L’Essentiel : Le 8 septembre 2017, Monsieur [M] [E] a cédé sa société [E] à BATISÛR, représentée par Monsieur [V] [U]. Ce jour-là, la SCI FERRY BRIAND a signé un bail commercial de neuf ans avec [E] pour des bureaux, avec un loyer initial de 800 € hors taxes. En raison de loyers impayés, un commandement de payer a été délivré le 30 août 2018. Après plusieurs procédures judiciaires, le tribunal a constaté la résiliation du bail et ordonné l’expulsion de PROBATECO, tout en lui accordant des délais de paiement pour régler sa dette de 4.199,33 €.
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Contexte de la cessionLe 8 septembre 2017, Monsieur [M] [E] a cédé sa société à responsabilité limitée [E] à la société par actions simplifiées BATISÛR, représentée par Monsieur [V] [U]. Ce même jour, la société civile immobilière SCI FERRY BRIAND, représentée par Monsieur [M] [E], a conclu un bail commercial de neuf ans avec la société [E] pour la location de bureaux. Conditions du bailLe loyer initial était fixé à 800 € hors taxes, avec des charges et la taxe foncière en sus. Ce montant a été révisé à 1 175,37 € toutes charges comprises jusqu’en octobre 2023. En raison de loyers impayés, le bailleur a délivré un commandement de payer le 30 août 2018, invoquant la clause résolutoire du bail. Procédures judiciairesLe 3 avril 2018, la SCI FERRY BRIAND a saisi le tribunal judiciaire de Créteil pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire et demander l’expulsion du preneur. Le 3 juillet 2020, la société [E] a été condamnée à verser 6.000 € pour arriérés locatifs, mais cette décision a été infirmée par la Cour d’appel de Paris le 4 mars 2021. Nouveaux commandements et contestationsLe 4 février 2023, un nouveau commandement a été délivré à la société [E], désormais dénommée PROBATECO, pour un montant de 21.053,89 € au titre des loyers et charges impayés. La société a contesté ce commandement par courrier du 14 mars 2023. Le 11 mai 2023, la SCI FERRY BRIAND a assigné PROBATECO pour faire constater la résiliation du bail et ordonner son expulsion. Arguments des partiesLa SCI FERRY BRIAND a soutenu que PROBATECO n’avait pas payé son loyer depuis novembre 2022 et que la clause résolutoire devait être considérée comme acquise. PROBATECO a contesté les montants réclamés, affirmant avoir réglé ses dettes et demandant des délais de paiement. Décision du tribunalLe tribunal a constaté que la clause résolutoire était acquise au 5 février 2023, ordonnant l’expulsion de PROBATECO et condamnant cette dernière à verser 4.199,33 € pour loyers et charges impayés. Le tribunal a également accordé des délais de paiement à PROBATECO, lui permettant de rembourser sa dette en douze mensualités. Conséquences de la décisionLa décision a suspendu les effets de la clause résolutoire, à condition que PROBATECO respecte les délais de paiement. En cas de non-respect, la clause résolutoire redeviendrait applicable, entraînant l’expulsion de PROBATECO des locaux loués. La SCI FERRY BRIAND a été autorisée à conserver le dépôt de garantie. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions d’acquisition de la clause résolutoire dans le cadre d’un bail commercial ?La clause résolutoire dans un bail commercial est un mécanisme qui permet au bailleur de résilier le contrat de location en cas de manquement aux obligations par le preneur, notamment le non-paiement des loyers. Selon l’article L. 145-41 du Code de commerce, « toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. » Pour que la clause résolutoire soit acquise, il est nécessaire que : – Le défaut de paiement soit fautif. Dans l’affaire en question, le commandement de payer délivré le 4 février 2023 a été jugé régulier, car il mentionnait les montants dus et les détails des créances. Ainsi, la clause résolutoire a été considérée comme acquise à la date du 5 mars 2023, entraînant la résiliation du bail. Quels sont les droits et obligations du preneur en matière de paiement des loyers et charges ?Les obligations du preneur en matière de paiement des loyers et charges sont clairement définies par le Code civil. L’article 1728 stipule que « Le preneur est tenu de deux obligations principales : En cas de non-paiement, l’article 1224 du Code civil précise que « La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. » Dans le cas présent, la société PROBATECO a cessé de payer ses loyers à partir de novembre 2022, ce qui a conduit à l’activation de la clause résolutoire. Le bail stipule également que le preneur doit rembourser la taxe foncière et les charges d’électricité, ce qui a été contesté par la société PROBATECO, mais qui reste une obligation contractuelle. Quelles sont les conséquences de la résiliation du bail pour le preneur ?La résiliation du bail a des conséquences significatives pour le preneur, notamment en ce qui concerne l’occupation des lieux et les obligations financières. L’article 1227 du Code civil indique que « La résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice. » Cela signifie que le bailleur peut demander l’expulsion du preneur en cas de résiliation. Dans cette affaire, la société PROBATECO est devenue occupante sans droit ni titre à partir du 5 mars 2023, ce qui a conduit à la demande d’expulsion par la SCI FERRY-BRIAND. De plus, le preneur est tenu de payer une indemnité d’occupation, qui est généralement équivalente au montant des loyers dus, jusqu’à ce qu’il quitte les lieux. L’article 1231-5 du Code civil précise que « lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre. » Ainsi, la société PROBATECO doit continuer à payer les loyers et charges jusqu’à la libération effective des locaux. Quelles sont les implications de la clause pénale dans le contrat de bail ?La clause pénale est une disposition contractuelle qui prévoit une sanction financière en cas de non-respect des obligations contractuelles. L’article 1231-5 du Code civil stipule que « lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre. » Dans le cas présent, la SCI FERRY-BRIAND a invoqué la clause pénale prévue dans le bail, qui s’élevait à 10 % des sommes dues. Cependant, le tribunal a décidé de ramener cette somme à 100 €, considérant que la clause pénale devait être modérée pour ne pas être manifestement excessive. Cela montre que, même si une clause pénale est prévue, le juge a la possibilité de l’ajuster en fonction des circonstances de l’affaire. Ainsi, la société PROBATECO a été condamnée à payer une somme de 419 € au titre de la clause pénale, mais celle-ci a été réduite à 100 € par le tribunal. |
JUGEMENT DU : 31 Décembre 2024
DOSSIER N° : N° RG 23/03549 – N° Portalis DB3T-W-B7H-UIJG
AFFAIRE : S.C.I. FERRY BRIAND C/ S.A.R.L. [E] devenue SARL PROBATECO
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE CRETEIL
3ème Chambre
COMPOSITION DU TRIBUNAL
PRESIDENT : M. LUCCHINI, Juge
Statuant par application des articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile, avis préalablement donné aux Avocats.
GREFFIER : Mme REA
PARTIES :
DEMANDERESSE
S.C.I. FERRY BRIAND, dont le siège social est sis [Adresse 1] – [Localité 4]
représentée par Me Emeline BACLE, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, avocat postulant, vestiaire : PC 244, Me Claire FILLIATRE, avocat au barreau de LYON, avocat plaidant
DEFENDERESSE
S.A.R.L. [E] devenue SARL PROBATECO, dont le siège social est sis [Adresse 2] – [Localité 4]
représentée par Me Jean-Sébastien TESLER, avocat au barreau de l’ESSONNE
Clôture prononcée le : 16 mai 2024
Débats tenus à l’audience du : 14 octobre 2024
Date de délibéré indiquée par le Président : 17 décembre 2024
Jugement prononcé par mise à disposition au greffe du 31 décembre 2024, nouvelle date indiquée par le Président
Par acte de cession du 8 septembre 2017, Monsieur [M] [E] a cédé sa société à responsabilité limitée [E] à la société par actions simplifiées BATISÛR, représentée par Monsieur [V] [U].
Par acte sous seing privé du même jour, la société civile immobilière SCI FERRY BRIAND, représentée par Monsieur [M] [E], a conclu, en qualité de bailleur, un bail commercial pour une durée de neuf années entières et consécutives à compter du 8 septembre 2017 jusqu’au 7 septembre 2026 avec la société [E], en qualité de preneur, et portant sur la location de bureaux sis [Adresse 2] à [Localité 4].
Le montant initial du loyer s’élevait à 800 € hors taxes, outre une quote-part de charges et le paiement de la taxe foncière, et a été révisé pour atteindre 1 175,37 € toutes charges comprises jusqu’en octobre 2023.
Le bailleur a fait délivrer le 30 août 2018, au preneur un commandement d’avoir à payer la somme de 5.830,91 € au titre des loyers et charges impayés, en visant la clause résolutoire insérée au bail reproduisant les dispositions de l’article L. 145-41 du code de commerce.
Suivant assignation du 3 avril 2018, le bailleur a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil aux fins de :
– constater l’acquisition de la clause résolutoire à compter du 30 septembre 2018 ;
– ordonner l’expulsion du preneur ;
– condamner la société [E] à lui payer par provision les sommes de :
4.171,91 € au titre des loyers et charges échus au 17 septembre 2019 ;
471 € correspondant au montant de la clause pénale prévue au bail ;
6.216,48 € au titre du remboursement des consommations d’énergie.
Par ordonnance de référé du 3 juillet 2020, la société [E] a été condamnée à verser à la SCI FERRY BRIAND la somme de 6.000 € au titre de l’arriéré locatif arrêté au 15 juin 2020.
Par un arrêt du 4 mars 2021, la Cour d’appel de Paris a infirmé l’ordonnance de référé du 3 juillet 2020.
La SCI FERRY BRIAND a fait délivrer le 4 février 2023 à la société [E] un nouveau commandement d’avoir à payer la somme de 21.053,89 € au titre des loyers, charges et taxes foncières impayés, en visant également la clause résolutoire insérée au bail.
Par courrier du 14 mars 2023, la société [E] a contesté ce commandement de payer.
Suivant assignation du 11 mai 2023 signifiée le 13 mai suivant, SCI FERRY-BRIAND a attrait la société [E] devant le tribunal judiciaire de Créteil, aux fins de constater l’acquisition de la clause résolutoire du bail et sa résiliation, d’ordonner l’expulsion de la défenderesse sous astreinte et de condamner cette dernière au paiement de diverses sommes.
Par note en délibéré du 15 mai 2024, la demanderesse a informé le tribunal du changement de dénomination de la défenderesse, devenue la société PROBATECO par annonce n° 3068 publiée au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales du Val-de-Marne des samedi 24 et dimanche 25 février 2024. Cette dénomination sera donc utilisée dans la présente décision afin de désigner la défenderesse.
EXPOSE DES PRÉTENTIONS ET MOYENS :
Dans ses dernières conclusions notifiées le 19 mars 2024, la SCI FERRY-BRIAND a demandé à la juridiction de :
« – CONSTATER l’acquisition de la clause résolutoire avec tous effets et conséquences à compter du 5 mars 2023,
– CONSTATER que, par suite de la résiliation du bail de plein droit, la société [E] [société PROBATECO] est devenue occupante sans droit ni titre depuis le 5 mars 2023,
– ORDONNER son expulsion et celle de tous les occupants des locaux, à compter de la signification de l’ordonnance à intervenir, avec l’assistance de la force publique et d’un serrurier si besoin est, et séquestration des objets se trouvant dans les lieux dans une dépendance de l’immeuble ou tout autre lieu ou garde meuble au choix du bailleur et aux frais, risques et périls du preneur,
– ASSORTIR ladite obligation de quitter les lieux, d’une astreinte de 700 euros par jour de retard,
– CONDAMNER la société [E] [société PROBATECO] à payer à la SCI FERRY BRIAND :
– 17.208,56 euros TTC au titre des loyers et charges impayés jusqu’à la résiliation du bail intervenu le 5 mars 2023 et incluant le virement réalisé par la société [E] [société PROBATECO] en date du 24 mai 2023.
– 2.223 euros TTC au titre de la clause pénale prévue au bail,
– Si le Tribunal estimait à juste titre que la société [E] [société PROBATECO] doit payer ses consommations réelles en électricité, la CONDAMNER au paiement de la somme complémentaire de 10.870,51 euros TTC correspondant à la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2023.
– AUTORISER la SCI FERRY BRIAND à conserver le dépôt de garantie,
– CONDAMNER la SCI FERRY BRIAND la somme mensuelle de 1019,38 euros TTC du 5 mars 2023 au 30 septembre 2023 et la somme mensuelle 1.128,57 euros TTC à partir du 1er octobre 2023 au titre de l’indemnité d’occupation en sus du paiement des charges réelles d’électricité et sous déduction du montant mensuel effectivement payé par la société [E] [société PROBATECO] et ce jusqu’à la libération effective des lieux occupés,
– CONDAMNER la société [E] [société PROBATECO] à payer à la SCI FERRY BRIAND le montant de 5.000 euros au titre l’article 700 du Code de Procédure Civile,
– CONDAMNER la société [E] [société PROBATECO] aux entiers dépens. »
La SCI FERRY-BRIAND a soutenu que :
– la société PROBATECO ne s’acquittait plus sciemment du règlement de son loyer principal depuis novembre 2022 nonobstant la délivrance d’un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail en date du 4 février 2023 auquel était joint un décompte détaillé des loyers et charges, et qu’elle n’a ensuite régularisé que partiellement sa situation, de sorte que la clause résolutoire doit être regardée comme acquise et le bail comme étant résilié depuis le 5 mars 2023 ;
– la société PROBATECO est devenue occupante sans droit ni titre depuis cette date, de sorte qu’elle doit en être expulsée sous astreinte de 700 € par jour de retard ;
– l’arrêt des paiements par la société PROBATECO n’est pas indépendant de sa volonté, les paiements ayant cessé à compter de novembre 2022, et qu’ainsi elle ne peut faire valoir qu’elle ne se serait aperçu des défauts de règlement à compter du commandement de payer du 4 février 2023, alors qu’en tout état de cause la société s’est prévalue du caractère infondé de ce commandement de payer lors de sa remise ;
– la société société PROBATECO est redevable au 5 mars 2023 de 17 208,56 € de loyers et charges impayés, déduction faite de la régularisation de 7 345,66 € intervenue après la résiliation du bail le 24 mai 2023 ;
– le locataire ne s’est jamais acquitté de la taxe foncière, y compris au titre des lots n° 12 et 14, alors que cela est stipulé dans le bail, laquelle s’élève à 6 020,31 €, et ce nonobstant la transformation des locaux à usage d’habitation en locaux commerciaux qui est sans incidence sur l’exigibilité de cette taxe ;
– le bail prévoit que les charges d’électricité sont à la charge du preneur alors qu’elles ne sont pas couvertes par les provisions de charges mensuels de 30 € correspondant à la consommation d’eau, et que la société PROBATECO ne s’en est jamais acquitté, sa dette à ce titre s’élevant au jour de l’assignation à 7 320 €, la somme de 2 196 € s’y ajoutant au titre de la location du compteur à hauteur de 30 € mensuels ;
– le forfait d’abonnement électrique de 100 € s’appliquant antérieurement à la cession étant devenu insuffisant à couvrir la consommation réelle du preneur, qui a refusé systématiquement l’installation d’un compteur ENEDIS permettant de calculer précisément la consommation, il sera condamné en outre à payer la somme de 10 870,51 € TTC ;
– la clause pénale prévue par le bail en cas de non-paiement d’une somme due à son échéance correspond à 10 % des sommes réclamées, soit 2 223 € ;
– la société PROBATECO est redevable, en vertu de la clause résolutoire, d’une indemnité d’occupation à compter de la résiliation du bail s’élevant mensuellement à 1 019,38 € TTC du 5 mars au 1er octobre 2023, puis 1 128,57 € mensuels au-delà jusqu’à la libération effective des lieux, outre les charges réelles d’électricité ;
– le bailleur et son assureur ont pris en charge de bonne foi les travaux nécessités par l’incendie survenu le 28 septembre 2023 dans les locaux donnés à bail.
Dans ses dernières conclusions notifiées le 16 février 2024, la société PROBATECO a demandé au tribunal :
« A titre principal
DECLARER infondées les demandes de la SCI FERRY BRIAND
En conséquence
L’en DEBOUTER intégralement
A titre subsidiaire, si par extraordinaire le Tribunal faisait droit à la demande et sans aucune reconnaissance de responsabilité
JUGER que l’intégralité des loyers dus a été réglée par la société [E] [société PROBATECO] ;
OCTROYER à la société [E] [société PROBATECO] les plus larges délais de paiement pour apurer sa dette ;
DIRE ET JUGER, par conséquent, que les effets de la clause résolutoire doivent être suspendus rétroactivement et que cette clause est réputée n’avoir jamais joué en l’absence de dette de loyer au jour de l’audience.
En tout état de cause
CONDAMNER la SCI FERRY BRIAND à payer à l’association RESSOURCES ET VOUS la somme de 3.000 € en application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile et aux entiers dépens de l’instance, dont recouvrement au profit de la SELARL AD LITEM JURIS dans les conditions de l’article 699 CPC. »
La société PROBATECO a soutenu que :
– aucun décompte de créance versé aux débats par la demanderesse n’est pas lisible et ne permet pas de déterminer les imputations qu’il expose ;
– l’arrêt du paiement des loyers à compter d’octobre 2022 n’est pas de son fait, sa banque attestant que l’arrêt des prélèvements automatiques n’était pas du fait du preneur ;
– elle s’est acquittée de bonne foi de la taxe foncière au titre des années 2028 et 2019, mais n’a pas pu obtenir des justificatifs des montants de taxe foncière réclamés alors que selon elle une partie correspond à des locaux d’habitation loués à des particuliers par la bailleresse au sein de l’ensemble immobilier concerné, le changement de destination de ces locaux n’ayant jamais été déclarés aux services de l’urbanisme et la SCI FERRY-BRIAND n’ayant jamais produit les documents fiscaux justifiant de la quote-part imputée au preneur ;
– la quote-part des charges est fixée par le bail à 30 €, correspond à un forfait général au titre des charges ne distinguant pas entre les consommations d’eau et d’électricité, aucun compteur d’électricité n’étant spécifiquement dédié au preneur en raison de la configuration des locaux, en raison de ce que le compteur général dessert d’autres locaux appartenant au bailleur, qui n’a d’ailleurs jamais communiqué de régularisation de charges ;
– le bail ne stipule l’application de la taxe sur la valeur ajoutée que sur le loyer en principal, cette taxe ne pouvant dès lors être appliquée aux charges ;
– un incendie a endommagé les lieux loués le 28 septembre 2023, mais que les travaux n’ont pas été effectués par le bailleur malgré ses nombreuses relances ;
– la clause résolutoire n’est pas acquise dans la mesure où les loyers ont été réglés et où les TVA et la taxe foncière ne sont pas dues ;
– à titre subsidiaire, il convient de lui accorder des délais de paiement et la suspension rétroactive de la clause résolutoire sur le fondement de l’article L. 145-41 du Code de commerce, en raison des règlements ultérieurs intervenus depuis l’intervention du commandement de payer ;
– à titre infiniment subsidiaire, elle nécessiterait des délais de paiement sur le fondement de l’article 1345-5 du Code civil afin d’apurer sa dette ainis que la suspension des effets de la clause résolutoire, laquelle étant réputée n’être jamais intervenue de sorte qu’aucune indemnité d’occupation n’étant due ;
– les conditions de mise en œuvre de la clause pénale ne sont pas réunies.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures déposées, en application de l’article 455 du Code de procédure civile.
À l’issue de la mise en état, la clôture a été prononcée le 16 mai 2024.
L’affaire a été appelée à l’audience de plaidoirie en juge unique du 14 octobre 2024 et mise en délibéré au 17 décembre 2024 puis prorogée au 31 décembre 2024.
Sur la demande principale
Sur l’acquisition de la clause résolutoire,
Aux termes de l’article 1103 du Code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
L’article 1353 du même code expose que : « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.
Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. »
L’article 1728 du Code civil prévoit que « Le preneur est tenu de deux obligations principales :
1° D’user de la chose louée en bon père de famille, et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d’après les circonstances, à défaut de convention ;
2° De payer le prix du bail aux termes convenus. »
Selon l’article 1741 du même code, « Le contrat de louage se résout par la perte de la chose louée, et par le défaut respectif du bailleur et du preneur de remplir leurs engagements. »
En vertu de l’article 1224 de ce code, « La résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. »
Aux termes de son article 1227, « La résolution peut, en toute hypothèse, être demandée en justice. »
L’article 1228 du même code dispose que « Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts. »
Aux termes de l’article 1342-10 du Code civil : « le débiteur de plusieurs dettes peut indiquer, lorsqu’il paie, celle qu’il entend acquitter. A défaut d’indication par le débiteur, l’imputation a lieu comme suit : d’abord sur les dettes échues ; parmi celles-ci, sur les dettes que le débiteur avait le plus d’intérêt d’acquitter. A égalité d’intérêt, l’imputation se fait sur la plus anciennes ; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement ».
Aux termes de l’article L. 145-41 du Code de commerce, « toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.
Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge. »
Le bailleur, au titre d’un bail commercial, demandant la constatation de l’acquisition de la clause résolutoire comprise dans le bail, doit rapporter la preuve de sa créance.
Le juge peut constater la résiliation de plein droit du bail au titre d’une clause contenue à l’acte à cet effet, à condition que :
– le défaut de paiement de la somme réclamée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire soit fautif ;
– le bailleur soit en situation d’invoquer de bonne foi la mise en jeu de cette clause ;
– la clause résolutoire soit dénuée d’ambiguïté.
En l’espèce, la soumission du bail au statut des baux commerciaux ne donne lieu à aucune discussion.
Le commandement de payer délivré le 4 février 2023 est régulier en ce qu’il correspond exactement au détail des montants réclamés préalablement au preneur par le bailleur. En annexe du commandement, figure en effet le détail complet des loyers et charges réclamés et le décompte des versements effectués. Le commandement précise qu’à défaut de paiement dans le délai d’un mois, le bailleur entend expressément se prévaloir de la clause résolutoire incluse dans le bail, et la reproduction de la clause résolutoire et de l’article L. 145-17 alinéa 1 du Code de commerce y figure. Le commandement contenait ainsi toutes les précisions permettant au locataire de connaître la nature, les causes et le montant des sommes réclamées, de procéder au règlement des sommes dues ou de motiver la critique du décompte.
Ce commandement de payer précisait ainsi que, au titre la période de janvier 2018 à janvier 2023, la société PROBATECO était redevable envers le bailleur des sommes facturées ainsi que suit :
– 60 222,44 € TTC au titre du loyer principal ;
– 6 020,31 € au titre de la taxe foncière sur la période considérée ;
– 2 196 € au titre de provision de consommation EF ;
– 7 230 € au titre de la provision sur la consommation d’électricité.
Soit un total de 75 758 € TTC facturés au cours de la période.
Le commandement de payer précise que à sa date de délivrance seule la somme de 54 704,89 € avait été effectivement réglée par la société PROBATECO, ce que ne conteste pas cette dernière, le reste demeurant dû correspondant à 21 053,89 € selon la demanderesse.
La défenderesse soutient en substance dans le cadre de la présente instance que l’arrêt du virement des loyers à partir d’octobre 2022 n’était pas de son fait, et qu’elle a postérieurement réglé le montant correspondant aux loyers non versés mais qu’elle reconnaissait devoir entre novembre 2022 et mai 2023.
En revanche, elle conteste être avoir été redevable des sommes mentionnées dans le commandement de payer, relatives à la taxe foncière, à la provision sur la consommation d’électricité et à la taxe sur la valeur ajoutée appliquée au forfait mensuel de 30 € relatif aux provisions pour consommation EF.
Aux termes des stipulations du bail commercial renouvelé au profit de la société PROBATECO le 8 septembre 2017 (pièce n° 4 de la demanderesse), la SCI FERRY-BRIAND a donné à bail au preneur, défendeur à l’instance, « un local commercial comprenant :
– 4 bureaux,
– sanitaires,
– sous-sol,
– dépôt »
Concernant le loyer, il a été convenu que le bail était « consenti et accepté moyennant un loyer en principal mensuel fixé à HUIT CENT EUROS HORS TAXES (800 € HT) auquel s’ajoute une quote-part de charges d’un montant de TRENTE EUROS (30 €), à compter du 8 septembre deux mil dix sept (08/09/2017) que le Preneur s’oblige à payer au Bailleur par mois et d’avance au domicile du Bailleur ou de son représentant ». Ce loyer a été révisé pour être porté, à compter d’octobre 2020 à 849,48 € HT mensuels, puis à 1 175,37 € HT mensuels à compter d’octobre 2023, dans les conditions stipulées dans le bail.
Sur la déclaration fiscale, il a été stipulé que « le Bailleur a opté pour le régime de la Taxe à la Valeur Ajoutée applicable au loyer en principal ci-dessus stipulé. / Cette option s’impose de droit au Preneur qui le reconnaît et s’y oblige expressément, sans que pour autant cette option puisse être pour ce dernier une cause de résiliation des termes du présent bail. / Le Preneur s’oblige en conséquence à acquitter en sus du loyer en principal, le montant de la taxe la valeur ajoutée, au taux en usage ».
Sur les charges, les parties se sont accordées sur le fait que « le Preneur s’oblige à rembourser au Bailleur la taxe foncière des locaux loués, la taxe sur les bureaux ou tout nouvel impôt sur les propriétés bâties ou non bâties dont ce dernier est ou sera redevable au titre des lieux loués susvisés ».
Sur le dépôt de garantie, il est convenu qu’à « la garantie du paiement des loyers et de l’entière exécution de toutes les charges, clauses et conditions du bail, le Preneur verse ce jour au Bailleur, la somme de MILLE SIX CENTS EUROS (1 600 €), représentant deux mois de loyers hors taxes et hors charges » et que cette somme « restera entre les mains du propriétaire jusqu’à l’expiration du présent bail avec affectation spéciale à l’entière exécution des charges et conditions des présentes ».
Enfin, sur la clause résolutoire, les parties ont convenu que « à défaut de paiement d’un seul terme de loyer ou du montant des accessoires à son échéance, ainsi que du montant de tous frais de poursuite dues en vertu du présent contrat ou de la loi, comme en cas d’inexécution d’une seule des conditions du bail et un mois après un commandement de payer ou quinze jours après une sommation d’exécuter, demeurés infructueux, le bail sera résilié de plein droit, si bon semble au Bailleur, sans qu’il soit besoin de remplir de formalité judiciaire nonobstant toute consignation ou offres réelles postérieures au délai ci-dessus ».
Par ailleurs, l’annexe au contrat de bail comporte un tableau selon lequel les parties se sont mises d’accord pour que « les dépenses d’électricité des parties privatives dédiés spécifiquement au PRENEUR, et les dépenses d’entretien, de réparations et de remplacements des dites installations électriques privatives » soient à la charge de la société PROBATECO, outre « l’entretien et les relevés des compteurs divisionnaires, ainsi que leur remplacement ».
Sur le non-paiement de la provision pour consommation électricité et la taxe foncière,
La SCI FERRY-BRIAND soutient que le preneur n’a pas régularisé l’ensemble de ses dettes locatives.
À ce titre, la demanderesse fait valoir que la société PROBATECO ne s’acquittait pas, d’une part, de la taxe foncière, hormis une provision de 2 000 € versée au titre de la taxe due pour les années 2018 et 2019, et, d’autre part, du forfait de 100 € mensuel qui lui était facturé, correspondant aux provisions de consommation d’électricité, la provision de 30 € prévue par le bail se rapportant selon la SCI FERRY-BRIAND aux consommations d’eau.
La société PROBATECO, en réplique, argue de ce que le bailleur n’établit précisément ni la quote-part de cette taxe correspondant à la partie des locaux qui lui est effectivement louée, ni l’exigibilité de la provision relative à la consommation d’électricité. Elle ajoute qu’elle n’est redevable que de la provision de 30 € prévu conventionnellement par le bail et qu’il ne résulte d’aucune stipulation de ce dernier que la TVA ne peut être facturée au preneur quant aux charges, mais seulement au regard du loyer au principal.
Il est constant que le décret du 26 août 1987 ne peut être appliqué à un bail commercial qu’à la condition que les parties soient convenues de lui soumettre la détermination des charges locatives, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.
Il résulte néanmoins du contrat de bail que la société PROBATECO s’est conventionnellement engagée à supporter la taxe foncière et les charges d’électricité, de sorte que la SCI FERRY-BRIAND peut prétendre en vertu du bail à la récupération de ces charges auprès du preneur.
Mais il est de jurisprudence constante qu’il incombe au bailleur qui réclame au preneur de lui rembourser, conformément au contrat de bail commercial le prévoyant, un ensemble de dépenses et de taxes, d’établir sa créance en démontrant l’existence et le montant de ces charges. Dans le cadre contractuel du versement de provisions sur charges par le locataire, il existe ainsi une obligation légale pour le bailleur de régulariser annuellement les charges. Il appartient en effet au bailleur de justifier des charges locatives récupérables sur le preneur, de façon à ce que ce dernier puisse avoir une connaissance exacte de ses obligations : à défaut, le bailleur pourrait être tenu de restituer les acomptes perçus et non justifiés.
En l’espèce, il résulte de l’ensemble de la procédure que la seule provision stipulée dans le bail correspondant à la somme mensuelle de 30 €, dont il ne résulte d’aucune autre stipulation qu’elle devait se voir appliquer la TVA, la société PROBATECO ne pouvant se voir reprochée de ne pas s’être acquittée d’autres provisions au titre de ses virements mensuels pour la période considérée par le commandement de payer, notamment le forfait de 100 € mensuels qu’elle ne s’est pas engagée à verser aux termes du bail litigieux.
Ainsi le moyen tiré de que la société PROBATECO, en ne s’acquittant pas du versement mensuel d’une provision de 100 € au titre de la consommation d’électricité non prévue par les stipulations du bail, aurait manqué à ses obligations à la date du commandement de payer ne saurait prospérer.
S’agissant de la taxe foncière, il est constant que la SCI FERRY-BRIAND conservait à tout moment la possibilité de solliciter une régularisation des charges dans les conditions prévues au bail commercial, ce qu’elle a fait notamment fait par courrier du 10 janvier, 13 mars et 21 novembre 2022 au titre des années 2018, 2019, 2020 et 2021, et par courrier du 4 octobre 2023 au titre de l’année 2022 (pièce n° 9 de la demanderesse).
Toutefois, il découle ce qui a été rappelé supra, qu’il revient au bailleur de justifier de manière précise des charges récupérables de manière à ce que le preneur ait une connaissance précise de ses obligations.
Or, en l’espèce, il résulte des débats que la société PROBATECO a réclamé à plusieurs reprises que la SCI FERRY-BRIAND lui produise les copies intégrales des taxes foncières 2018 et 2019 par courriers des 17 janvier, 28 février, 29 septembre et 16 décembre 2020 (pièces n° 7, 8, 9 et 10 de la défenderesse) en contestant être redevable de cette taxe au titre de lots n° 12 et 14 non domiciliés au [Adresse 2] [Localité 4].
Si le bailleur a transmis au preneur les avis de taxe foncière pour 2018 et 2019 par courriers du 3 décembre 2018, du 5 novembre 2019 et du 3 février 2020 (pièces n° 11, 12 et 13 de la défenderesse), il ne résulte d’aucun document fiscal versé aux débats que les tantièmes associés aux lots n° 1 et 6 correspondent bien à ceux reportés dans les factures émises par la SCI FERRY-BRIAND ou que les lots n° 12 et 14, indissociables entre eux et consistant en une cour et un hangar appartenant à l’adresse non mentionnée au bail du [Adresse 3], entrent bien dans le périmètre des locaux donnés à bail lequel mentionne des bureaux, des sanitaires, des sous-sols et un dépôt.
Compte-tenu de l’imprécision de ces éléments contestés par la défenderesse, la SCI FERRY-BRIAND ne peut être regardée comme apportant la preuve du montant précis des charges récupérables au titre de la taxe foncière, la circonstance que la société PROBATECO occuperait lesdits emplacements sans le contester étant sans incidence tant qu’il n’est pas établi que les lots concernés entrent bien dans le champ conventionnel du bail souscrit par les parties.
En conséquence le moyen tiré de ce que la défenderesse ne s’est pas acquittée des charges récupérables au titre de la taxe foncière devra également être écarté.
Il résulte de tout ce qui précède que, à la date du commandement de payer du 4 février 2023, la société PROBATECO n’était redevable que des loyers au principal auxquels la TVA était applicable et de la provision conventionnelle de 30 € HT, la provision de 100 € n’ayant pas de fondement conventionnel et l’exigibilité de taxe foncière n’étant pas déterminée de manière suffisamment précise pour être récupérable à cette date.
Sur le défaut de versement intégral des loyers au cours du bail,
La SCI FERRY-BRIAND soutient que le preneur a commis un manquement à ses obligations contractuelles en cessant de payer, à compter de novembre 2022, le loyer dû au principal et qu’il n’a régularisé la situation que le 24 mai 2023, soit postérieurement à la signification de l’assignation du 11 mai 2023.
Or, la société PROBATECO, qui ne conteste pas être redevable des montants du loyer au principal augmentés de la TVA, verse aux débats un échange de courriels entre son personnel et sa banque BRED Banque populaire (pièce n° 1 de la défenderesse) datés des 5 et 6 juin 2023 dont il découle que le preneur s’était enquis des raisons pour lesquelles le virement automatique de 1 049,38 € au bénéfice du bailleur s’était interrompu depuis fin octobre 2022, ce à quoi la banque a répondu que cela était lié au fait que le virement automatique de périodicité avait été mis en place le 2 novembre 2021 avec une fin programmée le 2 octobre 2022.
Il résulte en outre d’un avis d’opération de virement du 24 mai 2023 (pièce n° 2 de la défenderesse), que le preneur avait quelques jours auparavant pris des dispositions pour faire parvenir à la SCI FERRY-BRIAND un virement de 7 345,66 €.
Le loyer au principal s’élevait alors à la somme de 849,48 € HT, soit 1 019,38 €, les montants virés mensuellement intégrant manifestement la provision de 30 € stipulée dans le bail et dont la société ne conteste pas l’exigibilité mais seulement le fait que la TVA lui soit appliquée.
S’il résulte de l’article 1342-10 précité du Code civil que, à défaut d’indication de la défenderesse sur l’imputation des sommes versées, l’imputation de la régularisation doit se faire sur les dettes les plus anciennes qu’elle avait le plus intérêt à acquitter, en l’espèce, il résulte pourtant bien du libellé du virement du 24 mai 2023 que la société PROBATECO avait indiqué que la somme de 7 345,66 € serait imputée au règlement des loyers de novembre et décembre 2022 ainsi que des loyers de janvier, février, mars, avril et mai 2023, ce qui correspond au montant mensuel de 1 049,38 € qui faisait auparavant l’objet du virement automatique ayant expiré. Dès lors seuls les montants correspondant aux trois mois de novembre et décembre 2022 et au mois de janvier 2023 peuvent s’imputer sur la créance au titre des loyers au principal résultant des causes du commandement de payer du 4 février 2023, soit un montant de 3 x 1 049,38 € = 3 148,14 €.
Il s’évince de ce qui précède que la défenderesse apporte la preuve que les défauts de versement du loyer au principal à compter d’octobre 2022 ne peuvent être regardés comme procédant d’un comportement fautif ou comme ayant été commis de mauvaise foi, et qu’elle a ensuite régularisé intégralement les loyers au principal dus entre octobre 2022 et mai 2023.
En conséquence, le moyen tiré de ce que la société PROBATECO ne s’acquittait plus sciemment et de mauvaise foi de son loyer au principal entre octobre 2022 et mai 2023 devra donc être écarté.
Néanmoins, il résulte tant du commandement de payer que des dernières conclusions de la SCI FERRY-BRIAND aux termes desquelles elle allègue que le preneur ne verse qu’une partie du loyer depuis le début du bail, que le bailleur se prévaut de manière globale, entre janvier 2018 et janvier 2023 d’une créance pour l’ensemble des loyers au principal TTC qui n’ont pas été intégralement acquittés durant cet intervalle par le preneur.
Aux termes du commandement de payer du 4 février 2023, le montant total des loyers au principal facturés entre janvier 2018 et janvier 2023 s’élève à 60 222,36 €.
Or il n’est contesté par aucune parties au cours des débats que la société PROBATECO avait effectivement payé au bailleur la somme 54 704,89 € à la date dudit commandement, à laquelle s’ajoute la somme de 3 148,14 € de régularisation versée le 24 mai 2023 et explicitement indiquée comme s’imputant au titre de la période comprise de novembre 2022 à janvier 2023.
Ainsi, à la date de l’assignation, le montant cumulé effectivement payé par la société PROBATECO au titre des loyers au principal facturés entre janvier 2018 et janvier 2023 (61 mensualités) s’élevait à 54 704,89 € + 3 148,14 € = 57 853,03 €, montant inférieur à la somme totale de 60 222,36 € dont se prévaut à cet égard et de manière non contestée la SCI FERRY-BRIAND.
Cette dernière demeurait donc redevable au 4 février 2023 de :
– la somme de 2 369,33 TTC au titre des loyers au principal impayés,
– la somme correspondant au total des provisions mensuelles de 30 € HT due au cours de la période, soit 61 mensualités x 30 = 1 830 €,
Soit un total de 4 199,33 €, et ce nonobstant la régularisation du 24 mai suivant.
Il s’évince donc de tout ce qui précède que les causes de ce commandement du 4 février 2023 n’ont pas été intégralement acquittées dans le mois de sa délivrance et que la dette locative n’a pas été apurée en cours de procédure.
La société PROBATECO doit donc être regardée comme n’étant pas, à la clôture de la mise en état, à jour du paiement de ses loyers et provisions exigibles, et demeure en tout état de cause redevable des charges récupérables au titre de la taxe foncière et de des dépenses d’électricité sous réserve que le bailleur en établisse précisément les montants.
La clause résolutoire est donc acquise à la date du 5 février 2023 et il convient d’ordonner l’expulsion de la société PROBATECO, en défense.
Il y a donc lieu de condamner la société PROBATECO à verser à la SCI FERRY-BRIAND une somme de 4 199,33 €, au titre des loyers et charges échus et impayés à la date du 16 mai 2024, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 4 février 2023, date de délivrance du commandement de payer.
Il convient également d’ordonner l’expulsion de la société PROBATECO ainsi que de tous occupants de son chef des lieux loués, sis au [Adresse 2] [Localité 4], avec l’éventuelle assistance de la Force Publique et d’un serrurier en cas de besoin, ainsi que la séquestration des meubles garnissant les lieux loués, sur place ou dans un garde-meubles au choix du requérant et aux frais de la société défenderesse.
Il convient de fixer une indemnité d’occupation à un montant égal aux loyers et charges que la société PROBATECO aurait dû acquitter sans l’acquisition de la clause résolutoire, et de le condamner à régler cette indemnité d’occupation, jusqu’à libération effective des locaux.
Sur la clause pénale,
La SCI FERRY-BRIAND se prévaut de l’application de la clause pénale prévue au bail.
L’article 1231-5 du Code civil prévoit à ce titre que lorsque le contrat stipule que celui qui manquera de l’exécuter paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts, il ne peut être alloué à l’autre partie une somme plus forte ni moindre, mais que néanmoins, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité ainsi convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.
En l’espèce, il résulte de ce qui précède que la société PROBATECO demeurait au 4 février 2023 redevable de la somme de 4 199,33 € au titre des loyers et charges impayés, de sorte que la clause pénale de 10 % s’élève à la somme de 419 €. Toutefois il y a lieu de ramener cette somme à un montant de 100 €.
Sur la condamnation au paiement des charges correspondant aux consommations réelles d’électricité,
Le bailleur sollicite la condamnation du preneur au paiement de la somme de 10 870,51 € au titre des consommations réelles d’électricité pour la période du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2023.
S’il découle de ce qui précède que les charges découlant de cette consommation sont récupérables par la SCI FERRY-BRIAND auprès de la défenderesse, c’est à la condition pour le bailleur d’apporter la preuve du montant précis de sa créance.
En l’espèce, il résulte de factures d’électricité produites (pièce n° 5-7 de la demanderesse) que le compteur électrique est commun à l’ensemble des locaux possédés par la SCI FERRY-BRIAND et dont seulement une partie est donnée à bail à la société PROBATECO. Les factures sont établies au lieu de consommation correspondant à l’adresse du [Adresse 3] et non à celle correspondant au bail litigieux.
S’il résulte des débats qu’aucun compteur individuel n’est installé pour mesurer la consommation de la société PROBATECO, alors que coût affèrent à la pose d’un tel compteur relève bien des charges locatives lui incombant aux termes de l’annexe précitée du bail, cette circonstance n’exonère pas le bailleur de son obligation de rapporter de manière précise la preuve des charges qu’il entend récupérer auprès du preneur.
En l’absence d’éléments suffisamment précis permettant d’imputer à la société PROBATECO les charges récupérables au titre de sa consommation réelle d’électricité, il y a lieu de débouter la SCI FERRY-BRIAND de cette demande.
Sur le délai rétroactif et les délais de paiement,
La dette n’ayant pas été apurée avant la clôture de l’instance, aucun délai rétroactif ne peut être accordé à la défenderesse.
Néanmoins, compte tenu des circonstances de la cause des règlements de régularisation effectués, du montant de la dette locative et de la situation de la société PROBATECO, sa situation doit être prise en compte tandis que la résiliation du bail entraînerait de très lourdes conséquences économiques.
En l’espèce, il ressort des débats et de l’examen des pièces versées, que la société PROBATECO est de bonne foi et se propose d’apurer sa dette locative, dont le montant est relativement faible.
Aussi en sera-t-il tenu compte pour lui accorder des délais de paiement sur le fondement des dispositions de l’article L. 145-41 du Code de commerce et l’autoriser à rembourser sa dette par douze mensualités de 349,94 €, en sus du loyer courant, les effets de la clause résolutoire inscrite dans le bail étant corrélativement suspendus, dans les formes et conditions prévues dans le présent dispositif.
Sur la conservation du dépôt de garantie
La SCI FERRY-BRIAND demande à conserver le dépôt de garantie.
Compte-tenu des charges récupérables dont le preneur est redevable mais dont il lui appartient encore de déterminer les montants précisément exigibles, il y a lieu de lui permettre de conserver le dépôt de garantie.
Sur les demandes accessoires
En application de l’article 696 du Code de procédure civile, il convient de condamner la société PROBATECO aux entiers dépens.
Il y a lieu en outre de condamner la société PROBATECO à payer à SCI FERRY-BRIAND la somme de 300 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile
L’exécution provisoire est de droit, conformément à l’article 514 du Code de procédure civile, et il n’y a pas lieu en l’espèce d’en disposer autrement.
Le Tribunal, statuant après débats publics, par décision contradictoire mise à disposition des parties par le greffe et en premier ressort,
CONDAMNE la société PROBATECO à verser à la SCI FERRY-BRIAND une somme de 4 299,33 € au titre tant des loyers et charges échus et impayés au 16 mai 2024 que de la clause pénale, et ce avec intérêts au taux légal à compter du 4 février 2023, date de délivrance du commandement de payer ;
CONSTATE que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire sont réunies à la date du 5 février 2023 ;
FIXE le montant de l’indemnité d’occupation à un montant égal aux loyers additionnés des charges que la société PROBATECO aurait dû continuer de régler s’il n’y avait eu acquisition de la clause résolutoire, et CONDAMNE la société PROBATECO à régler à la SCI FERRY-BRIAND cette indemnité d’occupation mensuelle, jusqu’à la libération complète des locaux précédemment pris à bail ;
ACCORDE à la société PROBATECO des délais de paiement sur le fondement des dispositions de l’article L. 145-41 du Code de commerce pour se libérer de sa dette locative et l’AUTORISE à rembourser ladite dette à l’égard de la SCI FERRY-BRIAND par douze mensualités de 349,94 € en sus des loyers courants ;
SUSPEND en conséquence les effets de la clause résolutoire inscrite dans le bail commercial conclu entre les parties en date du 8 septembre 2017 ;
DIT qu’à défaut d’apurement de la dette locative par la société PROBATECO dans les conditions ci-dessus octroyées, la société PROBATECO perdra de plein droit le bénéfice des délais qui lui sont accordés et, dans cette éventualité, CONSTATE l’acquisition de plein droit de la clause résolutoire insérée dans le bail commercial conclu entre les parties en date du 8 septembre 2017, de sorte que la société PROBATECO devrait alors quitter les lieux sis au [Adresse 2] [Localité 4] et les restituer à la SCI FERRY-BRIAND libres de toute occupation, en satisfaisant aux obligations des locataires sortants, notamment la remise des clés ;
AUTORISE la SCI FERRY-BRIAND à conserver le dépôt de garantie ;
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.
CONDAMNE la société PROBATECO à payer à la SCI FERRY-BRIAND la somme de 300 € en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
DIT n’y avoir lieu de suspendre l’exécution provisoire de la présente décision ;
CONDAMNE société PROBATECO aux entiers dépens, y compris le coût du commandement de payer.
Fait à CRETEIL, L’AN DEUX MIL VINGT QUATRE ET LE TRENTE ET UN DECEMBRE
LE PRÉSENT JUGEMENT A ÉTÉ SIGNE PAR LE PRÉSIDENT ET LE GREFFIER PRÉSENTS LORS DU PRONONCE.
Le GREFFIER Le PRÉSIDENT
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