Reconnaissance de la maladie professionnelle : enjeux de preuve et responsabilité de l’employeur

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Reconnaissance de la maladie professionnelle : enjeux de preuve et responsabilité de l’employeur

L’Essentiel : Le 20 février 2017, Madame [S] [F] a déclaré un syndrome d’épuisement professionnel à la caisse primaire d’assurance maladie de Paris, soutenue par un certificat médical. Le 12 janvier 2018, sa pathologie a été reconnue comme accident du travail. En décembre 2020, elle a saisi le tribunal pour faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur. Le 27 mai 2024, le CRRMP a conclu à l’absence de lien entre sa maladie et son travail. Le tribunal a rejeté sa demande, notant que les éléments présentés ne prouvaient pas ce lien, entraînant des conséquences financières pour Madame [F].

Déclaration de maladie professionnelle

Le 20 février 2017, Madame [S] [F], employée de l’Association [9], a soumis une déclaration de maladie professionnelle à la caisse primaire d’assurance maladie de Paris, invoquant un syndrome d’épuisement professionnel. Elle a accompagné sa demande d’un certificat médical du docteur [E] mentionnant des troubles anxieux liés à des difficultés professionnelles.

Prise en charge par la caisse primaire

Le 12 janvier 2018, la caisse primaire d’assurance maladie a reconnu cet accident comme étant lié à la législation sur les risques professionnels, après consultation du comité régional des maladies professionnelles d’Ile-de-France. L’état de santé de Madame [F] a été déclaré consolidé au 7 décembre 2018, avec un taux d’incapacité de 10 % notifié le 28 janvier 2019.

Recours en reconnaissance de faute inexcusable

Le 7 décembre 2020, Madame [F] a saisi le tribunal judiciaire de Paris pour faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur. Ce recours a été enregistré sous le numéro RG 21/0042 et a connu plusieurs rebondissements, notamment une radiation et une réinscription à la demande de son conseil.

Procédure d’inopposabilité

Simultanément, l’Association [9] a engagé une procédure d’inopposabilité concernant la décision de prise en charge de la pathologie de Madame [F], enregistrée sous le numéro RG 18/0570. Le 24 janvier 2024, le Pôle social de Paris a refusé de joindre les deux procédures et a ordonné un nouvel avis sur le lien entre la pathologie et l’exposition professionnelle de Madame [F].

Avis du CRRMP

Le CRRMP de Nouvelle Aquitaine a rendu un avis le 27 mai 2024, concluant à l’absence de lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée par Madame [F] et son travail habituel. Les parties ont été convoquées à l’audience du 23 octobre 2024, où Madame [F] a soutenu ses demandes.

Arguments de Madame [F]

Madame [F] a demandé au tribunal de reconnaître la faute inexcusable de son employeur, d’ordonner une expertise judiciaire pour évaluer ses préjudices, et de majorer sa rente au taux maximum. Elle a également sollicité une provision de 10.000 euros et des indemnités au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Réponse de l’Association [9]

L’Association [9] a demandé le déboutement de Madame [F] de toutes ses demandes, tout en sollicitant que la CPAM avance les sommes dues. Elle a également demandé à ce que Madame [F] soit condamnée à lui verser 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

Position de la Caisse primaire

La Caisse, représentée par son conseil, a affirmé qu’elle se conformait à l’avis du CRRMP et que la procédure d’inopposabilité n’affectait pas la reconnaissance de la faute inexcusable. Elle a indiqué qu’elle se réservait le droit de faire des observations sur la liquidation du préjudice.

Décision du tribunal

Le tribunal a statué sur l’indépendance des procédures et a noté que les avis des CRRMP étaient contradictoires. Il a conclu que les éléments présentés par Madame [F] ne permettaient pas d’établir un lien direct entre sa pathologie et son travail, entraînant le rejet de sa demande de reconnaissance de faute inexcusable.

Conséquences financières

Madame [F] a été condamnée aux dépens et à verser 1.000 euros à l’Association [9] au titre de l’article 700 du Code de procédure civile. L’exécution provisoire de la décision a également été ordonnée.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de l’indemnisation demandée par Mme [P] [T] ?

La demande d’indemnisation de Mme [P] [T] repose sur la loi du 5 juillet 1985, qui régit la responsabilité civile en matière d’accidents de la circulation.

Cette loi, également connue sous le nom de « loi Badinter », vise à protéger les victimes d’accidents de la route en facilitant leur accès à l’indemnisation.

L’article 1 de cette loi stipule que « toute personne victime d’un accident de la circulation a droit à une indemnisation intégrale de son préjudice ».

Cela inclut les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux, qu’ils soient temporaires ou permanents.

Ainsi, Mme [P] [T] a le droit de demander réparation pour les frais médicaux, les pertes de revenus, ainsi que pour la souffrance physique et psychologique subie à la suite de l’accident.

Comment le tribunal évalue-t-il le montant de l’indemnisation ?

Le tribunal évalue le montant de l’indemnisation en se basant sur les rapports d’expertise médicale et les éléments de preuve fournis par les parties.

L’article 1240 du Code civil précise que « celui qui cause un dommage à autrui est tenu de le réparer ».

Dans le cas présent, le tribunal a pris en compte les préjudices patrimoniaux et extra-patrimoniaux subis par Mme [P] [T].

Les préjudices patrimoniaux temporaires, tels que les frais divers, ont été évalués à 500 €.

Les préjudices extra-patrimoniaux temporaires, incluant le déficit fonctionnel temporaire et les souffrances endurées, ont été chiffrés à 945 € et 5 000 € respectivement.

Enfin, le déficit fonctionnel permanent a été évalué à 7 840 €, ce qui a conduit à un total d’indemnisation de 14 785 € avant déduction de la provision de 3 000 €.

Quelles sont les conséquences des demandes accessoires formulées par la SA MUTUELLE DES MOTARDS ?

Les demandes accessoires formulées par la SA MUTUELLE DES MOTARDS visent à réduire le montant de l’indemnisation et à clarifier les modalités de paiement.

L’article 1231-7 du Code civil stipule que « les intérêts moratoires sont dus à compter de la mise en demeure ».

Dans ce cas, la SA MUTUELLE DES MOTARDS a demandé que le doublement des intérêts soit limité à la période du 4 au 8 septembre 2023, ce qui a été accepté par le tribunal.

De plus, l’article 514 du Code de procédure civile prévoit que les décisions de première instance sont exécutoires à titre provisoire, sauf disposition contraire.

Le tribunal a donc décidé de ne pas écarter l’exécution provisoire de la décision, permettant ainsi à Mme [P] [T] de recevoir rapidement une partie de son indemnisation.

Quelle est la portée de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce jugement ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au tribunal de condamner la partie perdante à payer une somme à titre de frais irrépétibles.

Cet article stipule que « la partie qui succombe dans ses prétentions peut être condamnée à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés ».

Dans ce jugement, le tribunal a condamné la SA MUTUELLE DES MOTARDS à verser 1 500 € à Mme [P] [T] en application de cet article.

Cette somme vise à couvrir les frais engagés par Mme [P] [T] pour faire valoir ses droits, notamment les frais d’avocat et d’expertise.

Ainsi, l’article 700 permet de garantir que la victime ne supporte pas seule le coût de la procédure judiciaire, renforçant ainsi l’accès à la justice.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 3 Expéditions exécutoires délivrées aux parties en LRAR le :
3 Expéditions délivrées aux avocats en LS le :

PS ctx protection soc 3

N° RG 23/00014 – N° Portalis 352J-W-B7G-CYW7X

N° MINUTE :

Requête du :

31 Octobre 2022

JUGEMENT
rendu le 08 Janvier 2025
DEMANDERESSE

Madame [S] [N] [F]
[Adresse 3]
[Localité 2]

Représentée par Maître Rachel SPIRE, avocat au barreau de PARIS, substituée par Maître DURAND, avocat plaidant

DÉFENDERESSES

Association [9]
[Adresse 1]
[Localité 4]

Représentée par Maître Romain SUTRA de la SCP SUTRA CORRE ET ASSOCIES, substitué par Maître ABBAS, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

ASSURANCE MALADIE DE [Localité 8] DIRECTION CONTENTIEUX ET LUTTE CONTRE LA FRAUDE
POLE CONTENTIEUX GENERAL
[Adresse 6]
[Localité 5]

Représentée par Maître Florence KATO de la SELARL KATO & LEFEBVRE ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant

Décision du 08 Janvier 2025
PS ctx protection soc 3
N° RG 23/00014 – N° Portalis 352J-W-B7G-CYW7X

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame RANDOULET, Magistrate
Monsieur VINGATARAMIN, Assesseur
Monsieur DORIA AMABLE, Assesseur

assistés de Marie LEFEVRE, Greffière

DEBATS

A l’audience du 23 Octobre 2024 tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 08 Janvier 2025.

JUGEMENT

Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Le 20 février 2017, Madame [S] [F], salariée de l’Association [9] (anciennement [7]), a transmis à la caisse primaire d’assurance maladie de Paris une déclaration de maladie professionnelle au titre d’un syndrome d’épuisement professionnel.

Elle a joint à cette demande un certificat médical initial établi le 20 février 2017 par le docteur [E] qui mentionne : « troubles anxieux réactionnels à des difficultés professionnelles, épuisement professionnel ».

Par décision du 12 janvier 2018, la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 8] a pris en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels après avoir recueilli l’avis du comité régional des maladies professionnelles d’Ile-de-France.

L’état de santé de Madame [F] a été déclaré consolidé au 7 décembre 2018 et un taux d’incapacité de 10 % lui a été attribué par notification du 28 janvier 2019.

Par courrier recommandé avec demande d’accusé de réception en date du 7 décembre 2020, Madame [F] a saisi le tribunal judiciaire de Paris afin de faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur.

Ce recours a été enregistré sous le numéro RG 21/0042. Par jugement du 12 avril 2022, l’affaire a été radiée puis réinscrite, sous le numéro RG 23/0014 à la demande du conseil de Madame [F].

En parallèle, la société [9] a saisi la présente juridiction d’un recours en inopposabilité de la décision de prise en charge de la pathologie déclarée par Madame [F], enregistrée sous le numéro RG 18/0570.

Par jugement en date du 24 janvier 2024, le Pôle social de Paris a refusé la jonction de la présente procédure avec le RG 18/0570, sursis à statuer et désigné un second CRRMP aux fins qu’il donne un avis sur l’existence d’un lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée par Madame [F] et son exposition professionnelle.

Le CRRMP de Nouvelle Aquitaine a rendu son avis le 27 mai 2024 et n’a pas retenu de lien direct et essentiel entre la pathologie déclarée et le travail habituel de Madame [F].

Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience du 23 octobre 2024, date à laquelle l’affaire a été retenue.

Madame [F], représentée, a soutenu oralement ses conclusions déposées à l’audience et a demandé au Tribunal de :
la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes,juger que la présente procédure est indépendance du litige entre son employeur et la CPAM de [Localité 8] référencée sous le n° RG 18/02570,juger que sa maladie professionnelle déclarée le 20 février 2017 est due à la faute inexcusable de son employeur,en conséquence,
ordonner la majoration de la rente au taux maximum,avant dire droit, ordonner une expertise judiciaire aux fins d’évaluation de ses préjudices et dire que les frais de l’expertise seront pris en charge par l’employeur ou à défaut par la Caisse ; de fixer la provision à valoir sur l’indemnisation définitive à la somme de 10.000 euros,en tout état de cause, débouter l’employeur et la Caisse de leurs demandes, condamnation son employeur à lui verser la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile et d’ordonner l’exécution provisoire,
Par conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience, l’Association [9], demande au tribunal de :
débouter Madame [F] de son action en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur et de l’ensemble de ses demandes,à titre subsidiaire, ordonner que la CPAM fasse l’avance de toute somme qui serait accordée à Madame [F], débouter cette dernière de sa demande provisionnelle ainsi que de sa demande formulée au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,condamner Madame [F] à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Oralement, la Caisse, représentée par son conseil, rappelle qu’elle est tenue par l’avis du CRRMP et que la procédure d’inopposabilité n’a pas d’incidence sur la procédure en faute inexcusable. Elle indique s’en rapporter à la décision du tribunal sur le caractère professionnel de la pathologie déclarée, sur la reconnaissance de la faute inexcusable ainsi que sur l’éventuel majoration de la rente. Elle indique se réserver le droit de faire des observations sur la liquidation du préjudice qui pourrait intervenir.

L’affaire a été mise en délibéré au 08 janvier 2025.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de rappeler qu’en raison de l’indépendance des rapports entre assuré/employeur/caisse, le Tribunal n’a pas joint la présente procédure à la procédure parallèle intentée par l’employeur à l’encontre de la Caisse et a ainsi recueilli l’avis d’un second CRRMP dans le cadre de la présente procédure.

Pour autant, si la décision prise dans le cadre de la procédure en inopposabilité susvisée est bien indépendante de la résolution du présent litige, il convient de rappeler que s’agissant de la détermination du caractère professionnel ou non de la pathologie déclarée par Madame [F], il demeure évident que certains critères et arguments sont nécessairement communs et similaires entre les deux procédures, sans que cela ne puisse être valablement reproché au Tribunal.

En ce sens, la demande de Madame [F] visant à solliciter au Tribunal de juger que la présente procédure est indépendance du litige entre son employeur et la CPAM de [Localité 8] référencée sous le n° RG 18/02570, n’étant pas une demande que le juge a le pouvoir de trancher, le rappel susvisé étant fait, il n’y a pas lieu de répondre à cette demande dans le cadre du présent dispositif.

Sur le caractère professionnel de la pathologie déclarée

L’article L.461-1 du code de la sécurité « (…) Est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d’exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime.
Peut être également reconnue d’origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux évalué dans les conditions mentionnées à l’article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé.
Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l’origine professionnelle de la maladie après avis motivé d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L’avis du comité s’impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l’article L. 315-1.
Les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d’origine professionnelle, dans les conditions prévues aux septième et avant-dernier alinéas du présent article. Les modalités spécifiques de traitement de ces dossiers sont fixées par voie réglementaire ».

En application de l’article R.142-17-2 du même code lorsque le litige porte sur la reconnaissance de l’origine professionnelle d’une maladie non désignée dans un tableau de maladies professionnelles et entraînant une IPP supérieure à 25 %, il incombe au tribunal de recueillir préalablement l’avis d’un autre comité régional.

En l’espèce, deux Comités Régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles ont donné leur avis, à savoir :

le CRRMP d’Île-de-France, saisi par la caisse, a rendu un avis favorable le 19 décembre 2017, retenant le lien direct et essentiel entre le travail habituel de la victime et sa pathologie en relevant : « l’analyse des conditions de travail telles qu’elles ressortent de l’ensemble des pièces du dossier ainsi que la chronologie d’apparition des symptômes et leur nature permettent de retenir un lien direct et essentiel entre le travail habituel et la maladie déclarée par certificat médical du 20 février 2017 » ;
le CRRMP de Nouvelle Aquitaine, saisi par le Tribunal, a rendu un avis défavorable le 27 mai 2024, en indiquant « il s’agit d’une femme de 48 ans à la date de constatation médicale exerçant la profession de conseillère (organisme de formation ds adultes et formation continue). L’assurée déclare travailler à temps complet comme conseillère cadre au forfait depuis 2008. Elle précise que jusqu’en 2013, elle n’a rencontré aucun problème particulier. Elle date le début de ses difficultés, à la suite de son élection en novembre 2013 comme déléguée du personnel et secrétaire du comité d’entreprise. Elle précise découvrir ses nouvelles fonctions et a rapidement été confrontée aux pressions de la DRH et de la présidente du CE et que les échanges liés à l’exercice de son mandat ont été à l’origine de la dégradation des relations avec son employeur. Elle était l’objet d’intimidations suite à un désaccord sur certain sujet ou une divergence de point de vue avec ses interlocuteurs. Cette altération de sa santé s’est poursuivie en l’absence de réactions à ses signalements, avec des arrêts de travail et une prise en charge spécialisée. Selon sa hiérarchie, la demande de l’assurée n’a pas de lien avec son activité professionnelle. Il y aurait un compte rendu détaillée de toutes les réunions, alléguées et n’a jamais eu connaissance d’intimidations, de pressions ou de comportements anormaux à son égard. L’assurée a été accompagnée lors de toutes ses reprises de travail.Il n’est pas retrouvé d’avis sapiteur dans ce dossier, l’avis du médecin du travail n’a pas été reçu. L’ingénieur conseil a été entendu.
Après avoir étudié les pièces médico-administratives du dossier, le Comité considère que l’action délétère du contexte professionnel sur son état de santé n’est pas établie. ».

Entendu par l’agent assermenté dans le cadre de l’enquête diligentée par la Caisse, Madame [F] a déclaré :
qu’elle n’aurait connu aucune difficulté dans l’exercice de ses fonctions jusqu’en 2013, année au cours de laquelle elle a été élue représentante du personnel et secrétaire du comité d’entreprise et qu’elle aurait, dans ce cadre subi des pressions de la part de la directrice des ressources humaines, du président du comité d’entreprises et d’un autre délégué du personnel ; qu’elle aurait été menacée par le président du comité d’entreprise lors d’une réunion en date du 28 mai 2015 ; que cette situation aurait eu des répercussions sur son état de santé dès le début de l’année 2014 au cours de laquelle elle aurait observé plusieurs arrêts de travail de courte durée avant de reprendre son activité dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique mais qu’à son retour, la directrice des ressources humaines s’en aurait à nouveau pris à elle, qu’elle aurait alerté le directeur général de cette difficulté mais n’ aurait obtenu aucun soutien ; qu’en juin 2015, le [7] aurait fait l’objet d’une réorganisation dans le cadre de laquelle elle a été affectée au service CEP 2 (accompagnement à l’élaboration de projets) dans le cadre duquel elle tenait des rendez-vous individuels de projets mais animait également des réunions collectives et des entretiens de refus ; mais que seuls les rendez-vous individuels de projets étant comptabilisés, cela l’aurait obligé à les multiplier pour atteindre ses objectifs ;que la combinaison des difficultés relationnelles avec le directeur général et du stress lié à sa charge de travail depuis la nouvelle organisation était à l’origine de la dégradation de son état de santé.
En l’espèce, il est constant que l’intéressé a connu des périodes d’arrêt maladie et de mi-temps thérapeutique de janvier à mai 2014 puis de novembre 2016 à juin 2017, date à laquelle elle a été définitivement arrêtée, les justificatifs étant versés aux débats .

S’agissant des pièces médicales versées aux débats, le Tribunal constate:

que le Docteur [T] dans son attestation en date du 10 avril 2014 indique suivre Madame [F] depuis le 27 février 2014 à la demande de son médecin traitant et se dit favorable d’un mi-temps thérapeutique lui paraissant plus adapté, néanmoins aucun lien avec le contexte professionnel de Madame [F] n’est mentionné à ce stade,que le certificat médical du Dr. [Y] [E] en date du 13 mars 2014 fait état du fait que Madame [F] « va beaucoup mieux. Son état physique et psychique se sont améliorés / avec son psychiatre nous pensons qu’une reprise à temps partiel (50%) lui serait très bénéfique » alors même que c’était l’ACMS (médecine du travail) qui aurait sollicité la prolongation de l’arrêt maladie de la salariée par courrier entre professionnel médical du 20 février 2014,que le certificat médical du Docteur [T] du 17 mars 2017 fait état d’une apparition progressive des symptômes d’un épuisement professionnel et de leur accentuation ayant nécessité un arrêt de travail à compter de la mi-novembre 2016 ;que seule la fiche de suivi de la médecine du travail, au demeurant peu lisible et exploitable, relève qu’en février 2014, des difficultés relationnelles avec la directrice des Ressources humaines, difficultés non reprise postérieurement.
De façon générale, le Tribunal relève que ces pièces ne comportent, à l’exclusion du certificat médial initial et de l’attestation du Docteur [T] du 17 mars 2017, soit postérieurement à la déclaration de maladie professionnelle, aucune référence au contexte professionnel n’est faite, une reprise à temps partiel étant même considérée comme bénéfique par certains praticiens, dont un psychiatre.

Par ailleurs, et s’agissant des relations de Madame [F] avec sa hiérarchie et sur le contexte de travail dans lequel elle évoluait :

que l’agent enquêteur a entendu Madame [D] [X], directrice des ressources humaines depuis le mois de septembre 2016 qui a nié l’ensemble des éléments avancés par Madame [F] ; que celle-ci a indiqué n’avoir jamais eu à connaître de pressions exercées à l’encontre de Madame [F] et que les réunions du comité d’entreprise se passaient dans un climat certes parfois houleux mais toujours respectueux et faisait en tout état de cause l’objet de retranscriptions particulièrement détaillées ; concernant la charge de travail de la salariée, elle indiquait n’avoir jamais eu à connaître de difficulté concernant ses horaires de travail bénéficiant d’un aménagement de son temps de travail pour lui permettre d’exercer ses mandats, précisant que sa supérieure hiérarchique était également élue du personnel, pour le même syndicat ; qu’elle ajoutait que comme l’ensemble de ses collègues, Madame [F] n’était soumise à aucun objectif chiffré ; qu’elle transmettait à l’agent enquêteur un courriel de Monsieur [M], directeur général du [7] et président du comité d’entreprise qui contenait des éléments similaires ;
qu’il ressort du seul échange de mail versé aux débats, échange entre la salariée et le directeur général en date des 31 mars et 1er avril 2014, aucune agressivité ou pression de la part du supérieur de Madame [F] que pourrait retenir le Tribunal au soutien des pressions exercées par la hiérarchie de la requérante, qu’en l’occurrence celui-ci se contente d’exposer les raisons juridiques motivant la demande de signature d’un avenant à son contrat de travail et de rappeler le cadre d’intervention de la directrice des ressources humaines, cet élément ne pouvant venir corroborer ni une situation de pression, ni surcharge ou harcèlement au travail ; étant rappelé que légalement et vue la situation, Madame [F] se devait effectivement de remplir ledit avenant ;
qu’au sein d’un courriel adressé par Madame [F] à Monsieur [M], le 20 juin 2017 soit bien postérieurement à la date de première constatation médicale de la pathologie retenue par le service médical de la caisse, celle-ci lui reproche d’avoir refusé de la recevoir alors qu’elle souhaitait faire part de difficultés rencontrées alors qu’elle « était en larmes », or, ce mail ne contient que les seules affirmations de la salariée, que pour autant si à l’issue de la séance du 20 juin 2017, Madame [F] a pu être vu en pleurs après avoir apparemment sollicité en vain un entretien avec le directeur général, les attestations versées, ne font aucunement état d’un comportement inadapté de la direction à l’origine du comportement de Madame [F] mais uniquement d’un mal-être exprimée par cette dernière, ne permettant pas au Tribunal de faire un lien direct avec la demande d’entretien et le comportement de son supérieur hiérarchique ;
qu’aucune pièce versée aux débats ne permet au Tribunal de considérer que Madame [F] aurait fait état de difficultés à concilier son poste de conseillère et ses différents mandats entre 2014 et sa déclaration de maladie professionnelle ;
qu’aucun élément objectif permettant au Tribunal de caractériser de façon objective la surcharge de travail déclarée par celle-ci, n’est versé aux débats, que s’agissant uniquement de déclarations non corroborées ou de documents généraux à l’entreprise qui s’ils peuvent certes mettre en lumières l’existence de situations de souffrance au travail au sein de la Société à une période concomitante de l’apparition de la pathologie de Madame [F], ces documents ne font pas référence à la situation de cette salariée en particulier ni même à l’un des griefs par elle invoqué au soutien de sa demande de reconnaissance de maladie professionnelle (pressions dans le cadre de son mandat de représentante du personnel et surcharge de travail) ;
qu’aucun élément n’est versé aux débat concernant les menaces dont Madame [F] aurait été victime le 28 mai 2025 et rapportées à l’agent enquêteur de la Caisse ;
Qu’enfin, par courrier du 1er février 2019, la Société [9] a sollicité auprès de l’inspection du travail l’autorisation de licencier Madame [F] pour indaptitude, que par décision en date du 25 mars 2019, l’inspectrice du travail a refusé de délivrer l’autorisation au motif que la demande de licenciement serait en rapport avec les fonctions représentatives de la salariée, qu’ainsi l’employeur a formé un recours hiérarchique, que le licenciement a été autorisé du fait du silence gardé par la Ministre du travail le 15 janvier 2020 ; que Madame [F] a contesté ce licenciement devant le Tribunal administratif Paris et que ce dernier comme la Cour Administrative d’Appel de Paris ensuite saisie, ont considéré que l’existence d’un lien entre la dégradation de l’état de santé de la requérante à l’origine de son inaptitude professionnelle et l’exercice de ses mandats passés et présents n’était pas établi ;
Ainsi, il en résulte que les éléments apportés ne permettent pas au Tribunal de soutenir et caractériser le sentiment de souffrance au travail, de surcharge de travail et de discrimination professionnelle dont fait état Madame [F], que s’agissant d’une maladie hors tableau, la preuve d’un lien direct et essentiel doit être rapporté pour que le caractère professionnel de la maladie soit reconnu, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

En l’absence de preuve du caractère professionnel de la pathologie déclarée, il y a lieu de débouter Madame [F] de sa demande en faute inexcusable de son employeur et du surplus de ses demandes.

Sur les mesures accessoires

Madame [F], succombant, sera condamnée aux dépens.

L’article 700 du code de procédure civile dispose que, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer. A l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans tous les cas, le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à ces condamnations.

En l’espèce, Madame [S] [F], partie perdante et condamnée aux dépens sera condamnée à payer à l’Association [9] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile, et sera déboutée de sa demande formulée à ce titre.

L’exécution provisoire sera ordonnée en application de l’article R. 142-10-6 du code de la sécurité sociale.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe ;

Rejette la demande de Madame [S] [F] visant à la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur dans sa pathologie déclarée le 20 février 2017 et ses demandes subséquentes ;

Condamne Madame [S] [F] à payer à l’ASSOCIATION [9] la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Déboute Madame [S] [F] de sa demande formée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Madame [S] [F] aux dépens ;

Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement ;

Fait et jugé à Paris le 08 Janvier 2025.

La Greffière La Présidente

N° RG 23/00014 – N° Portalis 352J-W-B7G-CYW7X

EXPÉDITION exécutoire dans l’affaire :

Demandeur : Mme [S] [N] [F]

Défendeur : Association [9]

EN CONSÉQUENCE, LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE mande et ordonne :

A tous les huissiers de justice, sur ce requis, de mettre ladite décision à exécution,
Aux procureurs généraux et aux procureurs de la République près les tribunaux judiciaires d`y tenir la main,
A tous commandants et officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu`ils en seront légalement requis.

En foi de quoi la présente a été signée et délivrée par nous, Directeur de greffe soussigné au greffe du Tribunal judiciaire de Paris.

P/Le Directeur de Greffe

10ème page et dernière


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