L’Essentiel : [H] [P], hospitalisé depuis le 25 décembre 2023 pour des raisons de sécurité publique, a vu son maintien en soins psychiatriques confirmé par le tribunal de Pontoise le 27 juin 2024. Malgré une décision de levée d’hospitalisation le 26 décembre 2024, contestée par le préfet, l’audience du 8 janvier 2025 a révélé l’absence des parties concernées. Le tribunal a examiné les allégations de non-respect des droits de [H] [P], concluant que son état mental justifiait le maintien des soins, en raison de son incapacité à consentir, et a infirmé la décision de levée d’hospitalisation.
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Contexte de l’hospitalisation[H] [P], né le 3 novembre 1977, a été placé sous soins psychiatriques en hospitalisation complète depuis le 25 décembre 2023, suite à une décision du maire de [Localité 3] et confirmée par le préfet des [Localité 4]. Cette mesure a été prise en raison d’un risque grave d’atteinte à la sûreté des personnes et de troubles à l’ordre public, conformément à l’article L. 3213-1 du code de la santé publique. Procédures judiciairesLe 27 juin 2024, le tribunal judiciaire de Pontoise a ordonné le maintien de l’hospitalisation de [H] [P]. Le 4 décembre 2024, le préfet du [Localité 7] a demandé au tribunal de se prononcer sur la situation de [H] [P]. Le 26 décembre 2024, le tribunal a décidé de lever la mesure d’hospitalisation, décision qui a été contestée par le préfet le 3 janvier 2025. Audience et absence des partiesL’audience s’est tenue le 8 janvier 2025, mais ni le préfet, ni [H] [P], ni le centre hospitalier n’étaient présents. Le conseil de [H] [P] a renoncé à contester certaines irrégularités, tout en soulignant l’absence d’information sur les droits de [H] [P] suite à son évasion. Recevabilité de l’appelL’appel interjeté par le préfet a été jugé recevable, car effectué dans les délais légaux. Non-respect des droits du patientLe tribunal a examiné les allégations de non-respect des droits de [H] [P] en vertu de l’article L. 3211-3 du code de la santé publique. Il a été établi que l’absence de notification des droits était due à la fugue de [H] [P], ce qui a conduit à un rejet de ce moyen. Évaluation de l’état mental de [H] [P]Les certificats médicaux de juillet à novembre 2024 ont révélé des comportements et discours délirants chez [H] [P]. Malgré son retour à l’hôpital, son état mental n’a pas été évalué de manière concluante, et ses fugues ont démontré un manque de consentement aux soins. Décision finaleLe tribunal a conclu que les soins psychiatriques de [H] [P] devaient être maintenus en raison de son incapacité à consentir aux soins, justifiant ainsi les restrictions à ses libertés individuelles. L’ordonnance de levée de l’hospitalisation a été infirmée, et le maintien de l’hospitalisation complète a été ordonné. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la recevabilité de l’appel interjeté par le préfet du [Localité 7] ?L’appel interjeté par le préfet du [Localité 7] a été déclaré recevable car il a été effectué dans les délais légaux. En effet, selon l’article 901 du Code de procédure civile, « l’appel est formé dans un délai d’un mois à compter de la notification de la décision ». Dans cette affaire, le préfet a interjeté appel le 3 janvier 2025, ce qui est dans le délai imparti après la décision du tribunal judiciaire de Pontoise. Ainsi, l’appel est recevable et peut être examiné sur le fond. Quelles sont les irrégularités liées au non-respect des droits du patient selon l’article L. 3211-3 du code de la santé publique ?L’article L. 3211-3 du code de la santé publique stipule que : « Lorsqu’une personne atteinte de troubles mentaux fait l’objet de soins psychiatriques… les restrictions à l’exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental… ». En l’espèce, il a été soutenu que [H] [P] n’a pas été informé de l’arrêté du préfet du 24 octobre 2024 et des droits qui en découlent. Cependant, il a été établi que [H] [P] avait fugué de l’établissement hospitalier le 31 décembre 2023 et n’a réintégré l’établissement que le 23 octobre 2024. La notification de l’arrêté n’a pas pu être effectuée en raison de cette fugue. Ainsi, le grief relatif à l’absence d’information est rejeté, car il découle de l’attitude de fuite de [H] [P] et non d’une irrégularité procédurale. Quelles sont les conditions de maintien des soins psychiatriques selon l’article L. 3213-1 et L. 3213-4 du code de la santé publique ?L’article L. 3213-1 du code de la santé publique précise que : « le représentant de l’Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d’un certificat médical circonstancié, l’admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public ». De plus, l’article L. 3213-4 indique que : « Dans les trois derniers jours du premier mois suivant la décision d’admission en soins psychiatriques… le représentant de l’Etat dans le département peut prononcer… le maintien de la mesure de soins pour une nouvelle durée de trois mois ». Dans cette affaire, les certificats médicaux établis indiquent que [H] [P] présente des comportements et discours délirants, justifiant ainsi le maintien des soins psychiatriques. Les avis médicaux ont confirmé que l’état de [H] [P] nécessitait une surveillance constante et des soins adaptés, ce qui a conduit à la décision de maintenir l’hospitalisation complète. Quels sont les éléments justifiant la décision de maintenir l’hospitalisation complète de [H] [P] ?La décision de maintenir l’hospitalisation complète de [H] [P] repose sur plusieurs éléments. Tout d’abord, les certificats médicaux de juillet à novembre 2024 indiquent des « bizarreries comportementales et un discours délirant ». De plus, le certificat médical du 23 octobre 2024 a décrit [H] [P] comme étant « calme et sédaté », mais avec des antécédents de discours délirant et d’instabilité de l’humeur. Ces éléments montrent que [H] [P] souffre de troubles mentaux qui compromettent la sûreté des personnes et nécessitent des soins psychiatriques. Enfin, les avis médicaux récents ont confirmé que les soins doivent être maintenus à temps complet, justifiant ainsi la décision de l’ordonnance infirmée. |
DE VERSAILLES
Chambre civile 1-7
Code nac : 14C
N°
N° RG 25/00051 – N° Portalis DBV3-V-B7J-W55I
(Décret n°2011-846 du 18 juillet 2011, Article L3211-12-4 du Code de la Santé publique)
Copies délivrées le : 09/01/2025
à :
ARS du [Localité 7]
M. [P]
Centre Hospitalier [6]
Me Barrere
Le Min. Public
ORDONNANCE
Le 09 Janvier 2025
prononcé par mise à disposition au greffe,
Nous, Monsieur David ALLONSIUS, Président, à la cour d’appel de Versailles, délégué par ordonnance de monsieur le premier président pour statuer en matière d’hospitalisation sous contrainte (décret n°2011-846 du 18 juillet 2011), assisté de Madame [D] [L], Greffière stagiaire en préaffectation, avons rendu l’ordonnance suivante :
ENTRE :
ARS DU [Localité 7]
non représentée
APPELANTE
ET :
Monsieur [H] [P]
né le 03 Novembre 1977 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Non comparant, représentée par Me Julie BARRERE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 638, commis d’office
M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER DE
[6]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Non représenté
INTIMES
ET COMME PARTIE JOINTE :
M. LE PROCUREUR GENERAL DE LA COUR D’APPEL DE VERSAILLES
Non représenté à l’audience, ayant rendu un avis écrit
A l’audience publique du 08 Janvier 2025 où nous étions Monsieur David ALLONSIUS, Président, assisté de Madame [D] [L], Greffière stagiaire en préaffectation, avons indiqué que notre ordonnance serait rendue ce jour ;
[H] [P], né le 3 novembre 1977 à [Localité 5], fait l’objet depuis le 25 décembre 2023 d’une mesure de soins psychiatriques, sous la forme d’une hospitalisation complète, au centre hospitalier [6], sur décision du maire de [Localité 3] du 25 décembre 2023, puis sur décision du représentant de l’Etat, en l’espèce le préfet des [Localité 4], du 26 décembre 2023, en application de l’article L. 3213-1 du code de la santé publique, pour risque grave d’atteinte à la sûreté des personnes ou de troubles grave à l’ordre public et décision du préfet du [Localité 7] du 24 octobre 2024.
Par ordonnance du 27 juin 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Pontoise a ordonné le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète de [H] [P].
Le 4 décembre 2024, Monsieur le préfet du [Localité 7] a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire afin qu’il soit saisi conformément aux dispositions des articles L. 3211-12-1 et suivants du code de la santé publique.
Par ordonnance du 26 décembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Pontoise a ordonné la mainlevée de la mesure de soins psychiatriques sous forme d’hospitalisation complète avec effet immédiat.
Appel a été interjeté le 3 janvier 2025 par le préfet du [Localité 7].
Le 6 janvier 2025, Monsieur le préfet du [Localité 7], [H] [P], le centre hospitalier [6] ont été convoqués en vue de l’audience.
Le procureur général représenté par Corinne MOREAU, avocate générale, a visé cette procédure par écrit le 7 janvier 2025, avis versé aux débats.
L’audience s’est tenue le 8 janvier 2025 en audience publique.
A l’audience, bien que régulièrement convoqués, Monsieur le préfet du [Localité 7], [H] [P] et le centre hospitalier [6] n’ont pas comparu.
Le conseil de [H] [P], qui avait fait parvenir des conclusions, a indiqué oralement renoncer aux moyens d’irrégularité relatifs au non-respect des dispositions de l’article L. 3213-4 du code de la santé publique. En outre, elle indique que ne figure pas à la procédure le document attestant que [H] [P] ait été informé de l’arrêté du 24 octobre 2024 et des droits qui en découlent dans son intérêt. Cette information aurait dû être faite, en application de l’article L. 3211-3 du code de la santé publique, puisqu’il était présent avant d’être en fugue à partir du 31 octobre 2024. Compte tenu du grief qui en résulte pour l’intéressé, la mainlevée de l’hospitalisation doit être confirmée.
L’affaire a été mise en délibéré.
Sur la recevabilité de l’appel
L’appel de Monsieur le préfet du [Localité 7] a été interjeté dans les délais légaux. Il doit être déclaré recevable.
Sur l’irrégularité tirée du non-respect des droits du patient résultant de l’article L. 3211-3 du code de la santé publique
Selon l’article L. 3211-3 du code de la santé publique : « Lorsqu’une personne atteinte de troubles mentaux fait l’objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l’exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en ‘uvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée.
Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.
En outre, toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est informée :
a) Le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état, de la décision d’admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;
b) Dès l’admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l’article L. 3211-12-1.
L’avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible.
En tout état de cause, elle dispose du droit :
1° De communiquer avec les autorités mentionnées à l’article L. 3222-4 ;
2° De saisir la commission prévue à l’article L. 3222-5 et, lorsqu’elle est hospitalisée, la commission mentionnée à l’article L. 1112-3 ;
3° De porter à la connaissance du Contrôleur général des lieux de privation de liberté des faits ou situations susceptibles de relever de sa compétence ;
4° De prendre conseil d’un médecin ou d’un avocat de son choix ;
5° D’émettre ou de recevoir des courriers ;
6° De consulter le règlement intérieur de l’établissement et de recevoir les explications qui s’y rapportent ;
7° D’exercer son droit de vote ;
8° De se livrer aux activités religieuses ou philosophiques de son choix.
Ces droits, à l’exception de ceux mentionnés aux 5°, 7° et 8°, peuvent être exercés à leur demande par les parents ou les personnes susceptibles d’agir dans l’intérêt du malade ».
En l’espèce, [H] [P] a fugué de l’établissement hospitalier le 31 décembre 2023 qu’il a réintégré le 23 octobre 2024 puis a fugué de nouveau le 24 octobre 2024 ainsi qu’il est mentionné à l’imprimé de notification de l’arrêté du préfet du 24 octobre 2024 et des droits du patient y afférents, ladite notification n’ayant pas été possible à cette date, ni ultérieurement, compte tenu de la fugue de l’intéressé. Dès lors que c’est en raison de l’attitude de fuite de [H] [P] que l’établissement hospitalier n’a pas été en mesure de lui notifier la décision préfectorale et les droits qu’il lui est possible d’exercer, il n’existe aucun grief. Le moyen sera rejeté.
Sur le fond
L’article L.3213-1 du code de la santé publique dispose que : « le représentant de l’Etat dans le département prononce par arrêté, au vu d’un certificat médical circonstancié, l’admission en soins psychiatriques des personnes dont les troubles mentaux nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l’ordre public ».
L’article L.3213-4 du même code prévoit que : « Dans les trois derniers jours du premier mois suivant la décision d’admission en soins psychiatriques mentionnée au I de l’article L. 3213-1 ou, le cas échéant, suivant la mesure provisoire prévue à l’article L. 3213-2, le représentant de l’Etat dans le département peut prononcer, au vu du certificat médical ou de l’avis médical mentionné à l’article L. 3213-3, le maintien de la mesure de soins pour une nouvelle durée de trois mois. Il se prononce, le cas échéant, sur la forme de la prise en charge du patient dans les conditions prévues au même article L. 3213-3. Au-delà de cette durée, la mesure de soins peut être maintenue par le représentant de l’Etat dans le département pour des périodes maximales de six mois renouvelables selon les mêmes modalités.
Faute de décision du représentant de l’Etat à l’issue de chacun des délais prévus au premier alinéa, la levée de la mesure de soins est acquise.
En outre, le représentant de l’Etat dans le département peut à tout moment mettre fin à la mesure de soins prise en application de l’article L. 3213-1 après avis d’un psychiatre participant à la prise en charge du patient attestant que les conditions ayant justifié la mesure de soins en application du même article L. 3213-1 ne sont plus réunies, ou sur proposition de la commission départementale des soins psychiatriques mentionnée à l’article L. 3222-5 ».
En l’espèce, les certificats mensuels établis de juillet à novembre 2024, soit depuis la décision du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Pontoise 27 juin 2024, indiquent que l’intéressé présente des « bizarreries comportementales et un discours délirant ».
En outre, le certificat médical du 23 octobre 2024 établi lors d’un retour de fugue de [H] [P], et avant qu’il ne fugue à nouveau le 24 octobre 2024, indique « arrivé à 18h40, patient calme et sédaté, coopérant, reste de bon contact, discours cohérent peu élaboré, entretien laborieux car patient visiblement fatigué. Il n’a pas exprimé d’éléments délirants a priori à son arrivée dans le service. Il a été décrit aux urgences comme délirant, logorrhéique et méfiant, sthénique avec des propos injurieux, discours décousu instabilité de l’humeur avec irritabilité par l’expert psychiatre qui l’a vu au commissariat, pas de critiques de ses troubles ».
L’absence d’examen médical de [H] [P] depuis, en sa présence, ne permet pas d’affirmer ou de présumer que celui-ci ne souffrirait plus de troubles mentaux de nature à compromettre la sûreté des personnes ou portant atteinte de façon grave à l’ordre public. Ces fugues sont de nature à faire la démonstration de l’absence de consentement aux soins et de l’absence de prise de conscience de son état par [H] [P] tel que décrit par les certificats médicaux.
A cet égard, les avis motivés des 3 décembre 2024 et 7 janvier 2025, rappelant la plus récente fugue, concluent que les soins psychiatriques doivent être maintenus à temps complet étant observé qu’ils peuvent être exprimés même en l’absence du patient.
Par conséquent, les avis médicaux sont suffisamment précis et circonstanciés pour justifier les restrictions à l’exercice des libertés individuelles de [H] [P], qui demeurent adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en ‘uvre du traitement requis, l’intéressé se trouvant dans l’impossibilité de consentir aux soins en raison des troubles décrits, son état nécessitant des soins assortis d’une surveillance constante.
Pour toutes ces raisons, l’ordonnance sera donc infirmée et [H] [P] sera maintenu en hospitalisation complète.
Statuant par ordonnance réputée contradictoire,
Déclarons l’appel de Monsieur le préfet du [Localité 7] recevable,
Rejetons le moyen tiré du non-respect des droits du patient résultant de l’article L. 3211-3 du code de la santé publique,
Infirmons l’ordonnance entreprise,
Et statuant à nouveau,
Ordonnons le maintien de l’hospitalisation complète de [H] [P],
Laissons les dépens à la charge du Trésor public.
Prononcé par mise à disposition de notre ordonnance au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées selon les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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