L’Essentiel : La cession globale des œuvres futures est déclarée nulle, conformément à l’article L. 131-1 du code de la propriété intellectuelle. Les clauses des conditions générales d’utilisation de Facebook stipulent que l’utilisateur conserve les droits sur son contenu, mais accorde à Facebook une licence mondiale, non-exclusive et sans redevance. Cette situation crée un déséquilibre significatif entre les droits des parties, rendant la clause abusive. De plus, la suppression des contenus ne garantit pas leur effacement total, laissant l’utilisateur dans l’incertitude quant à l’utilisation de ses données. Les exigences légales en matière de clarté et de précision ne sont pas respectées.
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Solution transposable à tous les services de communication électronique permettant à leurs utilisateurs de créer et diffuser leurs contenus : la cession globale d’œuvres futures est nulle. Interdiction de la cession globale d’œuvres futuresEn l’espèce, les clauses des CGU de Facebook, stipulaient que l’utilisateur reste titulaire des droits sur le contenu qu’il publie lorsqu’il publie des « contenus » ou des « informations » sur le réseau social (« Le contenu et les informations que vous publiez sur Facebook vous appartiennent »). Absence de contrepartieCependant ces clauses accordent à la société Facebook, une licence mondiale non-exclusive, transférable, sous-licenciable, pour l’utilisation des contenus de propriété intellectuelle publiés par l’utilisateur sur Facebook « ou en relation avec Facebook » (licence de propriété intellectuelle) sans que soit prévu une quelconque rémunération (« sans redevance ») au bénéfice de l’utilisateur. La clause prévoit également que la licence prend fin dans deux situations : en cas de suppression des contenus de propriété intellectuelle et en cas de suppression du compte de l’utilisateur, sauf si ce compte est partagé avec d’autres personnes qui n’ont pas supprimé le contenu en cause. De sorte que, les « contenus » ou « informations », qui ne sont pas supprimés ou ceux dont l’auteur n’aurait pas supprimé le compte Facebook, ne font l’objet d’aucune limitation de durée. Article L. 131-1 du code de la propriété intellectuelleL’article L. 131-1 du code de la propriété intellectuelle, qui s’applique tant aux contrats de cession de droits qu’aux contrats de licences, prévoit que « la cession globale des œuvres futures est nulle ». Aux termes des articles L. 131-2 et L. 131-3 du même code, les contrats par lesquels sont transmis des droits d’auteur doivent être constatés par écrit. Cette transmission est conditionnée à ce que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée. L’article L. 133-2, devenu l’article L. 211-1 du code de la consommation, prévoit que les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible. Ainsi, les articles L.131-1, L. 131-2, L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle, imposent au bénéficiaire de la cession l’obligation de préciser au sein des contrats de transmission des droits d’auteur, le contenu visé, les droits conférés ainsi que les exploitations autorisées par l’auteur du contenu protégé. S’agissant d’une cession consentie à titre gratuit, de surcroît par un consommateur au bénéfice d’un professionnel, la clause de transmission des droits d’auteur doit être dépourvue de toute ambiguïté, aux termes des articles L. 133-2, devenu l’article L. 211-1 du code de la consommation. Tel n’était pas le cas des clauses en cause qui confèrent au bénéfice de Facebook, fournisseur du service de réseautage social, une « licence » « mondiale » « sans redevance », « transférable et sous-licenciable », c’est-à-dire un droit d’utilisation à l’échelle mondiale et à titre gratuit sur tous les « contenu(s) protégé(s) par les droits de propriété intellectuelle « , susceptibles en conséquence de faire l’objet d’une protection par le droit d’auteur (photos, vidéos etc.), dès lors qu’ils sont publiés par l’utilisateur sur Facebook ou en relation avec Facebook, c’est-à-dire lorsque l’utilisateur n’est pas sur la plate-forme Facebook, mais sur un site partenaire. Par ailleurs, la suppression du contenu de propriété intellectuelle n’emporte pas suppression définitive des contenus, lesquels survivent « pendant un certain temps » dans des « copies de sauvegarde » « mais qu’ils ne sont pas disponibles ». De sorte que le droit d’utilisation concédé par l’utilisateur au fournisseur de réseautage social sur les données (« contenus » et les « informations) » ne connait aucune limitation de durée, même en cas de suppression des « Contenus » ou « Informations » ou de suppression du compte de l’utilisateur, ce dernier n’ayant aucune certitude quant l’utilisation de ces données postées sur le réseau social à des fins autres que celles pour lesquelles elles ont été collectées. En conséquence, ces clauses, imprécises quant aux contenus concernés, à la nature et la durée des droits conférés et aux exploitations autorisées, ne répondent à aucune des exigences du Code de la propriété intellectuelle. Sanction des licences sans limitesCompte tenu du caractère très étendu des droits conférés par l’utilisateur au fournisseur de réseautage social par la licence d’exploitation (« non exclusive, transférable, sous-licenciable, sans redevance et mondiale »), sans commune mesure avec l’accès au réseau social accordé par la société Facebook à l’utilisateur, la clause des CGU est abusive en ce qu’elle est nature à créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat au détriment du consommateur. Télécharger la décision |
Q/R juridiques soulevées :
Qu’est-ce que la cession globale d’œuvres futures et pourquoi est-elle considérée comme nulle ?La cession globale d’œuvres futures est un concept juridique stipulé par l’article L. 131-1 du code de la propriété intellectuelle, qui déclare que toute cession de droits d’auteur sur des œuvres qui n’existent pas encore est nulle. Cette règle vise à protéger les créateurs en leur permettant de conserver leurs droits sur des œuvres qu’ils n’ont pas encore produites. En effet, une telle cession pourrait priver un auteur de la possibilité de contrôler l’utilisation de ses créations futures, ce qui serait injuste et désavantageux pour lui. Comment Facebook gère-t-il les droits d’auteur des utilisateurs selon ses CGU ?Les conditions générales d’utilisation (CGU) de Facebook stipulent que les utilisateurs conservent les droits sur le contenu qu’ils publient. Cependant, en publiant sur la plateforme, ils accordent à Facebook une licence mondiale, non-exclusive, transférable et sous-licenciable pour utiliser ces contenus. Cette licence est accordée sans rémunération pour l’utilisateur, ce qui soulève des questions sur l’équité de cette pratique. De plus, la licence ne prend fin que si l’utilisateur supprime son contenu ou son compte, ce qui peut laisser les utilisateurs dans l’incertitude quant à l’utilisation de leurs données. Quelles sont les exigences légales concernant la cession des droits d’auteur ?Les articles L. 131-2 et L. 131-3 du code de la propriété intellectuelle imposent que les contrats de cession de droits d’auteur soient rédigés par écrit et que chaque droit cédé soit mentionné de manière distincte. De plus, le domaine d’exploitation des droits doit être clairement délimité en termes d’étendue, de destination, de lieu et de durée. Ces exigences visent à garantir la transparence et la protection des droits des auteurs, en évitant les ambiguïtés qui pourraient nuire à leur contrôle sur leurs œuvres. Pourquoi les clauses de Facebook sont-elles considérées comme abusives ?Les clauses des CGU de Facebook sont jugées abusives en raison de l’étendue des droits conférés à la plateforme par les utilisateurs. La licence accordée est mondiale, non-exclusive, transférable et sans redevance, ce qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties. Cela signifie que Facebook peut utiliser les contenus des utilisateurs de manière illimitée, sans compensation, ce qui est disproportionné par rapport à l’accès que les utilisateurs ont au réseau social. Cette situation est contraire aux principes de protection des consommateurs et des droits d’auteur. Quelles sont les conséquences de la suppression de contenu sur Facebook ?La suppression d’un contenu par un utilisateur ne garantit pas que ce contenu soit définitivement effacé. En effet, même après suppression, des copies de sauvegarde peuvent subsister, ce qui signifie que Facebook pourrait continuer à avoir accès à ces données. Cela soulève des préoccupations quant à la confidentialité et à l’utilisation des données personnelles, car les utilisateurs n’ont pas de certitude sur la manière dont leurs informations seront utilisées après leur publication, même si elles sont supprimées de leur profil. Comment les utilisateurs peuvent-ils protéger leurs droits d’auteur sur les plateformes de communication électronique ?Pour protéger leurs droits d’auteur, les utilisateurs doivent être conscients des conditions d’utilisation des plateformes sur lesquelles ils publient. Il est essentiel de lire attentivement les CGU et de comprendre les implications de la cession de droits. Les utilisateurs peuvent également envisager d’utiliser des licences spécifiques qui préservent leurs droits tout en permettant un certain niveau d’utilisation par d’autres. Enfin, il est conseillé de consulter un avocat spécialisé en propriété intellectuelle pour obtenir des conseils adaptés à leur situation. |
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