Responsabilité contractuelle et conformité des installations photovoltaïques

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Responsabilité contractuelle et conformité des installations photovoltaïques

L’Essentiel : Le 12 juin 2018, CA Consumer Finance a accordé un crédit de 29 900 euros à M. et Mme [T] pour l’achat d’une centrale photovoltaïque auprès de la société Idelec. L’installation, réalisée par Eco Système Durable, a été facturée 2 720 euros. Le 27 août 2020, les époux [T] ont assigné Idelec pour défaut de conformité, révélant des non-conformités dans le câblage. Le tribunal, le 9 novembre 2022, a débouté leur demande d’annulation des contrats, condamnant Idelec et Eco Système Durable à verser 4 887,25 euros de dommages et intérêts, ainsi que 2 000 euros pour les frais de justice.

Constitution du crédit et installation de la centrale photovoltaïque

La société CA Consumer Finance a accordé un crédit de 29 900 euros à M. [L] [T] et Mme [M] [T] le 12 juin 2018, destiné à financer l’achat d’une centrale photovoltaïque auprès de la société Idelec. Cette installation, réalisée par la société Eco Système Durable le 28 juin 2018, a été facturée 2 720 euros.

Assignation en justice pour défaut de conformité

Les époux [T] ont assigné la société Idelec en référé le 27 août 2020, invoquant une productivité insuffisante et des défauts dans l’installation. Une expertise a été ordonnée, révélant des non-conformités dans le câblage et des éléments de l’installation, bien que les panneaux eux-mêmes étaient conformes.

Jugement du tribunal judiciaire

Le 9 novembre 2022, le tribunal a débouté les époux [T] de leur demande d’annulation des contrats, mais a condamné la société Idelec et Eco Système Durable à verser 4 887,25 euros de dommages et intérêts. Les époux ont également obtenu 2 000 euros pour les frais de justice, tandis que la société CA Consumer Finance a été exonérée de toute condamnation.

Appel de la société Eco Système Durable

Le 30 janvier 2023, la société Eco Système Durable a interjeté appel, demandant l’infirmation du jugement et la nullité du bon de commande entre les époux [T] et Idelec. Elle a également demandé à être déboutée de toutes les demandes des époux.

Conclusions des époux [T] et de la société Idelec

Les époux [T] ont demandé la confirmation du jugement initial, en augmentant le montant des dommages pour perte d’énergie à 10 930 euros. De son côté, la société Idelec a contesté la demande de nullité et a demandé l’infirmation du jugement concernant les condamnations financières.

Analyse de la responsabilité

La cour a examiné la responsabilité des sociétés Idelec et Eco Système Durable, concluant que la première était responsable des défauts de conformité, tandis que la seconde, en tant que sous-traitant, devait garantir Idelec pour les non-conformités liées à son travail.

Préjudices et indemnisation

La cour a déterminé que les époux [T] avaient droit à une indemnisation totale de 6 846,65 euros pour les défauts de conformité, incluant des frais de réparation et des pertes de production. La société Eco Système Durable a été condamnée à garantir Idelec pour une partie de cette somme.

Dépens et frais de justice

Les sociétés Idelec et Eco Système Durable ont été condamnées in solidum aux dépens de première instance et d’appel, y compris les frais d’expertise. Elles ont également été déboutées de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile, mais condamnées à verser 4 000 euros pour les frais irrépétibles.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la demande de nullité du contrat conclu entre la société Idelec et les époux [T]

La société Eco Système Durable soutient que le bon de commande établi entre la société Idelec et les époux [T] ne respecte pas les mentions obligatoires visées au code de la consommation.

Cependant, la société Idelec fait valoir que, selon l’article 562 du code de procédure civile, la cour n’est saisie que des chefs de jugement qui sont expressément critiqués dans la déclaration d’appel.

Cet article stipule :

* »L’appel défère à la cour la connaissance des chefs du dispositif de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent. Toutefois, la dévolution opère pour le tout lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible. »*

Dans ce cas, la déclaration d’appel ne mentionne pas la nullité du contrat, ce qui signifie que la cour n’est pas saisie de cette demande.

De plus, la société Eco Système Durable, n’étant pas partie au contrat, ne peut pas soulever une nullité qui est relative.

Ainsi, la cour conclut qu’elle n’est pas saisie de la demande de nullité du contrat principal.

Sur la responsabilité de la société Idelec et de la Eco Système Durable

Les époux [T] invoquent les conclusions du rapport d’expertise judiciaire pour établir que l’installation photovoltaïque présente plusieurs désordres.

Ils affirment que la société Idelec a manqué à ses obligations contractuelles en ne livrant pas un matériel conforme, tandis que la société Eco Système Durable n’a pas respecté les règles de l’art lors de la pose.

L’article L. 217-4 du code de la consommation précise que :

* »Le vendeur livre un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance. »*

Il est établi que la société Idelec est responsable des défauts de conformité, car elle est le vendeur direct des époux [T].

La société Eco Système Durable, en tant que sous-traitant, n’a pas de lien contractuel direct avec les époux [T] et ne peut donc pas être tenue responsable des défauts de conformité.

La cour conclut que la responsabilité de la société Idelec est engagée pour les défauts de conformité identifiés par l’expert.

Sur les préjudices

L’article L. 217-9 du code de la consommation stipule que :

* »En cas de défaut de conformité, l’acheteur choisit entre la réparation et le remplacement du bien. »*

Les époux [T] ont choisi la réparation, et l’expert a chiffré le coût des réparations nécessaires.

Les montants incluent :

– 700 euros pour la modification du câblage et la pose d’étiquettes,
– 2 000 euros pour la réinstallation des panneaux.

De plus, l’expert a évalué la perte de production à 2 187,25 euros.

Les époux [T] demandent une augmentation de ce montant pour couvrir les pertes sur 10 ans.

La cour juge que, bien que les pertes de production liées à la puissance des panneaux soient indemnisables, les pertes futures doivent être calculées sur une base raisonnable.

Ainsi, la société Idelec sera condamnée à payer aux époux [T] un total de 6 846,65 euros, incluant les réparations et les pertes de production.

Sur l’appel en garantie de la société Eco Système Durable

La société Eco Système Durable conteste sa responsabilité, mais le rapport d’expertise indique des non-conformités directement liées à son travail.

Elle doit donc garantir la société Idelec pour les défauts de conformité relevés.

La cour conclut que la société Eco Système Durable doit relever et garantir la société Idelec de la condamnation à des dommages et intérêts, dans la limite de 4 495,38 euros.

Sur les dépens et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la société Idelec et la société Eco Système Durable, qui succombent en principal, seront tenues in solidum aux dépens.

Elles seront également déboutées de leurs demandes au titre de l’article 700, car elles ne remplissent pas les conditions d’octroi.

La cour condamne in solidum les deux sociétés à payer 4 000 euros au titre de l’article 700 pour couvrir les frais irrépétibles de la première instance et de l’appel.

N° Minute : 2C25/015

COUR D’APPEL de CHAMBÉRY

2ème Chambre

Arrêt du Jeudi 16 Janvier 2025

N° RG 23/00158 – N° Portalis DBVY-V-B7H-HFPG

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection de BONNEVILLE en date du 09 Novembre 2022, RG 22/00520

Appelante

S.A.S.U. ECO SYSTEME DURABLE dont le siège social est sis [Adresse 5] – prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Jennifer BOULEVARD, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me Yoni MARCIANO, avocat plaidant au barreau de HAUTS-DE-SEINE

Intimés

M. [L] [T]

né le [Date naissance 3] 1952 à [Localité 6],

et

Mme [M] [U] épouse [T]

née le [Date naissance 1] 1952 à [Localité 6], demeurant ensemble [Adresse 4]

Représentés par la SARL BALLALOUD ET ASSOCIES, avocat au barreau de BONNEVILLE

S.A.S.U. IDELEC, dont le siège social est sis [Adresse 2]

prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Lisa LEGRAND, avocat postulant au barreau de CHAMBERY et Me Marinne ERHARD, avocat plaidant au barreau de LIMOGES

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COMPOSITION DE LA COUR :

Lors de l’audience publique des débats, tenue le 29 octobre 2024 avec l’assistance de Madame Sylvie LAVAL, Greffière présente à l’appel des causes et dépôt des dossiers et de fixation de la date du délibéré, à laquelle il a été procédé au rapport,

Et lors du délibéré, par :

– Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente, à ces fins désignée par ordonnance de Madame la Première Présidente

– Monsieur Edouard THEROLLE, Conseiller,

– Monsieur Fabrice GAUVIN, Conseiller,

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EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre préalable acceptée le 12 juin 2018, la société CA Consumer Finance a consenti à M. [L] [T] et Mme [M] [T] un crédit accessoire d’un montant de 29 900 euros remboursable en 120 mensualités, à un taux d’intérêts effectif global de 5,9%, destiné à financer un contrat d’équipement souscrit le même jour auprès de la société Idelec, portant sur une centrale photovoltaïque composée de 15 panneaux solaires, d’une puissance de 4 500 WC.

La société Eco Système Durable a procédé à l’installation de la centrale photovoltaïque le 28 juin 2018 et a facturé cette prestation à la société Idelec pour un montant de 2 720 euros.

Se plaignant d’une productivité insuffisante de l’installation photovoltaïque ainsi que de la défectuosité de l’installation, les époux [T], par acte du 27 août 2020, ont assigné la société Idelec devant le juge des référés aux fins d’expertise.

Une expertise a été ordonnée par ordonnance de référé du 7 janvier 2021 du tribunal judiciaire de Bonneville et confiée à M. [F]. L’expert a déposé son rapport le 8 octobre 2021. Il en résulte notamment que :

– les panneaux photovoltaïques sont installés sur la toiture du garage annexé à la maison,

– l’installation apparaît conforme aux indications du fabriquant pour la pose des panneaux sur le toit,

– les solutions adoptées pour la partie câblage ne sont pas conformes aux normes UTE-15-712-1 et les branchements au tableau ne respectent pas les normes NF-C-15-100,

– les éléments de l’installation ne correspondent pas et ne respectent pas les conditions du contrat,

– aucune trace d’infiltration n’est visible le jour de l’expertise.

Par actes des 11,17 et 21 mars 2022, les époux [T] ont fait assigner la société Idelec, la société Eco système Durable et la société CA Consumer Finance devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville aux fins principales d’annulation des relations contractuelles.

Par jugement réputé contradictoire du 9 novembre 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bonneville a :

– débouté les époux [T] de leur demande tendant au constat de la nullité du contrat principal et du contrat de crédit affecté et de leurs demandes de restitutions subséquentes,

– dit n’y avoir lieu à statuer sur la créance de restitution de la société CA Consumer Finance,

– condamné la société Idelec et la société Eco Système Durable in solidum à payer aux époux [T] la somme de 4 887,25 euros à titre de dommages et intérêts,

– débouté les époux [T] de leurs autres demandes de dommages et intérêts au titre de la dépose de l’installation et du préjudice moral,

– condamné la société Idelec et la société Eco Système Durable in solidum à payer aux époux [T] la somme de 2 000 euros, incluant le coût du procès-verbal de constat d’huissier du 28 juin 2020, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société CA Consumer Finance,

– condamné la société Idelec et la société Eco Système Durable in solidum aux dépens, incluant le coût de l’expertise judiciaire réalisée par M. [I],

– rappelé que la décision est exécutoire par provision.

Par déclaration du 30 janvier 2023, la société Eco Système Durable a interjeté appel de la décision à l’encontre de M. [L] [T] et Mme [M] [T] et de la société Idelec.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 1er août 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la société Eco Système Durable demande à la cour de :

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il l’a condamné à payer aux époux [T] la somme de 4 887,25 euros à titre de dommages et intérêts, de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens en ce compris les frais d’expertise.

Statuant à nouveau, il lui est demandé de,

– constater la nullité du bon de commande signé entre les époux [T] et la société Idelec,

– débouter les époux [T] de l’ensemble de leurs demandes vis-à-vis d’elle,

– débouter la société Idelec de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles vis-à-vis d’elle,

– débouter les époux [T] de l’ensemble de leurs demandes reconventionnelles vis-à-vis d’elle,

– condamner la société Idelec à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Idelec aux entiers dépens.

Dans leurs conclusions notifiées par voie électronique le 13 juin 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, les époux [T] demandent à la cour de :

– confirmer la décision déférée en ce qu’elle a retenu la responsabilité in solidum de la SASU Idelec et de la SASU Eco Système Durable et les a condamnées à réparer leur préjudice,

– confirmer la décision déférée en ce qu’elle a condamné in solidum la SASU Idelec et la SASU Eco Système Durable à payer aux concluants la somme de 2 700 euros au titre de la reprise de l’installation,

– recevant leur appel incident, réformer la décision déférée en ce qu’elle a chiffré leur préjudice au titre de la perte d’énergie à 2 187,25 euros (1 795,38 + 391,87) et statuant à nouveau fixer le préjudice subi à la somme de 10 930 euros,

– condamner in solidum la SASU Idelec et de la SASU Eco Système Durable au paiement de ladite somme,

– confirmer la décision déférée en ce qu’elle a condamné in solidum lesdites sociétés à leur payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance, y rajoutant,

– condamner lesdites sociétés in solidum à leur payer la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles en cause d’appel,

– condamner in solidum la SASU Idelec et de la SASU Eco Système Durable aux entiers dépens incluant les frais d’expertise judiciaire et le coût du procès-verbal d’huissier du 28 juin 2020.

Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 14 juin 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, la SASU Idelec demande à la cour de :

– la dire recevable et bien fondée en l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

Y faisant droit,

– juger n’y avoir lieu à statuer sur la demande de la SASU Eco Système Durable, appelante, tendant à voir ‘constater la nullité du bon de commande signé entre les époux [T] et la SASU Idelec’, la cour d’appel n’étant saisie que des chefs de jugement expressément critiqués dans la déclaration d’appel,

– infirmer le jugement déféré en ce qu’il a :

– condamné la SASU Idelec et la SASU Eco Système Durable in solidum à payer aux époux [T] la somme de 4 887,25 euros à titre de dommages et intérêts,

– condamné la SASU Idelec et la SASU Eco Système Durable in solidum à payer aux époux [T] la somme de 2 000 euros, incluant le coût du procès-verbal de constat d’huissier du 28 juin 2020, au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SASU Idelec et la SASU Eco Système Durable in solidum aux dépens, incluant le coût de l’expertise judiciaire réalisée par M. [I],

Statuant à nouveau,

– juger que la non-conformité de pose ‘B3 Pose sur la toiture du garage’ n’a causé aucun dommage actuel et que le dommage futur relevé par M. [I], expert, est éventuel et peu probable, ne revêtant ainsi pas un caractère certain, de sorte qu’aucune responsabilité n’est encourue,

– condamner la SASU Eco Système Durable à payer aux époux [T] la somme de 2 495,38 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant des non-conformités de pose ‘B4 Absence d’indication de sécurité sur le cheminement du câblage’, ‘B5 câblage vers le tableau général’ et ‘B6 Adaptation de la charge de phase’, dont la SASU Eco Système Durable est entièrement et exclusivement responsable,

– la condamner payer aux époux [T] la somme de 391,87 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de la non-conformité ‘B2″,

– dire et juger que sa condamnation et celle de la SASU Eco Système Durable prononcée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et des dépens au profit des époux [T] sera déterminée à juste proportion des responsabilités prononcées,

– condamner la SASU Eco Système Durable à la relever indemne de toute autre condamnation qui serait prononcée à son encontre,

– condamner la SASU Eco Système Durable à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles engagés en cause d’appel et condamner la même aux entiers dépens de l’appel,

– débouter la SASU Eco Système Durable de toutes ses demandes fins et prétentions formulées contre elle,

– débouter les époux [T] de l’ensemble de leurs demandes, fins et prétentions contraires aux présentes, et notamment celles au titre des dommages et intérêts.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 2 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1. Sur la demande de nullité du contrat conclu entre la société Idelec et les époux [T]

La société Eco Système Durable estime que le bon de commande établi entre la société Idelec et M. [L] [T] et Mme [M] [T] ne respecte pas les mentions obligatoires visées au code de la consommation.

La société Idelec réplique que, en application de l’article 562 du code de procédure civile, la cour n’est saisie que des chefs de jugement qui sont expressément critiqués dans la déclaration d’appel et que la dévolution ne s’opère pour le tout que si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible. Elle précise que la société Eco Système Durable n’a pas critiqué le rejet de la nullité du contrat par le juge des contentieux de la protection dans sa déclaration d’appel. Elle ajoute que l’appel n’est pas un appel-nullité et que l’objet litige est divisible. Elle en déduit que la cour n’est, en réalité, pas saisie de la demande de nullité du contrat. Elle rappelle, pour le surplus, que la société Eco Système Durable n’est pas partie au contrat et se prévaut d’une nullité qui est relative de sorte que, tiers au contrat, elle ne peut pas soulever une telle nullité.

Sur ce :

L’article 562 du code de procédure civile, dans sa version applicable à l’appel en cause, dispose que : ‘L’appel défère à la cour la connaissance des chefs du dispositif de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.

Toutefois, la dévolution opère pour le tout lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.’.

La déclaration d’appel du 30 septembre 2023 précise expressément que l’appel est limité aux dispositions de la décision qui :

– la condamne in solidum avec la société Idelec à payer aux époux [T] la somme de 4 887,25 euros à titre de dommages et intérêts,

– la condamne in solidum avec la société Idelec à payer aux époux [T] la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, incluant le coût d’un procès-verbal de constat,

– la condamne in solidum avec la société Idelec aux dépens incluant les frais d’expertise.

Dans la mesure où aucun des intimés ne formule d’appel incident sur le point de la nullité du contrat principal, il y a lieu de dire que la cour n’est pas saisie de cette demande.

2. Sur la responsabilité de la société Idelec et de la Eco Système Durable

2.1 Sur le principe de la responsabilité

Les époux [T] se fondent sur les conclusions du rapport d’expertise judiciaire pour dire que l’installation photovoltaïque souffre de plusieurs désordres dont la reprise a été chiffrée par l’expert à la somme de 2 700 euros TTC. Elle considère que la faute contractuelle de la société Idelec réside dans le fait qu’elle n’a pas livré un matériel conforme à la commande et que celle de la Eco Système Durable consiste à n’avoir pas posé le matériel dans les règles de l’art ne lui permettant pas ainsi une production d’énergie correcte. Ils demandent donc la confirmation de la décision déférée en ce qu’elle a dit que les deux sociétés avaient chacune concouru à leur entier préjudice.

La société Eco Système Durable reconnaît avoir posé la centrale photovoltaïque et réalisé une mince isolation sous les panneaux des époux [T]. Elle estime que, lors de son départ, les panneaux et l’onduleur étaient parfaitement installés et fonctionnaient. Elle explique être revenue sur place à la demande des époux [T] pour un problème d’alignement de tuiles et que ces derniers ont attesté de la bonne conformité des travaux. Elle ajoute que, par la suite, elle n’a plus reçu de doléances avant le 22 janvier 2020. Elle reproche à la société Idelec de ne pas justifier du fait qu’elle a bien assuré l’entretien annuel de la centrale. Elle dit encore qu’elle n’est pas responsable de ce qu’elle lui a demandé de poser des panneaux différents de ceux qui avaient été commandés. Elle nie ne pas avoir respecté les règles de l’art et dit que, les points litigieux pour elle (défaut d’étiquette sur les gaines de passage de câbles et pose des rails sans respect des recommandation de précision), sont sans lien avec la productivité de l’installation. Elle rappelle enfin que les panneaux sont parfaitement fonctionnels.

La société Idelec expose que, selon l’expert, la défectuosité de l’installation provient notamment de la réalisation du câblage et des branchements qui provoquent de fréquents déclenchements du disjoncteur mettant l’installation à l’arrêt. Elle estime qu’il n’existe aucun dommage lié à la non-conformité des panneaux et qu’il n’y a pas de responsabilité sans dommage. S’agissant des autres désordres, elle dit qu’ils sont tous exclusivement liés à la pose dont elle n’avait pas la charge. Elle reconnaît en revanche sa responsabilité dans le désordre ‘B2″ (impossibilité pour la centrale d’atteindre la puissance de 4 500 kwc en raison de la puissance maximale de l’installation à 3 750 kwc) et accepte de dédommager les époux [T] selon l’évaluation de l’expert à hauteur de 391,87 euros.

Sur ce :

La cour relève que la responsabilité de la société Idelec et de la Eco Système Durable a été recherchée par les époux [T] sur le fondement du défaut de conformité tel qu’il est prévu par le code de la consommation, notamment en son article L. 217-4. Cette responsabilité est de nature contractuelle.

Il est constant que les époux [T] ne sont en lien contractuel qu’avec la société Idelec (pièce époux [T] n°1). La société Eco Système Durable reconnaît être intervenue pour poser le matériel commandé. Elle produit une facture correspondant à son travail (pièce n°1), facture qui est établie à l’endroit de la société Idelec et non des particuliers. Il en résulte que la société Eco Système Durable est intervenue en qualité de sous-traitant de la société Idelec et n’a jamais été en lien contractuel avec M. [L] [T] et Mme [M] [T]. Par conséquent, la responsabilité encourue pour les défauts relevés ne peut incomber qu’à la société Idelec, à charge pour elle, ce qu’elle fait en demandant à ce que la Eco Système Durable soit condamnée à la relever et garantir, de se retourner contre son sous-traitant.

Par conséquent, il convient d’infirmer le jugement en ce qu’il a condamné in solidum la société Idelec et la société Eco Système Durable à payer à M. [L] [T] et Mme [M] [T] des dommages et intérêts.

2.2 Sur la responsabilité de la société Idelec

L’article L. 217-4 du code de la consommation, dans sa version applicable au contrat litigieux, dispose que : ‘Le vendeur livre un bien conforme au contrat et répond des défauts de conformité existant lors de la délivrance.’.

Il convient de relever que la société Idelec ne conteste pas la réalité des désordres numérotés B2 (défaut de correspondance de la puissance des panneaux posés avec celle prévue au contrat), B4 (défaut d’étiquetage de sécurité des gaines de câblage), B5 (absence de câblage jusqu’au tableau général) et B6 (défaut d’adaptation de la charge de phase) par l’expert. Compte tenu de ce qui a été relevé plus haut, il est indifférent que les désordres soient liés à la pose ou non.

L’expert a conclu que les solutions adoptées pour le câblage ne sont pas conformes aux normes applicables et que le système n’étant connecté que sur une seule phase, des déclenchements du disjoncteur de ligne se produisent lorsque la consommation locale n’est pas suffisamment importante pour absorber une partie significative de l’énergie produite. Il en déduit que les périodes de fonctionnement des panneaux sont très limitées ce qui entraîne une perte se rapportant à l’énergie non produite.

En ce qui concerne le poste contesté par la société Idelec (B3) c’est-à-dire la pose des panneaux sur le toit, l’expert note que la méthode de pose ne respecte pas les recommandations de précision de pose indiquée sur la notice des modules. Il relève en effet que les rails de support ne sont pas assemblés de manière à former un bloc unique mais sont posés sur le litelage de la charpente et sont donc assujettis aux mouvements de celle-ci, ce qui transmet des contraintes mécaniques aux panneaux. Si l’expert indique que la probabilité que des contraintes mécaniques importantes se présentent est faible, il relève néanmoins qu’elle est toujours possible, les panneaux pouvant alors se fissurer et devenir non-opérationnels. Dans la mesure où il n’est pas contesté que les panneaux ne sont pas posés conformément aux indications du constructeur, le défaut de conformité est caractérisé et la société Idelec doit en répondre. Il ne s’agit pas là d’un dommage futur et éventuel mais bien d’un défaut de conformité actuel et avéré.

Par conséquent, il y a lieu de juger que la société Idelec engage sa responsabilité pour les défauts de conformité tels que relevés par l’expert. Le jugement déféré sera réformé en ce sens.

2.3 Sur les préjudices

L’article L. 217-9 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, dispose que : ‘En cas de défaut de conformité, l’acheteur choisit entre la réparation et le remplacement du bien.’.

L’article L. 217-11 du code de la consommation, dans sa version applicable au litige, prévoit que : ‘L’application des dispositions des articles L. 217-9 et L. 217-10 a lieu sans aucun frais pour l’acheteur. Ces mêmes dispositions ne font pas obstacle à l’allocation de dommages et intérêts.’.

En l’espèce M. [L] [T] et Mme [M] [T] ont choisi la réparation. Il convient de noter que l’expert a chiffré le coût de ces réparations aux sommes suivantes :

– modification du câblage, répartition des charges sur les phases au tableau général, pose des étiquettes d’indication des circuits photovoltaïques : 700 euros TTC ;

– réinstallation des panneaux : 2 000 euros.

Il a chiffré le préjudice lié à la perte de production à la somme globale de 2 187,25 euros. Les époux [T] demandent une augmentation de ce dernier poste pour étendre l’estimation sur les 10 ans à venir. Il convient toutefois de noter que, dans la mesure où ils obtiennent la réparation des défauts de conformité, les pertes de production autres que celles liées à la puissance des panneaux, disparaîtront.

En revanche, pour l’avenir, dès lors que les panneaux qui produisent une puissance inférieure à celle qui est prévue au contrat resteront les mêmes, la perte spécifique liée au supplément de production perdue à vocation à demeurer. Cela constitue un préjudice certain, quoique futur, et donc indemnisable. Les époux [T] sollicitent le calcul sur 10 ans, ce qui n’est pas excessif au regard de la durée moyenne estimée des panneaux de ce type (15 à 20 ans). Le calcul ayant été fait par l’expert sur deux années pour aboutir à la somme de 391,87 euros, soit une perte annuelle de 195,93, il convient d’ajouter au poste de préjudice lié à la perte de production d’énergie la somme de 1 959,30 euros (195,93 x 10).

Il résulte de ce qui précède que la société Idelec sera condamnée à payer aux époux [T] la somme globale de 6 846,65 euros (700 + 2 000 + 2 187,25 + 1 959,30), outre intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2022, date du jugement entrepris. Ce dernier sera réformé en ce sens.

3. Sur l’appel en garantie de la société Eco Système Durable

Il convient de relever que, contrairement à ce qu’affirme la société Eco Système Durable, le rapport d’expertise met bien en avant des non-conformités directement liées à son travail, c’est-à-dire à la pose de l’installation. Il en est ainsi de la pose des panneaux, non conforme aux instructions du constructeur, des câblages et branchements, non conformes aux normes applicables et qui entraînent une sous-production par déclenchement fréquents du disjoncteur et de l’absence d’étiquettes obligatoires sur les câbles afin de permettre la discrimination des câbles reliés au système photovoltaïque.

Par conséquent, elle doit sa garantie à la société Idelec sur ces différents points. Elle sera donc condamnée à relever et garantir la société Idelec de la condamnation à des dommages et intérêts dans la limite de la somme de 4 495,38 euros. En effet les dommages et intérêts comprennent les sommes de 391,87 euros et de 1 959,30 euros qui sont liées à la non conformité des panneaux par rapport à ce qui a été prévu au contrat laquelle ne relève donc pas du travail de la société Eco Système Durable.

4. Sur les dépens et les demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Il convient, à titre liminaire de noter que la société Idelec engage sa propre responsabilité et que c’est elle qui a choisi un prestataire défaillant. Elle ne peut donc pas être relevée et garantie par la Eco Système Durable des condamnations aux dépens et au titre de l’article 700 du code de procédure civile prononcées contre elle.

Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, la société Idelec et la société Eco Système Durable qui succombent en principal seront tenues in solidum aux dépens de première instance et d’appel en ce compris les frais d’expertise judiciaire. Elles seront, dans le même temps déboutées de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile comme n’en remplissant pas les conditions d’octroi.

Il n’est pas inéquitable de faire supporter par la société Idelec et la société Eco Système Durable partie des frais irrépétibles non compris dans les dépens exposés par M. [L] [T] et Mme [M] [T]. Elles seront condamnées in solidum à leur payer la somme globale de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la première instance et la cause d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement, par décision contradictoire,

Constate que la cour n’est pas saisie de la demande formulée par la société Eco Système Durable de nullité du contrat conclu entre M. [L] [T] et Mme [M] [T] et la société Idelec,

Réforme partiellement la décision déférée sur les points critiqués à hauteur d’appel et statuant à nouveau sur ces points pour plus de clarté,

Condamne la société Idelec à payer à M. [L] [T] et Mme [M] [T] la somme globale de 6 846,65 euros au titre de la non conformité de l’installation photovoltaïque, outre intérêts au taux légal à compter du 9 novembre 2022,

Y ajoutant,

Condamne la société Eco Système Durable à relever et garantir la société Idelec de sa condamnation à des dommages et intérêts à hauteur de la somme de 4 495,38 euros,

Condamne in solidum la société Idelec et la société Eco Système Durable aux dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais d’expertise judiciaire,

Déboute la société Idelec et la société Eco Système Durable de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la société Idelec et la société Eco Système Durable à payer à M. [L] [T] et Mme [M] [T] la somme globale de 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Ainsi prononcé publiquement le 16 janvier 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile, et signé par Madame Alyette FOUCHARD, Conseillère faisant fonction de Présidente et Madame Sylvie DURAND, Greffière pour le prononcé.

La Greffière La Présidente

Copies : 16/01/2025

Me Jennifer BOULEVARD

la SARL BALLALOUD ET ASSOCIES

+ GROSSE

Me Lisa LEGRAND

+ GROSSE


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