Reconnaissance de paternité : enjeux de fraude et de régularité administrative

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Reconnaissance de paternité : enjeux de fraude et de régularité administrative

L’Essentiel : L’affaire concerne la reconnaissance de paternité de [S] [F] [X], née le [Date naissance 3] 2017. Monsieur [H] [Z] [G] [X] a effectué une reconnaissance anticipée, mais le Procureur a suspecté une fraude. L’enquête a révélé l’absence de lien entre Monsieur [X] et l’enfant, ainsi qu’un passé migratoire complexe de Madame [F]. Une expertise ADN a confirmé que Monsieur [X] n’est pas le père biologique. Le tribunal a annulé la reconnaissance de paternité, déclarant que l’enfant porterait uniquement le nom de sa mère, et a condamné les parties aux dépens. La décision a été prononcée le 06 janvier 2025.

Présentation de l’Affaire

[S] [F] [X] est née le [Date naissance 3] 2017 à [Localité 16] de Madame [O] [F]. Le 14 avril 2017, Monsieur [H], [Z], [G] [X] a effectué une reconnaissance anticipée de paternité à la mairie de [Localité 12] (78).

Procédure Judiciaire

Le Procureur de la République a assigné Monsieur [X] et Madame [F] devant le tribunal judiciaire de Versailles en raison de soupçons de reconnaissance frauduleuse de paternité. Les demandes incluent l’annulation de la reconnaissance de paternité, la déclaration de non-paternité de Monsieur [X], et des conséquences sur le nom de l’enfant.

Enquête et Éléments de Preuve

L’enquête a révélé que Monsieur [X] n’a pas assisté à la naissance de l’enfant et n’a pas justifié de sa participation à son entretien. De plus, il n’existe aucune preuve d’une vie commune entre les parents. Madame [F] a également un passé migratoire complexe, ayant été déboutée du droit d’asile et étant mère de trois enfants de pères différents.

Résultats de l’Expertise ADN

Une expertise ADN a conclu que Monsieur [H] [X] n’est pas le père biologique de [S] [F] [X]. Malgré cela, Madame [F] et Monsieur [X] ont continué à nier les accusations de reconnaissance frauduleuse.

Décision du Tribunal

Le tribunal a annulé la reconnaissance de paternité, a déclaré que Monsieur [X] n’est pas le père de l’enfant, et a ordonné que l’enfant porte uniquement le nom de sa mère. La décision a été transcrite sur les registres de l’état civil, et les deux parties ont été condamnées aux dépens.

Conclusion de la Procédure

La décision a été prononcée le 06 janvier 2025, et est exécutoire de plein droit.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de validité d’une reconnaissance de paternité en France ?

La reconnaissance de paternité en France est régie par les articles 316 et suivants du Code civil. Selon l’article 316, « la reconnaissance de paternité est un acte par lequel un homme déclare être le père d’un enfant ».

Pour qu’une reconnaissance soit valide, elle doit être effectuée dans les formes prévues par la loi, notamment devant un officier d’état civil.

L’article 317 précise que « la reconnaissance peut être faite avant ou après la naissance de l’enfant ». Toutefois, la reconnaissance doit être libre et éclairée, sans contrainte ni fraude.

Dans le cas présent, le Procureur de la République a soulevé des soupçons de fraude, ce qui remet en question la validité de la reconnaissance effectuée par Monsieur [H].

En effet, l’article 318 du Code civil stipule que « la filiation peut être contestée en cas de fraude ».

Ainsi, si la reconnaissance a été faite dans le but d’obtenir des avantages indus, elle peut être annulée, comme cela a été décidé par le tribunal dans cette affaire.

Quels sont les effets juridiques de l’annulation d’une reconnaissance de paternité ?

L’annulation d’une reconnaissance de paternité a des conséquences juridiques importantes, notamment en ce qui concerne la filiation et le nom de l’enfant.

L’article 320 du Code civil dispose que « l’annulation de la reconnaissance de paternité entraîne la perte des droits et obligations qui en résultent ».

Cela signifie que l’enfant ne pourra plus revendiquer des droits successoraux ou d’autres droits liés à la filiation avec le père dont la reconnaissance a été annulée.

De plus, l’article 311-21 précise que « l’enfant porte le nom de son père et de sa mère ». Dans le cas présent, le tribunal a décidé que l’enfant [S] [F] [X] portera désormais le nom de sa mère, Madame [F], ce qui est conforme à la législation en vigueur.

Enfin, l’article 331 du Code civil prévoit que « la décision d’annulation doit être transcrite sur les registres de l’état civil ».

Le tribunal a donc ordonné la transcription de sa décision, ce qui est une étape essentielle pour que les effets de l’annulation soient opposables aux tiers.

Quelles sont les implications de la situation irrégulière de la mère sur la reconnaissance de paternité ?

La situation irrégulière de la mère peut avoir des implications sur la reconnaissance de paternité, notamment en ce qui concerne la légitimité de la filiation.

L’article 9 du Code civil stipule que « chacun a droit au respect de sa vie privée ». Cependant, la situation administrative de la mère peut être prise en compte dans l’appréciation des circonstances entourant la reconnaissance de paternité.

Dans cette affaire, le Procureur a mis en avant le fait que Madame [F] était en situation irrégulière au moment de la naissance de l’enfant, ce qui soulève des questions sur la sincérité de la reconnaissance de paternité.

L’article 311-1 du Code civil précise que « la filiation est établie par la reconnaissance, le mariage ou la possession d’état ».

Ainsi, si la reconnaissance a été effectuée dans un contexte de fraude, cela peut justifier son annulation, comme cela a été décidé par le tribunal.

En outre, l’article 334-1 du Code civil indique que « la filiation peut être contestée en cas de fraude ou de mensonge ».

Dans ce cas, la situation irrégulière de la mère pourrait être interprétée comme un élément de fraude, renforçant ainsi la décision du tribunal d’annuler la reconnaissance de paternité.

Minute n°

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
Première Chambre
JUGEMENT
06 JANVIER 2025

N° RG 23/05739 – N° Portalis DB22-W-B7H-RUHU
Code NAC : 2AV

DEMANDERESSE :

MADAME PROCUREUR DE LA REPUBLIQUE
Tribunal judiciaire de Versailles
[Adresse 7]
[Localité 8]
dispensée du ministère d’avocat

DEFENDEURS :

Monsieur [H], [Z], [G] [X] tant en son nom personnel que comme représentant légal de l’enfant mineur [S] [F] [X] née le [Date naissance 3] 2017 à [Localité 16] (10)
né le [Date naissance 5] 1971 à [Localité 11] (REP DEM CONGO)
demeurant [Adresse 6]
[Localité 9]
défaillant

Madame [O] [F], tant en son nom personnel que comme représentante légale de l’enfant mineur [S] [F] [X] née le [Date naissance 3] 2017 à [Localité 16] (10)
née le [Date naissance 4] 1982 à [Localité 14] (REP DEM CONGO)
demeurant [Adresse 2]
[Localité 10]
défaillante

ACTE INITIAL du 16 Octobre 2023 reçu au greffe le 18 Octobre 2023.

DÉBATS : A l’audience tenue en chambre du conseil le 12 Novembre 2024, Madame LE BIDEAU, Vice Présidente, siégeant en qualité de juge rapporteur avec l’accord des parties en application de l’article 805 du Code de procédure civile, assistée de Madame BEAUVALLET, Greffier, a indiqué que l’affaire sera mise en délibéré au 06 Janvier 2025.

MAGISTRATS AYANT DÉLIBÉRÉ :
Madame LE BIDEAU, Vice Présidente
Madame DURIGON, Vice-Présidente
Madame MARNAT, Juge

EXPOSE DU LITIGE

[S] [F] [X] est née le [Date naissance 3] 2017 à [Localité 16] de Madame [O] [F], née le [Date naissance 4] 1982 à [Localité 14] (R.D. CONGO).

Le 14 avril 2017, Monsieur [H], [Z], [G] [X], né le [Date naissance 5] 1971 à [Localité 11] (R.D. CONGO) a réalisé une reconnaissance anticipée de paternité de l’enfant à la mairie de [Localité 12] (78).

Par acte de commissaire de justice en date des 9 et 16 octobre 2023, suite au signalement de la préfecture des Yvelines de suspicion de reconnaissance frauduleuse de paternité à visée migratoire et enquête, le Procureur de la République près le tribunal judiciaire de Versailles a fait assigner Monsieur [X] et Madame [F] devant le tribunal judiciaire de Versailles, tant en leur nom personnel que comme représentants légaux de l’enfant [S] [F] [X], aux fins de voir :
– Annuler la reconnaissance de [S] [F] [X] née le [Date naissance 3] 2017 à [Localité 16] (10) effectuée par [H], [Z], [G] [X] né le [Date naissance 5] 1971 à [Localité 11] (R.D. CONGO) le 14 avril 2017 à la mairie de [Localité 12](78) ;
– Dire que [H], [Z], [G] [X] n’est pas le père de l’enfant [S] [F] [X] née le [Date naissance 3] 2017 à [Localité 16] (France) ;
– En déduire toute conséquence quant au nom de l’enfant ;
– Ordonner la transcription du jugement en marge des actes dont s’agit ;
– Condamner solidairement [H], [Z], [G] [X] et [O] [F] aux entiers dépens.

Au soutien de ses prétentions, Madame le Procureur de la République expose qu’il ressort de l’enquête diligentée le 4 février 2020 et des auditions de la mère et du père putatif que ce dernier n’a pas assisté à la naissance de l’enfant ; qu’il n’a fourni aucun justificatif de participation à sa charge et qu’il ne l’a jamais reçu à son domicile ; Madame [F] et Monsieur [X], ayant 11 ans de différence d’âge, ne justifient d’aucune vie commune avant ou après la naissance, et vivaient respectivement à [Localité 13] (52) et [Localité 15] (78) au moment du signalement de la Préfecture ; qu’en outre, Monsieur [X] a reconnu un autre enfant [U], [L], [B] [X], né le [Date naissance 1] 2014 à l’égard duquel il ne peut justifier ni d’une participation à l’entretien et à l’éducation ni d’une vie commune avec la mère, étant précisé que les titres de cet enfant ont été invalidés (carte d’identité, passeport) ; qu’en ce qui concerne Madame [F], elle est entrée de manière irrégulière sur le territoire français en 2016 et a été déboutée du droit d’asile par l’OFPRA en 2017, décision confirmée par la CNDA en 2019, d’où il ressort qu’elle se trouvait en situation irrégulière au moment de la naissance de l’enfant ; que cette dernière est mère de trois enfants de trois pères différents avec lesquels elle n’a jamais vécu. Il est relevé une double demande de titres pour l’enfant [S] [F] [X] en septembre 2017, moins de trois mois après la naissance. Enfin, il est fait état que, malgré le compte-rendu du 21 février 2023 relatif à une expertise ADN menée qui a conclu que « [H] [X] n’est pas le père biologique de [S] [F] [X] », Madame [F] et Monsieur [X] ont continué à nier les faits d’avoir procédé à la reconnaissance de paternité dans le but d’obtenir des papiers.

Madame [F] et Monsieur [X], assignés par actes de commissaires de justice remis à l’étude les 9 et 16 octobre 2023 n’ont pas constitué avocat.

L’ordonnance de clôture en date du 02 mai 2024 a fixé les plaidoiries au 12 novembre 2024.

[DÉBATS NON PUBLICS – Motivation de la décision occultée]
PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, après débats en chambre du conseil, par jugement réputé contradictoire, et en premier ressort,

Annule la reconnaissance de [S] [F] [X] née le [Date naissance 3] 2017 à [Localité 16] (10) effectuée par Monsieur [H], [Z], [G] [X] né le [Date naissance 5] 1971 à [Localité 11] (R.D. CONGO) le 14 avril 2017 à la mairie de [Localité 12](78) ;

Dit que [H], [Z], [G] [X] n’est pas le père de l’enfant [S] [F] [X] née le [Date naissance 3] 2017 ;

Dit que l’enfant [S] [F] [X] née le [Date naissance 3] 2017 à 5h35 à [Localité 16] (10) portera désormais le seul nom de patronymique de sa mère, soit [F] et qu’il y a lieu de supprimer le nom de [X] ;

Ordonne la transcription de la présente décision sur les registres de l’état civil et en marge de l’acte de naissance de l’enfant n° 001410/2017 établi par l’officier d’état civil de la mairie de [Localité 16] ;

Condamne in solidum Monsieur [H], [Z], [G] [X] et Madame [O] [F] aux entiers dépens.

Rappelle que la décision est exécutoire de plein droit.

Prononcé par mise à disposition au greffe le 06 JANVIER 2025 par Madame LE BIDEAU, Vice Présidente, assistée de Madame BEAUVALLET, greffier, lesquelles ont signé la minute du présent jugement.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


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