L’Essentiel : Le tribunal judiciaire de Saint-Etienne a condamné M. [N] à verser 34 000 € aux demandeurs, M. [K] et Mme [L], pour indemnité d’immobilisation. M. [N] a ensuite demandé un relevé de forclusion pour interjeter appel, mais la cour d’appel de Lyon a déclaré cet appel irrecevable en raison de son caractère tardif. M. [N] a soutenu qu’il n’avait pas reçu la signification du jugement, mais les consorts [K]-[L] ont contesté cette assertion, arguant qu’il avait choisi de partir en vacances. Finalement, la demande de M. [N] a été rejetée, et il a été condamné aux dépens.
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Exposé du litigeLe tribunal judiciaire de Saint-Etienne a rendu un jugement le 3 octobre 2023, condamnant M. [N] à verser 34 000 € aux demandeurs, M. [K] et Mme [L], pour indemnité d’immobilisation, ainsi qu’une somme de 1 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. Ce jugement a été signifié à M. [N] le 23 octobre 2023. Demande de relevé de forclusionM. [N] a déposé une assignation le 22 janvier 2024, demandant à être relevé de la forclusion pour interjeter appel du jugement. Lors de l’audience du 3 juin 2024, il a été noté que M. [N] avait déjà interjeté appel avant de demander le relevé de forclusion. Ordonnance de sursis à statuerLe 17 juin 2024, le délégué du premier président a ordonné un sursis à statuer sur la demande de relevé de forclusion, en attendant une décision sur la recevabilité de l’appel. L’affaire a été radiée administrativement du rôle. Irrecevabilité de l’appelLe 10 octobre 2024, la cour d’appel de Lyon a déclaré l’appel de M. [N] irrecevable en raison de son caractère tardif. M. [N] a alors demandé la réinscription de l’affaire au rôle. Arguments de M. [N]M. [N] a soutenu qu’il n’avait pas reçu la signification du jugement en raison de son absence pour congés ou raisons professionnelles. Il a produit des attestations pour justifier son absence. Réponse des consorts [K]-[L]Les consorts [K]-[L] ont contesté la demande de M. [N], arguant qu’il avait choisi de partir en vacances et qu’il ne pouvait pas invoquer ses convenances personnelles pour justifier son incapacité à interjeter appel. Motifs de la décisionLe délégué du premier président a constaté que M. [N] n’avait pas prouvé qu’il était dans l’impossibilité d’interjeter appel dans le délai imparti. Il n’a pas précisé quand il avait eu connaissance du jugement et n’a pas fourni de preuves suffisantes pour justifier son absence lors de la signification. Conclusion de la décisionLa demande de relevé de forclusion de M. [N] a été rejetée. Il a été condamné aux dépens et à verser une indemnité de 1 200 € aux consorts [K]-[L] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de recevabilité d’une demande de relevé de forclusion selon l’article 540 du Code de procédure civile ?La demande de relevé de forclusion est régie par l’article 540 du Code de procédure civile, qui stipule que : « Lorsqu’un jugement a été rendu par défaut ou s’il est réputé contradictoire, le juge a la faculté de relever le défendeur de la forclusion résultant de l’expiration du délai si le défendeur, sans qu’il y ait eu faute de sa part, n’a pas eu connaissance du jugement en temps utile pour exercer son recours, ou s’il s’est trouvé dans l’impossibilité d’agir. » Ainsi, pour qu’une demande de relevé de forclusion soit recevable, il faut que le défendeur prouve qu’il n’a pas eu connaissance du jugement dans les délais impartis, ou qu’il a été dans l’impossibilité d’agir sans qu’il y ait eu de faute de sa part. Il est également précisé que la demande en relevé de forclusion doit être faite dans un délai de deux mois suivant le premier acte signifié à personne ou, à défaut, suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible tout ou partie des biens du débiteur. En l’espèce, M. [N] a invoqué son absence lors de la signification du jugement, mais il n’a pas réussi à établir qu’il n’avait pas eu connaissance du jugement en temps utile. Comment la signification du jugement a-t-elle été effectuée et quelles sont les implications de cette procédure ?La signification du jugement a été réalisée en application des articles 656 à 658 du Code de procédure civile, qui précisent que : « La signification d’un acte est faite par un huissier de justice. Elle doit être faite à personne, sauf dans les cas où la loi autorise la signification à domicile ou par voie électronique. » Dans le cas présent, la signification a été effectuée par un commissaire de justice, ce qui est conforme aux exigences légales. Il est important de noter que la signification à personne implique que le destinataire doit être informé directement de l’acte. Si le destinataire n’est pas présent, l’huissier peut laisser un avis de passage, et la signification est réputée effectuée. M. [N] n’a pas contesté la régularité de cette signification, ce qui signifie qu’il a été informé du jugement en temps utile. De plus, il n’a pas fourni d’éléments prouvant qu’il n’avait pas reçu la lettre contenant l’acte, ce qui renforce la présomption de connaissance du jugement. Quelles sont les conséquences de la défaillance de M. [N] à établir son impossibilité d’agir dans le délai imparti ?La défaillance de M. [N] à établir qu’il était dans l’impossibilité d’agir dans le délai imparti a conduit à un rejet de sa demande de relevé de forclusion. Selon l’article 528 du Code de procédure civile, le délai pour interjeter appel est d’un mois à compter de la signification du jugement. M. [N] a interjeté appel le 19 janvier 2024, soit bien après le délai légal, sans avoir prouvé qu’il n’avait pas eu connaissance du jugement en temps utile. En conséquence, le tribunal a considéré que M. [N] n’avait pas respecté les délais de procédure, ce qui a entraîné le rejet de sa demande. Il est également précisé que M. [N] doit supporter les dépens de la présente instance et indemniser ses adversaires des frais irrépétibles engagés pour assurer leur défense, conformément à l’article 700 du Code de procédure civile, qui prévoit que : « La partie qui succombe est condamnée aux dépens et peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. » Ainsi, la décision du tribunal a des conséquences financières pour M. [N], qui doit non seulement faire face à ses propres frais, mais également à ceux de ses adversaires. |
COUR D’APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT
ORDONNANCE DU 20 Janvier 2025
DEMANDEUR :
M. [M] [N]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représenté par Me Laurie DA COSTA VAZ substituant Me Frédéric HORDOT de la SCP BONIFACE-HORDOT-FUMAT-MALLON, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
DEFENDEURS :
M. [W] [U] [A] [K]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représenté par Me Catherine BOUCHET de la SELARL BASSET-BOUCHET-HANGEL, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
Mme [H] [L]
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentée par Me Catherine BOUCHET de la SELARL BASSET-BOUCHET-HANGEL, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
Audience de plaidoiries du 06 Janvier 2025
DEBATS : audience publique du 06 Janvier 2025 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d’appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 septembre 2024, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.
ORDONNANCE : contradictoire
prononcée le 20 Janvier 2025 par mise à disposition de l’ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile;
signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Par jugement réputé contradictoire du 3 octobre 2023, le tribunal judiciaire de Saint-Etienne a statué sur l’assignation délivrée le 18 avril 2023 par M. [W] [K] et par Mme [H] [L] à l’encontre de M. [M] [N] en condamnant ce dernier à payer aux demandeurs la somme de 34 000 € au titre de l’indemnité d’immobilisation et celle de 1 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Cette décision a été signifiée à M. [N] le 23 octobre 2023 par acte remis en l’étude du commissaire de justice significateur.
Par assignation délivrée le 22 janvier 2024 aux consorts [K]-[L], M. [N] a saisi le délégué du premier président en lui demandant de le relever de la forclusion encourue afin de lui permettre d’interjeter appel du jugement du 3 octobre 2023.
Lors de l’audience du 3 juin 2024, il a été relevé par le délégué du premier président que la demande de relevé de forclusion a été présentée par M. [N] alors qu’il avait interjeté un appel dès avant de solliciter une autorisation à former ce recours ensuite du relevé de forclusion qu’il demande.
Par ordonnance du 17 juin 2024, le délégué du premier président a ordonné un sursis à statuer sur la demande de relevé de forclusion dans l’attente d’une décision irrévocable rendue dans le cadre de la mise en état concernant la recevabilité de l’appel ou dans l’attente de la décision de la cour d’appel et ordonné la radiation administrative de l’affaire du rôle, à charge pour la partie la plus diligente de justifier de la réalisation de la condition mettant fin au sursis à statuer pour que l’affaire y soit réinscrite.
Par ordonnance du 10 octobre 2024, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Lyon a déclaré irrecevable comme tardif l’appel formé par M. [N].
M. [N] a alors sollicité la réinscription de la présente affaire au rôle.
Lors de l’audience du 6 janvier 2025 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s’en sont remises à leurs écritures déposées avant l’ordonnance du 17 juin 2024, qu’elles ont soutenues oralement.
Dans son assignation, M. [N] invoque l’article 540 du Code de procédure civile et fait valoir qu’il n’a pas pu recevoir la signification du jugement du 3 octobre 2023 à sa personne, ni même avoir pu aller en connaissance chez le commissaire de justice, car il était en déplacement soit pour des congés soit pour des raisons professionnelles.
Dans leurs conclusions déposées au greffe par RPVA le 20 février 2024, les consorts [K]-[L] demandent au délégué du premier président de débouter M. [N] de sa demande de relevé de forclusion et de condamner ce dernier à leur payer la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
Ils considèrent que M. [N] ne peut soutenir que c’est sans faute de sa part qu’il a été dans l’impossibilité de relever appel, car il a fait le choix de privilégier un départ en vacances et ne peut mettre en avant ses convenances personnelles.
Pour satisfaire aux dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l’exposé des moyens à l’énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.
Attendu qu’il n’est pas discuté que la décision rendue le 1er octobre 2024 par le conseiller de la mise en état est devenue irrévocable à défaut d’un déféré, ce qui a mis fin au sursis à statuer ;
Attendu qu’aux termes de l’article 540 du Code de procédure civile, lorsqu’un jugement a été rendu par défaut ou s’il est réputé contradictoire, le juge a la faculté de relever le défendeur de la forclusion résultant de l’expiration du délai si le défendeur, sans qu’il y ait eu faute de sa part, n’a pas eu connaissance du jugement en temps utile pour exercer son recours, ou s’il s’est trouvé dans l’impossibilité d’agir ;
Que le relevé de forclusion est demandé au président de la juridiction compétente pour connaître de l’opposition ou de l’appel, en l’espèce le premier président en l’état d’un appel prévu pour être interjeté par M. [N] ;
Attendu que la demande en relevé de forclusion est recevable jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant le premier acte signifié à personne ou à défaut suivant la première mesure d’exécution ayant pour effet de rendre indisponible tout ou partie des biens du débiteur ;
Attendu que M. [N] ne précise pas à quel moment il a été informé de l’existence de la décision rendue le 3 octobre 2023 par le tribunal judiciaire de Saint-Etienne, la lecture de l’ordonnance du conseiller de la mise en état susvisée faisant état de ce qu’il a interjeté appel le 19 janvier 2024 ;
Que la recevabilité de la demande de relevé de forclusion n’est pas discutée par les consorts [K]-[L] et aucun élément ne peut conduire à en contrôler l’effectivité ;
Attendu qu’au regard des dispositions susvisées, M. [N] a la charge d’établir que c’est sans faute de sa part qu’il a été empêché d’interjeter appel dans le délai des articles 528 et 538 du Code de procédure civile ;
Attendu qu’il soutient qu’il n’a pas été à même de former ce recours dans les temps à raison de son absence lors de la signification du jugement le 23 octobre 2023 et dans les semaines suivantes ;
Qu’il produit à cet effet :
– une attestation de congés payés du 18 janvier 2024 faisant état de tels congés entre le 31 octobre et le 27 novembre 2023,
– une attestation de Mme [C] [J] [I] du 25 mai 2024, sa compagne qui de manière étonnante ne mentionne pas son adresse, faisant état de ce que M. [N] est arrivé à [Localité 4] le 29 octobre 2023 précisément et que leur déménagement s’est fait entre le 30 octobre et le 24 novembre 2023 pour qu’ils emménagent ensemble,
– une attestation de Mme [E] [V] [T] du 22 mai 2024 faisant état de l’aide qu’elle a fournie avec son conjoint pour aider Mme [J] à déménager entre le 30 octobre et le 24 novembre 2023, dans le cadre de «plusieurs étapes» ;
Attendu que M. [N] ne discute pas la régularité de la signification du jugement effectuée le 23 octobre 2023, soit à une date antérieure à son arrivée à [Localité 4] dite effective «précisément le 29 octobre 2023», la signification ayant été réalisée en l’étude du commissaire de justice significateur en application des articles 656 à 658 du Code de procédure civile, comportant l’envoi d’une lettre contenant l’acte à son destinataire ; que le demandeur n’indique d’ailleurs pas s’il a ou non reçu ce courrier et le cas échéant à quel moment il aurait pu en prendre connaissance ;
Attendu que les consorts [K]-[L] relèvent avec pertinence que M. [N] invoque dans son assignation, sans en apporter d’éléments de preuve, l’existence d’un déplacement professionnel au moment de la signification du jugement, cette preuve étant pourtant aisée en l’état de ce qu’il produit une attestation de son employeur concernant ses congés payés ;
Que comme cela a été relevé plus haut, M. [N] ne précise pas à quel moment il a pris connaissance du jugement du tribunal judiciaire de Saint-Etienne et ne tente pas d’expliquer ce qui l’a conduit à patienter jusqu’au 19 janvier 2024 pour relever appel, alors que les documents qu’il fournit attestent qu’il a repris son travail dès le 27 novembre 2023 ; qu’il n’explique pas non plus comment durant la période dite de déménagement s’étant échelonnée sur plusieurs semaines, il n’a pas été à même de prendre connaissance de son courrier lors des inéluctables allers et retours entre [Localité 4] et [Localité 5], lieu de l’emménagement commun avec sa compagne;
Attendu qu’il doit être retenu que M. [N] est défaillant à établir les conditions dans lesquelles il aurait été placé dans l’impossibilité de former appel dans le délai d’un mois suivant la signification du 23 octobre 2023 ;
Que sa demande de relevé de forclusion est rejetée ;
Attendu que M. [N] succombe et doit supporter les dépens de la présente instance comme indemniser ses adversaires des frais irrépétibles engagés pour assurer leur défense ;
Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, suivant
la procédure accélérée au fond et par ordonnance contradictoire,
Rejetons la demande de relevé de forclusion présentée par M. [M] [N],
Condamnons M. [M] [N] aux dépens de la présente instance et à verser à par M. [W] [K] et par Mme [H] [L] une indemnité de 1 200 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.
LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE
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