Dès lors qu’un rédacteur de presse jouit d’une liberté éditoriale, celle-ci est incompatible avec l’existence d’un lien de subordination. Salaires ou droits d’auteur ?Un éditeur de presse spécialisée a fait appel à plusieurs médecins pour participer aux comités de rédaction, soit en qualité de membres soit en qualité de directeurs. Ils avaient perçu à ce titre des rémunérations qualifiées de « droits d’auteur » qui ont été déclarées auprès de l’AGESSA. Poursuivi par l’URSSAF, l’éditeur a pu démontrer que les médecins recrutés en tant que rédacteurs / correcteurs étaient totalement indépendants dans les modalités d’exercice de leur travail. Leur rétribution ne pouvait donc pas être requalifiée en salaire. Une activité d’auteurPour ses revues médicales, la Société avait conclu avec des médecins des contrats intitulés « contrat de membre du comité de rédaction » et « contrat de directeur du comité de rédaction », aux termes desquels : — s’agissant des directeurs, il leur était confiée la mission de ‘ relire l’ensemble des articles des numéros à paraître et rédiger tout commentaire et observation, pour chaque texte qui lui est soumis ; vérifier que les messages délivrés sont justes et pertinents scientifiquement ; enrichir ou rectifier les textes », en contrepartie d’une rémunération forfaitaire par numéro, de 1 200 euros ; — s’agissant des membres du comité, il leur était confiée la mission d’ « assister l’éditeur dans sa réflexion scientifique et éditoriale relative à la conception, la réalisation, la rédaction de la Revue ; proposer pour chaque numéro de la revue un sommaire et des articles susceptibles par leur pertinence et leur haute tenue scientifique de satisfaire aux objectifs de la Revue ; proposer des rédacteurs experts susceptibles de participer à la rédaction de la Revue , en contrepartie d’une rémunération forfaitaire par numéro de 500 euros. Ces contrats ne comportaient aucune clause qui laisserait entendre un lien de subordination. La mission des intéressés relevait bien d’une création artistique et que ceux-ci ont apporté une véritable contribution intellectuelle pour l’élaboration scientifique des revues. En effet, ils choisissaient librement les sujets à traiter et les auteurs, ils écrivaient, ou réécrivaient, des oeuvres médicales aux fins de mise en forme des idées des rédacteurs et ils palliaient également, par leur écriture ou réécriture, les insuffisances, les erreurs ou les défaillances des différents rédacteurs. L’agrément des manuscrits ainsi que la ligne éditoriale ne dépendaient que d’eux et non de la volonté de l’éditeur, chacun restant en outre libre d’apporter, ou non, sa contribution et de définir la nature de celle-ci. Les directeurs disposaient ainsi de toute latitude pour décider ce qu’ils souhaitaient écrire, faire écrire et publier de sorte que les opinions qui y étaient exprimées n’étaient que les leur et non celles de l’éditeur. Tous ont bien rédigé, modifié ou révisé des articles qui portent dès lors la marque de l’originalité et reflètent ainsi leur empreinte personnelle. La Société a démontré que les médecins étaient totalement indépendants dans les modalités d’exercice de leur travail. Il ne leur a jamais été donné d’instruction, qu’il s’agisse de leur lieu de travail, de leurs horaires et des conditions de travail. Enfin, les directeurs et membres du comité de rédaction exécutaient leur mission, pour l’essentiel, à l’extérieur des locaux de la Société et avec leur propre matériel. Toutes les personnes concernées avaient une activité professionnelle à temps plein de médecin et leur contribution aux revues médicales ne représentait qu’un aspect accessoire de leur activité médicale. Aucun ne tirait de sa collaboration avec la Société une part essentielle de ses ressources, ni même une part significative, qui aurait pu traduire un assujettissement au pouvoir de subordination d’un employeur. Lien de subordination des rédacteursLe contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d’autrui moyennant rémunération, étant rappelé que l’existence d’un contrat de travail dépend, non pas de la volonté manifestée par les parties ou de la dénomination de la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité du travailleur, étant rappelé que le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Droits d’auteur : conditions de la requalification en salairesPour rappel, selon l’article L.311-2 du code de la sécurité sociale, sont affiliées obligatoirement aux assurances sociales, les personnes salariées ou travaillant à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs et quels que soient le montant et la nature de leur rémunération, la forme, la nature ou la validité de leur contrat. Au sens de l’article L.382-1 du code de la sécurité sociale, sont affiliées au régime des artistes-auteurs les personnes réalisant une « oeuvre de l’esprit » telle que définie par les articles L.112-2 ou L.112-3 du code de la propriété intellectuelle, dont l’activité exercée relève de l’AGESSA ou de la Maison des Artistes, et hors du lien de subordination visé à l’article L.311-2 précité. Sont considérés notamment comme oeuvres de l’esprit au sens du présent code : 1° Les livres, brochures et autres écrits littéraires, artistiques et scientifiques (…). Les revenus tirés de leur activité d’auteur à titre principal ou à titre accessoire par les personnes mentionnées à l’article L. 382-1 sont assujettis aux cotisations d’assurances sociales et d’allocations familiales dans les mêmes conditions que des salaires. Les revenus servant de base au calcul des cotisations dues sont constitués du montant brut des droits d’auteur lorsque ces derniers sont assimilés fiscalement à des traitements et salaires par le 1 quater de l’article 93 du code général des impôts. Ils sont constitués du montant des revenus imposables au titre des bénéfices non commerciaux majorés de 15 % lorsque cette assimilation n’est pas applicable. Sont affiliées aux assurances sociales, les personnes qui, au cours de la dernière année civile, ont tiré de leur activité d’artiste-auteur un revenu d’un montant au moins égal à 900 fois la valeur horaire moyenne du salaire minimum de croissance en vigueur pour l’année civile. Un artiste-auteur qui ne remplit pas ces conditions de ressources peut être affilié aux assurances sociales s’il fait la preuve devant une commission spécialisée qu’il a exercé habituellement son activité d’auteur. L’oeuvre de l’esprit se définit, quel que soit son genre, son mérite ou sa destination, par le seul critère de l’originalité, ce qui implique que, pour bénéficier de la protection légale, cette oeuvre droit porter l’empreinte de la personnalité de son auteur. Entrent dans le champ d’application de la loi, les personnes dont l’activité, relevant des articles L. 112-2 ou L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle, se rattache à la branche des écrivains : auteurs de livres, brochures et autres écrits littéraires et scientifiques. Télécharger un modèle de contrat en droit de la presse |
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Quels syndicats ont obtenu une saisie du Conseil constitutionnel ?Les syndicats de l’audiovisuel et du spectacle ont été à l’origine de la demande auprès du Conseil d’Etat pour qu’il saisisse le Conseil constitutionnel. Ces syndicats ont exprimé des préoccupations concernant la conformité de l’arrêté du 9 avril 2019, qui concerne le rattachement de la convention collective des artistes-interprètes à celle de la production audiovisuelle. Cette action vise à protéger les droits des artistes-interprètes et à garantir que leurs conditions de travail soient respectées. Quel est l’objet de la saisine du Conseil constitutionnel ?L’objet de la saisine est de vérifier la conformité des articles L. 2261-32, L. 2261-33 et L. 2261-34 du code du travail avec les droits et libertés garantis par la Constitution. Ces articles concernent des aspects fondamentaux du droit du travail, notamment la liberté contractuelle et le droit au maintien de l’économie des conventions légalement conclues. Les syndicats soutiennent que ces principes ont été méconnus par le législateur, ce qui justifie la demande de contrôle constitutionnel. Quels principes les syndicats estiment-ils avoir été méconnus ?Les syndicats estiment que plusieurs principes fondamentaux ont été méconnus, notamment la liberté contractuelle, le droit au maintien de l’économie des conventions légalement conclues, et la liberté syndicale. Ils soulignent également l’importance de la « liberté de négociation collective » et de la participation des salariés à la détermination de leurs conditions de travail. Ces principes sont garantis par des textes fondamentaux tels que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 et le Préambule de la Constitution de 1946. Quels textes fondamentaux sont cités par les syndicats ?Les syndicats citent plusieurs textes fondamentaux pour soutenir leur position. Parmi eux, les articles 4 et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789. Ces articles garantissent des droits essentiels tels que la liberté et la participation des citoyens à la vie collective. De plus, ils mentionnent les sixième et huitième alinéas du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, qui renforcent ces principes en matière de droits sociaux et de conditions de travail. Quel est le contexte de l’arrêté du 9 avril 2019 ?L’arrêté du 9 avril 2019 a été pris dans le cadre de la régulation des conventions collectives dans le secteur de l’audiovisuel. Il vise à rattacher la convention collective des artistes-interprètes engagés pour des émissions de télévision à celle de la production audiovisuelle. Ce rattachement soulève des questions sur les droits des artistes-interprètes et sur la manière dont leurs conditions de travail sont définies et protégées. |
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