L’Essentiel : Le litige oppose Mme [Z] à M. et Mme [T] concernant un bail d’habitation pour un appartement à [Localité 6]. En raison de loyers impayés et de l’absence d’assurance, Mme [Z] a demandé la résiliation du bail et l’expulsion des locataires. Le tribunal a prononcé la résiliation et condamné les époux [T] à payer 6 365 euros pour loyers dus. En appel, Mme [T] a contesté ces décisions, évoquant des désordres dans le logement et une agression physique. La cour d’appel a confirmé le jugement initial tout en accordant des dommages et intérêts à Mme [T] pour les violences subies.
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Contexte du litigeLe litige concerne un bail d’habitation consenti par Mme [H] [Z] à M. [M] [T] et Mme [W] [O] épouse [T] pour un appartement et un parking à [Localité 6]. Le loyer mensuel était fixé à 700 euros, avec une provision sur charges de 230 euros. En raison du non-paiement des loyers et de l’absence d’assurance contre les risques locatifs, Mme [Z] a assigné les époux [T] en justice. Demandes de Mme [Z]Dans son assignation, Mme [Z] a demandé la résiliation judiciaire du bail, l’expulsion des locataires, le paiement de loyers impayés, ainsi qu’une indemnité d’occupation. Elle a également demandé une astreinte de 200 euros par jour de retard et la conservation du dépôt de garantie de 1 400 euros. Jugement du tribunalLe tribunal de proximité de Mantes-la-Jolie a prononcé la résiliation du bail et ordonné l’expulsion des époux [T]. Il a également condamné ces derniers à payer 6 365 euros pour loyers et charges impayés, ainsi qu’une indemnité d’occupation de 930 euros. Mme [Z] a été autorisée à conserver un dépôt de garantie de 930 euros. Appel de Mme [T]Mme [T] a interjeté appel du jugement, contestant les condamnations relatives aux loyers et indemnités d’occupation. Elle a demandé la suspension de l’exigibilité des loyers et a évoqué des désordres dans le logement, ainsi qu’une agression physique de la part de Mme [Z]. Arguments de Mme [T]Mme [T] a soutenu que le logement était indécent et que des travaux n’avaient pas été réalisés malgré les demandes. Elle a également mentionné une agression physique subie de la part de Mme [Z], demandant des dommages et intérêts pour cette violence. Réponse de Mme [Z]Mme [Z] a contesté les allégations de Mme [T], affirmant que le logement était en bon état lors de la location et que les désordres avaient été causés par la locataire. Elle a également nié avoir commis des violences et a soutenu que les accusations de Mme [T] étaient infondées. Décision de la cour d’appelLa cour a confirmé le jugement de première instance, condamnant Mme [T] à payer des sommes pour loyers et charges impayés. Elle a également accordé des dommages et intérêts à Mme [T] pour les violences subies, tout en ordonnant la compensation des créances entre les parties. ConclusionLa cour a statué sur les demandes des deux parties, confirmant certaines décisions tout en émettant des ajustements concernant les montants dus. Les dépens ont été mis à la charge de Mme [T], qui a également été condamnée à verser des frais à Mme [Z]. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conséquences juridiques du non-paiement des loyers par le locataire ?Le non-paiement des loyers par un locataire entraîne plusieurs conséquences juridiques, notamment la possibilité pour le bailleur de demander la résiliation du bail et l’expulsion du locataire. Selon l’article 7 de la loi du 6 juillet 1989, le locataire est tenu de payer le loyer et les charges aux termes convenus. En cas de non-paiement, le bailleur peut, conformément à l’article 24 de la même loi, engager une procédure d’expulsion. L’article 24 précise que : « En cas de non-paiement du loyer et des charges, le bailleur peut, après mise en demeure, demander la résiliation du bail et l’expulsion du locataire. » Dans le cas présent, Mme [Z] a assigné M. et Mme [T] pour obtenir la résiliation du bail en raison du non-paiement des loyers, ce qui a été accepté par le tribunal. Quels sont les droits du locataire en cas de désordres dans le logement ?Le locataire a des droits en matière de conditions de logement, notamment en ce qui concerne la décence et l’habitabilité du bien loué. L’article 6 de la loi du 6 juillet 1989 stipule que : « Le bailleur est tenu de délivrer un logement décent, c’est-à-dire en bon état d’usage et de réparation, et ne présentant pas de risques pour la santé des occupants. » Si le logement présente des désordres, le locataire peut demander des réparations. L’article 20-1 de la même loi permet au juge de réduire le loyer ou de suspendre son paiement si le logement ne respecte pas les normes de décence. Cependant, dans cette affaire, le tribunal a noté que Mme [T] n’a pas demandé la réalisation de travaux, ce qui a conduit à rejeter sa demande de suspension des loyers. Comment se calcule la dette locative en cas de résiliation du bail ?La dette locative est calculée sur la base des loyers et charges dus jusqu’à la date de résiliation du bail. L’article 1728 du Code civil précise que : « Le locataire est tenu de payer le loyer aux termes convenus. » En cas de résiliation, le bailleur peut réclamer les loyers impayés jusqu’à la date de résiliation, ainsi que des indemnités d’occupation pour la période durant laquelle le locataire a continué à occuper les lieux après la résiliation. Dans cette affaire, le tribunal a condamné M. et Mme [T] à payer une somme correspondant aux loyers impayés et aux indemnités d’occupation, confirmant ainsi le principe selon lequel le locataire doit régler les sommes dues jusqu’à la libération effective des lieux. Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. Cet article stipule que : « Le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. » Dans le cas présent, le tribunal a condamné Mme [T] à verser une somme à Mme [Z] sur le fondement de cet article, en raison de la perte de son procès. Cela permet de compenser les frais engagés par la partie gagnante pour défendre ses droits. Quelles sont les conséquences d’une agression sur les relations locataire-bailleur ?Une agression entre le locataire et le bailleur peut avoir des conséquences juridiques significatives, notamment en matière de dommages et intérêts. L’article 1240 du Code civil stipule que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Dans cette affaire, Mme [T] a demandé des dommages et intérêts en raison d’une agression présumée par Mme [Z]. Le tribunal a reconnu que les violences étaient corroborées par des témoignages et des certificats médicaux, ce qui a conduit à une condamnation de Mme [Z] à verser des dommages et intérêts à Mme [T]. Cela souligne que les comportements violents peuvent entraîner des conséquences financières et juridiques pour le bailleur, affectant ainsi la relation contractuelle. |
DE
VERSAILLES
Code nac : 51A
Chambre civile 1-2
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 14 JANVIER 2025
N° RG 23/07215 – N° Portalis DBV3-V-B7H-WEOZ
AFFAIRE :
[W] [O] épouse [T]
C/
[H] [Z]
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 21 juillet 2023 par le Tribunal de proximité de MANTES LA JOLIE
N° RG : 11-23-100
Expéditions exécutoires
Copies certifiées conformes délivrées
le : 14/01/25
à :
Me Véronique BROSSEAU
Me Valérie THIEFFINE
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE QUATORZE JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
APPELANTE
Madame [W] [O] épouse [T]
née le 17 février 1990 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 4]
bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle, à hauteur de 25%
Représentant : Me Véronique BROSSEAU, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 653
****************
INTIMÉE
Madame [H] [Z]
née le 19 février 1969 à [Localité 7] (Maroc)
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représentant : Me Valérie THIEFFINE, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 468
Monsieur [M] [T] (caducité partielle)
[Adresse 1]
[Localité 6]
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 novembre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne THIVELLIER, Conseillère chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur Philippe JAVELAS, Président,
Madame Anne THIVELLIER, Conseillère,
Madame Agnès PACCIONI, Vice-présidente placée,
Greffière placée lors des débats et du prononcé : Madame Gaëlle RULLIER
Suivant acte sous seing privé du 2 septembre 2018, Mme [H] [Z] a consenti à M. [M] [T] et Mme [W] [O] épouse [T] un bail d’habitation portant sur un appartement ainsi qu’un parking situés [Adresse 1] (bâtiment H2, 5ème étage, apt. 151), à [Localité 6] moyennant un loyer mensuel de 700 euros, payable d’avance, outre 230 euros de provision sur charges.
Se prévalant du non-paiement des loyers et de la non-justification d’une assurance contre les risques locatifs, Mme [Z] a, par acte de commissaire de justice délivré le 23 janvier 2023, assigné M. et Mme [T] aux fins de voir :
– prononcer la résiliation judiciaire du bail,
– ordonner la libération des lieux et la remise des clés après établissement d’un état des lieux de sortie,
– assortir l’obligation de quitter les lieux d’une astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision et jusqu’au jour de la complète libération des lieux et remise des clés,
– dire que le juge se réservera le droit de liquider l’astreinte,
– à défaut de départ volontaire, ordonner l’expulsion des époux [T], ainsi que celle de tous occupants de leur chef, avec l’assistance de la force publique si besoin est,
– ordonner la disposition des meubles selon la loi du 9 juillet 1991,
– condamner solidairement M. et Mme [T] à lui payer :
– 3 720 euros avec intérêts au taux légal à compter du 12 octobre 2022,
– 3 000 euros avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation,
– condamner solidairement M. et Mme [T] à lui verser une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer, soit 930 euros, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération effective des lieux avec remise des clés,
– dire que les intérêts ayant plus d’un an d’ancienneté seront eux même productifs d’intérêts et ce au taux de l’intérêt légal,
– dire et juger qu’elle conservera le montant du dépôt de garantie d’un montant de 1 400 euros,
– ordonner la compensation judiciaire avec les sommes dues par les époux [T],
– condamner solidairement M. et Mme [T] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens y compris le coût du commandement de payer
– ordonner l’exécution provisoire.
Par jugement réputé contradictoire du 21 juillet 2023, le juge des contentieux et de la protection du tribunal de proximité de Mantes-la-Jolie a :
– prononcé la résiliation du bail consenti par Mme [Z] à M. et Mme [T] à compter de la présente décision,
– ordonné à M. et Mme [T] de libérer les lieux après remise des clés et établissement d’un état des lieux de sortie,
– ordonné, faute de départ volontaire, l’expulsion de M. et Mme [T] avec tous occupants et tous biens de leur chef, à leurs frais, avec l’assistance de la force publique s’il en est besoin,
– condamné solidairement M. et Mme [T] à payer à Mme [Z] la somme de 6 365 euros à valoir sur les loyers et charges impayés, échéance du mois de janvier 2023 incluse, avec intérêts au taux légal à compter du 23 janvier 2023,
– condamné solidairement M. et Mme [T] à verser à Mme [Z] une indemnité d’occupation de 930 euros, et ce à compter de la résiliation du bail et jusqu’à libération effective et complète des lieux,
– autorisé Mme [Z] à conserver le dépôt de garantie d’un montant de 930 euros,
– ordonné la compensation de ce montant avec les sommes qui resteront dues au titre de l’arriéré de loyers et d’indemnités d’occupation,
– ordonné la capitalisation des intérêts,
– condamné in solidum M. et Mme [T] à payer à Mme [Z] la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– débouté Mme [Z] de ses demandes plus amples ou contraires,
– condamné M. et Mme [T] aux entiers dépens de l’instance qui comprendront le coût du commandement de payer,
– rappelé que l’exécution de la présente décision est de droit à titre provisoire,
– ordonné la notification de la présente décision à M. le préfet des Yvelines par les soins du secrétariat greffe du tribunal de proximité.
Par déclaration reçue au greffe le 19 octobre 2023, Mme [T] a relevé appel de ce jugement.
Par ordonnance du 29 décembre 2023, le conseiller de la mise en état a prononcé la caducité partielle de la déclaration d’appel à l’encontre de M. [T].
Par ordonnance du 12 septembre 2024, le conseiller de la mise en état a :
– déclaré recevable la demande de radiation formée par Mme [Z],
– débouté Mme [Z] de sa demande de radiation et de sa demande en paiement fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,
– dit que les dépens de l’incident suivront le sort de ceux de l’instance au fond.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 30 septembre 2024, Mme [T], appelante, demande à la cour de :
– infirmer le jugement rendu par le tribunal de proximité de Mantes-la-Jolie le 21 juillet 2023 en ce qu’il l’a condamnée à payer à Mme [Z] des loyers depuis le 1er avril 2022 et des indemnités d’occupation équivalentes au montant du loyer mensuel jusqu’à son départ effectif du logement,
Et statuant à nouveau,
– sur les loyers et indemnités d’occupation :
* à titre principal :
– suspendre l’exigibilité du loyer à compter du 1er avril 2022 jusqu’au 1er juin 2023,
– dire n’y avoir lieu à paiement de loyers pour la période du 1er avril 2022 à juin 2023,
* subsidiairement :
– réduire à de plus justes proportions le montant du loyer et de l’indemnité d’occupation compte tenu des troubles de jouissance subis par elle,
– sur la violation de domicile assortie de violences à son encontre, condamner Mme [Z] à lui verser la somme de 6 000 euros de dommages et intérêts et le cas échéant, ordonner la compensation de cette somme avec les loyers et indemnités d’occupation si la cour venait à estimer que ceux-ci étaient dus en totalité ou partiellement à Mme [Z],
– débouter Mme [Z] de toutes ses demandes, fins, conclusions, plus amples ou contraires,
– condamner Mme [Z] à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et 700 du code de procédure civile,
– condamner Mme [Z] aux entiers dépens.
Aux termes de ses dernières conclusions signifiées le 11 octobre 2024, Mme [Z], intimée et appelante à titre incident, demande à la cour de :
– déclarer Mme [T] mal fondée en son appel,
– débouter Mme [T] de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions,
– la déclarer recevable et bien fondée en son appel incident ,
– confirmer le jugement rendu le 21 juillet 2023 par le tribunal de proximité de Mantes-la-Jolie en toutes ses dispositions,
Et y ajoutant,
– condamner Mme [T] à lui verser la somme de 5 280 euros au titre des loyers et provisions sur charges du 1er février 2023 au 21 juillet 2023,
– condamner Mme [T] à lui verser la somme de 1 380 euros au titre des indemnités d’occupation dues pour la période du 22 juillet 2023 au 5 septembre 2023,
– condamner Mme [T] à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance.
La clôture de l’instruction a été prononcée le 17 octobre 2024.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens soutenus par les parties, la cour se réfère à leurs écritures et à la décision déférée.
A titre liminaire, la cour constate que dans ses conclusions, Mme [T], qui indique avoir quitté les lieux en juin 2023, ne sollicite pas l’infirmation des chefs du jugement ayant prononcé la résiliation du bail et l’expulsion des locataires, de sorte qu’ils sont devenus définitifs.
Sur la demande de suspension de l’exigibilité du loyer ou de réduction du loyer
Mme [T] poursuit l’infirmation des chefs du jugement l’ayant condamnée à payer des loyers depuis le 1er avril 2022 et des indemnités d’occupation équivalentes au montant du loyer mensuel jusqu’à son départ effectif du logement.
Elle demande, sur le fondement des articles 6 et 20-1 de la loi du juillet 1989 et 1719 du code civil, à être déchargée du paiement du loyer et d’une indemnité d’occupation à compter du 1er avril 2022 et jusqu’à son départ des lieux, et à titre subsidiaire, la réduction du loyer.
Elle fait valoir que le logement présentait des désordres dès l’origine, la bailleresse ayant pris l’engagement d’engager des travaux pour rendre l’appartement décemment habitable, ce qu’elle n’a pas respecté malgré ses demandes et ce qui l’a conduite à cesser de payer les loyers. Elle indique que ces désordres sont objectivement établis par une enquête de salubrité du 28 avril 2022 de la mairie qui a conclu à un risque pour la santé des occupants et mis en demeure Mme [Z] de procéder aux travaux de réparation et de remédier aux désordres. Elle relève que la bailleresse ne justifie d’aucune réponse à ce courrier ni d’aucun travaux aux fins de mise en conformité du logement.
Elle soutient que Mme [Z] ne peut exiger le paiement d’un loyer pour un logement qu’elle refuse d’entretenir et qui ne peut, en raison de son état, servir à l’usage pour lequel il a été loué.
Elle demande en conséquence la suspension rétroactive du loyer compte tenu de l’agression physique dont elle a été victime de la part de la bailleresse le 8 avril 2022 et du caractère indécent du logement qui n’a pas été mis en conformité, et à titre subsidiaire, si la cour estimait que le logement était habitable, de réduire le montant du loyer en considération des troubles de jouissance subis.
Mme [Z] s’oppose à ces demandes en contestant l’agression qui lui est reprochée et en faisant valoir que le logement n’était pas indécent.
Elle relève que lors de la prise à bail, l’appartement ne présentait aucun désordre et que la locataire ne l’a pas avisée de difficultés durant quatre ans et qu’elle a trouvé ce prétexte car elle savait qu’elle ne pouvait plus payer le loyer suite au départ de son époux. Elle soutient avoir remédié aux désordres comme demandé par la mairie.
Elle ajoute que Mme [T] est à l’origine des désordres électriques relevés et qu’elle n’a pas été avisée de ceux concernant les menuiseries. Elle précise que la mairie n’a pas qualifié le logement d’indécent ni d’insalubre mais a relevé des infractions au règlement sanitaire départemental des Yvelines auxquelles il a été remédié.
Elle indique que le preneur ne peut suspendre le paiement des loyers sans autorisation judiciaire et que l’exception d’inexécution ne peut être invoquée qu’en cas d’impossibilité d’utiliser les lieux.
Sur ce,
En application de l’article 20-1 de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version applicable au présent litige, si le logement loué ne satisfait pas aux dispositions des premier et deuxième alinéas de l’article 6, le juge saisi par l’une ou l’autre des parties détermine, le cas échéant, la nature des travaux à réaliser et le délai de leur exécution. Il peut réduire le montant du loyer ou suspendre, avec ou sans consignation, son paiement et la durée du bail jusqu’à l’exécution de ces travaux.
Il en résulte que le juge, qui n’est pas saisi d’une demande de travaux, n’a pas le pouvoir d’ordonner la suspension des loyers au visa de ce texte (Civ. 3ème, 3 décembre 2020, n°19.23-216), ni leur réduction.
En l’espèce, Mme [T] ne demande pas la réalisation de travaux, ce qu’elle ne serait en tout état de cause pas recevable à faire, le bail étant résilié. Sa demande au titre de la suspension et de la réduction des loyers sur ce fondement ne peut donc qu’être rejetée.
Au surplus, il convient de relever que faute pour Mme [T] de démontrer que le logement était inhabitable, la suspension des loyers ne se justifie pas (civ. 3ème, 9 septembre 2021, n°20-12.347).
En effet, il ressort du courrier du service communal d’hygiène et de santé de [Localité 6] du 28 avril 2022 qu’il a constaté des infractions au règlement sanitaire départemental des Yvelines, à savoir:
– une installation électrique qui n’est pas en sécurité notamment dans la salle de bains avec la présence de fils apparents sans aucune protection en présence d’eau et des prises électriques arrachées,
– des menuiseries extérieures en bois simple vitrage qui ne sont plus étanches et causent des infiltrations d’air et d’eau,
– la présence de moisissures sur le pourtour d’une fenêtre d’une des chambres,
– l’absence de réglettes de ventilation dans les menuiseries,
ce qui représente un risque pour la santé des occupants.
Mme [Z] a été mise en demeure de réparer et contrôler l’installation électrique ainsi que les menuiseries.
Il n’est nullement établi que le logement présentait ces désordres au jour de l’entrée dans les lieux comme l’affirme Mme [T] qui ne produit aucun élément corroborant ses allégations, notamment un état des lieux d’entrée ou des courriers de réclamations adressés à sa bailleresse avant la saisine des services d’hygiène et de sécurité de la mairie, alors que Mme [Z] produit une attestation du précédent locataire indiquant que le logement était décent et qu’en l’absence de production d’état des lieux d’entrée, le logement était présumé être en bon état.
Outre le fait qu’il en résulte que la locataire est à l’origine des désordres électriques, Mme [Z] justifie y avoir remédié (facture du 23 juin 2022) de même qu’aux désordres relatifs aux menuiseries (pièce 9). Elle a obtenu de la mairie le 11 juillet 2022 une autorisation préalable de mise en location du logement et elle justifie que la locataire n’a pas donné suite aux demandes de la CAF et de [A] pour la visite du logement afin d’établir un constat de décence du logement.
Il convient en conséquence de débouter Mme [Z] de ses demandes visant à être dispensée du règlement du loyer et tenant à la réduction du loyer, étant relevé que les allégations d’agression de la locataire par la bailleresse sont indifférentes sur ce point.
Sur le montant de la dette locative
Le premier juge a condamné M. et Mme [T] solidairement à payer la somme de 6 365 euros au titre des loyers et charges impayés, ainsi qu’au paiement d’une indemnité d’occupation.
Mme [Z] demande que Mme [T] soit condamnée au surplus au paiement de la somme de 5 280 euros au titre des loyers et provisions sur charges du 1er février au 21 juillet 2023 et au paiement d’une indemnité d’occupation pour la période du 22 juillet au 5 septembre 2023.
Mme [T] ne formule aucun autre moyen que celui relatif à la suppression ou la réduction du loyer auquel la cour a déjà répondu.
Sur ce,
Le paiement des loyers et charges aux termes convenus dans le contrat est une obligation essentielle du locataire, résultant de l’article 7 a) de la loi du 6 juillet 1989 et de l’article 1728 du code civil.
En application de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
En l’espèce, il ressort des décomptes produits par la bailleresse (pièces 5 et 14) que la dette locative était d’un montant de :
– 6 365 euros, terme de janvier 2023 inclus, comme l’a justement retenu le premier juge,
– 5 280 euros au titre des loyers et charges du 1er février au 21 juillet 2023,
– 1 380 euros au titre des indemnités d’occupation du 22 juillet au 5 septembre 2023.
La cour relève que Mme [T] ne formule aucune contestation sur ces montants et n’allègue ni ne justifie d’aucun règlement qui n’aurait pas été pris en compte.
Si elle affirme avoir quitté les lieux en juin 2023, elle n’en justifie pas alors que Mme [Z] produit une attestation à l’en-tête de l’étude [S] et [I] du 5 septembre 2023, commissaires de justice, dans laquelle elle reconnaît avoir récupéré les clés du logement qui avait été déposées dans la boîte aux lettres de l’Etude le 4 septembre 2023. Il sera donc retenu que l’indemnité d’occupation est due jusqu’au 5 septembre 2023, date à laquelle les clés lui ont été remises.
Il convient en conséquence de confirmer le jugement déféré de ce chef et y ajoutant, de condamner Mme [T] au paiement de la somme de 5 280 euros au titre des loyers et charges pour la période du 1er février au 21 juillet 2023 et 1 380 euros au titre des indemnités d’occupation pour la période du 22 juillet au 5 septembre 2023.
Sur la demande de dommages et intérêts
Mme [T] demande la condamnation de Mme [Z] à lui verser la somme de 6 000 euros à titre de dommages et intérêts et la compensation de cette somme avec la dette locative qui pourrait être mise à sa charge.
Elle fait valoir que la bailleresse s’est introduite dans son domicile pour un prétendu retard de paiement de loyer en mars 2022, ce dont elle ne disconvient pas et ce qui constitue une violation de domicile et une atteinte à sa vie privée et ouvre droit à réparation.
Elle ajoute qu’elle a également subi des violences pour lesquelles elle a déposé plainte et qui sont corroborées par l’attestation de sa voisine de pallier et par le service des urgences de l’hôpital de [Localité 6].
Mme [Z] s’oppose à cette demande.
Elle fait valoir que Mme [T] ne démontre nullement une quelconque violation de domicile; qu’elle s’est présentée chez elle pour évoquer ses problèmes de retard de loyers; qu’elle a été invitée par cette dernière à entrer chez elle et que sa version des faits ne correspond pas aux déclarations de sa voisine et amie. Elle ajoute que sa locataire est entrée dans un état de rage important quand elle appris qu’elle allait aviser la CAF.
Elle conteste avoir commis des violences et affirme que son état physique ne lui permettait pas d’être l’auteur des scènes décrites par Mme [T]. Elle relève que plus de deux ans après sa plainte, aucune poursuite n’a été engagée à son égard et que le certificat médical produit ne permet pas de déterminer qu’elle serait l’auteur de ces lésions.
Sur ce,
En application de l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
En l’espèce, Mme [T] produit une plainte déposée le 8 avril 2022 dans laquelle elle fait état de la présence, en bas de son immeuble, de Mme [Z] qui est montée avec elle dans l’ascenseur et lui a demandé des explications sur le dossier qu’elle avait monté contre elle à la mairie suite aux désordres dans l’appartement ; que le ton est monté; qu’elle a alors confié sa fille de 5 ans à sa voisine de palier, Mme [N]; qu’elle a ouvert la porte de son appartement que Mme [Z] a poussée avant de pénétrer dans l’appartement sans son accord; que le ton est monté et qu’elle a fouillé dans tout l’appartement en hurlant, étant hystérique et lui demandant de montrer les problèmes d’insalubrité; qu’elle a refusé de se calmer et de sortir de l’appartement.
Elle y ajoute que lorsqu’elle s’est penchée pour récupérer un sac de courses au sol, Mme [Z] l’a prise par les vêtements et lui a balancé la tête contre le mur de son entrée ; qu’elle a saigné au niveau du front et qu’en tentant de se lever, elle lui a pris la tête une seconde fois pour la balancer contre le mur et qu’elle a perdu connaissance quelques secondes; que prise de panique, elle a tenté de sortir de l’appartement et que Mme [Z] l’a alors tirée par les cheveux pour la ramener à l’intérieur; que sa voisine de pallier ayant assisté à la scène s’est interposée en repoussant la propriétaire ; qu’elle a réussi à s’enfermer dans la cuisine de sa voisine chez laquelle Mme [Z] a tenté d’entrer et qui a fait face à sa violence.
Elle verse par ailleurs aux débats un certificat médical descriptif des urgences de l’hôpital de [Localité 6] du 8 avril 2022 qui relate que Mme [T] déclare avoir été victime d’une agression et qu’elle présente une plaie frontale de 4 cm nécessitant la pose de 3 points de suture, un hématome du nez avec fracture des OPN sur la radiologie (à réévaluer en consultation ORL), des douleurs à la partie haute du dos par contusion, une contusion des épaules, un stress psychologique avec crainte de retourner chez elle. Il est indiqué une ITT de 10 jours à réévaluer.
Aucun élément médical complémentaire n’est produit.
Elle produit également la plainte de Mme [N], sa voisine, du 8 avril 2022 qui relate que la fille de sa voisine est venue sonner chez elle seule; qu’elles ont attendu sa mère sur le palier ; qu’elle a entendu parler fort très fort dans l’ascenseur et qu’à l’ouverture, elle a vu Mme [T] et sa propriétaire en train de se disputer; qu’elle a compris que quelque chose n’allait pas et qu’elle s’est enfermée chez elle avec l’enfant. Elle indique avoir entendu un gros boum et être allée voir ce qui se passait dans le hall; qu’elle a vu la propriétaire frapper sa voisine; qu’elle a essayé de les séparer et qu’elle a vu sa voisine couverte de sang au niveau du visage; que la propriétaire, qu’elle
décrit comme folle, lui a griffé l’avant-bras. Elle ajoute avoir emmené sa voisine dans son appartement pour la mettre en sécurité; que la propriétaire a voulu entrer dans son appartement; qu’elle a fermé la porte et appelé les pompiers.
Il apparaît ainsi que si la violation de domicile n’est pas établie faute d’élément permettant de corroborer cette allégation, les faits de violences dénoncés par Mme [T] sont corroborés par les déclarations de sa voisine, Mme [N], dans sa plainte, laquelle ne saurait être dénuée de toute valeur probante du seul fait de la divergence de leurs déclarations quant à la manière dont sa fille lui a été confiée, et par le certificat médical établi par le service des urgences de l’hôpital de [Localité 6] qui décrit des lésions compatibles avec les violences décrites. Le fait qu’aucune poursuite pénale ne soit démontrée à ce jour ne suffit pas à démontrer l’absence de faute sur le plan civil. De même, les pièces qu’elle verse aux débats ne permettent pas d’établir que médicalement, Mme [Z] n’aurait pu commettre ces violences en raison de son état de santé faisant suite à un accident de circulation.
Au vu de ces éléments, le préjudice subi par Mme [T] sera intégralement réparé par l’octroi d’une somme de 1 500 euros au paiement de laquelle Mme [Z] sera condamnée.
Il convient d’ordonner la compensation de cette somme avec celles dues par la locataire à Mme [Z].
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Mme [T], qui succombe à titre principal, est condamnée aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle, les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et aux frais irrépétibles étant par ailleurs confirmées.
Elle est en outre condamnée à verser à Mme [Z] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,
Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions dévolues à la cour sauf à l’émender en ce qui concerne la dette locative ;
Y ajoutant,
Condamne Mme [W] [O] épouse [T] à payer à Mme [H] [Z] la somme de 5 280 euros au titre des loyers et charges pour la période du 1er février au 21 juillet 2023 et la somme de 1 380 euros au titre des indemnités d’occupation pour la période du 22 juillet au 5 septembre 2023 ;
Condamne Mme [H] [Z] à payer à Mme [W] [O] épouse [T] la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts ;
Ordonne la compensation entre les créances respectives des parties ;
Déboute Mme [T] du surplus de ses demandes ;
Condamne Mme [W] [O] épouse [T] à payer à Mme [H] [Z] la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne Mme [W] [O] épouse [T] aux dépens d’appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle.
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Philippe JAVELAS, Président et par Madame Gaëlle RULLIER, Greffière placée, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La Greffière Placée Le Président
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