L’Essentiel : La SARL LINAT AUTO a engagé une procédure en référé contre les époux [F] pour obtenir la remise en état de locaux commerciaux, suite à l’édification d’une cloison en placoplâtre excluant l’accès aux sanitaires. Dans son assignation, la société a demandé la restauration des lieux, des dommages et intérêts, ainsi que la couverture des frais de justice. Le tribunal a ordonné aux époux de remettre en état les sanitaires sous 48 heures, avec une astreinte de 200 euros par jour de retard, tout en rejetant la demande de provision pour dommages et intérêts, considérant le préjudice insuffisamment établi.
|
Contexte de l’affaireLa SARL LINAT AUTO a engagé une procédure en référé contre Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F] pour obtenir la remise en état de locaux commerciaux qu’elle loue. Cette action a été motivée par l’édification d’une cloison en placoplâtre qui a exclu l’accès aux sanitaires, causant un préjudice au personnel de l’entreprise. Demande de la SARL LINAT AUTODans son assignation, la SARL LINAT AUTO a demandé au tribunal d’ordonner la remise des lieux dans leur état initial, de condamner les époux [F] à verser des dommages et intérêts pour le préjudice subi, ainsi que de couvrir les frais de justice. Elle a également souligné que l’absence de sanitaires constituait un manquement à l’obligation de délivrance de la part des bailleurs. Arguments de la SARL LINAT AUTOLa SARL LINAT AUTO a justifié sa demande en précisant qu’elle était titulaire d’un bail commercial signé en 2014, qui incluait des sanitaires. Elle a fait état d’une sommation restée sans réponse et d’un constat d’huissier attestant de la modification des lieux, ce qui constituait une violation de ses droits en tant que locataire. Défense des époux [F]Les époux [F], bien que régulièrement assignés, n’ont pas constitué avocat et n’ont pas présenté de défense lors de l’audience. Le tribunal a donc statué sur la base des éléments fournis par la SARL LINAT AUTO. Décision du tribunalLe tribunal a ordonné aux époux [F] de remettre en état les sanitaires dans un délai de 48 heures, sous astreinte de 200 euros par jour de retard. La demande de provision pour dommages et intérêts a été rejetée, le tribunal considérant que les éléments de préjudice n’étaient pas suffisamment établis pour justifier une provision. Condamnation aux dépensLes époux [F] ont été condamnés in solidum à payer une indemnité de 2.000 euros à la SARL LINAT AUTO au titre des frais de justice, ainsi qu’aux dépens de la procédure. Le tribunal a également précisé que les dépens seraient recouvrés au profit de l’avocat de la SARL LINAT AUTO. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article 834 du code de procédure civile dans le cadre d’une demande en référé ?L’article 834 du code de procédure civile stipule que : « Dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. » Cet article permet au juge des référés d’intervenir rapidement pour ordonner des mesures conservatoires ou de remise en état lorsque l’urgence est avérée. Dans le cas présent, la SARL LINAT AUTO a sollicité la remise en état des locaux commerciaux, en raison de l’édification d’une cloison qui a privé le personnel d’accès aux sanitaires. Le juge a considéré que cette demande visait à faire cesser un trouble manifestement illicite, justifiant ainsi l’application de l’article 834. Il a donc pu statuer sur la demande de remise en état, en se fondant sur l’urgence et l’absence de contestation sérieuse quant à la nécessité de rétablir l’accès aux sanitaires. Quelles sont les implications de l’article 835 du code de procédure civile dans ce litige ?L’article 835 du code de procédure civile précise que : « Le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. » Dans le contexte de l’affaire, bien que les époux [F] aient contesté la demande, le juge a pu ordonner la remise en état des lieux. L’article 835 permet au juge d’agir même en cas de contestation, ce qui est crucial dans les situations où un trouble manifeste est en cours. La SARL LINAT AUTO a démontré que l’édification de la cloison constituait un trouble illicite, justifiant ainsi l’application de cet article. Le juge a donc pu prescrire des mesures immédiates pour faire cesser ce trouble, en se fondant sur l’urgence et la nécessité de protéger les droits du preneur. Comment l’article 700 du code de procédure civile s’applique-t-il dans cette affaire ?L’article 700 du code de procédure civile dispose que : « La partie qui succombe est condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. » Dans cette affaire, les époux [F] ont été condamnés à verser une indemnité de 2.000 euros à la SARL LINAT AUTO au titre de l’article 700. Cette condamnation vise à compenser les frais engagés par la SARL pour faire valoir ses droits en justice. Le juge a estimé qu’il était équitable d’accorder cette somme, compte tenu de la situation et des circonstances entourant le litige. Ainsi, l’article 700 permet de garantir que la partie qui a dû faire face à des frais juridiques puisse être indemnisée, renforçant ainsi l’accès à la justice. Quelles sont les conséquences de l’article 699 du code de procédure civile dans le cadre des dépens ?L’article 699 du code de procédure civile stipule que : « Les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision. » Dans cette affaire, les époux [F] ont été condamnés aux dépens, ce qui signifie qu’ils doivent rembourser les frais de justice engagés par la SARL LINAT AUTO. La SELAS MIALET AMEZIANE, avocat de la SARL, pourra ainsi recouvrer directement les dépens avancés, conformément à l’article 699. Cette disposition assure que les avocats soient rémunérés pour leur travail, même si la partie condamnée ne paie pas immédiatement. Cela renforce également la responsabilité des parties dans le cadre des procédures judiciaires, en les incitant à respecter les décisions de justice. |
Au Nom du Peuple Français
Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés
Ordonnance du 28 janvier 2025
MINUTE N° 25/______
N° RG 25/00062 – N° Portalis DB3Q-W-B7J-QVJS
PRONONCÉE PAR
Carol BIZOUARN, Première vice-présidente,
Assistée de Fabien DUPLOUY, greffier, lors des débats à l’audience du 21 janvier 2025 et de Alexandre EVESQUE, greffier, lors du prononcé
ENTRE :
S.A.R.L. LINAT AUTO [Localité 5]
dont le siège social est sis [Adresse 4]
représentée par Maître Hakima AMEZIANE de la SELAS MIALET-AMEZIANE SELAS, avocate postulante au barreau de l’ESSONNE, et par Maître Jean-Jacques DULONG, demeurant [Adresse 2], avocat plaidant au barreau d’AGEN
DEMANDERESSE
D’UNE PART
ET :
Monsieur [B] [X] [F], propriétaire du bien situé [Adresse 4], pris en sa qualité de bailleur
demeurant [Adresse 3]
non comparant ni constitué
Madame [P] [M] épouse [X] [F], propriétaire du bien situé [Adresse 4], prise en sa qualité de bailleresse
demeurant [Adresse 3]
non comparante ni constituée
DÉFENDEURS
D’AUTRE PART
ORDONNANCE : Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, réputée contradictoire et en premier ressort.
EXPOSE DU LITIGE
Par acte de commissaire de justice du 15 janvier 2025, la SARL LINAT AUTO [Localité 5], dûment autorisée par ordonnance du 14 janvier 2025, a assigné en référé d’heure à heure Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F] devant le président du tribunal judiciaire d’Évry, au visa de l’article 834 du code de procédure civile, pour voir :
– Ordonner et condamner les époux [F] à procéder à la remise des lieux dans leur état initial avec suppression de la cloison en placoplâtre sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la date de délivrance de l’assignation ;
– Les condamner à payer une somme de 5.000 euros de dommages et intérêts à titre provisionnel en raison du préjudice subi, se manifestant, notamment par l’impossibilité pour le personnel d’accéder aux douches et toilettes ;
– Les condamner à payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Les condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de la SELAS MIALET AMEZIANE, avocat, en application de l’article 699 du code de procédure civile.
L’affaire a été appelée à l’audience du 21 janvier 2025, à laquelle la SARL LINAT AUTO [Localité 5], représentée par son avocat, a soutenu son acte introductif d’instance et déposé ses pièces telles que visées dans l’assignation.
Elle fait valoir qu’elle est le preneur des locaux commerciaux situés [Adresse 4] et [Adresse 1] à [Localité 5] dans le cadre d’un bail commercial établi devant notaire le 30 septembre 2014, lequel se poursuit tacitement. Elle indique que le lundi 23 décembre 2024, le personnel présent a constaté qu’une cloison avait été édifiée pour exclure les sanitaires du local commercial et les incorporer aux locaux attenants, constituant le logement personnel des bailleurs. Elle précise avoir délivré une sommation de remettre en état les locaux le 28 décembre et fait dresser le même jour un constat par un commissaire de justice, en vain, Monsieur [F] ayant oralement indiqué au personnel qu’il refusait de le faire. Elle soulève en outre que l’absence de sanitaires dans les locaux est un manquement du bailleur à son obligation de délivrance et constitue une voie de fait qu’il convient de faire cesser, et qu’elle cause un dommage puisqu’elle prive le personnel de la possibilité de se doucher malgré leurs fonctions salissantes, aggravée par le comportement du bailleur qui a tenu, envers le personnel, des propos excessifs et orduriers.
En défense, Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F], bien que régulièrement assignés, n’ont pas constitué avocat.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience ainsi qu’à la note d’audience.
A l’issue des débats il a été indiqué aux parties que l’affaire était mise en délibéré au 28 janvier 2025 et que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe.
En application des dispositions de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la demande de remise en état sous astreinte
L’article 834 du code de procédure civile dispose que dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
L’article 835 du code de procédure civile prévoit que le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
La SARL LINAT AUTO [Localité 5] sollicite que le bailleur soit condamné à remettre en état les locaux loués pour permettre un accès du personnel aux sanitaires. Cette demande s’interprète comme visant à faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le trouble manifestement illicite résulte de toute perturbation résultant d’un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.
Au cas présent, la SARL LINAT AUTO [Localité 5] justifie être titulaire d’un bail commercial signé devant notaire le 30 septembre 2014 et portant sur un ensemble immobilier situé à [Localité 5], [Adresse 4] et [Adresse 1], comprenant un garage, des bureaux et une cour à usage de parking, bail venu à échéance le 30 septembre 2023 et qui se poursuit tacitement depuis cette date.
Si le plan des locaux annexé au dit bail ne porte pas mention des sanitaires, le dossier technique amiante également annexé vise expressément dans sa partie «9. Identification et description du ou des bâtiments» la présence de sanitaires au rez-de-chaussée, localisés sur le plan annexé au rapport où figure en dernière page la signature du bailleur et du preneur. Aucun autre sanitaire n’est mentionné sur les plan annexés au bail.
Or, le procès-verbal établi par commissaire de justice en date du 28 décembre 2024 constate que «dans le local, une cloison réalisée à l’aide de deux panneaux a été posée, interdisant l’accès à la douche et aux toilettes». Il précise que les clichés extraits de la vidéosurveillance du samedi 21 décembre montrent «quatre phases :
– 14h43, la lumière du local s’allume de l’intérieur sans qu’aucune personne n’ait pénétré par l’accès principal des locaux étant fermés le samedi.
– 14h44, toujours à l’intérieur du local sanitaire et archives, on voit la silhouette d’un homme,
– 14h58, pose d’un drap en cours sur la fenêtre,
– 15h11, le droit est posé et la lumière éteinte.»
Ainsi, il apparaît avec l’évidence requise devant le juge des référés que les travaux ainsi réalisés ont modifié unilatéralement les lieux objets du bail commercial en contravention avec l’obligation de délivrance du bailleur et qu’ils ont en outre privé la SARL LINAT AUTO [Localité 5], en sa qualité d’employeur, de respecter ses obligations en matière d’utilisation des lieux de travail et plus spécifiquement des lieux d’aisance, telles qu’elles résultent notamment des articles R.4228-10 et suivants du code du travail.
Dès lors, il y a lieu de faire droit à la demande et de l’assortir d’une astreinte selon les modalités fixées au dispositif de la présente décision, la SARL LINAT AUTO [Localité 5] établissant avoir adressé aux défendeurs une sommation délivrée le 28 décembre 2024 demeurée sans effet.
Sur la demande de provision sur dommages et intérêts
L’article 835 alinéa 2 du code de procédure civile prévoit que dans les cas où l’existence d’une obligation n’est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
Au cas présent, il apparaît que le principe de la responsabilité de Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F] comme son quantum dans le préjudice invoqué par la SARL LINAT AUTO [Localité 5] relèvent de l’appréciation préalable du juge du fond.
Dès lors, ils n’apparaissent pas démontrés dans des conditions de nature à permettre l’octroi d’une provision. Il n’y a donc pas lieu à référé sur cette demande.
Sur les frais et dépens
Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F], parties perdantes, seront condamnés aux dépens de la présente procédure de référé.
Conformément à l’article 699 du code de procédure civile, les avocats peuvent, dans les matières où leur ministère est obligatoire, demander que la condamnation aux dépens soit assortie à leur profit du droit de recouvrer directement contre la partie condamnée ceux des dépens dont ils ont fait l’avance sans avoir reçu provision. Il sera donc fait droit à la demande en ce sens.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F] seront condamnés in solidum à payer à la SARL LINAT AUTO [Localité 5] une indemnité de procédure qu’il est équitable de fixer à la somme de 2.000 euros.
Le juge des référés, statuant, après débats en audience publique, par ordonnance réputée contradictoire rendue par voie de mise à disposition au greffe et en premier ressort,
CONDAMNE Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F] à remettre en état les sanitaires des locaux commerciaux situés [Adresse 4] et [Adresse 1] à [Localité 5], dont la SARL LINAT AUTO [Localité 5] est le preneur selon bail commercial signé le 30 septembre 2014, en déposant la cloison édifiée et en fermant l’accès depuis le local loué, et ce, dans un délai maximum de 48 heures à compter de la signification de la présente décision, sous astreinte de 200 euros par jour de retard passé ce délai pendant 6 mois ;
DIT n’y avoir lieu à se réserver la liquidation de l’astreinte ;
DIT n’y avoir lieu à référé sur la demande en paiement d’une provision formée par la SARL LINAT AUTO [Localité 5] à l’encontre de Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F] ;
CONDAMNE in solidum Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F] à payer à la SARL LINAT AUTO [Localité 5] une somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Monsieur [B] [X] [F] et Madame [P] [M] épouse [X] [F] in solidum aux dépens de l’instance en référé ;
DIT que les dépens seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile au profit de la SELAS MIALET AMEZIANE, avocat ;
REJETTE le surplus des demandes ;
RAPPELLE que la présente décision est exécutoire de plein droit.
Ainsi fait et prononcé par mise à disposition au greffe, le 28 janvier 2025, et nous avons signé avec le greffier.
Le Greffier, Le Juge des Référés,
Laisser un commentaire