Résiliation de bail et expulsion : application d’une clause résolutoire en cas d’impayés locatifs

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Résiliation de bail et expulsion : application d’une clause résolutoire en cas d’impayés locatifs

Contexte de l’Affaire

La société TRUCK ETAPE a assigné la société CARON CHRISTOPHE SERVICES devant le tribunal judiciaire de Valenciennes, en référé, pour diverses demandes liées à un bail à construction signé le 30 octobre 2014. Ce bail concernait un terrain destiné à l’exploitation d’une station de lavage, avec des obligations de paiement de loyers et une clause résolutoire en cas de non-respect des engagements.

Demandes de la Société TRUCK ETAPE

TRUCK ETAPE a sollicité plusieurs mesures, notamment la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire à compter du 1er juillet 2024, l’expulsion de CARON CHRISTOPHE SERVICES, le paiement d’un arriéré de loyers de 33 115,26 euros, une indemnité d’occupation de 1964,53 euros par mois, ainsi qu’une provision de 30 000 euros pour l’évacuation des déchets et la dépollution des sols. Elle a également demandé des dispositions en cas de non-paiement des échéances.

Arguments de la Société TRUCK ETAPE

TRUCK ETAPE a justifié ses demandes en indiquant que CARON CHRISTOPHE SERVICES avait des retards de paiement depuis plus d’un an et qu’une mise en demeure avait été adressée sans résultat. Elle a également souligné l’obligation de remise en état des lieux à la fin du bail, justifiant ainsi la demande de provision pour dépollution.

Absence de la Défense

La société CARON CHRISTOPHE SERVICES n’a pas comparu à l’audience, ce qui a conduit le juge à statuer sur les demandes de TRUCK ETAPE en vérifiant leur régularité et leur bien-fondé.

Décision du Tribunal

Le tribunal a constaté l’acquisition de la clause résolutoire et a ordonné l’expulsion de CARON CHRISTOPHE SERVICES des locaux loués. Il a également condamné cette dernière à payer l’arriéré locatif de 33 115,26 euros et a fixé une indemnité d’occupation à 1685,08 euros par mois jusqu’à la libération des lieux.

Rejet de Certaines Demandes

La demande de provision de 30 000 euros pour l’évacuation des déchets a été rejetée, le tribunal n’ayant pas trouvé de preuve suffisante concernant l’état actuel du site.

Condamnation aux Dépens

Caron Christophe Services a été condamnée aux dépens et à verser 1000 euros à TRUCK ETAPE au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La décision a été signée le 5 novembre 2024 et bénéficie de l’exécution provisoire.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

5 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Valenciennes
RG n°
24/00236
N° RG 24/00236 – N° Portalis DBZT-W-B7I-GNEA

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES
O R D O N N A N C E de R E F E R E – N° RG 24/00236 – N° Portalis DBZT-W-B7I-GNEA
Code NAC : 30B Nature particulière : 0A

LE CINQ NOVEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE

DEMANDERESSE

La S.A.S. TRUCK ETAPE [Localité 6], dont le siège social est sis [Adresse 1], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège;

représentée par Maître Jean-Pierre BLATTIER, avocat membre de la SCP BLATTER SEYNAEVE, avocats associés au barreau de PARIS, substitué par Maître Pauline MAILLARD, avocat membre de la SCP SPEDER DUSART FIEVET MAILLARD, avocats au barreau de VALENCIENNES,

D’une part,

DEFENDERESSE

La Société CARON CHRISTOPHE SERVICE, dont le siège social est sis [Adresse 2], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège;

ne comparaissant pas;
D’autre part,

LE JUGE DES RÉFÉRÉS : Louis-Benoît BETERMIEZ, président,

LE GREFFIER : Stéphanie BUSIER, adjoint administratif faisant fonction de greffier,

DÉBATS : en audience publique le 15 octobre 2024,

ORDONNANCE : rendue par mise à disposition au greffe le 05 novembre 2024,

EXPOSE DU LITIGE

Par acte du 27 septembre 2024, la société par actions simplifiée (SAS) TRUCK ETAPE [Localité 6] a assigné la société par actions simplifiée (SAS) CARON CHRISTOPHE SERVICES, devant le président du tribunal judiciaire de Valenciennes, statuant en référé, aux fins de voir :
– constater l’acquisition de la clause résolutoire stipulée dans le bail à construction du 30 octobre 2014 liant les parties, à la date du 1er juillet 2024,
– ordonner l’expulsion de la société CARON CHRISTOPHE SERVICES et de tout occupant de son chef des locaux loués, avec l’assistance de la force publique s’il y a lieu,
– s’appliquer les dispositions des article L.433-1 et R.433-1 du code des procédures civiles d’exécution pour les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place,
– condamner la société CARON CHRISTOPHE SERVICES à lui payer la somme provisionnelle de 33 115,26 euros correspondant à l’arriéré de loyers et accessoires à la date d’acquisition de la clause résolutoire,
– condamner la société CARON CHRISTOPHE SERVICES à lui payer, à titre provisionnel, une indemnité d’occupation d’un montant de 1964,53 euros par mois, à compter du 1er juillet 2024 et jusqu’à libération des locaux par remise des clés,
– juger que si l’occupation devait se prolonger plus d’un an après l’acquisition de la clause résolutoire, l’indemnité d’occupation fixée serait indexée sur l’indice trimestriel du coût de la construction publié par l’INSEE, s’il évolue à la hause, l’indice de base étant le dernier indice paru à la date de l’acquisition de la clause résolutoire,
– condamner la société CARON CHRISTOPHE SERVICES à lui payer, à titre provisionnel, la somme de 30 000 euros pour lui permettre d’évacuer les déchets présents sur le site et de procéder à la dépollution des sols,
– dire, subsidiairement, en cas d’octroi de délais de paiement, que, à défaut de paiement d’une seule échéance à sa date ou à défaut de paiement de l’indemnité d’occupation courant à bonne date, le preneur sera déchu du terme et l’intégralité de la dette deviendra exigible,
– condamner la société CARON CHRISTOPHE SERVICES aux dépens, qui comprendront le coût de la levée d’un état des privilèges et nantissement de la dénonciation aux créanciers inscrits, et à lui payer la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

A l’appui de ses demandes, la société TRUCK ETAPE [Localité 6] expose qu’elle a donné à bail à construction à la société CARON [Localité 3] SERVICE, devenue société CARON CHRISTOPHE SERVICES, un terrain situé à la Sentinelle, afin de faire édifier une construction pour exploiter une station de lavage, moyennant un loyer à paliers, et que le bail a prévu une clause de résiliation de plein droit en cas de non-respect des obligations, en particulier en cas de non-paiement des loyers.
Elle fait valoir que, depuis plus d’un an, la défenderesse ne paye que très irrégulièrement ses loyers et accessoires; qu’elle lui a notifié une mise en demeure de payer les loyers et accessoires non-réglés, sous peine d’une résiliation du bail; que la société CARON CHRISTOPHE SERVICES n’a pas régularisé sa situation.
Elle considère que, dès lors, la clause résolutoire du bail trouve à s’appliquer.
Elle ajoute qu’en vertu du bail, le preneur est tenu de remettre les sols en état initial et que la nécessité de cette remise en état justifie la provision de 30 000 euros qu’elle sollicite.

La société CARON CHRISTOPHE SERVICES n’a pas comparu à l’audience ni n’était représentée.

A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré pour être rendue ce jour.

MOTIFS DE LA DECISION

Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

En l’espèce, malgré l’absence de la société CARON CHRISTOPHE SERVICES à l’audience, il convient de statuer sur les demandes de la société TRUCK ETAPE [Localité 6], après avoir vérifié, conformément à l’article précité, que celles-ci sont régulières, recevables et bien fondées.

Sur la demande d’expulsion et sur le sort des meubles :

Aux termes de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

En cas de constatation d’une clause résolutoire, l’urgence n’a pas à être caractérisée.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats par la société TRUCK ETAPE [Localité 6] que, par acte du 30 octobre 2014, elle a donné à bail à construction à la société CARON [Localité 3] SERVICE, devenue société CARON CHRISTOPHE SERVICES, un terrain situé lieu-dit  » [Localité 5] « , en bordure de la route départementale 630, à [Localité 4], aux fins d’édifier une construction pour exploiter une station de lavage. Le bail a prévu un loyer différencié sur quatre paliers, avec un palier notamment à 15 000 euros hors-taxes par an entre le 1er janvier 2016 et le 2 mai 2029, les loyers étant réglés par trimestre. Le bail a également prévu, en son article 11, qu’il serait résilié de plein droit à défaut pour le preneur de respecter les textes légaux et réglementaires ou d’exécuter une seule des conditions du bail, après mise en demeure de respecter ses obligations restées infructueuses à l’expiration d’un délai d’un mois.

Il en ressort également, que, se prévalant de nombreux impayés de loyers, la société en demande a fait délivrer à la société en défense, par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 5 juin 2024, un commandement de payer la somme de 27 585,43 euros en principal et frais d’actes, au titre des loyers et frais accessoires impayés, totalement ou partiellement, depuis le 1er janvier 2024, en visant expressément l’article 11 du bail du 30 octobre 2014.

Enfin, il ne ressort d’aucune pièce produite que la société CARON CHRISTOPHE SERVICES ait acquitté, dans le mois suivant la délivrance du commandement de payer, l’intégralité de ses causes.

Il s’ensuit qu’il doit être constaté que la clause résolutoire trouve à s’appliquer de façon incontestable et que le bail liant les parties a été résilié de plein droit à compter du 5 juillet 2024.

En conséquence, il sera ordonné l’expulsion de la société CARON CHRISTOPHE SERVICES des lieux loués par la société TRUCK ETAPE [Localité 6] et de tout occupant de son chef, selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision.

En outre, il sera fait application des dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d’exécution pour les meubles et objets mobiliers se trouvant sur place lors de l’expulsion.

Sur les demandes de provision :

Aux termes de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le juge des référés peut, dans tous les cas où l’obligation n’est pas sérieusement contestable, accorder une provision.

En l’espèce, il résulte du décompte locatif non-contesté produit par la société TRUCK ETAPE [Localité 6] que la société CARON CHRISTOPHE SERVICES lui est redevable de la somme de 33 115,36 euros au titre de son arriéré locatif, selon décompte arrêté au 05 juillet 2024.

En conséquence, la société CARON CHRISTOPHE SERVICES sera condamnée à payer à la demanderesse cette somme provisionnelle.

En outre, aucune preuve n’est apportée de la libération des lieux par la société en défense et cette occupation sans droit ni titre cause un préjudice certain à la demanderesse.

En conséquence, il sera fixé une indemnité d’occupation due par la société CARON CHRISTOPHE SERVICES depuis l’acquisition de la clause résolutoire et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, à titre provisionnel, d’un montant équivalent à celui du loyer et charges de l’année précédant l’acquisition de la clause résolutoire, soit 1685,08 euros par mois, et la défenderesse sera condamnée à régler cette somme jusqu’à libération des lieux.

De plus, la société TRUCK ETAPE [Localité 6] sollicite la condamnation de la société CARON CHRISTOPHE SERVICES à lui payer une somme provisionnelle de 30 000 euros au titre de l’évacuation des déchets présents sur le site et de la dépollution des sols.

À cet égard, si le bail du 30 octobre 2014 prévoit une obligation de remise en état du site à la charge du preneur, il n’est rapporté aucune preuve de l’état actuel du site de sorte que l’obligation d’évacuation des déchets et du dépollution des sols invoqués par la demanderesse est, en l’état, sérieusement contestable.

En conséquence, la société TRUCK ETAPE [Localité 6] sera déboutée de sa demande de provision à ce titre ainsi que tout autre demande provisionnelle.

Sur les demandes accessoires :

Aux termes de l’article 700 du code de procédure civile, dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.

En l’espèce, la société CARON CHRISTOPHE SERVICES, succombant à l’instance, sera condamnée aux dépens, étant précisé que la levée d’un état des privilèges et nantissements et une dénonciation aux créanciers inscrits ne sont pas des actes rendus nécessaires par la présente instance et étant rappelé que la présente décision n’a pas l’autorité de la chose jugée et que le juge du fond, en cas de saisine ultérieure, pourra régler différemment le sort des dépens.

En outre, la société en défense sera condamnée à payer à la société TRUCK ETAPE [Localité 6] la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Nous, juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort,

Constatons l’acquisition de la clause résolutoire du bail du 30 octobre 2014, signé entre la société par actions simplifiée (SAS) TRUCK ETAPE [Localité 6] et la société par actions simplifiée (SAS) CARON CHRISTOPHE SERVICE, à la date du 5 juillet 2024,

Ordonnons, à défaut de restitution volontaire des lieux loués dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l’expulsion de la société par actions simplifiée (SAS) CARON CHRISTOPHE SERVICE et de tout occupant de son chef desdits lieux, situés lieu-dit  » [Localité 5] « , en bordure de la route départementale 630, à [Localité 4],

Condamnons la société par actions simplifiée (SAS) CARON CHRISTOPHE SERVICE à payer à la société par actions simplifiée (SAS) TRUCK ETAPE [Localité 6] la somme provisionnelle de 33 115,26 euros au titre de l’arriéré locatif depuis le 1er janvier 2024, selon décompte arrêté au 5 juillet 2024,

Fixons à titre provisionnel l’indemnité d’occupation due par la société par actions simplifiée (SAS) CARON CHRISTOPHE SERVICE à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant moyen du loyer et des charges l’année précédant l’acquisition de la clause résolutoire, soit 1685,08 euros par mois, et condamnons la société par actions simplifiée (SAS) CARON CHRISTOPHE SERVICE à la régler à la société par actions simplifiée (SAS) TRUCK ETAPE [Localité 6], en quittance ou en deniers,

Déboutons la société par actions simplifiée (SAS) TRUCK ETAPE [Localité 6] du surplus de ses demandes principales,

Condamnons la société par actions simplifiée (SAS) CARON CHRISTOPHE SERVICE aux dépens,

Condamnons la société par actions simplifiée (SAS) CARON CHRISTOPHE SERVICE à payer à la société par actions simplifiée (SAS) TRUCK ETAPE [Localité 6] la somme de 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Rappelons que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire.

En foi de quoi la présente décision a été signée par le président et le greffier, le 5 novembre 2024.

Le greffier, Le président,


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