Recours en révision : enjeux de la notification et de la preuve dans le cadre des charges de copropriété.

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Recours en révision : enjeux de la notification et de la preuve dans le cadre des charges de copropriété.

L’Essentiel : Le 14 février 2024, le tribunal judiciaire de Paris a condamné Mme [V] [B] à verser 2228,35 euros au syndicat des copropriétaires pour des charges impayées. En mai 2024, elle a demandé l’annulation de cette décision, arguant avoir déjà réglé ses charges. Lors de l’audience du 5 novembre 2024, le juge a déclaré son recours irrecevable, soulignant que le paiement n’avait pas été effectué avant le jugement. Le tribunal a rappelé que le recours en révision est limité à des cas spécifiques, et Mme [V] [B] a été condamnée aux dépens, sa demande d’indemnités étant rejetée.

Jugement du Tribunal Judiciaire

Par jugement du 14 février 2024, le tribunal judiciaire de Paris a condamné Mme [V] [B] épouse [N] à verser 2228,35 euros au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] pour des charges de copropriété impayées entre le 1er avril 2020 et le 1er septembre 2021. Cette somme inclut l’appel provisionnel du premier trimestre 2021, ainsi que des intérêts légaux à partir de l’assignation du 4 novembre 2022. En outre, Mme [V] [B] a été condamnée à payer 750 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Recours en Révision

Le 3 mai 2024, Mme [V] [B] a cité le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3] devant le juge de proximité, demandant l’annulation de sa condamnation et la déduction d’un excédent versé de sa quote-part des charges à venir. Elle a également sollicité des indemnités compensatoires de 1500 euros pour les préjudices subis. Son recours est fondé sur les articles 593 à 603 du code de procédure civile, arguant qu’elle avait déjà réglé les charges avant le jugement, information qu’elle estime avoir été dissimulée.

Audience et Irrecevabilité du Recours

Lors de l’audience du 5 novembre 2024, Mme [V] [B] a comparu en personne et a demandé la révision de la décision de justice. Le juge a soulevé l’irrecevabilité de son recours, en raison de l’absence d’ouverture de cette voie de recours. Le syndicat des copropriétaires n’ayant pas comparu, le jugement a été réputé contradictoire.

Motivations du Juge

Le juge a rappelé que le recours en révision ne peut être ouvert que dans des cas spécifiques, tels que la fraude ou la découverte de pièces décisives. Bien que Mme [V] [B] ait effectué un virement pour régler ses charges, celui-ci n’a été débité qu’après l’audience, ce qui signifie que le syndicat n’avait pas connaissance de ce paiement au moment du jugement. De plus, Mme [V] [B] n’a pas justifié qu’elle n’avait pas pu faire valoir sa cause avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée.

Décision Finale

En conséquence, le tribunal a déclaré le recours de Mme [V] [B] irrecevable. Étant la partie perdante, elle a été condamnée aux dépens de l’instance, et sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile a été rejetée.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de recevabilité d’un recours en révision selon le Code de procédure civile ?

Le recours en révision est régi par les articles 593 à 600 du Code de procédure civile.

Selon l’article 593, le recours en révision a pour but de faire rétracter un jugement qui a acquis force de chose jugée afin qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.

L’article 595 précise que ce recours n’est ouvert que pour certaines causes, notamment :

1. La fraude de la partie au profit de laquelle le jugement a été rendu.
2. La découverte de pièces décisives retenues par l’autre partie.
3. Le jugement sur des pièces reconnues ou déclarées fausses.
4. Le jugement sur des attestations, témoignages ou serments déclarés faux.

Il est important de noter que, pour que le recours soit recevable, son auteur doit prouver qu’il n’a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu’il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée.

De plus, l’article 596 stipule que le délai pour former un recours en révision est de deux mois, à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision.

En l’espèce, Mme [V] [B] épouse [N] a tenté de fonder son recours sur la découverte d’une pièce décisive, à savoir la preuve du règlement de ses charges de copropriété. Cependant, il a été établi que cette preuve n’était pas disponible au moment de l’audience, ce qui remet en question la recevabilité de son recours.

Quelles sont les conséquences d’une fin de non-recevoir dans le cadre d’un recours en révision ?

La fin de non-recevoir est régie par les articles 122 et 125 du Code de procédure civile.

L’article 122 définit la fin de non-recevoir comme tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel que le défaut de qualité ou d’intérêt.

L’article 125 précise que les fins de non-recevoir doivent être relevées d’office lorsqu’elles ont un caractère d’ordre public, notamment en cas d’inobservation des délais ou d’absence d’ouverture d’une voie de recours.

Dans le cas présent, le juge a soulevé d’office l’irrecevabilité du recours de Mme [V] [B] épouse [N] en raison de l’absence d’ouverture de cette voie de recours.

Cela signifie que, même si Mme [V] [B] épouse [N] avait des arguments à faire valoir, le tribunal n’a pas examiné le fond de sa demande en raison de cette irrecevabilité.

Ainsi, la fin de non-recevoir a conduit à un rejet pur et simple de son recours, sans possibilité d’examen des éléments de fond.

Comment le tribunal a-t-il statué sur les demandes accessoires de Mme [V] [B] épouse [N] ?

Les demandes accessoires de Mme [V] [B] épouse [N] ont été examinées à la lumière de l’article 696 du Code de procédure civile.

Cet article stipule que la partie perdante est condamnée aux dépens, sauf décision motivée du juge qui pourrait en mettre la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

Dans cette affaire, Mme [V] [B] épouse [N] a été déclarée partie perdante, ce qui implique qu’elle est tenue de supporter les dépens de l’instance.

De plus, sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, qui vise à obtenir le remboursement des frais irrépétibles, a été rejetée.

Cela signifie que le tribunal n’a pas jugé nécessaire de faire supporter ces frais par la partie adverse, renforçant ainsi la décision de condamner Mme [V] [B] épouse [N] aux dépens.

En conséquence, le tribunal a statué en faveur de la partie gagnante, confirmant ainsi l’irrecevabilité du recours et la condamnation aux dépens.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Madame [V] [N]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
le [6]

Pôle civil de proximité

PCP JTJ proxi fond

N° RG 24/03149 – N° Portalis 352J-W-B7I-C5B3S

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le jeudi 09 janvier 2025

DEMANDERESSE
Madame [V] [B] épouse [N]
demeurant [Adresse 5]
comparante en personne

DÉFENDEUR
Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 4], Représenté par son syndic en exercice le [6] sis [Adresse 1]
non comparant, ni représenté

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Mathilde CLERC, Présidente,
assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 05 novembre 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 09 janvier 2025 par Mathilde CLERC, Présidente, assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière

Décision du 09 janvier 2025
PCP JTJ proxi fond – N° RG 24/03149 – N° Portalis 352J-W-B7I-C5B3S

EXPOSE DU LITIGE

Par jugement du 14 février 2024 du tribunal judiciaire de Paris, Mme [V] [B] épouse [N] a été condamnée à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] la somme de 2228,35 euros au titre de charges de copropriété impayées pour la période du 1 avril 2020 au 1er septembre 2021, incluant l’appel provisionnel du 1er trimestre 2021, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation du 4 novembre 2022, outre la somme de 750 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens.

Par acte de commissaire de justice du 3 mai 2024, Mme [V] [B] épouse [N] a fait citer le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3] devant le juge de proximité du tribunal judiciaire de Paris aux fins de :
– » annulation de sa condamnation à payer au syndicat des copropriétaire représenté par son syndic le [6] la somme de 2228,35 euros avec intérêts  » ;
– » annulation de sa condamnation à payer au syndicat des copropriétaires représenté par son syndic le [6] la somme de 750 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile  » ;
– » que les dépens soient portés à la charge du syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] « ;
– » que l’excédent qu’elle a versé soit déduit de sa quote-part des charges à venir  »
– » que des indemnités compensatoires de 1500 euros lui soient versées pour les préjudices subis au titre de l’article 700 du code de procédure civile « .

L’affaire a été appelée à l’audience du 5 novembre 2024 à laquelle Mme [V] [B] épouse [N] a comparu en personne et a sollicité le bénéfice de son acte introductif d’instance, intitulé  » demande de révision d’une décision de justice « .

Elle fonde ses demandes sur les articles 593 à 603 du code de procédure civile, expliquant avoir été condamnée à payer un arriéré de charges de copropriété qu’elle avait, avant l’audience de jugement, déjà réglé, ce que le demandeur a l’instance se serait, selon elle, abstenu de communiquer à la juridiction. Son recours en révision est donc fondé sur la dissimulation d’une information qu’elle juge décisive quant à l’issue du litige tranché par jugement du 14 février 2024.

Le juge du pôle civil de proximité a, sur le fondement des articles 122, 125 et 472 du code de procédure civile, soulevé l’irrecevabilité du recours, notamment pour absence d’ouverture de cette voie de recours.

Bien que régulièrement assigné à personne morale, le syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 3], représenté par son syndic le [6] n’a pas comparu ni personne pour lui, de sorte qu’il sera, en application de l’article 473 du code de procédure civile, statué par jugement réputé contradictoire.

A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 9 janvier 2025.

MOTIVATION

Sur la fin de non – recevoir

En application de l’article 122 du code de procédure civile, constitue une fin de non – recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir tel que le défaut de qualité et le défaut d’intérêt.

En application de l’article 125 du code de procédure civile, les fins de non-recevoir doivent être relevées d’office lorsqu’elles ont un caractère d’ordre public, notamment lorsqu’elles résultent de l’inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l’absence d’ouverture d’une voie de recours .

En application de l’article 593 du code de procédure civile, le recours en révision tend à faire rétracter un jugement passé en force de chose jugée pour qu’il soit à nouveau statué en fait et en droit.

Selon l’ article 500 du Code de procédure civile ,  » a force de chose jugée le jugement qui n’est susceptible d’aucun recours suspensif d’exécution. Le jugement susceptible d’un tel recours acquiert la même force à l’expiration du délai de recours si ce dernier n’a pas été exercé dans le délai « .

En application de l’article 595 du code de procédure civile, le recours en révision n’est ouvert que pour l’une des causes suivantes :

1. S’il se révèle, après le jugement, que la décision a été surprise par la fraude de la partie au profit de laquelle elle a été rendue ;
2. Si, depuis le jugement, il a été recouvré des pièces décisives qui avaient été retenues par le fait d’une autre partie ;
3. S’il a été jugé sur des pièces reconnues ou judiciairement déclarées fausses depuis le jugement ;
4. S’il a été jugé sur des attestations, témoignages ou serments judiciairement déclarés faux depuis le jugement.

Dans tous ces cas, le recours n’est recevable que si son auteur n’a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu’il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée.

En application de l’article 596 du code de procédure civile, le délai du recours en révision est de deux mois. Il court à compter du jour où la partie a eu connaissance de la cause de révision qu’elle invoque.

En application de l’article 600 du code de procédure civile, lorsque le recours en révision est formé par citation, cette communication est faite par le demandeur auquel il incombe, à peine d’irrecevabilité de son recours, de dénoncer cette citation au ministère public.

En l’espèce, s’il est établi que les conditions posées à l’article 600 précité ont été remplies, il n’est pas établi que le jugement du 14 février 2024, réputé contradictoire et rendu en premier ressort, soit passé en force de chose jugée, Mme [V] [B] épouse [N] ne justifiant pas que ce dernier le lui aurait été notifié ; interrogée à l’audience sur les modalités de sa signification, elle a indiqué n’en avoir eu connaissance que parce que l’un de ses proches le lui avait envoyé par courriel et ne pas avoir le souvenir du passage ou d’un avis de passage d’un commissaire de justice ; il n’est par ailleurs pas établi qu’elle aurait exécuté volontairement la décision de sorte qu’il est impossible d’affirmer que son délai de recours selon la voie ordinaire est expiré.

Mme [V] [B] épouse [N] indique par ailleurs que son recours s’inscrit dans le second cas prévu à l’article 595 du code de procédure civile : elle soutient que, depuis le jugement, il a été recouvré une pièce décisive, à savoir la preuve du règlement de son impayé de charges de copropriété, qui, selon elle, a été retenue par le fait du demandeur.

Il résulte toutefois des pièces qu’elle produit et de ses propres déclarations que si elle a bien effectué un virement à destination du syndicat des copropriétaires en date du 2 décembre 2023, ce virement n’a été débité de son compte bancaire que le 4 décembre 2023, de sorte qu’il n’a pas pu parvenir au syndicat des copropriétaires avant l’audience, laquelle s’est précisément tenue le 4 décembre 2023. Il ne saurait ainsi être considéré que le syndicat des copropriétaires aurait retenu la preuve de ce paiement, dont il ne disposait pas au jour de l’audience, la somme payée par la copropriétaire ayant d’ailleurs été portée au crédit de son compte copropriétaire dès le 5 décembre 2023, soit, au lendemain de l’audience, ainsi qu’il en résulte du décompte qu’elle produit.

La situation telle qu’elle résulte des éléments qu’elle produit ne correspond donc pas au cas d’ouverture qu’elle vise.

Enfin, il convient de rappeler que le recours n’est recevable que si son auteur n’a pu, sans faute de sa part, faire valoir la cause qu’il invoque avant que la décision ne soit passée en force de chose jugée ; or, en l’espèce, il résulte du jugement du 4 février 2024 que Mme [V] [B] épouse [N] a été assignée à personne le 4 novembre 2022, et qu’elle n’a pas comparu à l’audience du 4 décembre 2023  » malgré plusieurs renvois dont le dernier accordé pour lui permettre de venir s’expliquer « . Il a donc été donné Mme [V] [B] épouse [N] plusieurs opportunités de faire valoir la cause qu’elle invoque aujourd’hui.

En conséquence, le recours de Mme [V] [B] épouse [N] sera déclaré irrecevable.

Sur les demandes accessoires

L’article 696 du Code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, Mme [V] [B] épouse [N], partie perdante, sera condamnée aux entiers dépens.

Sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile sera rejetée.

PAR CES MOTIFS,

Le tribunal judiciaire, statuant publiquement par décision réputée contradictoire, mise à disposition au greffe,

DECLARE le recours en révision de Mme [V] [B] épouse [N] irrecevable ;

CONDAMNE Mme [V] [B] épouse [N] aux dépens de l’instance ;

REJETTE la demande formée au titre des frais irrépétibles ;

La greffière La présidente


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