Remboursement d’un trop-perçu sur fermages : clarification des obligations contractuelles.

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Remboursement d’un trop-perçu sur fermages : clarification des obligations contractuelles.

L’Essentiel : Monsieur et Madame [U] [V] ont engagé une procédure contre la commune de [Localité 10] pour obtenir le remboursement de 2.639,39€, ainsi que des intérêts légaux. Malgré un avenant corrigé en novembre 2022, la commune a continué à percevoir des paiements excessifs, entraînant une saisie injustifiée. Lors de l’audience, le tribunal a constaté que les époux avaient payé des montants supérieurs à ceux dus et a jugé que l’avenant ne constituait pas une novation. En conséquence, la commune a été condamnée à rembourser la somme due, avec intérêts, et à verser des frais supplémentaires aux époux [V].

Exposé du Litige

Monsieur et Madame [U] [V] ont engagé une procédure contre la commune de [Localité 10] pour obtenir le remboursement d’une somme de 2.639,39€, ainsi que des intérêts légaux à compter du 26 décembre 2023, et 2.000,00 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile. Ils ont signé un bail rural à long terme le 23 mars 2010, qui a débuté le 1er octobre 2007 et se termine le 30 septembre 2025. Ce bail comportait une erreur dans le calcul du fermage, qui a été corrigée par un avenant en date du 28 novembre 2022. Malgré cela, la commune a continué à percevoir des paiements excessifs, entraînant une saisie de 3.557,60 € alors que seulement 919,35 € étaient dus.

Développements de l’Affaire

Lors de l’audience du 10 juin 2024, le dossier a été renvoyé au 9 septembre 2024, puis plaidé le 9 décembre 2024. Le conseil des époux [V] a maintenu ses demandes et a détaillé les calculs des fermages dus. Le maire a contesté les demandes, affirmant que les paiements avaient été correctement imputés et que la dette était réglée. Il a également soutenu que l’avenant au bail constituait une novation, ce qui aurait interrompu la prescription. En réponse, le conseil des époux a affirmé que l’avenant ne constituait pas une novation et que les fermages de 2017 avaient été réglés.

Motivation du Jugement

Le tribunal a rappelé que les contrats sont contraignants et que tout paiement suppose une dette. Il a constaté que la commune avait recalculé les fermages sur la base de l’avenant, mais que les époux [V] avaient payé des montants supérieurs à ceux dus. Les paiements effectués par les époux ont été jugés conformes à leurs calculs, et la commune a été reconnue coupable d’avoir réclamé des sommes déjà réglées. Le tribunal a également noté que l’avenant ne constituait pas une novation et n’interrompait pas la prescription.

Décision Finale

Le tribunal a condamné la commune de [Localité 10] à rembourser la somme de 2.638,31 € aux époux [V], avec intérêts à compter du 26 décembre 2023. De plus, la commune a été condamnée à verser 1.000 € aux époux sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’à tous les dépens de l’instance. Les exceptions d’irrecevabilité liées à la prescription ont été rejetées, et les réclamations pour la période antérieure à novembre 2018 ont été déclarées prescrites.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la nature des obligations découlant du bail rural entre Monsieur et Madame [V] et la commune de [Localité 10] ?

Le bail rural est un contrat par lequel un propriétaire (le bailleur) confie à un exploitant (le preneur) l’usage d’un terrain en échange d’un loyer, appelé fermage.

Les articles du Code rural et de la pêche maritime, notamment l’article L411-1, précisent que le bail rural est un contrat qui doit être écrit et qui fixe les droits et obligations des parties.

L’article L411-11 stipule que le fermage doit être déterminé par les parties au contrat, et en cas de litige, il peut être révisé selon les modalités prévues par la loi.

Dans cette affaire, le bail signé le 23 mars 2010 stipule un fermage de 198,30 euros par hectare, mais une erreur a été constatée dans le calcul du fermage, ce qui a conduit à un avenant pour corriger cette erreur.

Ainsi, les obligations des parties sont régies par les termes du bail et de l’avenant, qui doivent être respectés pour éviter des litiges sur les montants dus.

Quelles sont les conséquences juridiques d’un paiement effectué sans être dû ?

Les conséquences d’un paiement effectué sans être dû sont régies par les articles 1302 et 1302-1 du Code civil.

L’article 1302 précise que tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution.

Cela signifie que si une personne a payé une somme d’argent qu’elle n’était pas tenue de payer, elle a le droit de demander le remboursement de cette somme.

L’article 1302-1 stipule que celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l’a indûment reçu.

Dans le cas présent, Monsieur et Madame [V] soutiennent avoir payé un montant supérieur à ce qui était dû, ce qui leur donne le droit de réclamer la restitution de la somme de 2638,31 euros, considérée comme un trop-perçu.

Comment la prescription affecte-t-elle les demandes de remboursement des fermages ?

La prescription est un moyen de défense qui permet à une partie de faire valoir qu’une action en justice ne peut plus être engagée en raison de l’écoulement du temps.

L’article 2224 du Code civil prévoit que le délai de prescription est de cinq ans pour les actions en paiement, sauf disposition contraire.

Dans cette affaire, la commune de [Localité 10] a tenté de faire valoir que la prescription s’appliquait aux demandes de remboursement des fermages.

Cependant, le tribunal a constaté que l’avenant signé en novembre 2022 ne constituait pas une novation et n’interrompait pas la prescription.

Ainsi, les demandes de remboursement pour les périodes antérieures à 2018 étaient prescrites, et seules les sommes dues après cette date pouvaient faire l’objet d’une réclamation.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce litige ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme d’argent au titre des frais exposés pour la défense de ses droits.

Cette disposition vise à compenser les frais de justice, y compris les honoraires d’avocat, engagés par la partie qui a gagné le procès.

Dans le cas présent, le tribunal a condamné la commune de [Localité 10] à verser 1000 euros à Monsieur et Madame [V] sur le fondement de cet article, en raison de la perte de la commune dans le litige.

Cela souligne l’importance de cette disposition pour garantir un accès équitable à la justice et compenser les frais encourus par la partie qui a dû défendre ses droits en justice.

TRIBUNAL JUDICIAIRE d’AMIENS
[Adresse 3]
[Adresse 3]

☎ :[XXXXXXXX01]

RG N° N° RG 24/00013 – N° Portalis DB26-W-B7I-H4HL

JUGEMENT PARITAIRE
DU 20 Janvier 2025

[U] [V], [Z] [P] [J] épouse [V]

C/

Commune DE [Localité 10]

TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX
JUGEMENT

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Jugement rendu par le Tribunal Paritaire des Baux Ruraux le 20 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe.

Nom des juges devant qui l’affaire a été débattue le 9 décembre 2024 et qui ont délibéré :

PRÉSIDENT : Corinne DESMAZIERES, Président du Tribunal Paritaire des Baux Ruraux d’AMIENS

ASSESSEURS BAILLEURS : Bernard LONGUET et Patrick VAN DE KERCHOVE

ASSESSEUR PRENEUR : Romain DUBOIS

GREFFIERS : Claire GAVEL (lors des débats) et Manon MONDANGE (lors de la mise à disposition)

DANS LE LITIGE ENTRE

DEMANDEURS

Monsieur [U] [V]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Adresse 5]

comparant et assisté par Me Laurent JANOCKA, avocat au barreau d’AMIENS, substitué par Me VAZ, avocat au barreau d’Amiens

Madame [Z] [P] [J] épouse [V]
[Adresse 5]
[Adresse 5]

Représentée par Me Laurent JANOCKA, avocat au barreau d’AMIENS, substitué par Me VAZ, avocat au barreau d’Amiens

d’une part,

ET

DEFENDEUR

Commune DE [Localité 10]
[Adresse 7]
[Adresse 7]
[Adresse 7]

Représenté par Monsieur [B] [Y], maire de la commune

d’autre part,

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur et Madame [U] [V] ont demandé la convocation de la commune de [Localité 10] à l’effet de, à défaut de conciliation, la voir condamner à leur restituer la somme de 2.639,39€, assortie des intérêts au taux légal des créances professionnels à compter du 26 décembre 2023 outre celle de 2.000,00 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile;
Ils ont exposé que suivant un bail reçu le 23 mars 2010, la Commune de [Localité 10] leur a consenti un bail rural à long terme portant sur diverses parcelles dont les références cadastrales sont rappelées ci-dessous:
 
COMMUNE
REFERENCES
LIEUDIT
CONTENANCE
 
[Cadastre 13]
[Localité 9]
05ha 31 a 25ca
 [Localité 10]
[Cadastre 14]
[Localité 9]
04ha 70 a 00 ca
[Localité 6]
[Cadastre 2]
[Localité 8]
3ha 69a 30ca
[Localité 12]
Que ce bail a commencé à courir le 1 er octobre 2007 pour venir à échéance au 30 septembre 2025, qu’il comportait une erreur en page 12 puisqu’il faisait état d’un fermage de 456,62€ pour une surface de 3ha 14a, ce qui correspond à un fermage de 145,42€/ha et non 198,30€/ha comme l’acte le stipule.
Qu’un avenant a été établi en date du 28 novembre 2022 pour corriger cette erreur et qu’un remboursement des sommes versées indument avait été opéré.
Qu’il est apparu que la commune a toutefois poursuivi le paiement du fermage de 2020 par la voie d’une saisie à hauteur de la somme de 3557.60 euros alors que seule la somme de 919.35 euros serait dûe.
Qu’ils estiment que la Commune de [Localité 10] a commis une erreur dans la détermination des fermages dus rappelant que 2 titres ont été émis.
Titre N°32/2021 d’un montant de 8.337,88€ concernant les fermages 2018, 2019 et 2020 ;Titre N°74 – 2022 d’un montant de 5.976,14€ visant les fermages 2020, 2021, 2022 et une «régularisation ».Qu’ils affirment avoir réglé la somme de 2.417,40€ au titre des fermages 2020 par chèque N°7538685 lequel a été débité le 04 juillet 2022 et celles de 2.375,83€ , 2.404,45 et 3558.74 euros par chèques.
Qu’ils indiquent avoir payé au total la somme de 10.756,42€ au titre des années 2018 à 2022 alors que la somme de 11 675.77 euros était dûe, que le solde s’élevait donc à la somme de 919.35 euros rendant illégitime la saisie pratiquée pour la somme de 3557.60 € et nécessitant le remboursement de la somme de 2639.39 € au titre du trop versé.
 
A défaut de conciliation à l’audience du 10 juin 2024, le dossier a été renvoyé à l’audience du 9 septembre 2024 mais a été finalement plaidé à celle du 9 décembre 2024.

A cette audience, le conseil de Monsieur et Madame [V] a maintenu les demandes initiales et détaillé le calcul des fermages dus et payés. Il a évoqué la prescription des sommes réclamées puisque la commune aurait recalculé les fermages depuis 2008. Il a affirmé que les époux [V] avaient, lors du règlement des fermages, indiqué, quels fermages étaient concernés par les règlements.

Le maire de la commune de [Localité 10] a confirmé les termes de son décompte. Il a conclu au débouté des demandes et à la condamnation des requérants à lui payer la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Il a contesté la survenance de la prescription faisant valoir que les règlements opérés s’imputaient sur les plus anciens impayés de sorte qu’elle ne serait pas intervenue.
Il n’a pas contesté qu’un avenant au bail avait été signé car une incohérence affectait le bail initial quant au montant du fermage soutenant qu’il constituait une novation du bail. Il a affirmé que Monsieur [V] avait accepté un recalcul depuis l’origine du bail sans soulever la prescription et qu’en aucun cas les 3 règlements opérés par chèque ne mentionnaient le fermage réglé.
Il a ajouté que la dette était désormais totalement réglée et qu’aucun trop perçu n’était enregistré.

En réplique, le conseil des époux [V] a contesté que l’avenant du 23 mars 2010 interrompe la prescription puisqu’il ne constituait pas une novation.

Il a affirmé que les fermages de 2017 avaient été réglés et il a évoqué le fait que le titre 32/2021 listait les fermages impayés pour 2018 à hauteur de la somme de 2744.20 euros tandis que la commune mentionnait cette somme sur le fermage de 2017.

Il a ajouté que les preneurs avaient réglé également les fermages de 2020 à hauteur de la somme de 2804.36 euros.

Le jugement a été mis en délibéré au 20 janvier 2025.

Dans le cadre du délibéré, il a été demandé aux parties d’établir un tableau comportant les fermages dus depuis 2017 et les sommes réglées depuis cette même date à ce titre.

Des échanges ont été réalisés de manière contradictoire à propos des mentions figurant sur les titres 32 et 74 relativement au fermage de l’année 2020 inscrit sur les 2 titres.

MOTIVATION

SUR LE MONTANT DES FERMAGE- L’EXISTENCE DU TROP PERCU- SA CONTESTATION

Les contrats tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

Les dispositions de l’article 1302 prévoient que :
Tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution.
La restitution n’est pas admise à l’égard des obligations naturelles qui ont été volontairement acquittées.
Celles de l’article 1302-1 stipulent que :
Celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû doit le restituer à celui de qui il l’a indûment reçu.

En l’espèce, il est communiqué le bail signé le 23 mars 2010 fixant un fermage pour les parcelles de la commune de [Localité 10] de 1606.62 euros pour 8 hectares 10 ares et 20 ca soit un fermage de 198.30 euros de l’hectare et 456.62 euros pour 3 hectares 14 ares soit un fermage de 145.42 euros l’hectare et pour les parcelles du CCAS la somme de 89.04 euros soit un fermage de 198.30 euros l’hectare et pour l’association foncière un fermage de 119.57 euros soit un fermage de 198.30 euros l’hectare.

Il est versé également aux débats un avenant signé le 28 novembre 2022 mentionnant les dispositions suivantes :

“Le bail est consenti et accepté moyennant un fermage annuel fixé conformément aux dispositions de l’article L411-11 du Code Rural et de l’arrêté de Monsieur le Préfet de la Somme, à la somme de savoir, pour la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2010 :

Concernant la parcelle [Cadastre 15], [Localité 9], SIX CENT SOIXANTE QUATORZE EUROS et SOIXANTE DEUX CENTIMES (674.62 €) pour 3ha40a20ca, soit 198.30 € par hectare. Concernant la parcelle [Cadastre 16], [Localité 9], NEUF CENT TRENTE DEUX EUROS ET UN CENTl ME (932.01 €) pour 4ha70a, soit 198.30 € par hectare. Concernant la parcelle [Cadastre 2], [Localité 8], QUA TRE CENT SOIXANTE QUATRE EUROS et DEUX CENTIMES (464.02 €) pour 3ha14a, soit 145.42 € par hectare pour 3ha et 198.30 € par hectare pour 14a Concernant la parcelle [Cadastre 18], [Localité 4], CENT DIX-NEUF EUROS ET CINQUANTE SEPT CENTIMES (119.57 €) pour 60a30ca, soit 198.30€ par hectare. Concernant la parcelle [Cadastre 17], [Localité 11], QUA TRE VINGTNEUF EUROS ET QUATRE CENTIMES (89.04 €) pour 44a 90ca, soit 198.30 € par hectare.
L’avenant prévoyait un effet rétroactif à la date du 1e octobre 2007, Monsieur [V] a signé cet avenant en son nom et celui de son épouse en indiquant toutefois la mention sous réserves de sa conformité avec le code rural et le code civil.

Il apparaît effectivement que la commune a recalculé le montant des fermages sur la base de cet avenant le réclamant à hauteur de la somme de 2279.26 euros à compter de 2008.

Monsieur et Madame [V] réclament le remboursement de la somme de 2639.39 euros et produisent à l’appui de leur demande un extrait de compte courant au nom de la SCEA la canardière sur lequel figure 3 règlements par chèque de montants de fermages de 2018 à 2020 selon leur propre calcul soit 2375.83 euros pour 2018, 2404.45 euros pour 2019 et 2417.40 pour 2020.

Les époux [V] ont indiqué leur mode de calcul par année et les règlements correspondaient à ces calculs, la commune devait donc imputer les règlements sur les fermages concernés.

Les demandeurs communiquent aussi un courriel daté du 17 avril 2023 qu’ils ont adressé au trésor public affirmant qu’ils ont réglé le fermage de 2020 au moyen d’un chèque de 2417.40 euros débité le 4 juillet 2022 et celui du trésor public du 27 avril 2023 mentionnant les deux titres émis N°32/2021 et 74/2022 pour 8337.88 euros (fermages de 2018-2019-2020) et pour 5976.14 euros pour les fermages de 2020, 2021, 2022.

Les bordereaux de situation du TP sont produits pour les fermages des années 2016 et 2017 puis 2018-2020-2021-2022 et 2023 .

Le fermage de 2017 du bordereau du 15 décembre 2020 a été réglé définitivement en totalité le 7 janvier 2021 par le versement de la somme de 240.63 euros par chèque qui a bien été crédité.

Un avis du trésor public des sommes à payer daté du 1er décembre 2021- titre 32 vise une réclamation à hauteur de la somme de 8337.88 euros concernant la somme de 2063.24 euros pour les fermages de 2018, de 2789.32 euros pour 2019 et de 2804.36 euros pour 2020.

Le décompte au verso du courrier daté du 27 septembre 2023 comporte une discordance avec l’avis du 1er décembre 2021 puisqu’il mentionne un fermage de 2804.36 euros pour 2019 et non 2020 comme l’avis, idem pour 2018 et 2019.

Il est donc établi que les fermages de 2018, 2019 et 2020 sont réglés à hauteur de la somme de
2375.83 euros +2404.45 euros + 2417.40 euros au lieu de
2744.20 euros + 2789.32 euros + 2804.36 euros mais qu’ils l’ont été en juillet 2022 soit postérieurement aux avis du 12 novembre 2018, 15 décembre 2020 et 1er décembre 2021.

Il apparaît qu’est enregistrée au 31 décembre 2022, une dette pour les fermages de 2020-2021 et 2022 plus la régularisation soit un total de 5976.14 euros. Un titre est émis sur ces périodes portant le N° 74.

Les époux [V] ont réglé la somme de 3558.74 euros par chèque et le trésor public a encaissé sur ce titre la somme de 2417.40 euros provenant du produit de l’ATD d’un montant de 3557.60 euros dont la somme de 1140.20 euros a réglé le solde du titre N°32 .

Il apparaît donc que les fermages de 2020 ont été réclamés et payés deux fois sauf à démontrer que la référence au terme « régularisation » concerne d’autres périodes et d’autres sommes non atteintes par la prescription qui ne sont pas détaillées ce qui n’est pas fait par la commune.

Les époux [V] auraient dû régler les sommes suivantes :

Fermages 2018 : 2373.66 + 2019 2359.64 euros + 2020 2268.63 euros + 2021 2451.84 + 2022 2222 euros soit 11 675.77 euros

Ils ont payé :

2417.40 + 2404.45 + 2375.83 + 3558.74 euros + 3557.66 au titre de l’ATD = 14314.08 euros

Il en résulte donc un trop perçu de la somme de 2638.31 euros.

L’avis à tiers détenteur du 23 novembre 2023 pour la somme de 3557.60 euros comportait des sommes déjà réglées par les époux [V] puisqu’ils avaient réglé la somme de 3558.74 euros par chèque daté du 27 janvier 2023.

Pour s’opposer au remboursement de la somme due, la commune invoque la prescription de l’action et expose que des régularisations ont été opérées et des règlements affectés sur ces régularisations en application de l’avenant signé en 2022.

Cependant, il résulte des dispositions de l’article 1329 du code civil que si la novation est un contrat qui a pour objet de substituer à une obligation, qu’elle éteint, une obligation nouvelle qu’elle crée, elle ne se présume pas et doit résulter clairement de l’acte. Il a été jugé que toute modification du montant de la dette ou des modalités de remboursement d’un prêt n’emportait pas conclusion d’un nouveau contrat et il en a été de même s’agissant de la fixation d’un nouveau montant de loyer en fonction de la surface louée.

En l’espèce, l’avenant de novembre 2022 ne constitue donc pas une novation du contrat initial puisqu’il ne fait pas référence à la substitution au contrat initial et qu’il ne fait que rectifier une erreur commise dans le calcul du fermage au regard d’un prix au m² sur une parcelle.

Il n’interrompt donc pas la prescription et ne permet pas de revenir sur des périodes antérieures aux cinq années prévues par la loi et ce d’autant plus que les époux [V] ont signé cet avenant en notant « sous réserves que les dispositions soient conformes aux dispositions du code rural et du code civil » ce qui démontre qu’ils ne renonçaient pas à faire valoir les dispositions légales leur étant favorables dont celles concernant la prescription.

L’avenant ne permettait donc pas une régularisation des sommes dues au titre d’années antérieures à 2018.

Comme il a déjà été indiqué, les paiements effectués ne devaient concerner que les fermages mentionnés par les preneurs et pas ceux d’autres périodes.

La commune invoque la prescription applicable aux titres des recettes des agents des comptables publics qui est de quatre ans soutenant que Monsieur [V] se reconnaissait débiteur de fermages mais contestait uniquement leur calcul.

Toutefois, la prescription invoquée concerne l’action en recouvrement et pas l’action en paiement des fermages qui est soumise à la prescription quinquennale.

L’acte qui interrompt la prescription est l’ATD du 23 novembre 2023 de sorte que la réclamation des fermages antérieurs à 2018 est prescrite.

Aucune imputation ne pouvait être réalisée sur les périodes antérieures avec des sommes versées postérieurement.

En outre, les fermages de 2017 étaient réglés.

La bonne foi de la commune n’est pas en cause puisque les époux [V] se sont montrés défaillants dans leurs obligations de paiement de leurs fermages et ont contraint la commune à engager des procédures de recouvrement par voie d’ATD.

Ceux-ci n’ont pas été toujours fructueux.

La commune est obligée de tenir des comptes sur les arrérages et les sommes en cours dûs, d’attendre le résultat de procédures qu’elle ne maîtrise pas puisque réalisées par le Trésor public.

Cette situation est inévitablement source d’erreur.

Eu égard aux pièces fournies, aux décomptes produits par les parties, aux preuves de règlement, le tribunal estime que la commune doit donc rembourser la somme de 2638.31 euros avec intérêts professionnels à compter du 26 décembre 2023 aux époux [V].

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

La commune qui succombe devra verser la somme de 1000 euros aux époux [V] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal paritaire des baux ruraux en formation incomplète après avis des assesseurs statuant par jugement contradictoire en premier ressort

REJETTE les exceptions d’irrecevabilité liées à la survenance de la prescription.

DEBOUTE la commune de l’intégralité de ses demandes.

CONSTATE que les réclamations pour la période antérieure à novembre 2018 sont prescrites.

CONDAMNE la commune de [Localité 10] à payer à Monsieur et Madame [U] et [Z] [V] la somme de 2638.31 euros au titre du remboursement du trop-perçu de fermages avec intérêts professionnels à compter du 26 décembre 2023.

CONDAMNE la commune de [Localité 10] à payer à Monsieur et Madame [U] et [Z] [V] la somme de 1000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

CONDAMNE la commune de [Localité 10] à tous les dépens de l’instance.

Ainsi jugé, les jour, mois et an que dessus indiqués.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


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