L’Essentiel : Monsieur [U] [Y] a contesté une décision de la CPAM du [Localité 4] fixant son taux d’incapacité permanente partielle à 2 % suite à un accident de travail. Lors de l’audience, il a exprimé son désaccord, arguant que ses séquelles étaient plus graves et qu’un retentissement psychologique n’avait pas été pris en compte. Le tribunal a ordonné une consultation médicale, concluant que le taux approprié était de 15 %. Bien que le recours ait été jugé recevable, la demande de correctif socio-professionnel a été rejetée, et la CPAM a été condamnée aux dépens.
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Contexte du litigeMonsieur [U] [Y] a contesté une décision de la CPAM du [Localité 4] datée du 13/06/2023, qui avait fixé son taux d’incapacité permanente partielle à 2 % suite à un accident de travail survenu le 22/07/2022. Les séquelles de cet accident, décrites par le médecin conseil, incluent des douleurs au genou gauche et au niveau lombaire droit. Le recours a été formé par lettre recommandée le 03/01/2024. Comparution des partiesLors de l’audience publique du 28/11/2024, Monsieur [U] [Y] était assisté de son avocat, Me Sara KEBIR. Il a exprimé son désaccord avec le taux de 2 % et a demandé une réévaluation, arguant que ses séquelles étaient plus graves et qu’un retentissement psychologique n’avait pas été pris en compte. La CPAM, représentée par Monsieur [E], a défendu le taux initial, soulignant l’absence de déclaration pour les troubles psychiques et l’absence d’éléments pour justifier un correctif socio-professionnel. Consultation médicale ordonnéeLe tribunal a ordonné une consultation médicale, qui a été réalisée par le Professeur [O] [Z]. Ce dernier a examiné le dossier médical de Monsieur [U] [Y] et a présenté ses constatations lors de l’audience. Les conclusions écrites du médecin consultant ont été jointes au jugement. Recevabilité du recoursLe recours de Monsieur [U] [Y] a été jugé recevable, ayant respecté les conditions d’un recours administratif préalable. Il avait formé un recours devant la commission médicale de recours amiable, qui avait été implicitement rejeté. Évaluation du taux médicalLe tribunal a examiné l’évaluation du taux médical en se basant sur le barème et les dispositions du Code de la Sécurité Sociale. Le Professeur [O] [Z] a noté que le médecin conseil n’avait pas relevé de mouvements anormaux et que la flexion était limitée à 90°. Il a conclu que le taux de 15 % était plus approprié, en ne tenant pas compte de l’état antérieur asymptomatique. Évaluation du taux socio-professionnelConcernant le taux socio-professionnel, le tribunal a souligné que Monsieur [U] [Y] n’avait pas fourni de preuves suffisantes d’un préjudice économique distinct lié à son accident de travail. Bien qu’il ait été intérimaire, il n’a pas justifié d’un licenciement ou de difficultés à retrouver un emploi. De plus, son âge limitait l’incidence professionnelle. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré le recours recevable et a réformé la décision de la CPAM, fixant le taux d’incapacité permanente partielle à 15 % à compter de la date de consolidation. La demande de correctif socio-professionnel a été rejetée. L’exécution provisoire a été ordonnée, et la CPAM a été condamnée aux dépens. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la recevabilité du recoursLa recevabilité du recours est régie par l’article 125 du Nouveau Code de Procédure Civile (NCPC) et l’article L142-4 du Code de la Sécurité Sociale. L’article 125 du NCPC stipule que : « Le juge doit vérifier d’office la recevabilité des recours. » En l’espèce, Monsieur [U] [Y] a exercé un recours préalable le 31/07/2023 devant la Commission Médicale de Recours Amiable, qui a été rejeté implicitement. Il a ensuite formé un recours contentieux le 03/01/2024, ce qui respecte les délais et conditions posés par la loi. Ainsi, le recours est déclaré recevable, conformément aux dispositions légales. Sur l’évaluation du taux médicalL’évaluation du taux médical est encadrée par l’article L434-2 du Code de la Sécurité Sociale, qui précise que : « Le taux d’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, d’après ses aptitudes et qualifications professionnelles, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité. » Dans cette affaire, le Professeur [O] [Z] a constaté que, à la date de consolidation, le médecin conseil ne relevait pas de mouvements anormaux ni d’inflammation, mais une flexion limitée à 90°. Le barème prévoit un taux de 15 % pour un défaut de flexion à 90°. De plus, l’état antérieur retenu n’étant pas connu avant l’accident, il ne doit pas être pris en compte. Les troubles psychiques évoqués par Monsieur [U] [Y] n’ayant pas fait l’objet d’une déclaration de nouvelle lésion, ne peuvent donner lieu à indemnisation. Ainsi, le tribunal a réformé la décision contestée et a fixé le taux médical à 15 %. Sur l’évaluation du taux socio-professionnelL’article L434-2 du Code de la Sécurité Sociale stipule également que : « Le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, ainsi que d’après ses aptitudes et sa qualification professionnelle. » Pour qu’une majoration du taux d’incapacité soit accordée au titre du retentissement professionnel, il est nécessaire de prouver une perte d’emploi ou un préjudice économique distinct en lien direct avec l’accident. Monsieur [U] [Y] était intérimaire et n’a pas fourni d’avis d’inaptitude ni de preuve de licenciement. Il n’a pas démontré de difficultés à retrouver un emploi en lien avec son accident. De plus, à 64 ans, son incidence professionnelle est limitée. Par conséquent, le tribunal a rejeté la demande de correctif socio-professionnel, n’ayant pas trouvé d’éléments justifiant un préjudice distinct. Sur l’exécution provisoireL’exécution provisoire est ordonnée par le tribunal en raison de l’ancienneté du litige. Cette mesure permet d’assurer que les décisions rendues soient appliquées rapidement, même en cas d’appel. L’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale, introduit par la loi n° 2019-774, précise que : « Les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l’audience sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie. » Ainsi, le tribunal a ordonné l’exécution provisoire de son jugement, garantissant une mise en œuvre rapide des décisions prises. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LYON
POLE SOCIAL
Jugement du 28 Janvier 2025
Minute n° :
Audience du : 28 novembre 2024
Requête n° : N° RG 24/00058 – N° Portalis DB2H-W-B7I-Y5H3
PARTIES EN CAUSE
partie demanderesse
Monsieur [U] [Y]
né le 16 Janvier 1959 à [Localité 3] (ALGÉRIE)
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparant en personne assisté de Maître Sara KEBIR de la SELARL WAVE AVOCATS, avocate au barreau de LYON
partie défenderesse
CPAM DU [Localité 4]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
comparante en la personne de [J] [E] muni d’un pouvoir spécial
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats tenus en audience publique et du délibéré :
Présidente : Justine AUBRIOT
Assesseur collège employeur : Didier NICVERT
Assesseur collège salarié : Guy PARISOT
Assistés lors des débats et du délibéré de : Doriane SWIERC, Greffiere
Notification le :
Une copie certifiée conforme à :
[U] [Y]
CPAM DU [Localité 4]
la SELARL WAVE AVOCATS, toque 945
Une copie certifiée conforme au dossier
Par une lettre recommandée avec accusé de réception en date du 03/01/2024, Monsieur [U] [Y] a formé un recours à l’encontre d’une décision de la CPAM du [Localité 4] du 13/06/2023, confirmée implicitement par la Commission Médicale de Recours Amiable, et qui a fixé à 2 % le taux d’incapacité permanente partielle en raison d’un accident de travail du 22/07/2022 consolidé le 14/03/2023, dont les séquelles sont décrites de la manière suivante par le médecin conseil : «séquelles douloureuses du genou G et au niveau lombaire bas Dt, après contusion du genou G et faux mouvement lombaire bas Dt ayant permis la révélation d’un état antérieur à ces 2 niveaux.».
Le greffe de la juridiction a donc convoqué les parties, conformément à l’article R142-10-3 du Code de la sécurité sociale, pour l’audience du 28/11/2024.
À cette date, en audience publique :
Monsieur [U] [Y] a comparu assisté de Me Sara KEBIR. Il a fait valoir que sa situation n’avait pas été exactement évaluée et conteste le taux médical de 2 % qui lui a été attribué et qui est à son sens insuffisant au regard des séquelles qu’il présente (douleurs articulaires, et mobilité limitée). Il conteste l’état antérieur retenu par le médecin conseil et évoque un retentissement psychologique non pris en compte.Il sollicite également l’attribution d’un taux socio professionnel à hauteur de 2 % compte tenu de son âge (64 ans) et de son incapacité à retravailler.
La CPAM du [Localité 4] était comparante, représentée par Monsieur [E], et sollicite la confirmation du taux médical pour les seules lésions au niveau du genou gauche et au niveau lombaire droit. Il rappelle que les séquelles de type psychologique évoquées par l’assuré n’ont pas fait l’objet d’une déclaration de nouvelle lésion au titre de l’accident de travail et n’ont pas été prises en charge à ce titre.S’agissant du taux socio professionnel, la caisse rappelle que l’assuré était intérimaire à la date de consolidation et est indemnisé pour une affection longue durée depuis le 15/03/2023. Elle ajoute ne disposer d’aucun élément pour attribuer un correctif socio professionnel.
En raison de la nature du litige, le tribunal a ordonné une consultation médicale confiée au Professeur [O] [Z], mesure qui a été exécutée sur-le-champ.
A l’issue de cette consultation, le médecin consultant, commis conformément aux dispositions des articles R 142-16 et suivants du Code de la sécurité sociale, après avoir pris connaissance du dossier médical de Monsieur [U] [Y], a exposé oralement la synthèse de ses constatations médicales, dont les parties ont pu discuter.
Les conclusions écrites du médecin consultant auprès du tribunal sont jointes à la minute du présent jugement.
Puis, le tribunal s’est retiré et a délibéré de l’affaire conformément à la loi, avant de rendre son jugement par mise à la disposition au greffe le 28/01/2025.
– Sur la recevabilité du recours
La recevabilité du recours n’est pas discutée par la caisse. Il appartient néanmoins au juge de la vérifier d’office, l’exercice d’un recours administratif préalable conditionnant le recours contentieux en vertu de l’article 125 du NCPC et de l’article L142-4 du Code de la sécurité sociale (visant les litiges relatifs à l’incapacité permanente résultant d’accident du travail ou maladie professionnelle), applicable aux décisions notifiées à compter du 1er janvier 2020.
En l’espèce Monsieur [U] [Y] a exercé un recours préalable le 31/07/2023 devant la commission médicale de recours amiable et qui a été rejeté implicitement. Il a formé un recours contentieux le 03/01/2024.
Le recours est déclaré recevable.
– Sur l’évaluation du taux médical
La juridiction saisie du recours, doit vérifier l’application du barème et des dispositions de l’article L 434-2 du Code de la Sécurité Sociale.
En application de l’article L.434-2 du Code de la Sécurité Sociale, le taux d’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques et mentales de la victime, d’après ses aptitudes et qualifications professionnelles, compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité.
En l’espèce, le Professeur [O] [Z], médecin consultant, note qu’à la date de consolidation, le médecin conseil ne relève pas de mouvements anormaux (pas d’examen en ce sens), pas d’inflammation, une extension normale mais une flexion limitée à 90°. Elle est dite « alléguée ».
Le Professeur [Z] rappelle que le barème prévoit un taux de 15 % pour un défaut de flexion à 90°.
Par ailleurs, l’état antérieur retenu n’étant pas connu avant l’accident de travail du 22/07/2022, il n’y a pas lieu d’en tenir compte. En effet, l’état antérieur asymptomatique, quel que soit son siège, ne peut pas constituer un état antérieur opposable à l’assuré, une prédisposition pathologique dont l’apparition n’a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable ne limitant pas le droit à réparation.
Quant aux troubles psychiques invoqués par Monsieur [U] [Y], il apparaît qu’aucune demande de prise en charge d’une nouvelle lésion au titre de l’accident de travail n’a été faite et qu’en conséquence elle ne peut donner lieu à indemnisation.
Il ressort ainsi des observations et constatations du médecin consultant, des pièces fournies, du rapport du médecin-conseil et des débats à l’audience de ce jour, que le taux médical de 15% correspond à une plus juste évaluation des séquelles de l’assuré à la date de consolidation, conformément au barème indicatif.
En conséquence, il convient de réformer la décision contestée et d’attribuer un taux médical de 15 % à Monsieur [U] [Y].
– Sur l’évaluation du taux socio-professionnel
Il résulte des dispositions de L. 434-2 du Code de la sécurité sociale que « Le taux de l’incapacité permanente est déterminé d’après la nature de l’infirmité, l’état général, l’âge, les facultés physiques, et mentales de la victime, ainsi que d ‘après ses aptitudes et sa qualification professionnelle compte tenu d’un barème indicatif d’invalidité ».
Les notions de qualification professionnelle et d’aptitude se rapportent aux possibilités d’exercice d’une profession déterminée et aux facultés que peut avoir une victime d’accident du travail ou de maladie professionnelle de se reclasser ou de réapprendre un métier compatible avec son état de santé.
Dès lors, la majoration du taux d’incapacité au titre du retentissement professionnel suppose que soit rapportée la preuve d’une perte d’emploi ou d’un préjudice économique distinct en lien direct et certain avec l’accident du travail.
En l’espèce, Monsieur [U] [Y] occupait un poste d’intérimaire à [Adresse 2] en tant que préparateur de commande depuis juillet 2022.
Néanmoins, l’intéressé ne verse pas d’avis d’inaptitude du médecin du travail mais uniquement des courriers de son médecin traitant faisant état de difficultés à marcher avec des douleurs lombaires et du genou gauche invalidantes.
Il ne justifie pas d’un licenciement ni de difficultés à retrouver un emploi qui seraient en lien direct et certain avec son accident de travail.
En outre, à la date de consolidation, Monsieur [U] [Y] est âgé de 64 ans. En conséquence l’incidence professionnelle s’en trouve limitée.
En conséquence aucun élément ne démontre un préjudice professionnel et économique particulier distinct de celui d’ores et déjà indemnisé par le barème UCANSS dans le cadre de l’IPP retenue.
Par conséquent il n’y a pas lieu d’attribuer un correctif socio-professionnel à Monsieur [U] [Y].
Il convient par ailleurs d’ordonner l’exécution provisoire vu l’ancienneté du litige.
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, en premier ressort,
DÉCLARE recevable en la forme le recours formé par Monsieur [U] [Y] ;
REFORME la décision notifiée par la CPAM du [Localité 4] le 13/06/2023 confirmée implicitement par la Commission Médicale de Recours Amiable et FIXE à 15 % le taux d’incapacité permanente partielle de Monsieur [U] [Y] à compter de la date de consolidation le 14/03/2023 de son accident de travail du 22/07/2022;REJETTE la demande de correctif de socio-professionnel;
ORDONNE l’exécution provisoire ;
RAPPELLE, en application de l’article L142-11 du Code de la Sécurité Sociale introduit par l’article 61 (VII) de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé, que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l’audience sont à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie ;
CONDAMNE la CPAM du [Localité 4] aux dépens exposés à compter du 1er janvier 2019.
Jugement rendu par mise à la disposition au greffe le 28 janvier 2025, dont la minute a été signée par la présidente et la greffière.
La greffière La Présidente
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