à Monsieur [X] [N] la somme de 1.500 (mille cinq cents) euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne Monsieur [R] [K] et Madame [S] [D] épouse [K] à verser à Madame [E] et la S.A.R.L. [L] LES SALONS la somme de 3.000 (trois mille) euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de la présente décision.

Fait et jugé à Paris le 08 Janvier 2025

Le Greffier Le Président
Paulin MAGIS Maïa ESCRIVE


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