Répartition successorale et contestation des droits des héritiers : enjeux de la présence d’un héritier non partie.

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Répartition successorale et contestation des droits des héritiers : enjeux de la présence d’un héritier non partie.

L’Essentiel : Le 27 septembre 2021, [U], [O], [V] et [R] [I] ont assigné [X] [I] devant le tribunal judiciaire de Lille, demandant l’ouverture des opérations de compte-liquidation et de partage de la succession de [L] [I]. Ils ont également sollicité la requalification d’une assurance vie en donation et la réintégration de sommes perçues par [X] [I] et son fils [H] [J]. Le 27 octobre 2022, une seconde assignation a été déposée pour les mêmes motifs. Les défendeurs ont contesté ces demandes, affirmant que les fonds avaient été utilisés pour la prise en charge de leur mère en EPHAD.

Décès et héritiers

[L] [T] [A] [G], veuve de [O] [I], est décédée à [Localité 13] le [Date décès 4] 2020, laissant six héritiers : [U], [O], [S], [V], [R] et [X] [I]. Les opérations de liquidation-partage ont été ouvertes chez Maître [N] [K], notaire à [Localité 12], mais les parties n’ont pas réussi à parvenir à un partage amiable.

Assignation devant le tribunal

Le 27 septembre 2021, [U], [O], [V] et [R] [I] ont assigné [X] [I] devant le tribunal judiciaire de Lille. Ils ont demandé l’ouverture des opérations de compte-liquidation et de partage de la communauté entre [O] [I] et [L] [G], ainsi que de la succession de [L] [I]. Ils ont également demandé la requalification d’une assurance vie en donation et la réintégration de sommes perçues par [X] [I] et son fils [H] [J] à l’actif successoral.

Deuxième assignation

Le 27 octobre 2022, [U], [O], [V] et [R] [I] ont de nouveau assigné [H] [J] pour les mêmes motifs, en insistant sur la requalification de l’assurance vie et la réintégration de sommes à la succession. Ils ont également demandé l’exécution provisoire de la décision à intervenir.

Réponses des défendeurs

Les défendeurs, [X] [I] et [H] [J], ont constitué avocat et ont demandé au tribunal de débouter les requérants de leurs demandes concernant la requalification de l’assurance vie et la réintégration de sommes à l’actif successoral. Ils ont soutenu que [X] [I] avait prélevé des fonds pour la prise en charge de leur mère en EPHAD, mais qu’elle avait restitué ces fonds.

Jonction des affaires

Le juge de la mise en état a ordonné la jonction des deux affaires en raison de leurs liens, sous le numéro unique RG 22/7025. L’instruction de l’affaire a été clôturée par ordonnance du 9 novembre 2023, et l’affaire a été fixée à plaider pour le 8 octobre 2024.

Réouverture des débats

Il a été constaté que [S] [I], un des héritiers, n’avait pas été attrait à la cause, bien qu’il ait un intérêt dans l’ouverture des opérations de partage. Le tribunal a donc ordonné la réouverture des débats, la révocation de l’ordonnance de clôture, et a invité les requérants à mettre en cause [S] [I].

Décision du tribunal

Le tribunal a statué en ordonnant la réouverture des débats, en invitant les requérants à mettre en cause [S] [I], et en ordonnant le renvoi à la mise en état au 2 mai 2025, tout en réservant l’intégralité des prétentions et des dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la procédure à suivre pour l’ouverture des opérations de compte-liquidation et de partage de la succession ?

La procédure pour l’ouverture des opérations de compte-liquidation et de partage de la succession est régie par l’article 815 du Code civil, qui stipule :

« Nul ne peut être contraint de demeurer dans une indivision.

Toutefois, l’indivision peut être maintenue par l’effet d’un acte de volonté des coindivisaires.

Les coindivisaires peuvent demander le partage à tout moment. »

Dans le cadre de la succession de Mme [L] [G], les héritiers ont le droit de demander l’ouverture des opérations de partage.

Cette demande peut être formulée devant le tribunal judiciaire, qui désignera un notaire pour procéder aux opérations nécessaires.

Il est également prévu que, en cas d’empêchement des notaires, un juge ou un commissaire-priseur puisse être commis pour surveiller les opérations de partage.

Quelles sont les conséquences de la requalification d’une assurance vie en donation ?

La requalification d’une assurance vie en donation a des conséquences importantes sur la dévolution successorale.

L’article 757 du Code civil précise que :

« Les donations entre vifs sont soumises aux règles de la succession.

Les biens donnés doivent être rapportés à la succession, sauf disposition contraire. »

Ainsi, si l’assurance vie n°02968 102409 003 00 est requalifiée en donation, cela signifie que les sommes versées au titre de cette assurance doivent être intégrées à l’actif successoral.

Les héritiers peuvent alors demander la réintégration des primes excessives perçues par Mme [X] [I] et son fils [H] [J] dans le calcul de la part de chacun.

Comment se déroule la réintégration des sommes indûment prélevées sur les livrets de la défunte ?

La réintégration des sommes indûment prélevées sur les livrets de la défunte est également encadrée par le Code civil.

L’article 720 du Code civil stipule que :

« Les héritiers sont tenus de restituer les biens de la succession qu’ils ont indûment perçus. »

Dans ce cas, les demandeurs soutiennent que Mme [X] [I] a prélevé indûment plus de 35.000 euros sur les livrets de la défunte.

Il est donc possible de demander la réintégration de la somme restante de 8.902,34 euros à l’actif successoral, car ces fonds appartiennent à la succession et doivent être partagés entre tous les héritiers.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?

L’article 700 du Code de procédure civile prévoit que :

« La partie qui succombe peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. »

Dans le cadre de ce litige, les demandeurs ont demandé la condamnation de M. [H] [J] à verser une somme de 2.500 euros au titre de l’article 700.

Cela signifie que, si les demandeurs obtiennent gain de cause, ils pourront récupérer une partie de leurs frais d’avocat et autres dépenses engagées dans le cadre de la procédure.

Cette disposition vise à garantir un accès à la justice en permettant aux parties de récupérer une partie de leurs frais en cas de succès dans leur action.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Chambre 01
N° RG 22/07025 – N° Portalis DBZS-W-B7G-WR5C

JUGEMENT DU 10 JANVIER 2025

DEMANDEURS:

Mme [U] [I]
[Adresse 1]
[Localité 11]
représentée par Me Aurélie GOEMINNE, avocat au barreau de LILLE

M. [O] [I]
[Adresse 7]
[Localité 9]
représenté par Me Aurélie GOEMINNE, avocat au barreau de LILLE

M. [V] [I]
[Adresse 14],
[Adresse 14]
[Localité 5]
représenté par Me Aurélie GOEMINNE, avocat au barreau de LILLE

M. [R] [I]
[Adresse 3]
[Localité 2]
représenté par Me Aurélie GOEMINNE, avocat au barreau de LILLE

DÉFENDEURS:

Mme [X] [I]
[Adresse 6]
[Localité 8]
représentée par Me Fabien PANI, avocat au barreau de LILLE

M. [H] [J]
[Adresse 10]
[Localité 8]
représenté par Me Fabien PANI, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Marie TERRIER,
Assesseur : Juliette BEUSCHAERT,
Assesseur : Nicolas VERMEULEN,

Greffier : Benjamin LAPLUME,

DÉBATS

Vu l’ordonnance de clôture en date du 09 Novembre 2023.

A l’audience publique du 08 Octobre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les avocats ont été avisés que le jugement serait rendu le 10 Janvier 2025.

Vu l’article 804 du Code de procédure civile, Juliette BEUSCHAERT, juge préalablement désigné par le Président, entendu en son rapport oral, et qui, ayant entendu la plaidoirie, en a rendu compte au Tribunal.

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 10 Janvier 2025 par Marie TERRIER, Présidente, assistée de Benjamin LAPLUME, Greffier.

Exposé du litige

[L] [T] [A] [G], veuve de [O] [I], est décédée à [Localité 13] le [Date décès 4] 2020 laissant six héritiers dans le cadre de sa dévolution successorale en la personne de ses six enfants : [U], [O], [S], [V], [R] et [X] [I].

Les opérations de liquidation-partage ont été ouvertes chez Maître [N] [K], notaire à [Localité 12]. Les parties ne sont pas parvenues à un partage amiable de la succession.

Par acte d’huissier en date du 27 septembre 2021, [U], [O], [V] et [R] [I] ont fait assigner [X] [I] devant le tribunal judiciaire de Lille aux fins de voir :

Au visa de l’article 815 du Code civil,

ORDONNER l’ouverture des opérations de compte-liquidation et partage de la communauté ayant existé entre Mr [O] [I] et Mme [L] [G] et de la succession de Mme [L] [I] et à cet effet,
DESIGNER tel notaire qu’il plaira à la Juridiction à l’effet de procéder auxdites opérations,

COMMETTRE un de Mesdames, Messieurs les Juges du siège pour surveiller les opérations de partage et faire un rapport sur l’homologation de la liquidation s’il y a lieu,
DIRE qu’en cas d’empêchement des notaires, juge et commissaire-priseur commis, ils seront remplacés par simple ordonnance sur requête rendue à la demande de la partie la plus diligente,
REQUALIFIER l’assurance vie n°02968 102409 003 00 en donation,
REINTEGRER à l’actif successoral le montant des primes excessives de l’assurance vie n°02968 102409 003 00 perçue par Mme [X] [I] et son fils [H] [J], soit 69 073.47€,
ORDONNER l’exécution provisoire de la décision à intervenir,

CONDAMNER Mr [H] [J] à verser aux demandeurs la somme de 2500€ au titre de l’article 700 du NCPC,
DIRE que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage et dire que chacun des avocats pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Ils font valoir au soutien de leurs demandes, que Mme [X] [I] a prélevé indument plus de 35.000 euros sur les livrets de la défunte et qu’il demeure une somme de 8902,34 euros qui doit être réintégrée à la succession ; que par ailleurs des sommes ont été versées au titre de l’assurance-vie à Madame [X] [I] et son fils [H] [I], et que l’assurance vie doit être requalifiée en donation au regard du montant exorbitant des primes versées.
 

Par acte d’huissier en date du 27 octobre 2022, [U], [O], [V] et [R] [I] ont fait assigner [H] [J] devant le tribunal judiciaire de Lille aux fins de voir :

VU L’ARTICLE 815 DU CODE CIVIL ET 1364 DU CPC

ORDONNER 1’ouverture des opérations de compte-liquidation et partage de la communauté ayant existé entre [O] [I] et [L] [G] et de la succession de [L] [I] et à cet effet,
DESIGNER tel notaire qu’il plaira à la Juridiction à 1’effet de procéder auxdites opérations,
COMMETTRE un de Mesdames, Messieurs les Juges du siège pour surveiller les opérations de partage et faire un rapport sur l’homologation de la liquidation s’il y a lieu,
DIRE qu’en cas d’empêchement des notaires, juge et commissaire-priseur commis, ils seront remplacés par simple ordonnance sur requête rendue à la demande de la partie la plus diligente,
REQUALIFIER l’assurance vie n°02968 102409 003 00 en donation,
REINTEGRER à l’actif successoral le montant des primes excessives de l’assurance vie n°02968 102409 003 00 perçue par Mme [X] [I] et son fils [H] [J], soit 69 073.47€,
ORDONNER l’exécution provisoire de 1a décision à intervenir.
CONDAMNER Mr [H] [J] à verser aux demandeurs la somme de 2500€ au titre de l’article 700 du NCPC
DIRE que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage ct dire que chacun des avocats pourra les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Ils font valoir que M. [H] [J] a bénéficié de fonds issus d’une assurance vie laquelle au regard du caractère exorbitant des primes versées et des revenus modestes de la défunte, doit être requalifiée en donation.

Les défendeurs ont constitué avocat.

Par conclusions récapitulatives signifiées par la voie électronique le 6 décembre 2022, [X] [I] et [H] [J] demandent au tribunal :

ORDONNNER l’ouverture des opérations de compte-liquidation et partage de la communauté ayant existé entre M. [O] [I] et Mme [L] [G] et de la succession de Mme [L] [I] à cet effet,
DESIGNER tel notaire qu’il plaira à la Juridiction à l’effet de procéder auxdites opérations,
DIRE qu’en cas d’empêchement des notaires, juge et commissaire-priseur commis, ils seront remplacés par simple ordonnance sur requête rendue à la demande de la partie la plus diligente,
DEBOUTER les requérants de leur demande de requalification de l’assurance vie 02968 102409 003 00 en donation,
DEBOUTER les requérants de leur demande de réintégration en tout ou partie du montant de l’assurance vie 02968 102409 003 00 perçu par Mme [X] [I] et son fils [H] [J],
DEBOUTER les requérants de leur demande de réintégration d’une somme de 8.902,34 € à l’actif successoral,
DEBOUTER les requérants de toutes demandes amples ou contraires,
CONDAMNER les requérants solidairement à verser aux défendeurs une somme de 3000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Ils font valoir que [X] [I] reconnaît avoir prélevé la somme de 26.800 euros pour assurer la prise en charge de leur mère en EPHAD mais qu’elle a restitué ces fonds en raison du fait que leur mère n’était restée que quatre mois dans l’établissement ; qu’elle n’a pas prélevé plus. Sur l’assurance-vie, elle fait valoir qu’il n’est pas démontré de volonté irrévocable de se dépouiller lors des versements faits 12 ans avant le décès.

En raison des liens existants entre les deux affaires, le juge de la mise en état a, par ordonnance du 30 juin 2023, ordonné la jonction des deux affaires sous le numéro unique RG 22/7025.

Sur ordonnance du juge de la mise en état du 9 novembre 2023, la clôture de l’instruction de l’affaire a été ordonnée et l’affaire a été fixée à plaider à l’audience prise à juge rapporteur du 8 octobre 2024.

La décision a été mise en délibéré au 10 janvier 2025.

Sur ce,

Il ressort des pièces produites que la dévolution successorale de [L] [A] [G], s’établit en la personne de ses six enfants : [U], [O], [S], [V], [R] et [X] [I]. Pourtant, [S] [I], qui ne figure pas parmi les requérants, n’a pas été attrait à la cause à laquelle il a nécessairement intérêt, pour concerner l’ouverture des opérations de partage et de liquidation de la succession de [L] [G], sa mère, alors qu’il ne résulte pas des éléments soumis au tribunal qu’il aurait renoncé à ladite succession.

Il apparaît nécessaire, dans ce contexte, d’ordonner la réouverture des débats , la révocation de l’ordonnance de clôture et le renvoi à la mise en état, afin d’inviter les requérants à le mettre en cause.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe,
 
ORDONNE la réouverture des débats et la révocation de l’ordonnance de clôture de l’affaire,

INVITE les requérants à mettre en cause [S] [I],

ORDONNE le renvoi à la mise en état du 2 mai 2025, à laquelle il devra être justifié de la diligence à défaut de quoi la radiation de l’affaire sera envisagée

RESERVE l’intégralité des prétentions, en ce compris les dépens.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

Benjamin LAPLUME Marie TERRIER


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