L’Essentiel : La S.C.I. DEDE a engagé une procédure contre la S.A.R.L. SBS pour non-paiement des loyers d’un bail commercial signé en janvier 2017. Le bailleur a demandé la résiliation du contrat, l’expulsion du locataire et le paiement des loyers impayés. En réponse, la S.A.R.L. SBS a contesté la demande, évoquant des problèmes d’infiltration et demandant un délai de paiement. Le tribunal a finalement statué en faveur de la S.C.I. DEDE, ordonnant l’expulsion de la S.A.R.L. SBS et condamnant cette dernière à régler les sommes dues, tout en rejetant ses demandes reconventionnelles.
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Contexte de l’affaireLa présente affaire concerne un litige entre la S.C.I. DEDE, bailleur, et la S.A.R.L. SBS, locataire, relatif à un bail commercial signé le 21 janvier 2017. Ce bail portait sur des locaux destinés à une épicerie, avec un loyer annuel de 14 400 € hors taxes, payable mensuellement. La S.C.I. DEDE a succédé au bailleur initial et a assigné la S.A.R.L. SBS en référé pour non-paiement des loyers. Demandes de la S.C.I. DEDELa S.C.I. DEDE a sollicité la résiliation du bail, l’expulsion de la S.A.R.L. SBS, ainsi que le paiement d’une indemnité provisionnelle d’occupation et des loyers impayés. Elle a également demandé une somme pour couvrir les frais de justice, incluant le coût d’un commandement de payer. Réponses de la S.A.R.L. SBSLa S.A.R.L. SBS a contesté la demande, arguant de l’irrecevabilité de l’action et a demandé un délai de paiement. Elle a également soulevé des problèmes d’infiltration dans les locaux, invoquant un manquement du bailleur à ses obligations de réparation. La société a demandé une expertise pour évaluer les dégâts et a réclamé une indemnisation pour les pertes subies. Arguments de la S.C.I. DEDEEn réponse, la S.C.I. DEDE a justifié sa qualité de propriétaire par un acte d’acquisition et a produit des justificatifs des sommes dues. Elle a affirmé que la S.A.R.L. SBS n’avait pas réglé les loyers depuis mai 2024 et que les problèmes d’infiltration ne justifiaient pas l’exception de non-exécution, car l’exploitation des locaux avait continué sans impact significatif. Décision du tribunalLe tribunal a constaté la résiliation du bail et a ordonné l’expulsion de la S.A.R.L. SBS, autorisant l’usage de la force publique si nécessaire. La S.A.R.L. SBS a été condamnée à payer une provision pour loyers et charges dus, ainsi qu’une indemnité pour frais d’instance. Les demandes reconventionnelles de la S.A.R.L. SBS ont été rejetées, le tribunal considérant qu’elles n’étaient pas fondées. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la qualité à agir de la S.C.I. DEDE dans cette affaire ?La S.C.I. DEDE justifie de sa qualité à agir en tant que propriétaire des lots n° 107 et 153 de la copropriété loués à la S.A.R.L. SBS. Cette qualité est confirmée par l’acte d’acquisition des locaux, daté du 14 avril 2021, qui a été produit lors des débats. L’article 544 du Code civil stipule que « la propriété est le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu que l’on n’en fasse pas un usage prohibé par les lois ou par les règlements. » Ainsi, en tant que propriétaire, la S.C.I. DEDE a le droit d’agir en justice pour faire valoir ses droits, notamment en matière de recouvrement de loyers impayés. Quelles sont les conséquences du non-paiement des loyers selon le bail commercial ?Le bail commercial conclu entre la S.C.I. DEDE et la S.A.R.L. SBS stipule que le loyer annuel de 14 400 € hors taxes et hors charges est payable mensuellement d’avance. L’article L 145-41 du Code de commerce précise que « le bailleur peut, en cas de non-paiement d’une seule échéance, faire constater la résiliation du bail. » Dans ce cas, la S.C.I. DEDE a délivré un commandement de payer le 28 mai 2024, portant sur un arriéré de loyer et charges de 18 766,91 € TTC. Le non-paiement des sommes dues dans le délai d’un mois imparti par le commandement a conduit à la résiliation du bail et à la demande d’expulsion de la S.A.R.L. SBS. Quelles sont les justifications requises pour contester les sommes dues ?La S.A.R.L. SBS a tenté de contester les sommes réclamées par la S.C.I. DEDE en invoquant des contestations sérieuses, notamment l’absence de justification des charges de copropriété et des factures d’eau. Cependant, la S.C.I. DEDE a produit des décomptes de charges, des factures d’eau et des avis de taxes foncières, conformément à l’article 1315 du Code civil, qui stipule que « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. » Les éléments fournis par la S.C.I. DEDE ont permis de constater que les sommes réclamées n’étaient pas sérieusement contestables, justifiant ainsi la décision du juge des référés. Quelles sont les implications de l’exception de non-exécution dans ce litige ?L’exception de non-exécution, prévue par l’article 1219 du Code civil, permet à un débiteur de refuser d’exécuter son obligation si son créancier n’exécute pas la sienne. Dans cette affaire, la S.A.R.L. SBS a tenté d’invoquer cette exception en raison de problèmes d’infiltrations dans les locaux. Cependant, le tribunal a constaté que la S.A.R.L. SBS ne justifiait d’aucune plainte entre décembre 2020 et la présente procédure, et que l’exploitation des locaux s’était poursuivie sans incidence sur l’activité. Ainsi, l’exception de non-exécution ne pouvait pas être retenue pour faire échec à la demande d’expulsion. Comment est déterminée l’indemnité provisionnelle d’occupation ?L’indemnité provisionnelle d’occupation est fixée au montant du dernier loyer actualisé, soit 1 461,35 € TTC par mois. Cette indemnité est due à compter du 1er novembre 2024 et jusqu’à la libération complète des lieux. L’article 1728 du Code civil précise que « le locataire est tenu de payer le loyer convenu. » Ainsi, en cas de résiliation du bail, le bailleur a droit à une indemnité pour l’occupation des lieux jusqu’à leur restitution effective. Le tribunal a donc statué en faveur de la S.C.I. DEDE en accordant cette indemnité provisionnelle. |
Minute N° 2024/
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
du 21 Novembre 2024
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S.C.I. DEDE
C/
S.A.R.L. SBS (JOUMA MARKET)
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copie exécutoire délivrée le 21/11/2024 à :
la SELARL VILLAINNE-RUMIN – 20
copie certifiée conforme délivrée le 21/11/2024 à :
la SCP CALVAR & ASSOCIES – 28
la SELARL VILLAINNE-RUMIN – 20
dossier
MINUTES DU GREFFE
DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTES
(Loire-Atlantique)
_________________________________________
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
_________________________________________
Président : Pierre GRAMAIZE
Greffier : Eléonore GUYON
PRONONCÉ fixé au 21 Novembre 2024
Ordonnance contradictoire, mise à disposition au greffe
ENTRE :
S.C.I. DEDE (RCS NANTES 894 922 145),
dont le siège social est sis [Adresse 4]
[Localité 3]
Rep/assistant : Maître Yann RUMIN de la SELARL VILLAINNE-RUMIN, avocats au barreau de NANTES
DEMANDERESSE
D’UNE PART
ET :
S.A.R.L. SBS (JOUMA MARKET)
(RCS NANTES N°829 240 977),
dont le siège social est sis [Adresse 1]
[Localité 2]
Rep/assistant : Maître Julien VIVES de la SCP CALVAR & ASSOCIES, avocats au barreau de NANTES
DÉFENDERESSE
D’AUTRE PART
PRESENTATION DU LITIGE
Selon acte sous seing privé du 21 janvier 2017, la S.C.I. BOUTIQUES A NANTES a donné à bail commercial à la S.A.R.L. SBS des locaux dans les bâtiments A et E d’un ensemble immobilier en copropriété situé [Adresse 1] correspondant aux lots n° 107 et 153 pour une durée de 9 ans à compter du 9 septembre 2017, à destination d’épicerie, toutes activités alimentaires hors restauration et sans cuisson, moyennant un loyer annuel de 14 400 € hors taxes hors charges, payable mensuellement d’avance.
Se plaignant d’un défaut de paiement du loyer malgré un commandement de payer visant la clause résolutoire du 28 mai 2024, la S.C.I. DEDE venant aux droits du bailleur a fait assigner en référé la S.A.R.L. SBS suivant acte de commissaire de justice du 9 juillet 2024 pour solliciter :
– le constat de la résiliation du bail,
– l’expulsion de la S.A.R.L. SBS et de tous occupants de son chef et ce, au besoin avec l’aide de la force publique et d’un serrurier et sous astreinte de 300 € par jour de retard à compter du prononcé de l’ordonnance,
– le paiement d’une indemnité provisionnelle d’occupation de 1 268 € par mois jusqu’à libération effective des lieux,
– le paiement provisionnel de la somme de 23 322,72 € au titre des loyers et charges impayés arrêtés à juillet 2024,
– le paiement de la somme de 2 500,00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens, y compris le coût du commandement du 28 mai 2024 et des frais de levée d’un état des créanciers inscrits.
La S.A.R.L. SBS conclut à l’irrecevabilité et au débouté de la demanderesse, subsidiairement à l’octroi d’un délai de paiement sur 24 mois, au paiement d’une indemnisation provisionnelle de 3 000 €, à l’organisation d’une expertise pour déterminer les causes des infiltrations affectant le local avec consignation partagée des frais, ainsi qu’à la condamnation de la S.C.I. DEDE à lui payer une somme de 2 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens, le tout en objectant que :
– la demanderesse ne justifie pas de sa qualité de propriétaire,
– les sommes réclamées se voient opposer des contestations sérieuses, faute de justification des charges de copropriété de 2021/2022, des factures d’eau de 2022, des taxes foncières 2022/2023, de provisions sur charges en l’absence de régularisation, alors que la clause pénale est manifestement excessive et que trois paiements n’ont pas été déduits,
– la demande se heurte à l’exception de non-exécution, puisqu’une partie des locaux est affectée par un dégât des eaux depuis janvier 2020 ayant provoqué une perte de marchandises de 4 000 €, ce qui caractérise un manquement à l’obligation de délivrance du bailleur au titre des réparations relevant de l’article 606 du code civil.
La S.C.I. DEDE maintient ses prétentions initiales, sauf à actualiser le montant de la provision réclamée à 21 353,39 € à octobre 2024 et à porter la demande d’indemnité provisionnelle d’occupation à 1 461,35 € par mois avec rejet des demandes adverses, en répliquant que :
– elle produit l’acte d’acquisition des locaux du 14 avril 2021 pour justifier de sa qualité à agir,
– le décompte complet des sommes payées et dues est repris et les justificatifs des charges et taxes sont produits, de sorte que la somme réclamée à titre de provision est actualisée,
– non seulement la société SBS n’a pas réglé les causes du commandement, mais en plus elle a cessé tout règlement de loyer depuis mai 2024, ce qui justifie l’application de la clause résolutoire et l’expulsion,
– les trois paiements allégués sont bien pris en compte et rien ne justifie l’octroi de délais, alors que le résultat d’exploitation est positif,
– les infiltrations relèvent soit d’un défaut d’entretien du preneur soit de la responsabilité du syndicat des copropriétaires, étant souligné qu’il n’est pas justifié d’une déclaration à l’assurance et qu’il n’y a pas eu de réclamation depuis 2020,
– l’exception d’inexécution ne peut être invoquée qu’en cas d’inexploitation totale des locaux, ce qui n’est pas le cas,
– la demande de provision doit être rejetée, de même que celle d’expertise, la réclamation tardive étant de pure opportunité.
La S.C.I. DEDE justifie de sa qualité à agir en qualité de propriétaire des lots n° 107 et 153 de la copropriété loués à la S.A.R.L. SBS, pour les avoir acquis aux termes d’un acte dressé le 14 avril 2021 par Maître [J] [S] notaire à [Localité 5], dont la copie est versée aux débats, de sorte que la demande est recevable.
L’acte de bail du 21 janvier 2017 prévoyait le versement d’un loyer annuel de 14 400 € hors taxes hors charges, payable mensuellement d’avance, indexé, sous peine de résiliation du bail en cas de non-paiement d’une seule échéance.
La S.C.I. DEDE a fait délivrer un commandement de payer le 28 mai 2024 portant sur un arriéré de loyer et charges de 18 766,91 € TTC et qui rappelait la clause résolutoire insérée au bail et les dispositions de l’article L 145-41 du code de commerce.
Les sommes dues n’ont pas été réglées dans le délai d’un mois imparti par le commandement.
Les sommes réclamées sont vainement contestées, alors que les décomptes de charges de copropriété, les factures d’eau, les avis de taxes foncières correspondant aux charges réclamées sont produits.
Il n’y a plus de litige sur les appels de charges, qui ne sont pas réclamés dans la provision.
Il résulte d’un état récapitulatif des inscriptions délivré par le greffe du tribunal de commerce qu’il n’y a pas de créanciers inscrits au 27 juin 2024.
L’exception de non-exécution ne saurait être invoquée pour faire échec à la demande, alors que la S.A.R.L. SBS ne justifie d’aucune plainte entre décembre 2020 et la présente procédure, que les échanges par courriels ont été engagés initialement en janvier 2020 à l’initiative du représentant du bailleur et que le courrier de décembre 2020 adressé au représentant du bailleur n’a été suivi d’aucune autre démarche. Au surplus, il n’est pas établi que les désordres allégués gênent l’exploitation des locaux qui s’est poursuivie depuis 2020 sans aucune incidence sur l’activité.
La locataire réclame des délais de paiement mais ne justifie d’aucune difficulté financière, se contentant de produire sa liasse fiscale de l’exercice 2022 et non celle de 2023, laquelle fait état d’un résultat bénéficiaire (3 049 € de résultat d’exploitation).
Dès lors, il n’y a pas de contestation sérieuse sur le principe de l’acquisition de la clause résolutoire qu’il conviendra de constater, ce qui justifie l’expulsion du preneur et de tous occupants de son chef au besoin avec l’aide de la force publique.
Le recours à la force publique étant autorisé, il n’apparaît pas nécessaire de fixer une astreinte.
L’indemnité provisionnelle d’occupation sera fixée au montant du dernier loyer actualisé, c’est à dire la somme de 1 461,35 € TTC par mois.
Le décompte des loyers et accessoires figurant sur trois pages et demie dans les conclusions de la demanderesse permet de constater qu’il est dû 21 353,39 € jusqu’au 31 octobre 2024, en tenant compte des paiements prétendument omis, de sorte que cette somme n’est pas sérieusement contestable et sera accordée à titre de provision.
Si la locataire rapporte la preuve, par un constat de commissaire de justice du 29 juillet 2024, que les problèmes d’infiltrations ne sont pas résolus, l’obligation d’indemnisation de la part du bailleur qu’elle invoque pour réclamer une provision est sérieusement contestable, étant donné qu’elle ne justifie d’aucune démarche auprès de lui depuis qu’il est devenu propriétaire, ni d’aucune déclaration à son assureur comme elle était invitée à le faire depuis janvier 2020, et alors que les désordres proviennent manifestement de parties communes. La demande reconventionnelle de provision sera donc rejetée.
La demande d’expertise n’est pas fondée sur un motif légitime, puisque la résiliation du bail a pris effet avant le constat du commissaire de justice et la réclamation au titre de l’état des locaux.
Il est équitable de fixer à 1 500 € l’indemnité pour frais d’instance non compris dans les dépens que la S.A.R.L. SBS devra verser à la demanderesse en application de l’article 700 du code de procédure civile.
DECISION
Constatons la résiliation du bail,
Ordonnons l’expulsion de la S.A.R.L. SBS et celle de tous occupants de son chef au besoin avec l’aide de la force publique et le cas échéant d’un serrurier à compter de la signification de l’ordonnance,
Condamnons la S.A.R.L. SBS à payer à la S.C.I. DEDE :
– une provision de 21 353,39 € au titre des loyers et charges dus au 31/10/24,
– une somme de 1 500,00 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– une indemnité provisionnelle d’occupation de 1 461,35 € par mois à compter du 1er novembre 2024 et jusqu’à libération complète des lieux,
Rejetons toutes autres prétentions plus amples ou contraires,
Condamnons la S.A.R.L. SBS aux dépens, y compris le coût du commandement du 28 mai 2024 et des frais de levée de l’état des créanciers inscrits.
Le Greffier, Le Président,
Eléonore GUYON Pierre GRAMAIZE
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