L’Essentiel : Monsieur [X] [A] a été embauché par la SARL SODEPAC en 2002 sans contrat écrit. En novembre 2015, il a été placé en garde à vue pour escroquerie et a démissionné en reconnaissant avoir vendu des produits périmés. Bien que relaxé par le tribunal correctionnel en 2016, la Cour d’Appel de Nouméa l’a déclaré coupable en 2017, le condamnant à une amende et à rembourser des préjudices. En 2023, le tribunal du travail a requalifié sa démission en licenciement abusif, mais la Cour d’Appel a finalement infirmé cette décision, considérant sa démission comme libre et non équivoque.
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Embauche et Contexte de l’AffaireMonsieur [X] [A] a été embauché par la SARL SODEPAC en tant qu’employé de rayon polyvalent sans contrat de travail écrit, à partir du 23 septembre 2002. En octobre 2015, son salaire de base était de 165.000 F CFP pour 169 heures de travail. Suite à une plainte de l’employeur en novembre 2015, plusieurs employés, dont [X] [A], ont été entendus par la police. Garde à Vue et DémissionLe 19 novembre 2015, Monsieur [X] [A] a été placé en garde à vue pour des faits d’escroquerie. Le même jour, il a été mis à pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable au licenciement. Lors de cet entretien, il a remis une lettre de démission dans laquelle il reconnaissait avoir participé à des actes frauduleux, notamment la vente de produits périmés à des prix réduits. Procédures JudiciairesLe 7 octobre 2016, le tribunal correctionnel de Nouméa a relaxé Monsieur [X] [A] et d’autres salariés des accusations d’escroquerie. Cependant, le 8 août 2017, la Cour d’Appel de Nouméa a infirmé cette décision, déclarant Monsieur [A] coupable d’avoir trompé la société SODEPAC. Il a été condamné à une amende de 150.000 F CFP et à rembourser 3 millions de F CFP pour préjudice économique. Demande de Requalification de la DémissionLe 17 janvier 2018, Monsieur [X] [A] a saisi le Tribunal du travail de Nouméa pour contester la validité de sa démission, arguant qu’elle n’avait pas été donnée librement. Il a demandé le paiement de diverses indemnités et salaires dus. Le tribunal a suspendu la procédure en attendant un arrêt de la Cour de Cassation. Décisions de la Cour de Cassation et de la Cour d’AppelLe 6 novembre 2019, la Cour de Cassation a annulé les décisions de la Cour d’Appel de Nouméa, renvoyant l’affaire devant la Cour d’Appel de Paris. En janvier 2022, la Cour d’Appel de Paris a confirmé le caractère définitif de l’arrêt de la Cour d’Appel de Nouméa concernant Monsieur [A]. Jugement du Tribunal du TravailLe 28 mars 2023, le tribunal du travail a requalifié la démission de Monsieur [X] [A] en licenciement sans cause réelle et sérieuse, condamnant la société SODEPAC à lui verser plusieurs indemnités, y compris des dommages et intérêts pour licenciement abusif. Procédure d’Appel de la Société SODEPACLa société SODEPAC a interjeté appel du jugement du 28 mars 2023, soutenant que la démission de Monsieur [A] était libre et volontaire. Elle a contesté la requalification de la démission et a demandé le déboutement de toutes les demandes indemnitaires. Décision de la Cour d’AppelLe 18 octobre 2023, la Cour d’Appel a rejeté la requête de radiation de l’instance de Monsieur [A]. En septembre 2024, l’affaire a été fixée pour plaidoirie. La Cour a finalement infirmé le jugement du tribunal du travail, déclarant que la démission de Monsieur [A] était libre et non équivoque, le déboutant de toutes ses demandes et le condamnant à payer des frais à la société SODEPAC. |
Q/R juridiques soulevées :
La validité de la démission de Monsieur [X] [A]La démission est un acte par lequel un salarié met fin à son contrat de travail de manière volontaire. Selon l’article L1231-1 du Code du travail, « le contrat de travail à durée indéterminée peut être rompu à tout moment par l’une ou l’autre des parties, sous réserve du respect d’un préavis ». Il est essentiel que la démission soit claire et non équivoque. En effet, l’article L1231-2 précise que « la démission doit être donnée de manière claire et non équivoque ». Dans le cas de Monsieur [X] [A], la cour a constaté que sa démission, bien que contestée deux ans après, a été formulée dans un contexte de mise à pied à titre conservatoire et de révélations de faits délictuels. Il a été établi que Monsieur [A] n’a pas prouvé avoir subi des pressions ou des menaces de la part de son employeur au moment de sa démission. Ainsi, la cour a requalifié la démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse, en considérant que la volonté de démissionner n’était pas claire, mais équivoque. Les conséquences financières du licenciement sans cause réelle et sérieuseLorsqu’un licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse, l’article L1235-1 du Code du travail stipule que « le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à six mois de salaire ». Dans le cas présent, Monsieur [X] [A] a demandé plusieurs indemnités, y compris des rappels de salaire, des indemnités compensatrices de congés payés, et des dommages et intérêts. Le tribunal a accordé des sommes spécifiques, notamment 1.590.000 F CFP au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que des rappels de salaire et des indemnités de congés payés. L’article 886-2 du Code de procédure civile précise que « l’exécution provisoire est de droit sur les créances salariales », ce qui a été appliqué dans cette affaire pour garantir le paiement des sommes dues à Monsieur [A]. La question des frais irrépétibles et des dépensLes frais irrépétibles, selon l’article 700 du Code de procédure civile, permettent à une partie de demander le remboursement des frais engagés pour la procédure. Dans cette affaire, Monsieur [X] [A] a demandé 500.000 F CFP au titre de l’article 700, mais la cour a finalement condamné Monsieur [A] à payer 200.000 F CFP à la société SODEPAC pour les frais irrépétibles, en raison de sa défaite dans l’instance. Les dépens, quant à eux, sont régis par l’article 696 du Code de procédure civile, qui stipule que « la partie perdante est condamnée aux dépens ». Ainsi, la cour a condamné Monsieur [A] aux dépens de première instance et d’appel, ce qui est conforme à la pratique judiciaire en matière de contentieux du travail. |
COUR D’APPEL DE NOUMÉA
Arrêt du 25 novembre 2024
Chambre sociale
N° RG 23/00030 – N° Portalis DBWF-V-B7H-T24
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 28 Mars 2023 par le Tribunal du travail de NOUMEA (RG n° :F 20/00010)
Saisine de la cour : 03 Mai 2023
APPELANT
LA SARL SODEPAC prise en la personne de ses représentants légaux,
Siège social : [Adresse 1]
Représentée par Me Pierre-henri LOUAULT de la SELARL SOCIETE D’AVOCATS JURISCAL, avocat au barreau de NOUMEA
INTIMÉ
M. [X] [A]
né le 17 Mai 1978 à [Localité 4],
demeurant [Adresse 2]
Représenté par Me Barbara BRUNARD de la SELARL BARBARA BRUNARD, avocat au barreau de NOUMEA
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 12 Septembre 2024, en audience publique, devant la cour composée de :
M. François GENICON, Président de chambre, président,
M. François BILLON, Conseiller,
Mme Zouaouïa MAGHERBI, Conseiller,
qui en ont délibéré, sur le rapport de Mme Zouaouïa MAGHERBI.
25/11/2024 : Copie revêtue de la formule exécutoire – Me LOUAULT ;
Expéditions – Me BRUNARD ;
– SODEPAC et M. [A] (LR/AR)
– Copie CA ; Copie TT
Greffier lors des débats et lors de la mise à disposition : M. Petelo GOGO
ARRÊT :
– contradictoire,
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 451 du code de procédure civile de la Nouvelle-Calédonie,
– signé par M. François GENICON, président, et par M. Petelo GOGO, greffier, auquel la minute de la décision a été transmise par le magistrat signataire.
Procédure de première instance :
Monsieur [X] [A] était embauché sans contrat de travail écrit en qualité d’employé de rayon polyvalent, par la SARL SODEPAC, qui assure l’exploitation du supermarché SUPER U à [Localité 3] à compter du 23 septembre 2002 .
En octobre 2015, son salaire de base s’élevait à 165.000 F CFP pour 169 heures.
Suite à une plainte contre X de l’employeur en date du 13 novembre 2015, plusieurs salariés de la société, dont [X] [A], étaient entendus par la police.
Le 19 novembre 2015, Monsieur [X] [A] était quant à lui placé en garde à vue et entendu sur les faits d’escroquerie qui lui étaient reprochés.
Par courrier du 19 novembre 2015, il était immédiatement mis a pied à titre conservatoire et convoqué à un entretien préalable à licenciement fixé au 1er décembre 2015.
Au cours de l’entretien, Monsieur [X] [A] a remis une lettre de démission au directeur de la société .
Ce courrier était rédigé comme suit :
« Je reconnais avoir pris des cartons poulets que j’ai payés et un veau pour mon mariage que j’ai payé aussi vu avec [H] chef du dock. Je reconnais avoir vu des marchandises périmées, produits intermarché ,vendus au personnel à 200, 100 et 50 F CFP, qui allaient dans une boîte qu’on appelle « pot voleur ». Le personnel participait! Le directeur [S] nous a donné l’accord pour vendre les produits intermarché qui lui avait l’accord du PDG Monsieur [N]. ll y avait des produits qui étaient périmés (DL V) qu’on prenait et payait à 200 F CFP, 100 F CFP et 50 F CFP, qui allaient au « pot voleur ». Le « pot voleur » servait à dépanner des gens (personnel) qui après remboursait, comme moi! Vu dans les caméras, [D], [G], [Y], [P]. Je reconnais aussi qu’ils /elles prenait les produits périmer marque U et inter marché et qu’ils /elles payé 200, 100, 50 parce que j’y étais. Tous les sous des produit périmer étaient remis aux chefs de caisses [R] et [W] [E] qui eux mettaient dans la boîte » pot voleur ». Moi [X] participer aux achats (les DL V) que j’ai payé à (200, 100, 50) CFP et le directeur aussi participer. Dans tous les produits périmé, il y avait les produits locaux comme cococue/rabot/ Serdis. Mais avec Serdis, il faisait un échange. En conclusion, je décide de donner ma démission à compter de ce jour le 1/12/2015. Je vous demande de retenir les sommes qui me sont du pour commencer à rembourser ce que je dois à l’entreprise. »
Le 7 octobre 2016, le tribunal correctionnel de NOUMEA relaxait Monsieur [X] [A] et les autres salariés poursuivis des faits d’escroquerie commis à NOUMEA du 28 septembre 2014 au 28 septembre 2015.
Le 8 août 2017, la Cour d’AppeI de NOUMEA infirmait cette décision et déclarait coupables Monsieur [A] et les autres ex-salariés d’avoir, entre le 28 septembre 2014 et le 28 septembre 2015, en employant des manoeuvres frauduleuses, en I’espèce en manipulant le logiciel informatique des stocks, trompé la société SODEPAC pour la déterminer à remettre des fonds valeurs ou bien quelconque en l’espèce en vendant des produits appartenant à la société à des prix entraînant une perte financière pour I’entreprise.
Monsieur [A] était quant à lui condamné à une peine d’amende de 150.000 F CFP.
Sur l’action civile, il était condamné solidairement avec les autres prévenus à rembourser la somme de 3 Millions de F CFP au titre du préjudice économique à la société d’expIoitation du pacifique et 500.000 F CFP au titre de l’article 475-1 du code de procédure pénale .
Par requête introductive d’instance enregistrée le 17 janvier 2018, complétée par des conclusions enregistrées le 10 décembre 2018, Monsieur [X] [A] a fait convoquer la société SODEPAC devant le Tribunal du travail de NOUMEA aux fins suivantes :
– dire que sa démission du 1er décembre 2015 n’a pas été donnée de manière libre et en conséquence s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– condamner la société SODEPAC à lui verser les sommes suivantes :
– 193.972 F CFP au titre du salaire du mois de novembre 2015,
– 253.927 F CFP au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés,
– 387.944 F CFP au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,
– 264. 508 F CFP au titre de l’indemnité légale de licenciement,
– 3.174. 084 F CFP à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 250 000 F CFP au titre de I’article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE DE LA NOUVELLE CALÉDONIE,
– dire et juger que la société SODEPAC devra fournir le bulletin de paye de novembre 2015,
– assortir le jugement à intervenir de I’exécution provisoire.
Par jugement du 30 juillet 2019, le tribunal du travail a sursis à statuer sur les demandes de M.[A] dans I’attente de I’arrêt de la Cour de Cassation et ordonné la radiation du rôle de la présente procédure.
Par arrêt en date du 6 novembre 2019, la Cour de Cassation cassait et annulait toutes les dispositions de I’arrêt susvisé de la Cour d’AppeI de Nouméa en date du 8 août 2017 et renvoyait la cause et les parties devant la Cour d’AppeI de Paris.
M.[A] sollicitait au terme de ses écritures le rétablissement au rôle de la procédure du 22 janvier 2020, dans la mesure où la décision de la Cour d’AppeI de NOUMEA était définitive à son égard Monsieur [A] ne soutenant pas le pourvoi en cassation, exercé par les autres.
Par courrier en date du 11 février 2021, son conseil sollicitait le renvoi de l’affaire dans I’attente de I’arrêt de la Cour d’appeI de PARIS au motif que celui-ci avait été convoqué devant cette cour alors qu’iI n’avait pas soutenu le pourvoi et qu’iI y avait donc une incertitude sur la portée de la décision de la Cour de cassation quant au caractère définitif de la décision de la Cour d’Appel de NOUMEA, s’agissant de M.[A].
L’arrêt de la Cour d’Appel de Paris rendu le 28 janvier 2022, adressé au tribunal sur sa demande le 23 janvier 2023, ne jugeait que les personnes ayant formé le pourvoi, ce qui confirmait le caractère définitif de I’arrêt de la Cour d’appel de NOUMEA, s’agissant de M.[A].
Par jugement du 28 mars 2023, le tribunal du travail de Nouméa a dès lors :
– requalifié la démission de monsieur [X] [A] en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– condamné la société SODEPAC à lui payer les sommes suivantes :
– Cent soixante-seize mille trois cent trente-huit (176.338) F CFP au titre de rappel du salaire du mois de novembre ;
– Dix-sept mille six cent trente-quatre (17. 634) F CFP au titre des congés payés sur le salaire du mois de novembre ;
-Trois cent cinquante-deux mille six cent soixante-seize (352.676) F CFP au titre de l’indemnité compensatrice de préavis;
-Trente cinq mille deux cent soixante-sept (35.267)F CFP au titre de I’indemnité de congés payés sur préavis ;
– Deux cent cinquante-trois mille neuf cent vingt-sept (253.927) F CFP au titre des congés payés ;
– Deux cent soixante-quatre mille cinq cent huit (264. 508) F CFP au titre de l`indemnité de licenciement;
– Un million cinq cent quatre-vingt-dix mille (1.590.000) F CFP au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelIe et sérieuse ;
– dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la présente décision, s’agissant des créances indemnitaires et à compter de la demande s’agissant des créances salariales ;
– fixé à la somme de Cent soixante-seize mille trois cent trente-huit (176.338) F CFP la moyenne des trois derniers mois de salaire ;
– condamné la société SODEPAC à remettre à monsieur [X] [A] son bulletin de salaire de novembre 2015
– dit n’y avoir lieu à astreinte ;
– rappelé que l’exécution provisoire est de droit sur les créances salariales dans les conditions prévues par l’article 886-2 du Code de Procédure Civile
– ordonné l’exécution provisoire de la présente décision à hauteur de l’intégralité des sommes allouées à titre de dommages-intérêts ;
– rejeté toutes autres demandes plus amples ou contraires
– condamné la société SODEPAC à payer à monsieur [X] [A] la somme de cent quatre vingt mille (180.000) F CFP au titre des frais irrépétibles ;
– condamné la société SODEPAC aux dépens.
Procédure d’appel :
Par requête et mémoire ampliatif déposés les 27 avril et 26 juillet 2023, auxquelles il convient de se référer pour de plus amples développements en fait et en droit, la société SODEPAC sollicite l’infirmation du jugement du 28 janvier 2022 et statuant à nouveau de dire et juger la démission de M.[A] libre et volontaire et de le débouter de toutes ses demandes indemnitaires et à titre subsidiaire, si la Cour devait entrer en voie de requalification de la démission donnée par Monsieur [A], le débouter de ses demandes d’indemnisation formulées au titre :
– du salaire du mois de novembre 2015 ;
– de l’indemnité de préavis et congés payés sur préavis ;
– de l’indemnité légale de licenciement ;
– de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
Elle expose que M.[A] ne rapporte pas la preuve de menaces ou des pressions de la part de son employeur pour l’obliger à lui donner sa démission. Selon elle, dès lors que sa démission est claire et non équivoque, M.[A] doit être débouté de l’ensemble de ses demandes.
Elle ajoute que ce dernier a eu surplus dénoncé l’ensemble de ses collègues dans ce courrier, tout en reconnaissant avoir également participé aux faits qui lui sont reprochés et qu’il n’a manifesté une volonté de rétractation de sa démission que tardivement, soit 2 ans après sa démission.
Elle précise que la procédure de licenciement pour faute grave était engagée et justifiée compte tenu de sa condamnation pénale et l’autorisation donnée par la juridiction administrative de licencier Mme [I] salariée protégée qui avait également participé aux faits délictueux. La démission litigieuse lui a permis selon elle d’éviter un licenciement pour faute incontestable sans règlement d’indemnité, de sorte qu’il n’est pas fondé à en solliciter, ni même fondé à solliciter un rappel de salaire sur la période de mise à pied à titre conservatoire.
Elle expose en outre que M. [A] n’étabIit pas avoir subi de préjudices causés par sa démission, les dommages et intérêts sollicités sont exorbitant en considération de la condamnation pénale de dernier.
Par ordonnance d’incident du 18 octobre 2023, la requête en radiation de l’instance déposée au visa de l’article 526 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE DE LA NOUVELLE CALÉDONIE de M.[A] a été rejetée. Une injonction de conclure au fond avant le 31 janvier 2024 lui a dès lors été délivrée.
Par conclusions déposées le 28 février 2024 par voie électronique, auxquelles il convient de se référer pour de plus amples développements en fait et en droit, M.[A] demande à la cour de confirmer dans toutes ses dispositions la décision du tribunal du travail de Nouméa en date du 28 mars 2023 à l’exception du montant alloué à titre de dommages et intérêts pour le licenciement sans cause réelle et sérieuse de Monsieur [A] ;
En conséquence, sur ce point uniquement ;
– réformer le jugement du 28 mars 2023 et condamner la Société SODEPAC à verser à M. [X] [A] les sommes suivantes : 3.174.084 F CFP à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
– condamner la Société SODEPAC à verser à M. [X] [A] 500.000 F CFP au titre de l’article 700 du CODE DE PROCÉDURE CIVILE DE LA NOUVELLE CALÉDONIE.
M. [X] [A] soutient que sous la pression de son employeur, il a cédé en écrivant la lettre de démission alors qu’il n’avait aucune intention de démissionner de son poste, ainsi, il y a lieu de confirmer la décision entreprise quant à la requalification de la rupture des relations contractuelles en licenciement sans cause réelle et sérieuse au motif que sa volonté de démissionner n’était pas claire, mais équivoque. Il considère donc justifiée I’intégraIité de ses demandes indemnitaires et salariales sur la base d’un salaire moyen de 176.338 F CFP compte tenu de son ancienneté, à l’exception des sommes allouées au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Le 18 juin 2024, l’affaire a été fixée à l’audience de plaidoirie du 12 septembre 2024.
Sur la requalification de la démission du 1er décembre 2015 :
La cour rappelle que si la démission est l’acte écrit ou l’expression orale par lesquels un salarié décide de rompre son contrat de travail à durée indéterminée de sa propre initiative, il n’en demeure pas moins qu’elle doit non seulement manifester clairement sa volonté, mais également être non équivoque et respecter le délai de préavis éventuellement prévu, sauf dispense accordée par l’employeur ou prévue par la convention collective.
Toutefois, même en présence d’une volonté apparente de démissionner, le salarié peut toutefois contester avoir démissionné s’il démontre que son consentement a été vicié ou que sa volonté était équivoque.
La cour observe qu’en l’espèce, la démission de M.[A], en date du 1er décembre 2015, contestée 2 ans après avoir été exprimée, a été donnée en raison de circonstances contemporaines de sa mise à pied à titre conservatoire notifiée le 19 novembre 2015, suite à la révélation de faits délictuels reconnus par ce dernier commis à l’encontre de son employeur antérieurement à la procédure de licenciement qui a été engagée à son encontre.
M. [A] déclare avoir subi des pressions de son employeur afin qu’il lui remette sa démission, qu’il était fragilisé par sa garde à vue et les poursuites pénales dont il faisait l’objet.
Or, force est de constater, que M. [A] non seulement ne démontre pas avoir subi de pression, ni de contrainte morale, ni de procédés vexatoires, de la part de son employeur ayant vicié son consentement au moment de la remise de sa démission (les seuls éléments qu’il invoque sont les conséquences des poursuites pénales du Ministère public qui s’avéreront justifiées par la suite et qui échappent totalement à l’employeur qui est victime des agissements de ses salariés, que la garde à vue est également la conséquence de ces poursuites pénales qui au demeurant a eu lieu plusieurs jours avant son entretien avec son employeur).
En premier lieu, la cour observe qu’en l’espèce la remise de la lettre de démission a mis un terme à la poursuite de la procédure de licenciement engagée par l’employeur suite à la révélation du comportement déloyal de M.[A] à son égard qui ne permettait plus la poursuite des relations de travail, la confiance de son employeur étant rompue.
En second lieu, l’absence de rétractation de la démission dite ‘équivoque’ donnée sous la pression de l’employeur dans un bref délai à compter de sa remise, comme le prétend le salarié, est un élément d’appréciation de sa mauvaise foi dès lors qu’il avait tout loisir d’exprimer sa rétractation une fois hors du champ de l’influence de son employeur si tel avait été le cas.
En effet, le délai de 2 ans afin de saisir le tribunal du travail d’une demande de requalification d’une démission en licenciement sans cause réelle et sérieuse, dans un tel contexte de faute grave commise par le salarié démontre tout au contraire que sa démission n’est ni équivoque, ni dictée par l’impulsivité du moment ou une quelconque pression de l’employeur.
Au surplus, la cour relève qu’aux termes du courrier de démission litigieux, il n’y a aucune discussion sur la matérialité des faits reprochés, ni grief, éléments qui justifieraient les pressions invoquées par M.[A] et qu’aucune démarche postérieure de rétractation de la démission n’est démontrée par la salarié.
Par ailleurs, le silence du salarié pendant une durée de 2 ans revêt un caractère préjudiciable à l’employeur qui aurait pu suite à une rétractation à bref délai poursuivre la procédure de licenciement d’ores et déjà engagée à son encontre suite aux révélations de faits délictuels commis au préjudice de l’employeur, faits reconnus, si ce dernier n’avait pas eu la volonté claire et non équivoque de démissionner.
Ainsi, la décision entreprise sera donc infirmée en toutes ses dispositions. Statuant à nouveau, la cour dit que la démission de M [A] est libre et non équivoque et le déboute de l’ensemble de ses demandes.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
M.[A] [C] succombant sera condamné aux dépens de première instance et d’appel et par conséquent à payer à la société SODEPAC une somme de 200.000 F CFP au titre des frais irrépétibles dont il a pu faire l’avance en appel.
La Cour
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
Dit que la démission de M. [A] [X] est libre et non équivoque ;
Le déboute de l’ensemble de ses demandes ;
Et y ajoutant
Condamne M. [A] [X] à payer à la société SODEPAC une somme de
200 000 F CFP au titre de l’article 700 du CPCNC ;
Le condamne aux dépens de première instance et d’appel.
Le greffier, Le président.
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