Reportages photographiques de presse

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Reportages photographiques de presse

Photographies d’actualité et originalité

Il semblerait que les photographies de presse concernant soit des événements d’actualité politique soit des manifestations sportives, n’ont pas les faveurs des tribunaux en matière d’originalité. Un grand nombre de clichés représentant des hommes politiques, seuls ou en groupe, dans l’exercice de leur activité professionnelle, n’ont pas été considérés comme originaux. Toutes les photographies dont il était demandé la protection ont été prises sur le vif, sans choix préalable du photographe quant à la mise en scène, la pose de la personne à photographier ou l’éclairage.

Il n’était  pas non plus établi que ces photographies aient fait l’objet, postérieurement à la prise de vue, de retouches dépassant un simple travail de sélection des photographies et de mise en forme technique préalable à leur envoi, pour revente, à une base de données photographiques.

Choix techniques du photographe

Le choix du cadrage était, s’agissant de photographies de personnalités politiques, particulièrement banal lorsqu’il car centré sur le sujet et/ou imposé par le positionnement du photographe à l’emplacement réservé à la presse, s’agissant des photographies de meetings politiques ou de cérémonies officielles. Le cadrage « diagonal » appliqué à de simples portraits individuels ou de groupe ne peut non plus suffire à lui seul à conférer à l’ensemble de la photographie l’empreinte de la personnalité de son auteur.

La composition des clichés est, quant à elle, dictée par l’événement lui-même et conforme aux codes habituels en matière politique, le choix de faire apparaître en arrière-plan ou avant-plan des drapeaux, affiches politiques, paysages étant éminemment banal en ce domaine comme celui d’assurer la mise au point sur le sujet principal et de flouter les contours et/ou l’arrière plans.

Les photographies en cause, si elles démontraient l’accomplissement d’un travail technique de qualité, ne révélait aucune recherche personnelle du photographe sur le sujet, l’instant, l’angle de prise de vue, le cadrage, les contrastes et la lumière susceptible de conférer aux clichés l’empreinte de sa personnalité et ne sont donc pas éligibles à la protection du droit d’auteur. A noter que l’emploi d’un grand angle est propre aux photographies de foules et la représentation de manifestations politiques sur fond de monuments parisiens emblématiques est un traitement classique de ce genre d’événement, sans que le cadrage diagonal ne confère à l’ensemble aucune particularité révélateur de la personnalité du photographe.

Protection des photographies sportives

Pas plus de succès pour les photographies sportives : s’agissant de photographies prises sur le vif au cours d’événements sportifs, le photographe n’a pas la maîtrise du déroulement du jeu et le choix des joueurs photographiés, est nécessairement limité puisqu’il s’agit soit de capter les joueurs les plus connus ou ceux engagés dans une action de jeu particulière. Le positionnement du photographe dans le stade est de plus contraint par le positionnement qui lui est assigné par les organisateurs de l’événement en cause. De plus, les joueurs sont saisis dans des attitudes banales pour des sportifs en action (service pour un joueur de tennis, en train de contrôler le ballon, exultant après une action victorieuse ou accroupis avant un tir au but pour des joueurs de football) et le souci d’assurer la mise au point sur le sujet principal, s’il démontre une fois encore la maîtrise technique du photographe pour saisir un sujet en action, ne traduit pas un choix créatif de ce dernier propre à conférer l’originalité nécessaire à leur protection par le droit d’auteur.

Charge de la preuve de l’originalité

Conformément à l’article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre de l’esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous comportant des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial. Ce droit appartient à l’auteur de toute œuvre de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination. Sont notamment considérées comme œuvres de l’esprit « Les œuvres photographiques et celles réalisées à l’aide de techniques analogues à la photographie » (article L.112-2-9° du Code de la propriété intellectuelle rappelle).

Si la protection d’une œuvre de l’esprit est acquise à son auteur sans formalité et du seul fait de la création d’une forme originale en ce sens qu’elle porte l’empreinte de la personnalité de son auteur et n’est pas la banale reprise d’un fonds commun non appropriable, il appartient à celui qui se prévaut d’un droit d’auteur dont l’existence est contestée de définir et d’expliciter les contours de l’originalité qu’il allègue. En effet, seul l’auteur, dont le juge ne peut suppléer la carence, est en mesure d’identifier les éléments traduisant sa personnalité et qui justifient son monopole et le principe de la contradiction posé par l’article 16 du code de procédure civile commande que le défendeur puisse connaître précisément les caractéristiques qui fondent l’atteinte qui lui est imputée et apporter la preuve qui lui incombe de l’absence d’originalité.

L’éligibilité d’une œuvre à la protection conférée par le livre Ier du code de la propriété intellectuelle est une question de droit dont les parties n’ont pas la libre disposition et le juge étant tenu, par l’article 12 du code de procédure civile, de donner ou restituer leur exacte qualification aux faits et actes litigieux sans s’arrêter à la dénomination que les parties en auraient proposé.

Statut des photographies réalistes

La CJUE, dans son arrêt du 1 er décembre 2010 C145/10 Eva Maria P. c/ Standard Verlags GmbH, énonce pour les photographies réalistes et notamment de portraits, que l’auteur photographe peut effectuer ses choix libres et créatifs de plusieurs manières et à différents moments lors de sa réalisation. Au stade de la phase préparatoire, l’auteur pourra choisir la mise en scène, la pose de la personne à photographier ou l’éclairage ; lors de la prise de la photographie de portrait, il pourra choisir le cadrage, l’angle de prise de vue ou encore l’atmosphère créée et enfin, lors du tirage du cliché, l’auteur photographe pourra choisir parmi diverses techniques de développement qui existent celle qu’il souhaite adopter, ou encore procéder, le cas échéant, à l’emploi de logiciels.

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Questions / Réponses juridiques

Pourquoi les photographies de presse ne sont-elles pas considérées comme originales par les tribunaux ?

Les photographies de presse, notamment celles capturant des événements politiques ou sportifs, sont souvent jugées non originales par les tribunaux. Cela est dû au fait que ces clichés sont généralement pris sur le vif, sans intervention créative du photographe concernant la mise en scène, la pose ou l’éclairage.

En effet, les juges constatent que ces images ne présentent pas de choix artistiques significatifs. Les photographies sont souvent le résultat d’une simple capture d’un moment, sans retouches ou modifications substantielles après la prise de vue.

Ainsi, le manque d’originalité dans le cadrage, la composition et le traitement technique des images empêche leur protection par le droit d’auteur. Les photographes ne peuvent pas revendiquer une empreinte personnelle sur des œuvres qui se contentent de reproduire des scènes banales et prévisibles.

Quels sont les choix techniques qui influencent l’originalité d’une photographie ?

Les choix techniques d’un photographe, tels que le cadrage et la composition, jouent un rôle crucial dans l’évaluation de l’originalité d’une photographie. Dans le cas des images de personnalités politiques, le cadrage est souvent banal, centré sur le sujet principal, ce qui limite la créativité.

De plus, la composition est souvent dictée par l’événement lui-même, respectant des codes établis. Par exemple, l’inclusion de drapeaux ou d’affiches politiques en arrière-plan est une pratique courante qui ne confère pas d’originalité.

Les photographies qui montrent une maîtrise technique, comme la mise au point sur le sujet principal, ne suffisent pas à prouver une recherche personnelle. L’absence d’éléments distinctifs, tels que des choix d’angle ou de lumière, empêche ces œuvres d’être considérées comme originales et donc protégées par le droit d’auteur.

Comment les photographies sportives sont-elles évaluées en termes d’originalité ?

Les photographies sportives rencontrent des difficultés similaires en matière d’originalité. Lors d’événements sportifs, le photographe n’a pas le contrôle sur le déroulement du jeu, ce qui limite ses choix quant aux joueurs à capturer.

Le positionnement imposé par les organisateurs de l’événement restreint également la créativité du photographe. Les images capturent souvent des moments banals, comme un joueur en train de servir ou de contrôler le ballon, ce qui ne traduit pas un choix artistique distinctif.

Ainsi, même si le photographe démontre une compétence technique en saisissant des actions en mouvement, cela ne suffit pas à établir l’originalité nécessaire pour la protection par le droit d’auteur. Les photographies restent des représentations prévisibles d’événements sportifs, sans empreinte personnelle identifiable.

Quelle est la charge de la preuve concernant l’originalité d’une œuvre ?

Selon l’article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, l’auteur d’une œuvre bénéficie d’un droit de propriété incorporelle exclusif dès la création de l’œuvre. Cependant, pour revendiquer ce droit, il doit prouver l’originalité de son œuvre.

L’originalité est définie comme l’empreinte de la personnalité de l’auteur, ce qui signifie que l’œuvre ne doit pas être une simple reproduction d’éléments communs. Si l’originalité est contestée, il incombe à l’auteur de démontrer les caractéristiques qui justifient son droit d’auteur.

Le juge ne peut pas suppléer à cette carence et doit se baser sur les éléments fournis par l’auteur pour évaluer l’originalité. Cela implique que le défendeur doit également être informé des éléments qui fondent l’atteinte à son droit, afin de pouvoir apporter la preuve de l’absence d’originalité.

Comment la CJUE définit-elle l’originalité des photographies réalistes ?

La Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a précisé dans son arrêt du 1er décembre 2010 que l’originalité des photographies réalistes, y compris les portraits, repose sur la liberté créative de l’auteur à différents stades de la création.

Au stade préparatoire, le photographe peut choisir la mise en scène, la pose et l’éclairage. Lors de la prise de vue, il peut décider du cadrage et de l’angle, et lors du tirage, il peut sélectionner des techniques de développement ou utiliser des logiciels pour modifier l’image.

Ces choix créatifs, effectués à divers moments du processus, contribuent à l’originalité de l’œuvre. Ainsi, contrairement aux photographies de presse ou sportives, où les choix sont souvent limités, les photographies réalistes peuvent bénéficier d’une protection par le droit d’auteur si elles reflètent l’empreinte personnelle de l’auteur.


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