Résiliation de bail et mesures de surendettement : équilibre entre créancier et débiteur.

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Résiliation de bail et mesures de surendettement : équilibre entre créancier et débiteur.

L’Essentiel : La société VILOGIA a engagé une procédure judiciaire contre [I] [T] pour résilier un bail en raison de loyers impayés. Un commandement de payer a été délivré le 1er septembre 2023, totalisant 1.786,00 euros. Lors de l’audience du 4 juillet 2024, la dette a été mise à jour à 5.618,01 euros. Le juge a reconnu la recevabilité de l’action de VILOGIA, tout en suspendant les effets de la clause résolutoire. [I] [T] a été condamnée à payer cette somme, avec des modalités de paiement échelonné, sous peine d’expulsion en cas de non-respect.

Contexte du litige

La société anonyme VILOGIA a signé un bail avec [I] [T] le 3 décembre 2009, pour un immeuble à usage d’habitation, avec un loyer mensuel de 427,58 euros et des provisions sur charges de 137,47 euros. En raison de loyers et charges impayés, un commandement de payer a été délivré à [I] [T] le 1er septembre 2023, pour un montant de 1.786,00 euros.

Procédures judiciaires

Le 16 novembre 2023, VILOGIA a cité [I] [T] devant le juge des contentieux de la protection pour obtenir la résiliation du bail et l’expulsion de la locataire. La demande incluait également le paiement des loyers et charges impayés, ainsi que des indemnités. Un diagnostic social et financier a été réalisé, et la commission de surendettement a déclaré la situation de surendettement de [I] [T] le 27 décembre 2023.

Décisions de la commission de surendettement

La commission a imposé un moratoire de deux ans sur l’exigibilité de la dette locative de 3.077,14 euros, à compter du 19 août 2024. Ce moratoire a été mis en place pour permettre à [I] [T] de gérer sa situation financière tout en continuant à payer le loyer courant.

Audience et plaidoiries

Lors de l’audience du 4 juillet 2024, les parties ont échangé leurs arguments, et l’affaire a été renvoyée au 4 novembre 2024. À cette audience, VILOGIA a mis à jour le montant de la dette à 5.618,01 euros, tandis que [I] [T] a demandé des délais de paiement et la suspension de la clause résolutoire.

Arguments des parties

VILOGIA a soutenu que les conditions de la clause résolutoire étaient réunies avant le dépôt du dossier de surendettement par [I] [T]. De son côté, [I] [T] a demandé des délais pour apurer sa dette, invoquant sa situation financière et le respect des paiements courants.

Décision du juge

Le juge a déclaré recevable l’action de VILOGIA et a accordé l’aide juridictionnelle provisoire à [I] [T]. Il a constaté que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies depuis le 2 novembre 2023, tout en ordonnant la suspension de ses effets. [I] [T] a été condamnée à payer 5.618,01 euros pour les loyers et charges impayés.

Modalités de paiement et conséquences

Le juge a suspendu l’exigibilité de la créance locative de 3.077,14 euros jusqu’au 19 novembre 2026, tout en permettant à [I] [T] de régler le surplus de sa dette de 2.540,87 euros par mensualités. En cas de non-paiement, la clause résolutoire redeviendrait effective, entraînant la résiliation du bail et l’expulsion de [I] [T].

Conclusion

La décision a été rendue le 13 janvier 2025, avec des dispositions concernant les frais de justice et le rejet de certaines demandes de VILOGIA. La décision est exécutoire de droit à titre provisoire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de la clause résolutoire dans le contrat de bail ?

La clause résolutoire dans un contrat de bail est régie par l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989. Cet article stipule que :

« Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux. »

Dans le cas présent, la SA VILOGIA a signifié un commandement de payer à [I] [T] le 1er septembre 2023, pour un montant de 1.786,00 euros.

Ce commandement a fixé un délai d’apurement de la dette à six semaines, conformément à la version de l’article 24 I applicable à l’époque.

Il est important de noter que, selon l’article 7 a) de la même loi, le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

Ainsi, si le locataire ne régularise pas sa situation dans le délai imparti, la clause résolutoire peut être activée, entraînant la résiliation du bail.

Comment la situation de surendettement affecte-t-elle l’exigibilité de la créance locative ?

La situation de surendettement d’un locataire peut avoir des conséquences sur l’exigibilité de la créance locative, comme le précise l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

Cet article, dans sa version modifiée par la loi n° 2023-668 du 27 juillet 2023, indique que :

« Lorsque la commission de surendettement des particuliers a imposé pendant un délai la suspension de l’exigibilité de la créance locative, le juge accorde ce délai prolongé de trois mois pour permettre au locataire de saisir à nouveau la commission de surendettement. »

Dans le cas de [I] [T], la commission de surendettement a constaté sa situation de surendettement et a imposé une suspension de l’exigibilité de la créance locative à hauteur de 3.077,14 euros pendant 24 mois.

Cela signifie que tant que [I] [T] respecte les conditions de ce plan, les effets de la clause résolutoire sont suspendus.

Cependant, si le locataire ne respecte pas ses obligations de paiement, la clause résolutoire peut reprendre son plein effet, entraînant la résiliation du bail.

Quels sont les droits du bailleur en cas de non-paiement des loyers ?

En cas de non-paiement des loyers, le bailleur dispose de plusieurs droits, notamment en vertu de l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

Cet article précise que :

« Le bailleur peut demander la résiliation du bail et l’expulsion du locataire en cas de non-paiement des loyers. »

De plus, l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution permet au bailleur de demander l’expulsion du locataire, avec l’assistance de la force publique, si le locataire ne libère pas les lieux dans le délai imparti après un commandement d’avoir à libérer les lieux.

Dans le cas présent, la SA VILOGIA a demandé l’expulsion de [I] [T] ainsi que le paiement des loyers et charges impayés.

Si le locataire ne s’acquitte pas de ses obligations, le bailleur peut procéder à l’expulsion, conformément aux dispositions légales en vigueur.

Quelles sont les conséquences d’une résiliation de bail pour le locataire ?

La résiliation d’un bail a des conséquences significatives pour le locataire, notamment en ce qui concerne le paiement des loyers et charges.

Selon l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, en cas de résiliation du bail, le locataire est tenu de payer une indemnité mensuelle d’occupation.

Cette indemnité est égale au montant du loyer qui aurait été dû si le bail n’avait pas été résilié, augmentée des charges récupérables.

De plus, si le locataire ne libère pas les lieux dans le délai imparti, il peut être expulsé avec l’assistance de la force publique, conformément à l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution.

Il est également important de noter que, si le locataire ne respecte pas ses obligations de paiement pendant les délais accordés, la clause résolutoire reprendra son plein effet, entraînant la résiliation du bail et l’expulsion.

Quelles sont les modalités de paiement des dettes locatives en cas de plan de surendettement ?

Les modalités de paiement des dettes locatives en cas de plan de surendettement sont encadrées par l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

Cet article stipule que :

« Le juge peut, à la demande du locataire, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l’article 1343-5 du code civil. »

Dans le cas de [I] [T], le juge a autorisé le paiement de la dette locative restante de 2.540,87 euros par 35 mensualités de 50 euros, suivies d’une dernière mensualité pour solder la dette.

Ces mensualités seront exigibles le 10 de chaque mois, et la première sera due le mois suivant la signification du jugement.

Il est crucial que le locataire respecte ces modalités de paiement, car tout manquement pourrait entraîner la reprise des effets de la clause résolutoire et la résiliation du bail.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
de LILLE
[Localité 2]

☎ :[XXXXXXXX01]

N° RG 23/10655 – N° Portalis DBZS-W-B7H-XXUK

JUGEMENT

DU : 13 Janvier 2025

S.A. VILOGIA

C/

[I] [T]

REPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

JUGEMENT DU 13 Janvier 2025

DANS LE LITIGE ENTRE :

DEMANDEUR(S)

S.A. VILOGIA, dont le siège social est sis [Adresse 3]

représentée par Représentant : M. [D] [Y], muni d’un pouvoir

ET :

DÉFENDEUR(S)

Mme [I] [T], demeurant [Adresse 4]

représentée par Me Camille GHESQUIERE, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DES DÉBATS À L’AUDIENCE PUBLIQUE DU 04 Novembre 2024

Noémie LOMBARD, Juge, assisté(e) de Deniz AGANOGLU, Greffier

COMPOSITION DU TRIBUNAL LORS DU DÉLIBÉRÉ

Par mise à disposition au Greffe le 13 Janvier 2025, date indiquée à l’issue des débats par Noémie LOMBARD, Juge, assisté(e) de Deniz AGANOGLU, Greffier

RG : 23/10655 PAGE

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous-seing privé du 3 décembre 2009 à effet au 16 décembre 2009, la société anonyme (ci-après SA) VILOGIA a donné à bail à [I] [T] un immeuble à usage d’habitation n°211212 sis [Adresse 4] à [Localité 5], moyennant un loyer mensuel initial de 427,58 euros outre 137,47 euros de provisions sur charges.

Par acte d’huissier du 1er septembre 2023, la SA VILOGIA a fait délivrer à [I] [T] un commandement de payer visant la clause résolutoire insérée au contrat de bail pour un montant principal de 1.786,00 euros au titre des loyers et charges impayés.

Par acte d’huissier du 16 novembre 2023, la SA VILOGIA a fait citer [I] [T] à comparaître devant le juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de Lille à l’audience du 4 juillet 2024 aux fins d’obtenir, sous le bénéfice de l’exécution provisoire, :
à titre principal, le constat de la résiliation du bail par le jeu de la clause résolutoire et, à titre subsidiaire, le prononcé de la résiliation du bail pour non-paiement des loyers et charges ; l’expulsion de [I] [T] ainsi que celle de toute personne introduite par elle dans le logement, dans le délai de deux mois du commandement d’avoir à libérer les lieux et ce, au besoin, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier ;la condamnation de [I] [T] à lui payer la somme de 3.077,14 euros représentant les loyers et charges impayés au jour de la résiliation du bail ;la condamnation de [I] [T] à lui payer les loyers et charges impayés à compter du jour de la résiliation du bail et jusqu’au jour du jugement ;la condamnation de [I] [T] à lui payer une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant du loyer courant et des charges à compter de la résiliation du bail et jusqu’à la libération effective des lieux ;la condamnation de [I] [T] au paiement des intérêts au taux légal à compter de la présente décision ;le constat que la part correspondant aux charges dans cette indemnité d’occupation pourra être réajustée au cas où les charges réelles de l’année dépasseraient 12 fois la provision ;la condamnation de [I] [T] à lui payer la somme de 150 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;la condamnation de [I] [T] aux entiers frais et dépens en ce compris le coût du commandement de payer.
Un diagnostic social et financier du 28 novembre 2023 est contenu au dossier.

En sa séance du 27 décembre 2023, la commission de surendettement des particuliers du Nord a constaté la situation de surendettement de [I] [T] et déclaré recevable son dossier déposé le 8 novembre 2023, comprenant une dette locative contractée envers la SA VILOGIA à hauteur de 3.077,14 euros.

Des mesures de désendettement imposées par la commission de surendettement, en l’espèce un moratoire consistant en une suspension de l’exigibilité de la dette locative pendant deux ans, sont entrées en application le 19 août 2024.

A l’audience du 4 juillet 2024, le juge a organisé les échanges en présence des parties représentées par leur conseil et renvoyé l’affaire à l’audience de plaidoiries du 4 novembre 2024.

A l’audience du 4 novembre 2024, la SA VILOGIA, représentée par son conseil, a soutenu oralement ses dernières écritures aux termes desquelles elle réitère les demandes contenues dans son acte introductif d’instance, sauf à actualiser le montant de la dette locative à la somme de 5.618,01 euros au 30 octobre 2024, terme inclus. Elle s’est en outre opposée aux demandes de délais présentées par la défenderesse.

Elle fait valoir que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies au 2 novembre 2023, soit avant le dépôt par [I] [T] d’un dossier de surendettement. Elle réplique que la locataire a aggravé sa dette entre la recevabilité du dossier de surendettement et la date d’audience et que sa situation financière ne lui permet pas de s’acquitter de sa dette en sus du paiement des loyers courant.

Se référant oralement aux termes de ses dernières écritures visées à l’audience, [I] [T], représentée par son conseil, a demandé au juge des contentieux de la protection, au visa de l’article 24 de la loi du 6 juillet 1989 et de l’article 1343-5 du code civil, de :

lui accorder l’aide juridictionnelle provisoire ;suspendre l’exigibilité de la dette de 3.077,14 euros jusqu’au 30 décembre 2026 ;suspendre les effets de la clause résolutoire stipulée dans le contrat de bail ;lui accorder un délai de 36 mois pour apurer le reliquat de la dette locative ;dire que les mensualités seront exigibles le 10 de chaque mois ;rejeter la demande présentée par la SA VILOGIA au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;à titre subsidiaire,
écarter l’exécution provisoire du jugement,lui accorder des délais pour quitter les lieux (12 mois).
Au soutien, elle considère qu’au regard de la décision de la commission de surendettement des particuliers du Nord et de la reprise du paiement du loyer courant, il y a lieu de suspendre l’exigibilité de la dette de 3.077,14 euros jusqu’au 30 décembre 2026. Pour le surplus de la dette, elle sollicite des délais de paiements sur 36 mois au motif qu’elle a effectué des versements supérieurs au montant du loyer courant sur les dernières échéances et que sa situation financière, dont elle fait état, lui permet de s’acquitter de sa dette par de telles mensualités.

A l’issue de l’audience, la décision a été mise en délibéré au 13 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l’aide juridictionnelle provisoire :

Aux termes de l’article 20 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique :
« Dans les cas d’urgence, sous réserve de l’application des règles relatives aux commissions ou désignations d’office, l’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président.
L’admission provisoire à l’aide juridictionnelle peut également être accordée lorsque la procédure met en péril les conditions essentielles de vie de l’intéressé, notamment en cas d’exécution forcée emportant saisie de biens ou expulsion.
L’aide juridictionnelle est attribuée de plein droit à titre provisoire dans le cadre des procédures présentant un caractère d’urgence dont la liste est fixée par décret en Conseil d’Etat.

L’aide juridictionnelle provisoire devient définitive si le contrôle des ressources du demandeur réalisé a posteriori par le bureau d’aide juridictionnelle établit l’insuffisance des ressources. »
Aux termes de l’article 61 du décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique et relatif à l’aide juridictionnelle et à l’aide à l’intervention de l’avocat dans les procédures non juridictionnelles :
« L’admission provisoire peut être accordée dans une situation d’urgence, notamment lorsque la procédure met en péril les conditions essentielles de vie de l’intéressé ou en cas d’exécution forcée emportant saisie de biens ou expulsion. Elle est accordée de plein droit au demandeur et au défendeur lorsque la procédure concerne la délivrance d’une ordonnance de protection.

L’admission provisoire est accordée par la juridiction compétente ou son président ou par le président de la commission mentionnée à l’article L. 432-13 ou à l’article L. 632-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, soit sur une demande présentée sans forme par l’intéressé, soit d’office si celui-ci a présenté une demande d’aide juridictionnelle sur laquelle il n’a pas encore été statué. »

En l’espèce, il convient d’accueillir la demande d’aide juridictionnelle provisoire formée par [I] [T] compte tenu de sa situation financière. La demande sera accueillie à compter de la date de l’audience sous réserve de la décision définitive qui sera prise après dépôt du dossier.

Sur la recevabilité de la demande en résiliation du bail :

Le bailleur justifie avoir notifié la situation d’impayés à la CAF du Nord par lettre recommandée avec accusé de réception réceptionnée le 1er septembre 2023, soit plus de deux mois avant l’assignation, conformément aux dispositions de l’article 24 II de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, dans sa version applicable à la date du commandement de payer litigieux.

Par ailleurs, il justifie avoir notifié l’assignation au Préfet du Nord, le 17 novembre 2023, soit plus de six semaines avant l’audience à laquelle l’affaire a été appelée, conformément aux dispositions de l’article 24 III de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, dans sa version issue de la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 applicable à l’espèce.

L’action est donc recevable.

Sur le bien-fondé de la demande de constat de la résiliation du bail :

En vertu de l’article 7 a) de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

L’article 24 I de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 dans sa version antérieure à la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023 applicable à l’espèce prévoit que « toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non-versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux ».

Le bail conclu le 3 décembre 2009 contient une clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers et charges, fixant le délai pour apurer la dette et prévenir l’acquisition de la clause résolutoire à deux mois.

Un commandement de payer visant cette clause a été signifié à [I] [T] le 1er septembre 2023, pour la somme en principal de 1.786,00 euros arrêtée au 30 août 2023, date de la dernière écriture comptable présente au décompte joint, échéance d’août 2023 incluse. Ce commandement a fixé le délai d’apurement de la dette à six semaines en application de l’article 24I de la loi n°89-462 précitée mais en sa rédaction issue de la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023.

Il convient toutefois de rappeler que l’article 24 I de la loi n°89-462, dans sa rédaction issue de la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023, ne s’applique pas immédiatement aux contrats en cours, lesquels demeurent régis par les stipulations des parties, telles qu’encadrées par la loi en vigueur au jour de la conclusion du bail ou de son renouvellement. En l’espèce, dès lors que la bail avait été renouvelé pour la dernière fois le 16 décembre 2021 (en vertu de l’article 10 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989) à la date à laquelle le commandement de payer a été délivré, les dispositions antérieures à la loi du 27 juillet 2023 continuaient de lui être applicables.

Suivant décompte produit par le bailleur, arrêté au 31 octobre 2024, [I] [T] n’a pas régularisé les causes du commandement de payer dans les deux mois suivant sa délivrance, seul un versement de 50 euros ayant été effectué par la locataire durant cette période, ce qui n’est au demeurant pas contesté par cette dernière.

Le commandement de payer est donc demeuré infructueux pendant plus de deux mois, de sorte que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire étaient réunies le 2 novembre 2023 conformément aux dispositions légales et contractuelle précitées.

Ce n’est que postérieurement à cette date que la commission de surendettement des particuliers du Nord a constaté la situation de surendettement de [I] [T] et déclaré son dossier recevable, de sorte que cette situation est sans incidence sur l’acquisition des effets de la clause résolutoire.

Sur la dette de loyers, les délais de paiement et la suspension de la clause résolutoire

Aux termes de l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, dans sa version issue de la loi n°2023-668 du 27 juillet 2023, V. – le juge peut, à la demande du locataire, du bailleur ou d’office, à la condition que le locataire soit en situation de régler sa dette locative et qu’il ait repris le versement intégral du loyer courant avant la date de l’audience, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, par dérogation au délai prévu au premier alinéa de l’article 1343-5 du code civil, au locataire en situation de régler sa dette locative. Le quatrième alinéa de l’article 1343-5 s’applique lorsque la décision du juge est prise sur le fondement du présent alinéa. Le juge peut d’office vérifier tout élément constitutif de la dette locative et le respect de l’obligation prévue au premier alinéa de l’article 6 de la présente loi. Il invite les parties à lui produire tous éléments relatifs à l’existence d’une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation.

– Par dérogation à la première phrase du V, lorsqu’une procédure de traitement du surendettement au sens du livre VII du code de la consommation a été ouverte au bénéfice du locataire et qu’au jour de l’audience, le locataire a repris le paiement du loyer et des charges, le juge qui constate l’acquisition de la clause de résiliation de plein droit du contrat de location statue dans les conditions suivantes :

2° Lorsque la commission de surendettement des particuliers a imposé pendant un délai la suspension de l’exigibilité de la créance locative en application du 4° de l’article L. 733-1 du même code, le juge accorde ce délai prolongé de trois mois pour permettre au locataire de saisir à nouveau la commission de surendettement des particuliers en application de l’article L. 733-2 du même code. Lorsque, dans ce délai, la commission de surendettement des particuliers a de nouveau été saisie d’une demande de traitement de la situation de surendettement, l’exigibilité de la créance locative demeure suspendue jusqu’à, selon les cas, l’approbation d’un plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 732-1 du même code, la décision imposant les mesures prévues aux articles L. 733-1, L. 733-4, L. 733-7 et L. 741-1 du même code, le jugement prononçant un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, le jugement d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire ou toute décision de clôture de la procédure de traitement du surendettement. A défaut, ou dès lors que la nouvelle procédure de traitement du surendettement est clôturée sans que de nouveaux délais de paiement de la dette locative aient été accordés, la clause de résiliation de plein droit reprend son plein effet ;

3° Par dérogation au 2° du présent VI, lorsqu’en application de l’article L. 733-10 du même code, une contestation a été formée par l’une des parties contre les délais et modalités de paiement de la dette locative imposés par la commission de surendettement des particuliers, le juge accorde des délais de paiement jusqu’à la décision du juge statuant sur cette contestation ;
4° Lorsque le juge statuant en application de l’article L. 733-10 du même code a pris tout ou partie des mesures mentionnées au 2° du présent VI, le juge accorde les délais et modalités de paiement de la dette locative imposés dans ces mesures. Lorsque la suspension de l’exigibilité de la créance locative a été imposée pendant un délai en application du 4° de l’article L. 733-1 du code de la consommation, le juge accorde ce délai prolongé de trois mois pour permettre au locataire de saisir à nouveau la commission de surendettement des particuliers en application de l’article L. 733-2 du même code. Lorsque, dans ce délai, la commission de surendettement des particuliers a de nouveau été saisie d’une demande de traitement de la situation de surendettement, l’exigibilité de la créance locative demeure suspendue jusqu’à, selon les cas, l’approbation d’un plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 732-1 dudit code, la décision imposant les mesures prévues aux articles L. 733-1, L. 733-4, L. 733-7 et L. 741-1 du même code, le jugement prononçant un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, le jugement d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire ou toute décision de clôture de la procédure de traitement du surendettement. A défaut, ou dès lors que la nouvelle procédure de traitement du surendettement est clôturée sans que de nouveaux délais de paiement de la dette locative aient été accordés, la clause de résiliation de plein droit reprend son plein effet.

Il apparaît au regard du décompte produit, arrêté au 31 octobre 2024, que [I] [T] demeurait à cette date redevable envers sa bailleresse d’une somme totale de 5.618,01 euros au titre des loyers et charges, les frais de procédure ayant été expurgés ; cette dette n’est contestée ni en son principe, ni en son montant.

[I] [T] sera par conséquent condamnée à payer à la SA VILOGIA la somme de 5.618,01 euros

En outre, la commission de surendettement des particuliers du Nord a imposé au profit de [I] [T] une suspension de l’exigibilité de la créance locative prise en compte à hauteur de 3.077,14 euros pendant une durée de 24 mois, à un taux de 0%, à compter du 19 août 2024. La décision de la commission prévoit que tant que la locataire respecte ce réaménagement et s‘acquitte du loyer et des charges à bonne date, les effets de la clause de résiliation sont suspendus.

Il ressort du décompte précité que [I] [T] a repris, à compter du 19 août 2024, le paiement de sa part à charge de loyer courant, déduction faite du montant de l’APL, laquelle s’élevait au mois d’août 2024 à la somme de 181,76 euros.

Il convient par conséquent de faire application des dispositions précitées de l’article 24 VI de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989.

L’exigibilité de la créance locative prise en compte dans le plan à hauteur de 3.077,14 euros jusqu’au 19 novembre 2026 (19 août 2026 + 3 mois) sera suspendue, de même que les effets de la clause résolutoire pendant le cours des délais ainsi accordés.

Pour le surplus de la dette, soit la somme de 2.540,87 euros, il convient de faire application de l’article 24 V de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989.
Dans la mesure où [I] [T] justifie percevoir, suivant attestations du 13 septembre 2024, l’aide personnalisée au logement à hauteur de 181,76 euros, la prime d’activité à hauteur de 258,07 euros et l’allocation chômage à hauteur de 849,40 euros, elle apparaît en mesure de s’acquitter de sa dette par 35 mensualités de 50 euros et une dernière qui soldera la dette, selon des modalités précisées au dispositif du présent jugement.
Il convient de rappeler que, faute pour [I] [T] de s’acquitter, pendant ces délais, du paiement du loyer courant, majoré des charges, le solde de l’arriéré de loyers et de charges deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire reprendra son plein effet, entraînant la résiliation du bail et permettant son expulsion avec si nécessaire le concours de la force publique.
En cas de résiliation du bail, [I] [T] sera tenue au paiement d’une indemnité mensuelle d’occupation égale au montant du loyer et des charges, indexée selon les stipulations contractuelles et, le cas échéant, révisé selon la réglementation applicable aux HLM, jusqu’à libération effective des lieux.

Sur les demandes accessoires :

Conformément aux dispositions de l’article 696 et dans les modalités décrites au présent article, [I] [T], qui succombe à l’instance, sera condamnée aux dépens de l’instance.

La situation économique respective des parties commande de rejeter la demande présentée par la SA VILOGIA au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En application de l’article 514 du même code, il a lieu de rappeler l’exécution provisoire de droit du présent jugement.

PAR CES MOTIFS :

La juge des contentieux de la protection de Lille, statuant après débats publics, par décision contradictoire, rendue en premier ressort et mise à disposition au greffe,

DECLARE recevable l’action de la SA VILOGIA ;

ACCORDE l’aide juridictionnelle provisoire à [I] [T] ;

CONSTATE que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire, figurant au bail conclu le 3 décembre 2009 entre la SA VILOGIA d’une part et [I] [T] d’autre part, et portant sur un immeuble à usage d’habitation n°211212 sis [Adresse 4], à [Localité 5], sont réunies depuis le 2 novembre 2023 ;

ORDONNE la suspension des effets de la clause résolutoire ;

CONDAMNE [I] [T] à payer à la SA VILOGIA la somme de 5.618,01 euros au titre des loyers et charges impayés au 31 octobre 2024 ;

POUR LA DETTE INCLUSE AU PLAN DE SURENDETTEMENT (3.077,14 euros)

SUSPEND le cours des intérêts et l’exigibilité de cette dette jusqu’au 19 novembre 2026 ;

RAPPELE qu’en application de l’article 24 VI de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, si, dans ce délai, la commission de surendettement des particuliers a de nouveau été saisie d’une demande de traitement de la situation de surendettement, le délai sera prorogé et l’exigibilité de la créance locative demeurera suspendue jusqu’à, selon les cas, l’approbation d’un plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 732-1 du code de la consommation, la décision imposant les mesures prévues aux articles L. 733-1, L. 733-4, L. 733-7 et L. 741-1 du même code, le jugement prononçant un rétablissement personnel sans liquidation judiciaire, le jugement d’ouverture d’une procédure de rétablissement personnel avec liquidation judiciaire ou toute décision de clôture de la procédure de traitement du surendettement et qu’à défaut, ou dès lors que la nouvelle procédure de traitement du surendettement est clôturée sans que de nouveaux délais de paiement de la dette locative aient été accordés, la clause de résiliation de plein droit reprend son plein effet ;

DIT que, pendant le délai consenti, à défaut de paiement à l’échéance du montant du loyer courant majoré des charges, et après une mise en demeure, adressée par lettre recommandée avec avis de réception, demeurée infructueuse pendant 15 jours :
Le solde de la dette redeviendra exigible ;La clause résolutoire produira ses effets et la résiliation du bail sera constatée au 2 novembre 2023 ;Il pourra être procédé, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier, à l’expulsion de [I] [T] et de tous occupants de son chef du logement à usage d’habitation n°211212 sis [Adresse 4], à [Localité 5], à défaut de départ volontaire dans un délai de deux mois suivant la signification du commandement d’avoir à libérer les lieux en application de l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution ;Les meubles se trouvant dans les lieux seront remis, aux frais de la personne expulsée, en un lieu désigné par celle-ci et, à défaut, laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrit avec précision par l’huissier de justice chargé de l’exécution avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans le délai d’un mois suivant la signification du procès-verbal d’expulsion en application des articles L. 433-1 et R. 433-1 du code des procédures civiles d’exécution ;[I] [T] sera condamnée à payer à la SA VILOGIA une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer qui aurait été payé en cas de non résiliation du bail, indexée selon les stipulations contractuelles augmenté du coût des charges récupérables sur justificatifs, à compter du 2 novembre 2023 jusqu’à la libération effective des lieux.POUR LA DETTE HORS PLAN (2.540,87 euros)

AUTORISE [I] [T] à s’acquitter de cette dette par 35 mensualités de 50 euros et une dernière mensualité portant solde de la dette ;

DIT que les mensualités seront exigibles le 10 de chaque mois et la première le 10 du mois suivant celui de la signification du présent jugement ;

DIT qu’à défaut du paiement d’une mensualité à son échéance et après une mise en demeure, adressée par lettre recommandée avec avis de réception, demeurée infructueuse pendant 15 jours :

Le solde de la dette redeviendra exigible ;La clause résolutoire produira ses effets et la résiliation du bail sera constatée au 2 novembre 2023 ;Il pourra être procédé, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier, à l’expulsion de [I] [T] et de tous occupants de son chef du logement à usage d’habitation n°211212 sis [Adresse 4], à [Localité 5], à défaut de départ volontaire dans un délai de deux mois suivant la signification du commandement d’avoir à libérer les lieux en application de l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution ;Les meubles se trouvant dans les lieux seront remis, aux frais de la personne expulsée, en un lieu désigné par celle-ci et, à défaut, laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrit avec précision par l’huissier de justice chargé de l’exécution avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans le délai d’un mois suivant la signification du procès-verbal d’expulsion en application des articles L. 433-1 et R. 433-1 du code des procédures civiles d’exécution ;[I] [T] sera condamnée à payer à la SA VILOGIA une indemnité mensuelle d’occupation d’un montant égal à celui du loyer qui aurait été payé en cas de non résiliation du bail, indexée selon les stipulations contractuelles augmenté du coût des charges récupérables sur justificatifs, à compter du 2 novembre 2023 jusqu’à la libération effective des lieux ;RAPPELLE qu’en toute hypothèse, les délais accordés n’entraînant pas la suspension du contrat de bail, en cas de non paiement des loyers et charges courants à leur échéance, la clause résolutoire retrouvera son plein effet,

CONDAMNE [I] [T] aux dépens dans les conditions précisées à l’article 696 du code de procédure civile ;

REJETTE la demande présentée par la SA VILOGIA au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de droit à titre provisoire ;

Ainsi jugé et prononcé à Lille, le 13 janvier 2025.

LE GREFFIER LA JUGE
D.AGANOGLU N.LOMBARD


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