Résiliation de bail commercial : enjeux de preuve et conditions d’application des clauses résolutoires

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Résiliation de bail commercial : enjeux de preuve et conditions d’application des clauses résolutoires

L’Essentiel : Le 12 septembre 2024, la société GAVARBIB a assigné KDJ FOOD en référé pour résilier le bail commercial en raison de loyers impayés, demandant également son expulsion. Lors de l’audience du 11 octobre 2024, GAVARBIB a sollicité le bénéfice de son acte introductif, tandis que KDJ FOOD n’a pas comparu. Le juge a noté que la clause résolutoire nécessitait un commandement de payer infructueux, délivré le 24 mai 2024. Cependant, GAVARBIB n’a pas prouvé les impayés, et sa demande de provision a été rejetée, entraînant le rejet de toutes ses demandes et la charge des dépens.

Constitution du bail commercial

Par acte sous seing privé en date du 1er mars 2017, l’indivision [L] a consenti un bail commercial à la société NHR, alors en formation, pour des locaux situés à [Adresse 2] à [Localité 4].

Cession du bail

Le 2 octobre 2017, la société PIZZA PANAM NHR a cédé son droit au bail à la société KDJ FOOD, également en cours de formation.

Cession des locaux

Le 5 mars 2018, l’indivision [L] a cédé les locaux concernés par le bail à la société GAVARBIB.

Assignation en référé

Le 12 septembre 2024, la société GAVARBIB a assigné en référé la société KDJ FOOD pour constater la résiliation du bail en raison de défaut de paiement des loyers, avec effet à partir du 24 juin 2024. Elle a également demandé l’expulsion de KDJ FOOD et le paiement de diverses sommes dues.

Audience et non-comparution

Lors de l’audience du 11 octobre 2024, la société GAVARBIB a sollicité le bénéfice de son acte introductif d’instance, tandis que la société KDJ FOOD, régulièrement assignée, n’a pas comparu.

État des inscriptions

L’état des inscriptions sur le fonds de commerce ne mentionne aucune inscription en date du 22 juillet 2024.

Demande de résiliation du bail

Le juge a examiné la demande de résiliation du bail commercial, notant que la clause résolutoire ne s’applique qu’après un commandement de payer demeuré infructueux. Le commandement a été délivré le 24 mai 2024, mais GAVARBIB n’a pas prouvé que les sommes étaient impayées ou que le commandement était resté sans effet.

Demande de provision

Concernant la demande de provision, bien que GAVARBIB ait prouvé l’existence d’une obligation non sérieusement contestable, elle n’a pas fourni de décompte des arriérés dus, rendant impossible la détermination du montant à allouer.

Décision finale

En conséquence, toutes les demandes de la société GAVARBIB ont été rejetées, sans condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et elle a conservé la charge des dépens. La décision est exécutoire par provision.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure à suivre pour la résiliation d’un bail commercial en cas de défaut de paiement ?

La résiliation d’un bail commercial en cas de défaut de paiement est régie par l’article L. 145-41 du code de commerce. Cet article stipule que :

« Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux.

Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée.

La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge. »

Dans le cas présent, la société GAVARBIB a délivré un commandement de payer le 24 mai 2024, mais n’a pas prouvé que ce commandement était demeuré infructueux dans le délai d’un mois.

Ainsi, la demande de résiliation du bail a été rejetée.

Quelles sont les obligations de preuve en matière de paiement des loyers ?

L’article 1353 du code civil précise que :

« Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. »

Dans cette affaire, la société GAVARBIB, qui réclamait le paiement des loyers, devait prouver que les sommes dues n’avaient pas été réglées.

Cependant, elle n’a pas produit de décompte des loyers impayés, ce qui a conduit à un rejet de ses demandes.

Il est donc essentiel pour le créancier de fournir des preuves claires et précises des montants dus pour que sa demande soit recevable.

Quelles sont les conditions pour obtenir une provision en référé ?

L’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile stipule que :

« Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier. »

Pour qu’une provision soit accordée, il faut que l’existence de l’obligation soit incontestable.

Dans le cas présent, bien que la société GAVARBIB ait produit le contrat de bail, elle n’a pas fourni de décompte des arriérés dus, rendant impossible la détermination du montant exact à allouer.

Ainsi, la demande de provision a également été rejetée.

Quelles sont les conséquences de l’absence de comparution du défendeur en référé ?

L’article 472 du code de procédure civile indique que :

« Lorsque le défendeur ne comparait pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée. »

Dans cette affaire, la société KDJ FOOD n’a pas comparu à l’audience.

Cependant, cela ne signifie pas que la demande de la société GAVARBIB sera automatiquement acceptée.

Le juge doit toujours vérifier la régularité et la fondement de la demande, ce qui a conduit au rejet de toutes les demandes présentées par GAVARBIB.

Ainsi, l’absence de comparution ne garantit pas le succès de la demande du demandeur.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOBIGNY
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Chambre 1/Section 5
N° du dossier : N° RG 24/01351 – N° Portalis DB3S-W-B7I-ZTEF

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ DU 21 NOVEMBRE 2024
MINUTE N° 24/03068
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Nous, Madame Mallorie PICHON, Vice-présidente, au Tribunal judiciaire de BOBIGNY, statuant en référés, assistée de Monsieur Tuatahi LEMAIRE, Greffier,

Après avoir entendu les parties à notre audience du 11 Octobre 2024 avons mis l’affaire en délibéré et avons rendu ce jour, par mise à disposition au greffe du tribunal en application des dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile, la décision dont la teneur suit :

ENTRE :

La société SCI GAVARBIB
dont le siège social est sis [Adresse 1] – [Localité 3]

représentée par Me Gilles BENCHETRIT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0092

ET :

La société KDJ FOOD
dont le siège social est sis [Adresse 2] – [Localité 4]

non comparante, ni représentée

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EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 1er mars 2017, l’indivision [L], représentée par son mandataire, a consenti à la société NHR, alors en cours de formation, un bail commercial portant sur des locaux situés [Adresse 2] à [Localité 4].

Par acte sous seing privé en date du 2 octobre 2017, la société PIZZA PANAM NHR a cédé son droit au bail à la société KDJ FOOD, alors en cours de formation.

Par acte authentique en date du 5 mars 2018, l’indivision [L] a cédé les locaux objet du bail à la société GAVARBIB.

Par acte délivré le 12 septembre 2024 à la société KDF FOOD par procès-verbal de recherches infructueuses et le 11 septembre 2024 au président de cette société, M. [E] [G], la société GAVARBIB a assigné en référé devant le président de ce tribunal la société KDJ FOOD, pour :
faire constater la résiliation du bail par l’effet d’une clause résolutoire à la suite du défaut de paiement des loyers avec effet à la date du 24 juin 2024 à 24 heures ;
à défaut de restitution volontaire des locaux dans le délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, obtenir l’expulsion de la société et de tous occupants de son chef des locaux loués, si besoin avec assistance de la force publique et d’un serrurier, et l’enlèvement et la séquestration des meubles avec sommation à la société KDJ FOOD d’avoir à les retirer dans le délai d’un mois non renouvelable à compter de cette sommation, à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques sur autorisation du juge de l’exécution ;la voir condamner à lui payer à titre provisionnel :une somme de 12.806,54 euros à valoir sur les loyers, charges et indemnités d’occupation impayés, arrêtée au 1er octobre 2024, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2024 sur la somme de 9.173,24 euros et à compter de l’assignation pour le surplus, jusqu’à la date de paiement effectif,une indemnité d’occupation de 50 euros par jour, jusqu’à la libération effective des lieux,que la société KDJ FOOD soit condamnée au paiement de la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens qui comprendront le coût du commandement de payer, de l’assignation, de la signification de l’ordonnance à intervenir et de l’état des privilèges et des nantissements ;voir rappeler que l’exécution provisoire est de droit.
L’affaire a été appelée à l’audience du 11 octobre 2024.

A l’audience, la société GAVARBIB sollicite le bénéfice de son acte introductif d’instance.

Régulièrement assignée, la société KDJ FOOD n’a pas comparu.

L’état des inscriptions sur le fonds de commerce ne porte mention d’aucune inscription en date du 22 juillet 2024.

Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions de la partie demanderesse, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance.

MOTIFS

En application de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparait pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la demande en résiliation du contrat de bail commercial

Aux termes de l’article L. 145-41 du code de commerce, « toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. Les juges saisis d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge. »

En application de l’article 1353 du code civil, « Celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ».

Le bail stipule qu’à défaut de paiement d’un terme du loyer à son échéance, le contrat est résilié de plein droit un mois après la délivrance d’un commandement de payer demeuré infructueux.

Le commandement a été délivré dans les formes prévues à l’article L. 145-41 du code de commerce le 24 mai 2024 par procès-verbal de recherches infructueuses pour le paiement de la somme en principal de 9.173,24 euros.

Néanmoins, la société GAVARBIB ne produit aucun décompte, de sorte qu’elle ne rapporte pas la preuve, ni que les sommes dont elle réclamait le paiement au titre du commandement de payer sont demeurées impayées, ni que ledit commandement est effectivement demeuré infructueux dans le délai d’un mois à compter de sa délivrance.

Dès lors, les demandes en résiliation du contrat de bail et d’expulsion seront rejetées.

Sur la demande en paiement d’une provision

Les dispositions de l’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile prévoient que, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier.

L’octroi d’une provision suppose le constat préalable par le juge de l’existence d’une obligation non sérieusement contestable, au titre de laquelle la provision est demandée. Le montant de la provision susceptible d’être ainsi allouée n’a d’autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée. Le juge des référés fixe discrétionnairement à l’intérieur de cette limite la somme qu’il convient d’allouer au requérant.

En l’espèce, la société GAVARBIB justifie, par la production du contrat de bail commercial, l’existence d’une obligation non sérieusement contestable à la charge de la société KDJ FOOD.

Cependant, elle ne produit aucun décompte permettant de justifier du montant des arriérés dus par la société KDJ FOOD, de sorte qu’il ne peut pas être déterminé, avec l’évidence requise en référé, le montant qui serait dû pour chaque poste de demande.

Dans ces conditions, la demande présentée à ce titre sera rejetée.

La société GAVARBIB conservera la charge des dépens et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Statuant en référé, par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire et en premier ressort,

Rejetons toutes les demandes de la société GAVARBIB ;

Disons n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Disons que la société GAVARBIB conservera la charge des dépens ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision.

AINSI JUGÉ AU PALAIS DE JUSTICE DE BOBIGNY, LE 21 NOVEMBRE 2024.

LE GREFFIER
LE PRÉSIDENT


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