L’Essentiel : Après quinze années de CDD d’usage, un salarié a été requalifié en CDI par les juges. Les contrats successifs, justifiés par des motifs vagues, ne correspondaient pas à la nature temporaire de l’emploi. Selon le Code du travail, un CDD ne peut pas pourvoir durablement un poste lié à l’activité normale de l’entreprise. En l’espèce, le salarié exerçait des fonctions de Chef Opérateur Vidéo de manière continue, ce qui a conduit à la conclusion que son emploi était pérenne. L’employeur a finalement été contraint de prouver que le contrat était à temps partiel, ce qui a été retenu.
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15 années de CDD d’usagePar de nombreux contrats de travail à durée déterminée d’usage et pendant près de quinze années, un salarié a été embauché par une société de production, en qualité de Chef Opérateur Vidéo. Sans grande surprise, le salarié a obtenu la requalification de sa collaboration en CDI. Recours aux CDD d’usageUn contrat à durée déterminée (CDD), quel que soit son motif, ne peut avoir pour objet, ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale de l’entreprise (L. 1242-1 du Code du travail). Un CDD ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire et seulement dans les cinq cas qu’il énumère, parmi lesquels figurent : i) le remplacement d’un salarié ; ii) l’accroissement temporaire de l’activité de l’entreprise ; iii) les emplois saisonniers ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou convention ou accord collectif étendu, il est d’usage de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée ou du caractère par nature temporaire de ces emplois (L. 1242-2). Parmi les secteurs autorisés à faire appel aux CDD d’usage figurent les spectacles, l’action culturelle, l’audiovisuel, la production cinématographique et l’édition phonographique. Appréciation in concreto des jugesL’accord-cadre sur le travail à durée déterminée conclu le 18 mars 1999, mis en oeuvre par la Directive N°1999/70/CE du 28 juin 1999, qui a pour objet de prévenir les abus résultant de l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, impose de vérifier que le recours à l’utilisation de ces contrats est justifié par des raisons objectives qui s’entendent de l’existence d’éléments concrets établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi. Motif précis des CDDEn l’espèce, le salarié a occupé les mêmes fonctions de Chef Opérateur Vidéo / Chef Opérateur de prise de vue pendant quinze ans sur la base d’une huitaine de jours par mois, avec des périodes intercalaires. Le motif apposé sur les CDD était « brève durée du travail à fournir par le salarié et le caractère intermittent des missions confiées » sans autre précision ni élément concret sur les missions confiées au salarié pendant toutes ces années. Il en résultait que cette activité de Chef opérateur Vidéo constituait une activité pérenne de l’entreprise ; l’ensemble des contrats signés avait bien pour objet de pourvoir durablement un poste lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. CDI à temps partielEn application du Code du travail, l’absence d’un écrit constatant l’existence d’un contrat de travail à temps partiel a pour effet de faire présumer que le contrat a été conclu pour un horaire à temps complet. Il incombe à l’employeur, qui conteste cette présomption, de rapporter la preuve d’une part qu’il s’agissait d’un emploi à temps partiel, d’autre part que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu’il n’avait pas à se tenir constamment à la disposition de son employeur. En l’occurrence, l’employeur a prouvé que son salarié avait connaissance à l’avance de ses rythmes de travail mensuels et des horaires de ses journées de travail. Il ne demeurait donc pas à la disposition de son employeur pendant les périodes interstitielles, c’est-à-dire les périodes non travaillées séparant chaque contrat de travail à durée déterminée. La requalification en CDI à temps partiel a donc été retenue. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le contexte de la requalification du contrat de travail en CDI ?La requalification du contrat de travail en CDI concerne un salarié qui a été employé pendant près de quinze ans par une société de production en tant que Chef Opérateur Vidéo. Ce salarié a été engagé par le biais de nombreux CDD d’usage, qui sont des contrats à durée déterminée utilisés dans des secteurs spécifiques. La requalification a été motivée par le fait que les CDD successifs ne répondaient pas aux critères légaux, car ils visaient à pourvoir un emploi durable lié à l’activité normale de l’entreprise. Quelles sont les conditions légales pour recourir aux CDD d’usage ?Les CDD d’usage peuvent être conclus uniquement pour des tâches précises et temporaires, selon l’article L. 1242-1 du Code du travail. Ces contrats ne doivent pas avoir pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale de l’entreprise. Les cas où un CDD peut être utilisé incluent le remplacement d’un salarié, l’accroissement temporaire de l’activité, ou des emplois saisonniers. Les secteurs autorisés à recourir aux CDD d’usage incluent notamment les spectacles, l’audiovisuel, et la production cinématographique. Comment les juges apprécient-ils l’utilisation des CDD ?Les juges doivent vérifier que le recours aux CDD est justifié par des raisons objectives, conformément à l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée. Cela implique d’établir des éléments concrets qui démontrent le caractère temporaire de l’emploi. L’objectif est de prévenir les abus liés à l’utilisation de contrats à durée déterminée successifs, afin de protéger les droits des salariés. Quel était le motif des CDD dans le cas du salarié ?Dans le cas du salarié, les CDD étaient justifiés par le motif de « brève durée du travail à fournir par le salarié et le caractère intermittent des missions confiées ». Cependant, ce motif manquait de précisions et d’éléments concrets sur les missions effectuées pendant les quinze années. Cela a conduit à la conclusion que l’activité de Chef Opérateur Vidéo était en réalité une activité pérenne, et que les CDD visaient à pourvoir un poste durable. Quelles sont les implications de l’absence d’un écrit pour un contrat à temps partiel ?L’absence d’un écrit constatant l’existence d’un contrat de travail à temps partiel entraîne la présomption que le contrat a été conclu pour un horaire à temps complet. Il incombe à l’employeur de prouver qu’il s’agissait d’un emploi à temps partiel et que le salarié n’était pas dans l’impossibilité de prévoir son rythme de travail. Dans le cas présent, l’employeur a pu démontrer que le salarié connaissait à l’avance ses rythmes de travail, ce qui a conduit à la requalification en CDI à temps partiel. |
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