L’Essentiel : En septembre 2019, l’URSSAF de Bretagne a notifié à la société [5] une régularisation suite à une vérification de ses obligations de sécurité sociale. Contestant un point relatif aux « Avantages en nature Véhicule », la société a saisi la commission de recours amiable, qui a maintenu les redressements. En réponse, la société a introduit un recours devant le tribunal judiciaire de Rennes, demandant l’annulation des décisions de l’URSSAF. Le tribunal a annulé certaines mises en demeure pour imprécision, tout en validant le redressement sur les avantages en nature, ordonnant un remboursement de 26 260 euros à la société.
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Contexte de l’affaireUne vérification de l’application des législations de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires a été effectuée par l’URSSAF de Bretagne sur la société [5] pour la période du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2017. À cette époque, la société comptait 18 établissements immatriculés en qualité de VLU auprès de l’URSSAF. Cette vérification a conduit à une régularisation sur cinq points, notifiée par une lettre d’observations en septembre 2019. Réactions de la société [5]La société [5] a contesté le point n° 5 concernant les « Avantages en nature Véhicule » par courrier en novembre 2019. En réponse, l’URSSAF a maintenu le redressement envisagé. En décembre 2019, l’URSSAF a mis en demeure la société de régler plusieurs sommes, totalisant plus de 76 000 euros, incluant des cotisations et des majorations de retard. Les montants ont été réglés, mais la société a demandé une remise des majorations. Procédure de recoursEn février 2020, la société a saisi la commission de recours amiable pour contester la validité des mises en demeure et le redressement. La commission a maintenu les redressements en octobre 2020. En septembre 2020, la société a introduit un recours devant le tribunal judiciaire de Rennes, demandant l’annulation des décisions de l’URSSAF et le remboursement des sommes versées. Arguments de la société [5]La société [5] a soutenu que la procédure de l’URSSAF n’avait pas permis de connaître la nature, la cause et l’étendue de ses obligations. Elle a demandé l’annulation des mises en demeure et le remboursement des sommes indûment versées, tout en contestant la régularité des mises en demeure et du contrôle. Position de l’URSSAFL’URSSAF a défendu la légitimité de ses redressements et la validité des mises en demeure, arguant que la société avait été informée des montants et des périodes concernés. Elle a demandé la confirmation des redressements et le rejet des demandes de la société. Décision du tribunalLe tribunal a statué que le pôle social n’est pas une juridiction d’appel des décisions de la commission de recours amiable. Il a examiné la régularité des mises en demeure et a constaté que certaines d’entre elles étaient insuffisamment précises, entraînant leur annulation. En revanche, d’autres mises en demeure ont été jugées régulières, et le tribunal a validé le redressement concernant les avantages en nature véhicule. Conséquences de la décisionLe tribunal a ordonné à l’URSSAF de rembourser à la société [5] la somme de 26 260 euros, avec intérêts au taux légal. Les demandes de la société concernant les autres mises en demeure et la régularité du contrôle ont été rejetées. Les dépens ont été laissés à la charge de l’URSSAF, et la société a été déboutée de sa demande d’indemnisation au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les exigences de régularité des mises en demeure selon le Code de la sécurité sociale ?Selon l’article R. 244-1 du Code de la sécurité sociale, « L’avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s’y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent. Lorsque la mise en demeure ou l’avertissement est établi en application des dispositions de l’article L. 243-7, le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d’observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l’agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d’observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l’agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l’article R. 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée. Il est également établi par la jurisprudence que la mise en demeure doit permettre au débiteur d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation, sans qu’il soit exigé de prouver un préjudice (Cass. soc. 19 mars 1992 n°88-11682 ; Cass. 2e civ. 9 février 2017 n°16-12.189). Ainsi, toute mise en demeure qui ne respecte pas ces exigences peut être déclarée nulle. Dans le cas présent, la société [5] a contesté la régularité des mises en demeure en arguant d’une opacité dans la procédure, ce qui a conduit à une analyse approfondie des documents fournis par l’URSSAF. Quels sont les critères d’évaluation des avantages en nature selon le Code de la sécurité sociale ?L’article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale stipule que tout avantage en nature ou en argent versé en contrepartie ou à l’occasion du travail doit être soumis à cotisations. Il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant au calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, de déduction au titre de frais professionnels que dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel. La circulaire DSS/SDFSS/5B du 7 janvier 2003 précise qu’il y a mise à disposition permanente d’un véhicule lorsque le salarié n’est pas tenu de restituer le véhicule en dehors de ses périodes de travail et qu’il ne lui est pas explicitement interdit de l’utiliser pendant ses congés. L’évaluation de l’avantage en nature peut se faire soit sur la base des dépenses réellement engagées, soit sur la base d’un forfait annuel estimé en pourcentage du coût d’achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l’entretien et l’assurance. En l’espèce, les inspecteurs de l’URSSAF ont constaté que la société [5] n’avait pas fourni les documents nécessaires pour justifier le calcul de l’avantage en nature, ce qui a conduit à un redressement basé sur une évaluation forfaitaire de 40 % du coût total annuel. Comment la jurisprudence interprète-t-elle les obligations de l’employeur lors d’un contrôle URSSAF ?Selon l’article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale, la personne contrôlée est tenue de mettre à disposition des agents chargés du contrôle tout document et de permettre l’accès à tout support d’information qui leur sont demandés. L’agent chargé du contrôle peut demander que les documents à consulter lui soient présentés selon un classement nécessaire au contrôle. Il est également établi par la jurisprudence que l’employeur qui ne fournit pas toutes les informations nécessaires au contrôle ne peut pas reprocher à l’URSSAF d’avoir retenu comme document de référence celui qui lui a été communiqué (Cass. 2e civ. 25 juin 2009 n° 08-19.056). Dans le cas de la société [5], il a été constaté qu’elle n’avait pas fourni les documents requis, ce qui a conduit les inspecteurs à procéder à un redressement basé sur les éléments comptables disponibles. La société a critiqué la méthode de calcul des inspecteurs, mais n’a pas démontré qu’elle avait mis à disposition tous les éléments nécessaires pour un contrôle adéquat. Quelles sont les conséquences d’une mise en demeure irrégulière sur l’obligation de paiement ?La nullité d’une mise en demeure entraîne l’absence de fondement de l’obligation de paiement des sommes qui en font l’objet. Cela signifie que si une mise en demeure est déclarée nulle, le débiteur n’est pas tenu de régler les sommes réclamées. Dans le cas présent, le tribunal a annulé certaines mises en demeure en raison de leur irrégularité, ce qui a permis à la société [5] de demander le remboursement des sommes indûment versées. En revanche, d’autres mises en demeure ont été jugées régulières, et la société a été déboutée de sa demande de nullité à leur égard. Ainsi, la régularité des mises en demeure est cruciale pour déterminer l’obligation de paiement et les conséquences qui en découlent pour le débiteur. |
PÔLE SOCIAL
MINUTE N°
AUDIENCE DU 31 Janvier 2025
AFFAIRE N° RG 20/00675 – N° Portalis DBYC-W-B7E-I6OT
88C
JUGEMENT
AFFAIRE :
SOCIETE [5]
C/
URSSAF BRETAGNE
Pièces délivrées :
CCCFE le :
CCC le :
PARTIE DEMANDERESSE :
SOCIETE [5]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Maître Ghislain BEAURE D’AUGERES, avocat au barreau de PARIS
PARTIE DEFENDERESSE :
URSSAF BRETAGNE
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Madame [K] [R], munie d’un pouvoir
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Présidente : Madame Guénaëlle BOSCHER
Assesseur : Monsieur Hervé BELLIARD, assesseur du pôle social du tribunal judiciaire de Rennes
Assesseur : Monsieur Laurent LE CORRE, assesseur du pôle social du tribunal judiciaire de Rennes
Greffière : Madame Rozenn LE CHAMPION
DEBATS :
Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience du 03 Décembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré pour être rendu au 31 Janvier 2025 par mise à disposition au greffe.
JUGEMENT : contradictoire et en premier ressort
Une vérification de l’application des législations de sécurité sociale, d’assurance chômage et de garantie des salaires ‘AGS’ a été diligentée par l’Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales (l’URSSAF) de Bretagne auprès de la société [5] pour la période du 01/01/2016 au 31/12/2017.
A la période du contrôle, la société [5] comptait 18 établissements au titre desquels elle était immatriculée en qualité de VLU (versement en lieu unique) auprès de l’URSSAF de Bretagne.
Cette vérification a donné lieu à une régularisation sur 5 points notifiée par lettre d’observations du 23 septembre 2019, réceptionnée le 27 septembre 2019.
Par courrier en date du 6 novembre 2019, la société [5] a fait valoir auprès des inspecteurs de recouvrement ses observations sur le point n° 5 relatif aux « Avantages en nature Véhicule ».
Suivant courrier en réponse du 2 décembre 2019, les inspecteurs du recouvrement, après examen des arguments avancés par la société, ont maintenu le redressement envisagé.
Suivant sept courriers du 13 décembre 2019, l’URSSAF de Bretagne a mis en demeure la société [5] de régler :
la somme de 48 582 euros, dont 44 074 euros de cotisations et 4 508 euros de majorations de retard, au titre du compte n° 502633279,la somme de 6 570 euros, dont 5 898 euros de cotisations et 581 euros de majorations de retard, au titre du compte n° 541434049,la somme de 7 935 euros, dont 7 111 euros de cotisations et 824 euros de majorations de retard, au titre du compte n° 541434015,la somme de 329 euros, dont 295 euros de cotisations et 34 euros de majorations de retard, au titre du compte n° 541434031,la somme de 3 077 euros, dont 2 758 euros de cotisations et 319 euros de majorations de retard, au titre du compte n° 502636421,la somme de 15 388 euros, dont 13 789 euros de cotisations et 1 599 euros de majorations de retard, au titre du compte n° 502641207,la somme de 2 903 euros, dont 2 602 euros de cotisations et 301 euros de majorations de retard, au titre du compte n° 541434007.Les sommes réclamées ont été réglées et les majorations de retard ont fait l’objet d’une demande de remise par la société [5].
Par courrier du 12 février 2020, la société [5] a saisi la commission de recours amiable de l’organisme d’une contestation sur la validité des mises en demeures du 13 décembre 2019 et du chef de redressement n° 5 « Avantage en nature Véhicule : Principe et évaluation – Hors cas des constructeurs et concessionnaires. »
Suivant décision du 15 octobre 2020, ladite commission a maintenu les redressements contestés.
Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception expédiée le 15 septembre 2020, la société [5] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Rennes d’un recours.
Après mise en état, l’affaire a été appelée à l’audience du 3 décembre 2024.
Suivant conclusions n° 3 visées par le greffe, que son conseil a soutenues oralement, la société [5] demande au tribunal de :
A titre principal,
Annuler les décisions implicites et explicites de rejet de la Commission de recours amiable de l’URSSAF de Bretagne ainsi que les 7 mises en demeure du 13 décembre 2019, la procédure suivie par l’URSSAF de Bretagne n’ayant pas permis à la société [5] « d’avoir connaissance de la nature, la cause et de l’étendue de son obligation. »
En conséquence, condamner l’URSSAF de Bretagne à rembourser à la société [5] la somme de 76 618 € indûment versée, ainsi que des majorations de retard y afférentes avec intérêts au taux légal, à compter du prononcé du jugement,
A titre subsidiaire, remettre en cause :
les décisions implicites et explicites de rejet de la Commission de recours amiable de l’URSSAF de Bretagne, ainsi que les 7 mises en demeure du 13 décembre 2019, en ce qu’elles ont procédé à un redressement de la Société [5] en matière d’avantage en nature VéhiculeEn conséquence, condamner l’URSSAF de Bretagne à rembourser à la société [5] la somme de 43 924 € indûment versée, ainsi que les majorations de retard y afférentes avec intérêts au taux légal, à compter du prononcé du jugement,
En tout état de cause, condamner l’URSSAF de Bretagne :
au paiement d’un intérêt au taux légal [avec capitalisation des intérêts] à compter de la date du paiement à titre conservatoire effectué par la société [5],à verser à la société [5] la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, à compter du prononcé du jugement.
En réplique, l’URSSAF Bretagne, dûment représentée, soutient oralement ses conclusions n° 2 visées par le greffe, aux termes desquelles elle prie le tribunal de :
confirmer le bien-fondé du redressement opéré,rejeter la nullité soulevée des sept mises en état datées du 13 décembre 2019,Par conséquent,
valider les 7 mises en demeure datées du 13 décembre 2019 relatives aux années 2016 et 2017,constater que l’entier redressement contesté s’élève à la somme de 84 784 euros,valider le chef de redressement relatif à l’avantage en nature pour la somme de 43 924 euros et 2 305 euros,constater que la société a réglé ces sommes,rejeter les demandes et prétentions de la société,rejeter la demande de condamnation de l’URSSAF à hauteur de 3 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,condamner la société aux entiers dépens, délivrer un jugement revêtu de la formule exécutoire.
Conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, il convient de se référer aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et arguments.
A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 31 janvier 2025 et rendue à cette date par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l’article 450 du Code de procédure civile.
A titre liminaire, il y a lieu de préciser que le pôle social n’est pas une juridiction d’appel des décisions de la commission de recours amiable, dont la saisine ne constitue qu’une condition de recevabilité du présent recours, de sorte que la juridiction de sécurité sociale, qui doit se prononcer sur le fond du litige, ne saurait ni infirmer ni confirmer les décisions implicites ou explicites rendues par ladite commission.
Sur la régularité des mises en demeure :
Selon l’article R. 244-1 du Code de la sécurité sociale, « L’avertissement ou la mise en demeure précise la cause, la nature et le montant des sommes réclamées, les majorations et pénalités qui s’y appliquent ainsi que la période à laquelle elles se rapportent.
Lorsque la mise en demeure ou l’avertissement est établi en application des dispositions de l’article L. 243-7, le document mentionne au titre des différentes périodes annuelles contrôlées les montants notifiés par la lettre d’observations corrigés le cas échéant à la suite des échanges entre la personne contrôlée et l’agent chargé du contrôle. La référence et les dates de la lettre d’observations et le cas échéant du dernier courrier établi par l’agent en charge du contrôle lors des échanges mentionnés au III de l’article R. 243-59 figurent sur le document. Les montants indiqués tiennent compte des sommes déjà réglées par la personne contrôlée. »
Il est par ailleurs de jurisprudence constante qu’en vertu de l’article L.244-2 et R244-1 précité, la mise en demeure, qui constitue une invitation impérative adressée au débiteur d’avoir à régulariser sa situation dans le délai imparti, doit permettre à celui-ci d’avoir connaissance de la nature, de la cause et de l’étendue de son obligation et préciser à cette fin, à peine de nullité, la nature et le montant des cotisations et contributions réclamées et la période à laquelle celles-ci se rapportent, sans que soit exigée la preuve d’un préjudice. (cass. soc 19 mars 1992 n°88-11682 ; Cass 2e civ 9 février 2017 n°16-12.189).
En outre, il a été jugé, s’agissant du Versement Transport, que la mention « régime général » sous le paragraphe concernant la nature des cotisations est insuffisante en ce qu’il n’est pas précisé la nature exacte des sommes réclamées et ne répond aux exigences des textes susvisés (2e Civ., 14 février 2019, pourvoi n° 18-10.238).
Pour conclure à l’annulation des sept mises en demeure, la société [5] tire d’abord argument d’une opacité de la procédure, en ce que la lettre d’observation du 23 septembre 2019, qui porte sur 5 chefs de redressement, globalise le montant de chaque chef de redressement pour l’ensemble de l’entreprise et ne les distingue pas par établissement, alors que les mises en demeure ont été différenciées pour chacun des sept établissements concernés, ce qui a privé l’entreprise de toute lisibilité sur la nature des rappels de cotisation par établissement.
Or, la lettre d’observation du 23 septembre 2019 identifie pour chaque établissement, la nature, la période et le montant du redressement et présente in fine une synthèse du montant global du redressement pour chacun d’eux. Par exemple, l’établissement de [Localité 4], Compte n° 541434015, est concerné par un redressement de 560 euros au titre du point n° 3 de la lettre d’observation « Modification de la situation juridique du cotisant » et 6 551 euros au titre du point n° 4 « Versement transport », le total du redressement pour cet établissement figurant en synthèse à hauteur de 7111 euros, qui correspondant au montant figurant sur la mise en demeure du 13 décembre 2019 concernant ce compte.
La société [5] soutient en outre que la lettre d’observation du 23 septembre 2019 porte sur un montant total de redressement de 78 418 euros et non 76 618 euros comme réclamé aux termes des mises en demeure, et qu’il lui était en conséquence, à la lecture des mises en demeure, impossible de disposer d’une information claire et précise sur la nature, la cause et l’étendue de son obligation. Cependant, la vérification des chiffres permet de constater que le montant total du redressement pour le chef de redressement n° 4 est de 25 700 euros et non comme 27 500 euros comme le note la demanderesse dans ses écritures. L’addition de chaque chef de redressement, tel que mentionnée dans la lettre d’observation : Point n° 1 : 150 euros, Point n° 2 : 4680 euros, Point n° 3 : 2164 euros, Point n° 4 : 25700 euros, Point n° 5 : 43924 euros donne bien la somme totale de 76 618 euros. Aucune erreur de calcul n’entache donc la lettre d’observation du 23 septembre 2019 et ne vient rendre incompréhensible les mises en demeure du 13 décembre 2019.
Enfin, la société [5] fait valoir que les sept mises en demeure du 13 décembre 2019 sont insuffisamment précises dès lors qu’elles ne précisent pas la nature des sommes réclamées, la mention « Nature des cotisations : régime général » étant insuffisante et de surcroît, inexacte puisque certaines sommes redressées n’ont pas la nature de cotisations sociales.
A cet égard, l’URSSAF fait valoir que les sept mises en demeure litigieuses font suite à la lettre d’observations du 23 septembre 2019, laquelle liste les différents chefs de redressement et précise la nature des cotisations, la période concernée, la ventilation entre les cotisations et les majorations, de sorte que la société avait une parfaite connaissance de ce qui lui était réclamé.
En l’espèce, les sept mises en demeure du 13 décembre 2019 mentionnent le motif de la mise en recouvrement, à savoir : « Contrôle. Chefs de redressement notifiés par lettre d’observations du 23 septembre 2019. Article R. 243 – 59 du code de la sécurité sociale ».
Elles précisent les périodes auxquelles les cotisations et les majorations de retard réclamées se rapportent, à savoir les années 2016 et 2017, ainsi que les différents montants y afférents, fixés conformément au dernier échange du 2 décembre 2019.
Au titre de la nature des cotisations, les mises en demeure font état de la mention « régime général » y incluant les contributions d’assurance chômage et cotisation AGS par le biais d’un renvoi opéré par un astérisque.
Il convient en conséquence de distinguer les mises en demeure selon qu’elles portent effectivement sur des cotisations relevant du régime général ou selon qu’elles concernent au contraire le « Versement Transport ».
Lorsque le redressement porte exclusivement sur des cotisations du régime général, la mention « régime général » y incluant les contributions d’assurance chômage et cotisation AGS par le biais d’un renvoi opéré par un astérisque, auquel s’ajoute le renvoi explicite à la lettre d’observations du 23 septembre 2019 et au dernier courrier des inspecteurs en date du 2 décembre 2019 permet à la société cotisante de connaître de manière précise la nature des sommes réclamées.
En effet, la lettre d’observation du 23 septembre 2019 indique, pour chaque chef de redressement, et par année concernée, la nature des cotisations réclamées, leur base et le taux appliqué.
Les montants figurant dans la lettre d’observation sont en outre strictement conformes à ceux repris dans la mise en demeure.
Il s’évince de ces constatations que la société [5] ne pouvait se méprendre quant à la nature, la cause et l’étendue de son obligation pour les trois mises en demeures suivantes :
compte n° 502633279, total à payer de 48 582 euros, dont 44 074 euros de cotisations et 4 508 euros de majorations de retard, compte n° 541434049, total à payer de 6 570 euros, dont 5 898 euros de cotisations et 581 euros de majorations de retard, compte n° 541434031, total à payer de 329 euros, dont 295 euros de cotisations et 34 euros de majorations de retard.lesquelles sont dès lors régulières.
En conséquence, la société [5] sera déboutée de sa demande de nullité pour ces trois mises en demeure.
En revanche, la lettre d’observations du 23 septembre 2019 porte sur 5 chefs de redressement parmi lesquels notamment le Versement Transport (point n°4).
Parmi les mises en demeure notifiée le 13 décembre 2019, quatre sont afférentes à ce chef de redressement. Même si ces quatre mises en demeure font expressément référence à la lettre d’observations et au courrier de réponse aux échanges des inspecteurs notifié le 2 décembre 2019, force est de constater que les montants réclamés au titre du redressement ne portent pas exclusivement sur des cotisations du régime général mais principalement, voire exclusivement sur du Versement Transport lequel ne revêt pas le caractère d’une cotisation de sécurité sociale mais celui d’une imposition de toute nature au sens de l’article 34 de la Constitution.
S’il peut être admis que la simple mention « régime général », associée à un renvoi à la lettre d’observations, est suffisante sans qu’il soit besoin d’apporter de précisions supplémentaires si cette mention est exacte, tel n’est pas le cas lorsque l’information délivrée est fausse.
Il en résulte que les mises en demeure suivantes :
compte n° 541434015, total à payer de 7 935 euros, dont 7 111 euros de cotisations et 824 euros de majorations de retard, compte n° 502636421, total à payer de 3 077 euros, dont 2 758 euros de cotisations et 319 euros de majorations de retard, compte n° 502641207, total à payer de 15 388 euros, dont 13 789 euros de cotisations et 1 599 euros de majorations de retard, compte n° 541434007, total à payer de 2 903 euros, dont 2 602 euros de cotisations et 301 euros de majorations de retard, sont erronées quant à la nature des cotisations réclamées et ne permet pas à la société d’avoir connaissance de la nature exacte de son obligation.
Ce faisant, compte tenu de cette irrégularité affectant ces quatre mises en demeure, il y a lieu de prononcer leur nullité.
La nullité de la mise en demeure prive de fondement l’obligation au paiement des sommes qui en font l’objet de sorte que la société [5] est fondée à solliciter le remboursement des sommes réglées à l’URSSAF à titre conservatoire (26 260 €) avec intérêts au taux légal à compter de la demande en justice, soit le 15 septembre 2020.
La mise en demeure du 13 décembre 2019 concernant le compte n° 502633279, d’un montant de 48 582 euros, dont 44 074 euros de cotisations et 4 508 euros de majorations de retard, et afférente au chef de redressement n° 5 « Avantage véhicule », ayant été déclarée régulière, il y a lieu d’examiner les moyens de la société [5] relatifs à ce chef de redressement.
Sur la régularité du contrôle :
Conformément à l’article R. 243-59 du Code de la sécurité sociale, « la personne contrôlée est tenue de mettre à disposition des agents chargés du contrôle (…) tout document et de permettre l’accès à tout support d’information qui leur sont demandés par ses agents comme nécessaires à l’exercice du contrôle. (…) L’agent chargé du contrôle peut demander que les documents à consulter lui soient présentés selon un classement nécessaire au contrôle dont il aura au préalable informé la personne contrôlée sans préjudice de demandes complémentaires ou du recours à la méthode d’évaluation du redressement par échantillonnage et extrapolation prévue à l’article R243-59-2, et afin de limiter le nombre des documents et donnés collectés, il peut également choisir de ne demander que des donnés et documents partiels ».
L’agent de contrôle ne peut rechercher par lui-même les documents dont il a besoin ou procéder à leur saisie (Cass soc 5 décembre 1991 n° 89-17.754). Il doit demander les documents nécessaires à sa mission à la personne contrôlée et ne peut pas les demander directement auprès de tiers, excepté en cas d’autorisation de la personne contrôlée (Cass 2e civ 28 janvier 2021 19-26.263).
La Cour de cassation a en outre précisé qu’au cours du contrôle, l’inspecteur de l’URSSAF est seul juge de la pertinence des pièces qui lui sont présentées. Il est fondé à refuser de les examiner si il les estime inexploitables. Ce refus ne remet pas en cause le caractère contradictoire du contrôle (Cass 2e civ 27 novembre 2014 n° 13- 23.320).
La haute juridiction a également jugé que l’employeur qui ne porte pas à la connaissance de l’agent de l’URSSAF, au cours de contrôle, toutes les informations nécessaires pour mener à bien ses investigations, ne peut a posteriori reprocher à l’URSSAF, pour calculer son redressement de cotisations, d’avoir retenu comme document de référence le seul qui lui était communiqué (Cass 2e civ 25 juin 2009 n° 08-19.056).
En l’espèce, la société [5] remet en cause les investigations menées par les inspecteurs de l’URSSAF au motif que les règles du contrôle n’ont pas été respectées.
Elle reproche en effet à l’URSSAF d’avoir procédé à la valorisation de l’avantage en nature en prenant en considération l’ensemble des montants inscrits aux comptes comptables (« entretien véhicule léger tourisme » et « carburant ») alors qu’il lui appartenait de procéder à un examen spécifique de chacune des factures d’entretien propres aux véhicules de tourisme mis à disposition des personnels et des dépenses réelles de carburant avec la consommation moyenne du véhicule afin de déterminer la consommation privée au vu de cette consommation moyenne.
L’URSSAF réplique que les éléments de calcul des avantages en nature véhicule ont été demandés à la société dès le début du contrôle le 25 mars 2019 et à de multiples reprises. Cependant, l’entreprise n’a pas été en mesure de fournir des documents exhaustifs lors de la phase contradictoire et de multiples incohérences comptables ont été relevées dans les justificatifs communiqués. Les inspecteurs ont donc procédé à un redressement à hauteur de 40 % du coût annuel des véhicules comprenant la location, l’entretien, l’assurance et le carburant toutes taxes comprises.
Il ressort des pièces versées aux débats les éléments suivants :
La lettre d’observation du 23 septembre 2019 mentionne en page 14,
« Constatations
Lors du précédent contrôle de l’entreprise l’observation suivante avait été effectuée : « Le calcul de l’avantage en nature véhicule au forfait doit prendre en compte l’intégralité des dépenses liées au véhicule (assurance, entretien, carburant, loyer) auquel on affecte un pourcentage de 30 % ou 40 % en fonction de la prise en charge ou pas du carburant à titre privé. »
Des salariés bénéficient de la mise à disposition permanente de véhicules de tourisme pour lesquels des avantages en nature véhicules ont été calculés par l’entreprise au taux de 40 % du taux de location toutes taxes comprises.
Les éléments de calcul des AN véhicules ont été demandés dès le début du contrôle du 25 mars et à de multiples reprises.
L’entreprise n’a pas été en mesure de fournir la liste des véhicules avec l’immatriculation, le montant du leasing, le nom de l’utilisateur, le montant de l’AN et son calcul.
Les salariés bénéficient de carte carburant TOTAL, aucun élément relatif aux dépenses de carburant prises en charge par l’entreprise n’a été fourni.
Compte tenu de ces éléments l’entreprise n’a pas été en mesure de justifier qu’elle ne prenait pas en charge le carburant correspondant à l’usage privé.
Par conséquent l’avantage en nature est égal à 40 % du coût total annuel comprenant la location, l’entretien, et l’assurance et le carburant toutes taxes comprises.
L’entreprise n’a pris en compte que le montant du leasing dans son calcul. Il s’ensuit donc un redressement sur la base du coût du carburant et des dépenses d’entretien, multiplié par 40 % et non intégré dans le calcul des avantages en nature véhicule.
(…) En l’absence d’éléments détaillés, le chiffrage est effectué sur le compte du siège. »
Dans leur courrier du 2 décembre 2019 adressé en réponse au courrier du 6 novembre 2019 de la société, les inspecteurs de l’URSSAF ont réitéré les mêmes observations.
Par ailleurs, l’URSSAF expose, qu’outre le fait que la société [5] n’a pas été en mesure de fournir des documents exhaustifs, les inspecteurs ont relevé de multiples incohérences comptables dans les justificatifs communiqués :
anomalies comptables présentes sur l’extraction du fichier Excel détaillant les véhicules légers susceptibles de faire l’objet d’une utilisation privée : en l’occurrence des salariés non identifiés : [D] et VERBOCKHAVEN,anomalies comptables repérées lors de la comparaison de l’extraction de paye des salariés pour lesquels un avantage en nature a été soumis à cotisation en 2016 (29 salariés) avec le tableau Excel (18 noms seulement).La société [5] se borne à critiquer le mode de calcul de l’URSSAF mais ne démontre pas, ni même n’allègue, avoir mis à disposition des inspecteurs tous les éléments nécessaires pour le contrôle. Il sera notamment souligné que la société n’évoque aucun document de suivi des dépenses liées à l’utilisation des véhicules (carburant, frais d’entretien). De plus, la société reste taisante sur ses diligences ou son absence de diligences pour fournir aux inspecteurs les documents demandés, en particulier la liste des véhicules avec l’immatriculation, le montant du leasing, le nom de l’utilisateur, le montant de l’avantage en nature et son calcul pour chaque salarié.
Par ailleurs, la société [5] remet en cause la méthode mais ne démontre que, dans la méthode de calcul qu’ils ont adoptée, les inspecteurs ont commis une erreur.
Dans ces conditions, il y a lieu de constater que les inspecteurs ont calculé le redressement de cotisations en se fondant sur les documents comptables mis à leur disposition, qu’il s’agit d’un procédé adapté aux circonstances particulières du contrôle et qu’il n’y a donc pas lieu de le remettre en question.
Ce moyen sera en conséquence rejeté.
Sur le bien-fondé du redressement concernant les Avantages en nature Véhicule :
L’article L. 243-7 du Code de la sécurité sociale dispose que lorsque l’employeur n’a pas pris en compte les observations notifiées par l’agent de l’URSSAF lors d’un précédent contrôle, que ses observations aient donné lieu à un redressement ou non, le montant du redressement des cotisations et contribution sociale mises en recouvrement à l’issue d’un nouveau contrôle est majoré de 10 %.
En vertu des dispositions de l’article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, et des articles L.136-1 et L. 136-2 du même code, tout avantage en nature ou en argent versé en contrepartie ou à l’occasion du travail doit être soumis à cotisations et il ne peut être opéré sur la rémunération ou le gain des intéressés servant au calcul des cotisations des assurances sociales, des accidents du travail et des allocations familiales, de déduction au titre de frais professionnels que dans les conditions et limites fixées par arrêté interministériel.
Il résulte ainsi de ce texte que l’assujettissement aux cotisations sociales s’applique non seulement au salaire mais également à tous ses accessoires ainsi qu’aux avantages en nature et aux revenus de remplacement et que sont constitutifs d’avantages en nature, devant être réintégrés dans l’assiette des cotisations sociales, les avantages constitués par l’économie de frais de transport réalisée par les salariés bénéficiaires de la mise à disposition d’un véhicule dont l’entreprise assume entièrement la charge.
La circulaire DSS/SDFSS/5B du 7 janvier 2003 précise qu’il y a mise à disposition permanente d’un véhicule lorsque :
le salarié n’est pas tenu de restituer le véhicule en dehors de ses périodes de travail (week-end et/ou congés)et qu’il ne lui est pas explicitement interdit de l’utiliser (pendant le week-end et/ou les congés), l’interdiction devant faire l’objet d’un document écrit (note de service, contrat de trail, règlement intérieur…)En application de l’article 3 de l’arrêté du 10 décembre 2002 relatif à l’évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale, dans sa version en vigueur jusqu’au 13/06/2019, lorsque l’employeur met à la disposition permanente du travailleur salarié ou assimilé un véhicule, l’avantage en nature constitué par l’utilisation privée du véhicule est évalué, sur option de l’employeur, soit sur la base des dépenses réellement engagées, soit sur la base d’un forfait annuel estimé en pourcentage du coût d’achat du véhicule ou du coût global annuel comprenant la location, l’entretien et l’assurance du véhicule en location ou en location avec option d’achat, toutes taxes comprises. L’option est laissée à la seule diligence de l’employeur et s’exerce salarié par salarié et pour l’année civile.
L’évaluation réelle tient compte du nombre exact de kilomètres parcourus à titre privé et à titre professionnel : l’avantage sera égal au coût réel du véhicule (achat/location -entretien-assurance, le cas échéant essence) multiplié par l’usage privé (correspondant au ratio « kilomètres privés divisé par total des kilomètres »), cette méthode supposant donc que l’employeur puisse démontrer le nombre de kilomètres privés. A défaut, l’employeur doit recourir à la méthode forfaitaire.
S’agissant de l’évaluation au forfait, les modalités d’évaluation de l’avantage diffèrent si l’employeur prend en charge le coût du carburant ou non, mais également si le véhicule est loué ou acheté.
Pour un véhicule loué, lorsque l’employeur ne prend pas en charge le coût du carburant, l’avantage est fixé à 30 % du coût global annuel comprenant la location, l’entretien et l’assurance TTC. Lorsque l’employeur prend en charge le coût du carburant, il a le choix entre 2 options : soit calculer l’avantage à 30 % du coût global annuel comprenant la location, l’entretien et l’assurance TTC auxquels s’ajoute l’évaluation des dépenses de carburant à partir des frais réellement engagés, soit calculer l’avantage à 40% du coût total annuel comprenant la location, l’entretien, l’assurance et le carburant TTC utilisée à des fins professionnelles et personnelles.
La circulaire n° 2005-239 du 19 août 2005 a précisé que la preuve de la prise en charge par le salarié du carburant privé pouvait être apportée par tous moyens.
En l’espèce, les inspecteurs du recouvrement ont relevé que des salariés bénéficient de la mise à disposition permanente de véhicules de tourisme pour lesquels des avantages en nature véhicules ont été calculés par l’entreprise au taux de 40 % du coût de la location toutes taxes comprises.
Malgré la demande réitérée des inspecteurs, l’entreprise ne leur a pas fourni la liste des véhicules avec l’immatriculation, le montant du leasing, le nom de l’utilisateur, le montant de l’avantage en nature et son calcul.
Par ailleurs, les inspecteurs ont constaté que les salariés bénéficiaient de cartes carburant TOTAL mais il ne leur a été fourni aucun élément relatif aux dépenses de carburant prises en charge par l’entreprise. Ils ont donc constaté que l’entreprise n’était pas en mesure de justifier qu’elle ne prenait pas en charge le carburant correspondant à l’usage privé. A cet égard, une simple note rédigée par l’employeur faisant interdiction aux salariés d’utiliser la carte carburant à des fins privées est en effet insuffisante pour démontrer l’absence de prise en charge du carburant correspondant à un usage privé dès lors que les salariés, qui bénéficient d’une mise à disposition permanente d’un véhicule, doivent inévitablement l’utiliser également pour des trajets extraprofessionnels.
Au vu de ces éléments, les inspecteurs ont considéré que l’avantage en nature devait être calculé forfaitairement sur la base de 40 % du coût total annuel comprenant la location, entretien l’assurance et le carburant toutes taxes comprises.
Constatant que pour calculer l’avantage en nature, l’entreprise n’avait pris en compte que le montant du leasing, le redressement a été opéré sur la base du coût du carburant et des dépenses d’entretien sur la base de 40 %.
Pour ce faire, les inspecteurs se sont fondés sur les données comptables à savoir les comptes « carburant véhicule léger » et « entretien véhicule léger tourisme » pour les années 2016 et 2017.
La société critique cette méthode au motif que cette base comptable serait erronée dans la mesure où :
le compte « carburant véhicules légers » inclut également les dépenses de carburant des véhicules de tourisme qui sont mis à disposition de salariés, de manière mutualisée, sans aucune utilisation privée, des véhicules utilitaires et des véhicules pris en location de courte durée,le compte « entretien véhicules légers tourisme » n’inclut pas seulement les frais d’entretien courant mais également les frais de remise en état suite à un sinistre.Si cet argumentaire est juste sur le principe, force est de constater que la société n’a produit, lors du contrôle et de la phase contradictoire, les éléments (par exemple, des tableaux de bords exhaustif sur l’utilisation de la carte essence et sur les frais d’entretien) permettant de procéder aux distinctions qu’elle sollicite.
S’agissant des frais de carburant, il appartenait à la société [5] de fournir aux inspecteurs les informations qu’ils ont dû solliciter en vain à plusieurs reprises, et d’y adjoindre tous les documents de suivi de la dépense permettant de faire la distinction dont elle réclame l’application devant la juridiction. Les volumineux tableaux Excel versés aux débats par la société ne saurait valoir aujourd’hui de justificatifs irréfragables à ses demandes alors qu’ils ne peuvent pas être comparés aux factures réelles, ne serait-ce que par sondage, et ce d’autant que lors des opérations de contrôles, les inspecteurs n’ont jamais pu obtenir de justificatifs attestant du kilométrage effectué par les salariés dans le cadre de leurs missions professionnelles et ont pu, de surcroît, relever des incohérences entre les documents qui leur étaient communiqués.
S’agissant spécifiquement des frais d’entretien des véhicules, il aurait été relativement aisé de justifier auprès des inspecteurs des dépenses ne rentrant pas dans le champ de l’entretien courant (puisqu’elles sont liées à des sinistres, par définition, ponctuels et donc facilement indentifiables) et de démontrer dans le même temps qu’elles découlaient d’un usage exclusivement professionnel.
Or, la lettre d’observation du 23 septembre 2019, le courrier des inspecteurs du 2 décembre 2019, la décision de la commission de recours amiable du 15 octobre 2020 déplorent unanimement l’absence de transparence de la société [5] et sa défaillance à produire les éléments précis et probants permettant d’identifier les dépenses, tant de carburant que d’entretien, résultant d’un usage exclusivement professionnel.
Dans ces conditions, la méthode de calcul sur la base des éléments comptables n’étant pas proscrite par les textes susvisés, et étant la seule applicable en l’état des données dont les inspecteurs disposaient, il y a lieu de valider le chef de redressement n° 5 Avantage en nature Véhicule.
La société [5] sera en conséquence déboutée de sa demande.
Sur les demandes accessoires :
Eu égard à l’issue du litige, les dépens seront laissés à la charge de l’URSSAF.
Compte tenu de la situation économique des parties, il n’est pas inéquitable de laisser à chacune d’elles, la charge de ses frais irrépétibles ; la société [5] sera en conséquence déboutée de sa demande sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.
Le tribunal, statuant après débats en audience publique, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe de la juridiction,
ANNULE les mises en demeure du 13 décembre 2019 et les redressements y afférents, relatives aux :
compte n° 541434015, total à payer de 7 935 euros, dont 7 111 euros de cotisations et 824 euros de majorations de retard, compte n° 502636421, total à payer de 3 077 euros, dont 2 758 euros de cotisations et 319 euros de majorations de retard, compte n° 502641207, total à payer de 15 388 euros, dont 13 789 euros de cotisations et 1 599 euros de majorations de retard, compte n° 541434007, total à payer de 2 903 euros, dont 2 602 euros de cotisations et 301 euros de majorations de retard, CONDAMNE l’URSSAF Bretagne à rembourser à la société [5] le somme de 26 260 euros, outre intérêts au taux légal à compter du prononcé du jugement,
DÉBOUTE la société [5] de son moyen tiré de l’irrégularité des mises en demeure du 13 décembre 2019, relatives aux :
compte n° 502633279, total à payer de 48 582 euros, dont 44 074 euros de cotisations et 4 508 euros de majorations de retard, compte n° 541434049, total à payer de 6 570 euros, dont 5 898 euros de cotisations et 581 euros de majorations de retard, compte n° 541434031, total à payer de 329 euros, dont 295 euros de cotisations et 34 euros de majorations de retard.DÉBOUTE la société [5] de son moyen tenant à l’irrégularité du contrôle,
VALIDE le chef de redressement visé au point n° 5 de la lettre d’observation du 23 septembre 2019 relatif aux Avantages en nature Véhicules d’un montant de 43 924 euros de cotisations,
DEBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
DÉBOUTE la société [5] de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
CONDAMNE l’URSSAF Bretagne aux dépens.
La Greffière La Présidente
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