Rémunération proportionnelle sur les recettes d’un Film

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Rémunération proportionnelle sur les recettes d’un Film

L’Essentiel : L’affaire Dany Boon soulève des questions déterminantes sur la nature de la rémunération des artistes. Dans le cadre de la production de « Bienvenue chez les Ch’tis », l’URSSAF a requalifié les sommes versées à Dany Boon en salaires, alors qu’elles étaient destinées à rémunérer ses droits d’auteur. La Cour de Paris a annulé le redressement, affirmant que ces paiements, basés sur les recettes d’exploitation vidéo, ne constituaient pas des salaires, mais des redevances liées à l’exploitation de son œuvre. Cette décision souligne l’importance de distinguer entre rémunération salariale et droits d’auteur dans le secteur artistique.

Affaire Dany Boon

Dans le cadre de la production du film « Bienvenue chez les Ch’tis » plusieurs contrats ont été conclus entre Dany Boon et la société Pathé Production. Sur la base du dernier contrat conclu et non publié au RPCA, l’URSSAF a procédé à un redressement de la société Pathé (plus d’un  million d’euros). Saisie sur appel, la Cour de Paris a annulé ce redressement.

Droits d’auteur, rémunération proportionnelle ou salaire ?

Le contrat en cause avait pour objet de fixer les conditions de la production du prochain film de Dany Boon et également de modifier l’assiette de sa rémunération en qualité d’auteur et avec la société Les Productions du Ch’timi, pour ce qui concerne l’exploitation vidéographique du film (30% des Recettes Nettes Part Producteur à revenir à Dany Boon et à la société Les Productions du Ch’timi, assorti d’un minimum garanti remboursable de 3 millions d’euros). L’URSSAF a considéré que les sommes versées à Dany Boon et à sa société de production étaient des salaires.

Aux termes de l’article L242-1 du code de la sécurité sociale toutes les sommes versées aux travailleurs en contrepartie ou à l’occasion d’un travail notamment les salaires ou gains, indemnités et tous les avantages en nature doivent être soumis à cotisations.

L’article L7121-8 du code du travail précise cependant que la rémunération due à l’artiste à l’occasion de la vente ou de l’exploitation de l’enregistrement de son interprétation n’est pas considérée comme un salaire dès lors que la présence de l’artiste n’est plus requise pour exploiter cet enregistrement et que cette rémunération n’est pas fonction du salaire reçu mais du produit de la vente ou de l’exploitation.

L’URSSAF a fondé la requalification des sommes versées à Dany Boon au titre de droit d’auteur en redevances et complément de rémunération sur deux motifs: le caractère confidentiel de l’accord et la modification de la base des recettes vidéo à prendre en compte. Cependant, le caractère confidentiel ne peut suffire à établir une fraude et une requalification injustifiée : le contrat conclu avait pour objet de permettre à la société Pathé d’avoir la promesse de financer le prochain film de Dany Boon dont elle espérait, en raison du phénoménal succès du précédent, qu’il serait rentable, et en échange d’augmenter la part versée à l’auteur interprète sur l’exploitation du film ‘Bienvenue chez les ch’tis’. A ce titre, les contractants pouvaient légitimement souhaiter que leur accord ne soit pas public.

Rémunération en droits d’auteur

La rémunération prévue était fondée sur les recettes d’exploitation vidéo, et le changement du montant de la base des recettes vidéos à prendre en compte n’a pas remis en cause le fait qu’il est le produit de la diffusion des idées (scénario, mise en scène) et de l’image et donc d’une rémunération de droit d’auteur et non un salaire, aucune nouvelle prestation de travail n’étant fournie et le montant étant conformément aux termes même de l’article L7121-8 du code du travail, fonction du produit de la vente ou de l’exploitation. Les sommes versées à titre d’avance sur les droits d’auteur qui sont fonctions des résultats de l’exploitation notamment en vidéogrammes ne sont pas des salaires si elles correspondent réellement au résultat prévisible.

En l’espèce, le montant du minima garanti prévu était  important mais il a été calculé en fonction du succès du film en salles.  Ces minima correspondant à des sommes versées pour rémunérer l’exploitation de l’enregistrement, ne requérant pas la présence de l’auteur et fonction des résultats des ventes et ne pouvaient donc pas recevoir la qualification de salaire.

Télécharger la décision

Q/R juridiques soulevées :

Quel était l’objet du contrat entre Dany Boon et Pathé Production ?

Le contrat entre Dany Boon et Pathé Production avait pour but de définir les conditions de production du film « Bienvenue chez les Ch’tis » et de modifier la structure de la rémunération de Dany Boon en tant qu’auteur.

Cette rémunération était spécifiquement liée à l’exploitation vidéographique du film, stipulant que 30% des recettes nettes de la part du producteur seraient attribués à Dany Boon et à sa société, Les Productions du Ch’timi.

Un minimum garanti de 3 millions d’euros était également prévu, remboursable en fonction des recettes générées par le film.

L’URSSAF a cependant requalifié ces sommes en salaires, ce qui a conduit à un redressement fiscal de plus d’un million d’euros pour Pathé Production.

Pourquoi l’URSSAF a-t-elle requalifié les sommes versées à Dany Boon ?

L’URSSAF a requalifié les sommes versées à Dany Boon en salaires en se basant sur deux motifs principaux.

Premièrement, elle a évoqué le caractère confidentiel de l’accord, suggérant que cela pourrait indiquer une tentative de fraude.

Deuxièmement, l’URSSAF a mis en avant la modification de la base des recettes vidéo à prendre en compte pour le calcul de la rémunération.

Cependant, la Cour de Paris a annulé le redressement, arguant que le caractère confidentiel ne suffisait pas à prouver une fraude.

Le contrat avait pour but de garantir le financement du film, en échange d’une augmentation de la part des recettes versées à Dany Boon, ce qui était légitime.

Comment la rémunération de Dany Boon est-elle définie par rapport aux droits d’auteur ?

La rémunération de Dany Boon était spécifiquement liée aux recettes d’exploitation vidéo, ce qui la qualifie comme une rémunération de droit d’auteur plutôt que comme un salaire.

Selon l’article L7121-8 du code du travail, la rémunération d’un artiste pour la vente ou l’exploitation de son interprétation n’est pas considérée comme un salaire si sa présence n’est plus requise pour l’exploitation de l’enregistrement.

Dans ce cas, les sommes versées à Dany Boon étaient fonction des résultats de l’exploitation, et non d’un travail supplémentaire fourni.

Ainsi, même si le montant du minimum garanti était élevé, il était calculé en fonction du succès anticipé du film, ce qui renforce l’argument que ces sommes ne peuvent pas être qualifiées de salaires.

Quel impact a eu le succès du film sur la rémunération de Dany Boon ?

Le succès du film « Bienvenue chez les Ch’tis » a eu un impact significatif sur la rémunération de Dany Boon.

Le montant du minimum garanti de 3 millions d’euros était calculé en fonction des recettes anticipées du film en salles.

Cela signifie que la rémunération de Dany Boon était directement liée à la performance commerciale du film, ce qui est typique dans le cadre des droits d’auteur.

Les sommes versées à titre d’avance sur les droits d’auteur, qui dépendent des résultats de l’exploitation, ne peuvent pas être considérées comme des salaires, car elles ne nécessitent pas la présence de l’auteur pour leur génération.

Ainsi, la structure de rémunération était conçue pour récompenser le succès commercial du film, tout en respectant les dispositions légales relatives aux droits d’auteur.


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