Résiliation de bail commercial et enjeux de la clause résolutoire en cas d’impayés

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Résiliation de bail commercial et enjeux de la clause résolutoire en cas d’impayés

L’Essentiel : En août et septembre 2005, l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH a signé un bail commercial avec la société Samakrand pour un local à [Adresse 1]. Après plusieurs cessions, la SARL Caméléon a hérité du bail, renouvelé en juin 2016. Cependant, des loyers impayés ont conduit à un commandement de payer en juin 2023, totalisant 19 377,81 €. En février 2024, l’EPIC a assigné la SARL Caméléon pour expulsion et paiement des arriérés. Le tribunal a constaté la clause résolutoire, ordonné l’expulsion et condamné la SARL à verser une indemnité d’occupation et des intérêts.

Contexte du Bail Commercial

L’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH a conclu un bail commercial avec la société Samakrand pour un local situé à [Adresse 1] à [Localité 5] en août et septembre 2005. En mai 2010, Samakrand a cédé son droit au bail à la société Crêperie du Marais, qui a ensuite transféré tous les éléments de son fonds de commerce, y compris le droit au bail, à la société Caméléon en juillet 2012. Le bail a été renouvelé en juin 2016 pour une durée de neuf ans, avec un loyer annuel de 15 255 €.

Impayés et Commandement de Payer

Des loyers sont restés impayés, conduisant le bailleur à délivrer un commandement de payer le 15 juin 2023 à la SARL Caméléon, pour un montant total de 19 377,81 € au titre de l’arriéré locatif. En septembre 2023, la SARL Caméléon a demandé le renouvellement du bail, mais cette demande a été refusée par l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH.

Assignation en Référé

Le 20 février 2024, l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH a assigné la SARL Caméléon devant le tribunal judiciaire de Paris pour obtenir son expulsion et le paiement des loyers dus. Lors de l’audience du 28 octobre 2024, l’EPIC a demandé la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire, l’expulsion de la SARL Caméléon, ainsi que le paiement d’une somme provisionnelle pour l’arriéré locatif.

Arguments de l’EPIC

L’EPIC a soutenu que le bail était toujours en cours et que la ville n’avait aucune obligation d’accorder des exonérations de loyers durant la crise sanitaire. Il a également précisé que le décompte de la dette locative, joint au commandement de payer, indiquait clairement les exonérations dont la SARL Caméléon avait bénéficié.

Réponse de la SARL Caméléon

La SARL Caméléon a demandé le rejet des demandes de l’EPIC, arguant que le refus de renouvellement du bail était nul et qu’il existait des contestations sérieuses concernant le montant des loyers dus. Elle a également contesté la validité du commandement de payer, affirmant qu’il ne distinguait pas entre les loyers dus et les exonérations accordées.

Décision du Tribunal

Le tribunal a constaté l’acquisition de la clause résolutoire et a ordonné l’expulsion de la SARL Caméléon en cas de non-restitution volontaire des lieux. Il a également condamné la SARL Caméléon à payer une indemnité d’occupation provisionnelle et une somme pour l’arriéré locatif, avec des intérêts au taux légal. Les demandes de majoration des indemnités d’occupation et de conservation du dépôt de garantie ont été rejetées.

Conséquences Financières

La SARL Caméléon a été condamnée à payer une somme provisionnelle de 19 377,81 € pour les loyers dus, ainsi qu’une indemnité d’occupation calculée sur la base du loyer contractuel. Le tribunal a également ordonné la capitalisation des intérêts et a précisé que les dépens seraient à la charge de la SARL Caméléon.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’acquisition de la clause résolutoire dans le cadre d’un bail commercial ?

L’article L. 145-41 du code de commerce précise que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux.

Ce commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Ainsi, pour qu’une clause résolutoire soit acquise, il est nécessaire que :

– Le bailleur ait délivré un commandement de payer,
– Ce commandement soit resté sans effet pendant un mois,
– La clause résolutoire soit clairement stipulée dans le bail.

Dans le cas présent, l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH a délivré un commandement de payer le 15 juin 2023, qui a été resté infructueux.

Dès lors, la clause résolutoire est acquise, entraînant la résiliation de plein droit du bail.

Quels sont les droits du bailleur en cas de résiliation du bail commercial ?

L’article 835 alinéa 1er du code de procédure civile stipule que le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent.

Cela inclut l’expulsion du locataire en cas de non-restitution volontaire des lieux.

En effet, le maintien dans un immeuble sans droit ni titre constitue un trouble manifestement illicite.

Ainsi, le bailleur a le droit de demander l’expulsion du locataire et de tous occupants des lieux loués, avec le concours de la force publique si nécessaire.

Dans cette affaire, l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH a demandé l’expulsion de la SARL Caméléon, ce qui est conforme aux droits du bailleur après la résiliation du bail.

Comment se calcule l’indemnité d’occupation due par le locataire après la résiliation du bail ?

L’article 1728 du code civil précise que le paiement du prix du bail aux termes convenus constitue l’une des obligations principales du locataire.

Après la résiliation du bail, le locataire n’est plus débiteur de loyers, mais d’une indemnité d’occupation.

Cette indemnité est généralement fixée au montant du loyer contractuel, plus les charges, taxes et accessoires.

Dans le cas présent, l’indemnité d’occupation due par la SARL Caméléon depuis l’acquisition de la clause résolutoire est fixée à titre provisionnel au montant du loyer contractuel, en plus des charges et taxes.

Cela signifie que la SARL Caméléon devra payer une indemnité d’occupation équivalente au loyer convenu jusqu’à la libération effective des lieux.

Quelles sont les conséquences de la résiliation du bail sur les obligations de paiement du locataire ?

L’article 1353 du code civil stipule que c’est à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver.

Après la résiliation du bail, le locataire est tenu de payer une indemnité d’occupation, mais il n’est plus débiteur de loyers.

Dans cette affaire, la SARL Caméléon est tenue de payer une somme provisionnelle de 19 377,81 € au titre de l’arriéré locatif, ainsi que des indemnités d’occupation.

Ces sommes sont considérées comme non sérieusement contestables, ce qui permet au juge des référés d’ordonner leur paiement sans condition d’urgence.

Ainsi, la SARL Caméléon doit s’acquitter de ces obligations financières suite à la résiliation du bail.

Quelles sont les modalités de recouvrement des dépens dans le cadre d’une procédure judiciaire ?

L’article 699 du code de procédure civile précise que les dépens, incluant les frais de commandement et d’assignation, seront recouvrés selon les modalités établies par le juge.

En cas de condamnation, la partie perdante doit supporter la charge des dépens.

Dans cette affaire, la SARL Caméléon, en tant que partie condamnée, devra payer les dépens, y compris les frais liés à la procédure.

Cela signifie que tous les frais engagés par l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH pour faire valoir ses droits seront à la charge de la SARL Caméléon, conformément aux dispositions légales en vigueur.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/51371 – N° Portalis 352J-W-B7I-C4ACM

N° : 5

Assignation du :
20 Février 2024

[1]

[1] 2 Copies exécutoires
délivrées le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 25 novembre 2024

par Lucie LETOMBE, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Pascale GARAVEL, Greffier.
DEMANDEUR

L’E.P.I.C. [Localité 4] HABITAT – OPH anciennement l’Office Public d’Aménagement et de Construction de [Localité 4] (OPAC de [Localité 4])
[Adresse 2]
[Localité 3]

représenté par Maître Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocats au barreau de PARIS – #P0173

DEFENDERESSE

La société dénommée CAMELEON S.A.R.L.
[Adresse 1]
[Localité 5]

représentée par Me Mathieu RETORET, avocat au barreau de PARIS – #E1512

DÉBATS

A l’audience du 28 Octobre 2024, tenue publiquement, présidée par Lucie LETOMBE, Juge, assistée de Pascale GARAVEL, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

EXPOSE DU LITIGE

Par actes du 28 août et du 1er septembre 2005, l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH a donné à bail commercial à la société Samakrand un local à usage commercial sis [Adresse 1] à [Localité 5].

Par acte du 21 mai 2010, la société Samakrand a cédé à la société Crêperie du Marais son droit au bail.

Par acte du 3 juillet 2012, la société Crêperie du Marais a cédé à la société Caméléon tous les éléments du fonds de commerce exploité dans les locaux loués, en ce compris son droit au bail.

Ledit bail a été renouvelé suivant acte du 15 juin 2016 à effet du 1er octobre 2014, pour une durée de 9 années venant à terme le 30 septembre 2023, moyennant un loyer annuel, horst taxes et hors charges, de 15 255 €.

Des loyers sont demeurés impayés.

Le bailleur a fait délivrer un commandement de payer visant la clause résolutoire, par acte de commissire de justice en date du 15 juin 2023, à la SARL Caméléon, pour une somme de 19 377,81 € en principal, au titre de l’arriéré locatif au 12 juin 2023.

Le 14 septembre 2023, la SARL Caméléon a adressé au bailleur une demande de renouvellement au bail, qui a été refusé le 29 septembre 2023 par l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH.

Par acte délivré le 20 février 2024, l’EPIC Paris Habitat-OPH a fait assigner la SARL Caméléon devant le président du tribunal judiciaire de Paris statuant en référé aux fins de voir prononcer son expulsion et la condamner au paiement des loyers, charges, indemnités d’occupation, et clause pénales contractuelles afférentes.

Par conclusions déposées à l’audience du 28 octobre 2024 et soutenues oralement par son conseil, l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH demande au juge des référés de :

– constater l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail,
– ordonner l’expulsion de la SARL Caméléon et celle de tous occupants de son chef des lieux loués avec le concours de la force publique et d’un serrurier si besoin est,
– ordonner la séquestration du mobilier trouvé dans les lieux dans tel garde-meubles qu’il plaira au bailleur aux frais, risques et péril de la partie expulsée, en conformité avec les dispositions des articles L.433-1 et R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,
– condamner la SARL Caméléon à lui payer la somme provisionnelle de 19 377,81 € au titre de l’arriéré locatif, due au 13 novembre 2023,

– condamner la SARL Caméléon au paiement d’une indemnité d’occupation provisionnelle égale au montant des loyers, charges et taxes, majoré de 20 %, à compter de la date de résiliation du bail et jusqu’à la libération des locaux qui se matérialisera par la remise des clés,
– dire que ces sommes seront majorées d’intérêts au taux des avances sur titres de la banque de France majoré de deux points, à compter de leur exigibilité,
– ordonner la capitalisation des intérêts,
– l’autoriser à conserver le dépôt de garantie,
– n’accorder aucun délai de paiement ou, à titre subsidiaire, prévoir une clause de déchéance du terme en cas de défaut de paiement d’une échéance,
– débouter la SARL Caméléon de ses demandes,
– condamner la SARL Caméléon au paiement d’une somme de 2 000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du même code.

L’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH fait valoir que :
– il ne conteste pas que le bail est toujours en cours, l’argumentaire de la SARL Caméléon sur le congé et le renouvellement du bail étant inopérant,
– la ville de [Localité 4] n’avait aucune obligation d’accorder des exonérations de loyers pendant la crise sanitaire,
– le décompte de la dette locative, joint au commandement de payer, fait apparaître clairement les exonérations dont a bénéficié la défenderesse par les mentions « exo Covid charges » ou « exo Covid loyers »,
– la SARL Caméléon ne tire pas de conséquence de cet argument : « il n’est pas à exclure que le loyer à venir soit inférieur au loyer indexé du bail venu à expiration d’où le cas échéant un droit à compensation dont la société CAMELEON pourrait se prévaloir ultérieurement. »

Par conclusions déposées à l’audience et soutenues oralement par son conseil, la SARL Caméléon demande au juge des référés de :
– rejeter l’intégralité des demandes de l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH,
– prononcer la nullité du congé,
– condamner l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH aux dépens,
– à titre subsidiaire, renvoyer l’affaire au fond et réserver les dépens.

La SARL Caméléon allègue que le refus de renouvellement du bail est nul, au visa de l’article L 145-10 alinéa 5 du code de commerce.

Elle soutient qu’il existe des contestations sérieuses sur le montant des loyers au vu des :
– délibérations de la ville de [Localité 4] 2020 SG 17 et 2021 DLH 150 en matière d’exonération des loyers et charges durant la crise sanitaire, en ce qu’elle a bénéficié d’une exonération de 10 213,83 € au lieu de 20 849,61 €,
– incertitudes sur la valeur locative des lieux, le bail ayant expiré le 30 septembre 2023 et la clause d’échelle mobile devait être adaptée à la valeur locative.

Elle invoque la nullité du commandement de payer du 15 juin 2023 au motif que le décompte de la dette locative, joint à l’acte, ne distingue pas entre les loyers dus et les exonérations accordées lors de la crise sanitaire.

Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience.

L’affaire a été mise en délibéré au 25 novembre 2024.

MOTIFS

Sur la demande relative à l’acquisition de la clause résolutoire et sur les demandes subséquentes

L’article 834 du code de procédure civile dispose que, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

La juridiction des référés n’est toutefois pas tenue de caractériser l’urgence, au sens de l’article 834 du code de procédure civile, pour constater l’acquisition de la clause résolutoire stipulée dans un bail et la résiliation de droit d’un bail.

L’article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Le bailleur, au titre d’un bail commercial, demandant la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire comprise stipulée dans le bail doit rapporter la preuve de sa créance.

Le juge des référés peut constater la résiliation de plein droit du bail au titre d’une clause contenue à l’acte à cet effet, à condition que :
– le défaut de paiement de la somme réclamée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire soit manifestement fautif,
– le bailleur soit, de toute évidence, en situation d’invoquer de bonne foi la mise en jeu de cette clause,
– la clause résolutoire soit dénuée d’ambiguïté et ne nécessite pas interprétation.

Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses résolutoires, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

L’octroi des délais de paiement autorisés par l’article 1343-5 du code civil n’est par ailleurs nullement conditionné à la seule existence d’une situation économique catastrophique de celui qui les demande mais relève du pouvoir discrétionnaire du juge.

Cependant, la juridiction des référés ne peut, sans excéder ses pouvoirs, accorder d’office un délai de grâce et suspendre les effets de la clause résolutoire dès lors que ce délai ne lui a pas été demandé par le preneur.

Au cas présent, la soumission du bail au statut des baux commerciaux ne donne lieu à aucune discussion.

Le bail prévoit une clause résolutoire stipulant sa résiliation de plein droit à défaut de paiement d’un seul terme de loyer, accessoires et autres charges, un mois après un commandement de payer resté infructueux.

Contrairement à ce qu’affirme la défenderesse, il n’existe aucune contestation sérieuse sur la régularité du commandement en ce qu’il correspond exactement au détail des montants réclamées préalablement au preneur par le bailleur. En annexe du commandement, figure en effet le détail complet des loyers et charges dus et le décompte des versements effectués, ainsi que les exonérations accordées lors de la crise sanitaire. Le commandement précise qu’à défaut de paiement dans le délai d’un mois, le bailleur entend expressément se prévaloir de la clause résolutoire incluse dans le bail ; la reproduction de la clause résolutoire et de l’article L. 145-17 alinéa 1 du code de commerce y figurent. Le commandement contenait ainsi toutes les précisions permettant au locataire de connaître la nature, les causes et le montant des sommes réclamées, de procéder au règlement des sommes dues ou de motiver la critique du décompte.

En faisant délivrer ce commandement, l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH n’a fait qu’exercer ses droits légitimes de bailleur face à un locataire ne respectant pas les clauses du bail alors que celles-ci avaient été acceptées en toute connaissance de cause.

Ce commandement détaille le montant de la créance, à savoir la somme de 19 377,81 € en principal, au titre de l’arriéré locatif au 12 juin 2023.

Les causes de ce commandement n’ont pas été acquittées dans le mois de sa délivrance.

Dès lors, la clause résolutoire est acquise et le bail se trouve résilié de plein droit avec toutes conséquences de droit. Dès lors, la clause résolutoire est acquise et le bail se trouve résilié de plein droit avec toutes conséquences de droit.

Aux termes de l’article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le maintien dans un immeuble, sans droit ni titre du fait de la résiliation du bail, constitue un trouble manifestement illicite.

L’expulsion de la SARL Caméléon et de tout occupant de son chef doit donc être ordonnée en cas de non restitution volontaire des lieux dans le mois suivant la signification de la présente ordonnance.

Le sort des meubles trouvés dans les lieux sera régi en cas d’expulsion conformément aux dispositions du code des procédures civiles d’exécution et selon les modalités précisées au dispositif de l’ordonnance.

Sur la demande de provision

L’article 835 alinéa 2 du code de procédure dispose que, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier.

Aux termes de l’article 1728 du code civil, le paiement du prix du bail aux termes convenus constitue l’une des deux obligations principales du locataire.

Aux termes de l’article 1353 du code civil, c’est à celui qui réclame l’exécution d’une obligation de la prouver et à celui qui se prétend libéré de justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation

Il est rappelé qu’à compter de la résiliation du bail par l’effet de la clause résolutoire, le preneur n’est plus débiteur de loyers mais d’une indemnité d’occupation.

L’indemnité d’occupation due par la SARL Caméléon depuis l’acquisition de la clause résolutoire et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, sera fixée à titre provisionnel au montant du loyer contractuel, outre les charges, taxes et accessoires.

S’agissant du paiement, par provision, de l’arriéré locatif, il convient de rappeler qu’une demande en paiement de provision au titre d’une créance non sérieusement contestable relève du pouvoir du juge des référés sans condition de l’existence d’une urgence, aux termes de l’article 835 du code de procédure civile. Le montant de la provision allouée en référé n’a d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée

Au cas présent, il convient de relever l’absence de contestations sérieuses sur le montant des loyers et indemnités d’occupation dus, le commandement de payer ayant été délivré avant le terme du contrat du bail. En outre, la ville de [Localité 4] pouvait discrétionnairement accorder des exonérations de loyers pendant la crise sanitaire causée par le Covid 19.

Ainsi, au vu du décompte produit par l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH, l’obligation de la SARL Caméléon au titre des loyers, charges, taxes, accessoires et indemnités d’occupation au 13 novembre 2023 n’est pas sérieusement contestable à hauteur de 19 377,81 €, somme provisionnelle au paiement de laquelle il convient de condamner la SARL Caméléon.

Cette provision sera assortie en application de l’article 1231-6 du code civil des intérêts au taux légal depuis la date de délivrance du commandement du 15 juin 2023.

La capitalisation des intérêts sera ordonnée, en application de l’article 1343-2 du code civil.

En revanche, les demandes de majoration des indemnités d’occupation et des intérêts de retard, et de conservation du dépôt de garantie s’analysent comme des clauses pénales et comme telles sont susceptibles d’être modérées par le juge du fond, en raison de leur caractère manifestement excessif ; par suite, il n’y a pas lieu à référé sur ces points.

Sur les demandes accessoires

La SARL Caméléon, défendeur condamné au paiement d’une provision, doit supporter la charge des dépens, incluant les frais de commandement et d’assignation, qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile.

L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer : 1° A l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, 2° et, le cas échéant, à l’avocat du bénéficiaire de l’aide juridictionnelle partielle ou totale une somme au titre des honoraires et frais, non compris dans les dépens, que le bénéficiaire de l’aide aurait exposés s’il n’avait pas eu cette aide. Dans ce cas, il est procédé comme il est dit aux alinéas 3 et 4 de l’article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations. Néanmoins, s’il alloue une somme au titre du 2° du présent article, celle-ci ne peut être inférieure à la part contributive de l’Etat.

Il est rappelé que la juridiction des référés a le pouvoir de prononcer une condamnation en application de ces dispositions.

Aucun élément tiré de l’équité ou de la situation économique de la SARL Caméléon ne permet d’écarter la demande de l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH formée sur le fondement des dispositions susvisées. Celle-ci sera cependant évaluée à la somme de 1 000 € en l’absence d’éléments de calcul plus explicites versés aux débats.

PAR CES MOTIFS

Statuant par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort,

Constatons l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 15 juillet 2023 à minuit ;

Ordonnons, à défaut de restitution volontaire des lieux dans le mois suivant la signification de la présente ordonnance, l’expulsion de la SARL Caméléon et de tout occupant de son chef des lieux situés au [Adresse 1] à [Localité 5], avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d’un serrurier ;

Rappelons que le sort des meubles trouvés sur place est régi par les dispositions des articles R.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;

Condamnons, à titre provisionnel, la SARL Caméléon à payer à l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH une indemnité d’occupation, à compter de la résiliation du bail du 15 juillet 2023 et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, fixée à une somme égale au montant du loyer contractuel, outre les taxes, charges et accessoires ;

Condamnons par provision la SARL Caméléon à payer à l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH la somme de 19 377,81 € à valoir sur les loyers, charges, accessoires et indemnités d’occupation arriérés arrêtés au 13 novembre 2023, avec intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2023, ainsi que les indemnités d’occupation postérieures ;

Ordonnons la capitalisation des intérêts ;

Disons n’y avoir lieu à référé sur les demandes de majoration des indemnités d’occupation, de majoration des intérêts de retard, et de conservation du dépôt de garantie ;

Condamnons la société la SARL Caméléon aux entiers dépens, en ce compris le coût du commandement, de l’assignation et de signification de la présente ordonnance, qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile ;

Condamnons la société la SARL Caméléon à payer à l’EPIC [Localité 4] Habitat-OPH la somme de 1 000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Disons n’y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.

Fait à Paris le 25 novembre 2024

Le Greffier, Le Président,

Pascale GARAVEL Lucie LETOMBE


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