Résiliation de bail commercial et contestation des loyers impayés

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Résiliation de bail commercial et contestation des loyers impayés

L’Essentiel : Madame [J] [Z] née [L] a conclu un bail commercial avec la Sasu Chez André, prenant effet le 16 juin 2017. Suite à des impayés, elle a délivré un commandement de payer, invoquant la clause résolutoire. Le 19 juin 2024, elle a assigné la Sasu devant le juge des référés pour constater la résiliation du bail et réclamer une dette de 6669,02 euros. Lors de l’audience du 8 novembre 2024, la Sasu a évoqué des difficultés financières, tandis que le juge a noté des contestations sérieuses sur les loyers. Finalement, il a renvoyé les parties à se pourvoir devant le juge du fond.

Contexte du Bail Commercial

Madame [J] [Z] née [L] et Madame [B] [C] veuve [L] ont conclu un bail commercial avec la Sasu Chez André pour des locaux situés à [Adresse 1], prenant effet le 16 juin 2017 pour une durée de neuf ans.

Commandement de Payer

Suite à des impayés, Madame [J] [Z] née [L] a délivré un commandement de payer des loyers à la Sasu Chez André, invoquant la clause résolutoire du bail.

Assignation en Justice

Le 19 juin 2024, Madame [J] [Z] née [L] a assigné la Sasu Chez André devant le juge des référés pour faire constater la résiliation du bail au 9 mai 2024, ainsi que le montant de la dette de 6669,02 euros.

Demandes de la Bailleresse

Elle a demandé le paiement d’une provision de 3915,16 euros pour l’arriéré des loyers, une somme mensuelle de 1443,29 euros à titre provisionnel, 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi que le remboursement des frais et dépens.

Situation Financière de la Sasu Chez André

Lors de l’audience du 8 novembre 2024, la Sasu Chez André a fait état de difficultés financières, affirmant que le paiement des loyers avait repris depuis septembre 2024 et demandant des délais de paiement.

Productions et Débats

Le juge a autorisé les parties à produire une note en délibéré jusqu’au 8 janvier 2025. Le 27 décembre 2024, la Sasu Chez André a fourni la preuve de deux virements totalisant 7063,71 euros.

Décision du Juge des Référés

Le juge a rappelé que les demandes de constatation n’étaient pas des prétentions juridiques. Il a constaté des contestations sérieuses concernant les loyers réclamés, notamment en lien avec la procédure de redressement judiciaire ouverte pour la Sasu Chez André.

Conclusion de la Procédure

Le juge a décidé qu’il n’y avait pas lieu à référé et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir devant le juge du fond, laissant les dépens à la charge de Madame [J] [Z] née [L].

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de mise en œuvre de la clause résolutoire dans un bail commercial ?

La clause résolutoire dans un bail commercial est une disposition contractuelle qui permet au bailleur de résilier le contrat en cas de non-paiement des loyers.

Selon l’article 1454 du Code civil, la clause résolutoire doit être expressément stipulée dans le contrat de bail.

Elle doit également être précédée d’un commandement de payer, conformément à l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989, qui impose que le locataire soit mis en demeure de s’acquitter de ses obligations.

Dans le cas présent, Madame [J] [Z] a délivré un commandement de payer, ce qui semble respecter cette exigence.

Cependant, l’article 835 du Code de procédure civile stipule que le juge des référés peut refuser d’ordonner la résiliation si l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Ainsi, la mise en œuvre de la clause résolutoire dépend de la preuve de l’impayé et de l’absence de contestation sérieuse par le locataire.

Quels sont les droits du locataire en cas de difficultés financières ?

En cas de difficultés financières, le locataire peut invoquer des circonstances atténuantes pour demander des délais de paiement.

L’article 1244-1 du Code civil permet au débiteur de demander des délais de paiement lorsque sa situation financière est compromise.

De plus, l’article 835 du Code de procédure civile permet au juge des référés de prescrire des mesures conservatoires, même en présence d’une contestation sérieuse.

Dans cette affaire, la Sas Chez André a fait valoir qu’elle a rencontré des difficultés conjoncturelles et que le paiement des loyers a repris.

Ces éléments peuvent être pris en compte par le juge pour accorder des délais de paiement ou suspendre les effets de la clause résolutoire.

Il est donc essentiel pour le locataire de prouver sa bonne foi et ses efforts pour régulariser sa situation.

Quelles sont les conséquences d’une procédure de redressement judiciaire sur les obligations locatives ?

La procédure de redressement judiciaire a des conséquences importantes sur les obligations locatives du locataire.

L’article L631-1 du Code de commerce stipule que, dès l’ouverture de la procédure, les créanciers ne peuvent pas agir en justice pour obtenir le paiement de leurs créances.

Cela signifie que les loyers échus avant l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire ne peuvent pas être réclamés par le bailleur.

Dans le cas présent, la Sas Chez André soutient que certains loyers réclamés par Madame [J] [Z] sont antérieurs à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire.

Le tribunal doit donc examiner si les sommes réclamées par la bailleresse concernent des périodes postérieures à l’ouverture de la procédure.

Si tel n’est pas le cas, la bailleresse ne pourra pas obtenir le paiement de ces loyers.

Comment le juge des référés apprécie-t-il les demandes de provision en cas de contestation sérieuse ?

Le juge des référés a un pouvoir d’appréciation limité lorsqu’il s’agit de demandes de provision en cas de contestation sérieuse.

L’article 835 du Code de procédure civile précise que le juge peut accorder une provision si l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable.

Dans le cas présent, la Sas Chez André a soulevé des contestations sérieuses concernant le montant des loyers réclamés.

Le juge a donc décidé de ne pas ordonner la résiliation du bail et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir devant le juge du fond.

Cela montre que, même si une demande de provision est formulée, le juge des référés doit s’assurer que l’obligation est incontestable avant de statuer en faveur du créancier.

Ainsi, la présence de contestations sérieuses peut empêcher l’octroi d’une provision.

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE NICE
ORDONNANCE DISANT N’Y AVOIR LIEU À RÉFÉRÉ

N° RG 24/01235 – N° Portalis DBWR-W-B7I-PYXE
du 31 Janvier 2025

N° de minute 25/00200

affaire : [J] [L] épouse [Z]
c/ S.A.S. CHEZ [I]

Grosse délivrée

à Me Anaïs LEPORATI

Expédition délivrée

à Me Pierre ARMANDO

le
L’AN DEUX MIL VINGT CINQ ET LE TRENTE ET UN JANVIER À 14 H 00

Nous, Solange LEBAILE, Première Vice-Présidente, Juge des référés, assistée de Monsieur Thibaut LLEU, Greffier, avons rendu l’ordonnance suivante :

Vu l’assignation délivrée par exploit en date du 19 Juin 2024 déposé par Commissaire de justice.

A la requête de :

Mme [J] [L] épouse [Z]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Rep/assistant : Me Pierre ARMANDO, avocat au barreau de NICE

DEMANDERESSE

Contre :

S.A.S. CHEZ [I]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Rep/assistant : Me Anaïs LEPORATI, avocat au barreau de NICE

DÉFENDERESSE

Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience du 08 Novembre 2024 au cours de laquelle l’affaire a été mise en délibéré au 17 Janvier 2025, prorogé au 31 Janvier 2025

EXPOSÉ DU LITIGE

Suivant acte sous seing privé non daté, Madame [J] [Z] née [L] et Madame [B] [C] veuve [L] ont donné à bail commercial à la Sasu Chez André des locaux commerciaux situés à [Adresse 1] à compter du 16 juin 2017 et pour une durée de neuf années.

Madame [J] [Z] née [L] a fait délivrer à la Sasu Chez André un commandement de payer des loyers visant la cause résolutoire insérée au bail.

Par acte de commissaire de justice en date du 19 juin 2024, Madame [J] [Z] née [L] a fait assigner la Sas Chez André devant le juge des référés aux fins de:

– constater la résiliation du bail commercial par l’effet de la clause résolutoire contractuelle à la date du 9 mai 2024 ;
– constater que le montant de la dette arrêtée au 1er juin 2024 s’élève à la somme de 6669,02 euros,
– condamner la “Sasu” Chez André à lui payer :

* la somme de 3915,16 euros ( 3418,87 + 1306,26 – 810) à titre de provision au titre de l’arriéré des loyers arrêté au 9 mai 2024 outre intérêts en application de l’article 1231-6 du code civil,
* la somme mensuelle de 1443,29 euros à titre provisionnel, à compter du 1ER juin 2024 outre intérêts en application de l’article 1231-6 du code civil jusqu’au complet départ du locataire et de tout occupant de son chef ;
* la somme de1500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
– les frais et dépens de l’instance, comprenant le coût du commandement de payer.

Madame [J] [Z] née [L] a justifié de l’absence de créanciers inscrits sur le fonds de commerce du locataire, par la communication d’un état relatif aux inscriptions des privilèges et publications à la date du 13 juin 2024.

A l’audience du 8 novembre 2024, Madame [J] [Z] née [L] a indiqué par l’intermédiaire de son conseil, que l’arriéré locatif s’élevait à cette date à la somme de 19165,25 euros.

Dans ses conclusions déposées à l’audience précitée et visées par le greffe, la Sas Chez André demande au juge des référés de :
– constater que la société locataire a été confrontée à des difficultés sérieuses qui ont entamé sa trésorerie et sa CAF,
– constater que l’exploitation a été rendue difficile en raison de difficultés conjoncturelles,
– constater que le paiement des loyers courants a repris depuis septembre 2024,
– constater la bonne foi de la société Chez André,
– constater que la bailleresse ne rapporte pas la preuve d’une tentative de résolution amiable de ce litige,
– lui accorder des délais de règlement soit une seule échéance payable au plus tard le 30 décembre 2024 pour s’honorer de la somme de 7063,61 euros,
En conséquence de quoi,
– ordonner la suspension des effets de la clause résolutoire insérée dans le bail commercial,
– débouter la bailleresse de l’ensemble de ses demandes,
En tout état de cause,
– minorer à de plus justes proportions la demande de condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– laisser à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

Les prétentions et moyens des parties sont plus amplement exposés dans les écritures précitées auxquelles, en application de l’article 455 du code de procédure civile, la présente juridiction se réfère.

Après clôture des débats à l’audience du 8 novembre 2024, le juge des référés a autorisé les parties à produire au plus tard le 8 janvier 2025, une note en délibéré relative à un éventuel règlement de la somme de 7063,61 euros.

Par message Rpva en date du 27 décembre 2024, le conseil de la Sas Chez André a fait parvenir à la juridiction une note en délibéré et la preuve de deux virements pour un montant total de 7063,71 euros.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il convient de rappeler que le juge n’est pas tenu de statuer sur les demandes de “constatations” qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques.

Sur les demandes de Madame [J] [Z] née [L]

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, le juge des référés peut, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, il peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.

En l’espèce, il ressort de l’extrait Papers produit par la défenderesse que :
– par jugement en date du 1er décembre 2022, le tribunal de commerce de Nice a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la Sas Chez André, a fixé la date de cessation de paiements au 1ER décembre 2022 et a rappelé que les déclarations des créances devaient être déposées entre les mains de la Selarl [H] et associés prise en la personne de Maître [X] [H], mandataire judiciaire, dans les deux mois à compter de la date de publication au Bodacc,
– par jugement en date du 13 mars 2024, le tribunal de commerce de Nice a arrêté un plan de redressement sur une durée de dix ans.
La Sas Chez André soutient qu’une partie des loyers aujourd’hui réclamés et qu’elle n’a pas spontanément réglés en cours de délibéré, porte sur une période antérieure à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire. Le dernier décompte produit par la demanderesse ( pièce 11 ) commence au 1ER janvier 2024 et mentionne un solde antérieur de 16 100,65 sans autre précision de sorte qu’il est impossible de dire avec l’évidence requise en matière de référés que l’intégralité des sommes réclamées par la bailleresse porte sur des échéances postérieures à l’ouverture du redressement judiciaire dont bénéficie la locataire. En l’état de ces contestations sérieuses, il convient de dire n’y avoir lieu à référé et de renvoyer les parties à mieux se pourvoir dès qu’elles aviseront, devant le juge du fond.

La demanderesse qui succombe au stade des référés, conservera à sa charge les dépens de la présente instance.

PAR CES MOTIFS :

Nous, Juge des référés du Tribunal judiciaire de Nice, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire, en premier ressort et prononcée par mise à disposition au greffe, avis préalablement donné,

DISONS n’y avoir lieu à référé et renvoyons les parties à mieux se pourvoir dès qu’elles aviseront, devant le juge du fond,

LAISSONS les dépens à la charge de Madame [J] [Z] née [L].

LE GREFFIER LE JUGE DES RÉFÉRÉS


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