Reconnaissance d’un accident de trajet en lien avec l’activité professionnelle

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Reconnaissance d’un accident de trajet en lien avec l’activité professionnelle

L’Essentiel : Le 20 octobre 2021, la société a informé la caisse primaire d’assurance maladie d’un accident de trajet survenu le 20 septembre 2021, impliquant un salarié, agent de propreté. Selon la déclaration, ce dernier rentrait chez lui en voiture après sa vacation lorsque son véhicule a été percuté par l’arrière. Le certificat médical a révélé des douleurs intenses et un syndrome de stress post-traumatique. Le 21 janvier 2022, la caisse a refusé de prendre en charge l’accident. Le salarié a contesté cette décision, mais le tribunal a rejeté sa demande. En appel, la cour a finalement reconnu l’accident comme un accident de trajet.

Déclaration de l’accident

Le 20 octobre 2021, la société a informé la caisse primaire d’assurance maladie d’un accident de trajet survenu le 20 septembre 2021, impliquant son salarié M. [S] [K], agent de propreté. Selon la déclaration, M. [K] rentrait chez lui en voiture après sa vacation lorsque son véhicule a été percuté par l’arrière. Le certificat médical initial a révélé des douleurs cervico-dorso-lombaires intenses et un syndrome de stress post-traumatique.

Refus de prise en charge

Le 21 janvier 2022, la caisse a refusé de prendre en charge l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels. M. [K] a contesté cette décision devant la commission de recours amiable, qui a rejeté sa demande le 15 décembre 2022. Il a ensuite saisi le tribunal judiciaire de Rouen pour contester ce refus.

Jugement du tribunal

Le 19 avril 2024, le tribunal a déclaré recevable le recours de M. [K], mais a rejeté sa demande de reconnaissance de l’accident comme accident du travail et de prise en charge. M. [K] a été condamné aux dépens. Il a interjeté appel de ce jugement le 24 mai 2024.

Prétentions de M. [K]

Dans ses conclusions du 12 août 2024, M. [K] a demandé à la cour d’infirmer le jugement, de reconnaître l’accident comme un accident du travail, d’ordonner sa prise en charge par la caisse, et de condamner celle-ci à lui verser 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il a soutenu que l’accident s’était produit peu après la fin de son travail et a contesté les horaires de travail fournis par son employeur.

Réponse de la caisse

La caisse a demandé la confirmation du jugement et a réclamé le paiement de 800 euros par M. [K] sur le fondement de l’article 700. Elle a souligné que l’accident s’était produit 1h30 après la fin de son travail, rendant le trajet incompatible avec un accident de travail. Elle a également mis en avant des contradictions dans les horaires de travail de M. [K].

Décision de la cour

La cour a statué que l’accident survenu à 12h30, peu après la fin du poste de M. [K], constituait un accident de trajet au sens de l’article L. 411-2 du code de la sécurité sociale. Elle a ordonné à la caisse de prendre en charge l’accident et a infirmé le jugement du tribunal. La caisse a été condamnée aux dépens et à verser 2 000 euros à M. [K] pour ses frais non compris dans les dépens.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions pour qu’un accident soit reconnu comme un accident de trajet selon le code de la sécurité sociale ?

L’article L. 411-2 du code de la sécurité sociale précise les conditions dans lesquelles un accident est considéré comme un accident du travail, notamment lors d’un trajet entre le domicile et le lieu de travail.

Cet article stipule que :

« Est considéré comme accident du travail, lorsque la victime ou ses ayants droit apportent la preuve que l’ensemble des conditions ci-après sont remplies ou lorsque l’enquête permet à la caisse de disposer sur ce point de présomptions suffisantes, l’accident survenu à un travailleur, pendant le trajet d’aller et de retour, entre :

1°) la résidence principale, une résidence secondaire présentant un caractère de stabilité ou tout autre lieu où le travailleur se rend de façon habituelle pour des motifs d’ordre familial et le lieu du travail.

Ce trajet peut ne pas être le plus direct lorsque le détour effectué est rendu nécessaire dans le cadre d’un covoiturage régulier ;

2°) le lieu du travail et le restaurant, la cantine ou, d’une manière plus générale, le lieu où le travailleur prend habituellement ses repas, et dans la mesure où le parcours n’a pas été interrompu ou détourné pour un motif dicté par l’intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante ou indépendant de l’emploi. »

Ainsi, pour qu’un accident soit reconnu comme un accident de trajet, il faut prouver que l’accident s’est produit pendant le trajet entre le domicile et le lieu de travail, sans interruption pour des motifs personnels.

Comment la cour a-t-elle évalué la preuve des horaires de travail du salarié au moment de l’accident ?

La cour a examiné les éléments de preuve fournis par le salarié concernant ses horaires de travail le jour de l’accident.

Il a été établi que la société avait déclaré que les horaires du salarié étaient de 8h15 à 11 heures. Cependant, le salarié a produit une attestation de son second employeur, indiquant qu’il travaillait pour elle du lundi au samedi de 6 h à 9 h.

Cela a permis de remettre en question les horaires déclarés par la société [3].

La cour a noté que :

« Il en résulte que l’accident de la circulation qui est survenu à 12h30, dans un temps proche de la fin du poste, dans une rue située à proximité du domicile de l’assuré, soit sur le trajet lieu de travail/domicile, constitue un accident de trajet au sens de l’article sus-visé. »

Ainsi, la cour a conclu que les horaires de travail du salarié étaient compatibles avec l’accident survenu, ce qui a conduit à la reconnaissance de l’accident comme un accident de trajet.

Quelles sont les conséquences de la décision de la cour sur la prise en charge de l’accident par la caisse ?

La décision de la cour a eu pour conséquence directe que la caisse primaire d’assurance maladie a été condamnée à prendre en charge l’accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

La cour a infirmé le jugement précédent et a ordonné à la caisse de :

« Prendre en charge au titre de la législation sur les risques professionnels. »

Cela signifie que le salarié, en tant que victime, a désormais droit à la prise en charge de ses frais médicaux et autres indemnités liées à l’accident, conformément aux dispositions de la législation sur les accidents du travail.

De plus, la caisse a été condamnée aux dépens, ce qui implique qu’elle doit également couvrir les frais de justice engagés par le salarié dans le cadre de cette procédure.

La cour a également décidé de condamner la caisse à verser au salarié une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, qui permet d’indemniser les frais non compris dans les dépens.

N° RG 24/01861 – N° Portalis DBV2-V-B7I-JVIT

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 31 JANVIER 2025

DÉCISION DÉFÉRÉE :

23/00057

Jugement du POLE SOCIAL DU TJ DE ROUEN du 19 Avril 2024

APPELANT :

Monsieur [S] [K]

[Adresse 8]

[Adresse 1]

[Localité 2]

comparant en personne,

assisté de Me Emmanuelle MARCHAND de la SCP BAROFFIO – MARCHAND – GIUDICELLI, SCP D’AVOCATS, avocat au barreau de l’EURE

INTIMEE :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE RED

[Adresse 1]

[Localité 7]

représentée par Me Vincent BOURDON, avocat au barreau de ROUEN

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 03 Décembre 2024 sans opposition des parties devant Madame ROGER-MINNE, Conseillère, magistrat chargé d’instruire l’affaire.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame BIDEAULT, Présidente

Madame ROGER-MINNE, Conseillère

Madame POUGET, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme WERNER, Greffière

DEBATS :

A l’audience publique du 03 décembre 2024, où l’affaire a été mise en délibéré au 31 janvier 2025

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 31 Janvier 2025, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame BIDEAULT, Présidente et par Mme WERNER, Greffière.

* * *

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Le 20 octobre 2021, la société [3] a adressé à la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7] [Localité 5] [Localité 4] (la caisse) une déclaration d’accident de trajet survenu le 20 septembre 2021, concernant son salarié M. [S] [K], agent de propreté, rédigée comme suit :

‘Activité de la victime lors de l’accident : Monsieur serait en train de rentrer chez lui en voiture après sa vacation.

Nature de l’accident : Monsieur aurait eu un accident de voiture. L’accident aurait eu lieu 1h30 après la fin de sa vacation.

Objet dont le contact a blessé la victime : Un véhicule l’aurait percuté par l’arrière.’

Le certificat médical initial faisait état de douleurs cervico-dorso-lombaires intenses, d’un syndrome rachidien et d’un syndrome de stress post-traumatique.

La caisse, par décision du 21 janvier 2022, a refusé de prendre en charge cet accident au titre de la législation sur les risques professionnels.

M. [K] a saisi la commission de recours amiable d’une contestation qui a été rejetée le 15 décembre 2022.

Il a poursuivi sa contestation devant le pôle social du tribunal judiciaire de Rouen.

Par jugement du 19 avril 2024, le tribunal a :

– déclaré recevable le recours de M. [K],

– débouté celui-ci de sa demande de reconnaissance implicite de l’accident du 20 septembre 2021,

– débouté celui-ci de sa demande de prise en charge de son accident,

– condamné celui-ci aux dépens.

M. [K] a relevé appel du jugement le 24 mai 2024.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par conclusions remises le 12 août 2024, soutenues oralement à l’audience, M. [K] demande à la cour de :

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a débouté de sa demande de prise en charge de son accident, condamné aux dépens et débouté de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

– juger que l’accident dont il a été victime le 20 septembre 2021 constitue un accident du travail,

– ordonner sa prise en charge au titre de la législation sur les risques professionnels,

– condamner la caisse aux dépens et à lui verser la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir que le 20 septembre 2021, il a cessé de travailler à 12h, a rangé ses outils et s’est changé ; qu’il a pris place dans son véhicule vers 12h15 et a été percuté à un kilomètre de son domicile ; qu’il a informé son employeur très rapidement. Il soutient que ses horaires de travail variaient de manière régulière et que le jour de l’accident, il travaillait de 9h30 à 12h10. Il considère que les horaires indiqués concordent avec l’horaire et le lieu de l’accident, de sorte qu’il ne peut être retenu l’existence d’une contradiction entre les horaires mentionnés dans son questionnaire et ceux mentionnés dans son courrier de contestation, qui comportent un écart de 10/15 minutes.

Par conclusions remises le 27 novembre 2024, soutenues oralement à l’audience, la caisse demande à la cour de :

– confirmer le jugement,

– condamner M. [K] au paiement de la somme de 800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle expose que l’employeur lui a adressé un courrier de réserves indiquant que l’accident de voiture avait eu lieu 1h30 après la fin du travail du salarié, qui était intervenue à 11h et que M. [K] avait plusieurs employeurs ; que celui-ci a indiqué dans son questionnaire qu’il commençait à 9h30 et finissait à 12h10 le lundi ; qu’ainsi l’accident est survenu à une heure incompatible avec un prétendu trajet travail-domicile. Elle invoque l’existence d’une contradiction flagrante sur les horaires de travail du 20 décembre 2021 et l’absence d’éléments confortant les dires de l’assuré sur une fin de travail à 12h ou 12h10, de sorte qu’il ne peut bénéficier de la prise en charge d’un accident de trajet au sens de l’article L. 411-2 du code de la sécurité sociale.

Il est renvoyé aux conclusions des parties pour l’exposé détaillé de leurs moyens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1/ Sur l’existence d’un accident de trajet

En application de l’article L. 411-2 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, lorsque la victime ou ses ayants droit apportent la preuve que l’ensemble des conditions ci-après sont remplies ou lorsque l’enquête permet à la caisse de disposer sur ce point de présomptions suffisantes, l’accident survenu à un travailleur, pendant le trajet d’aller et de retour, entre :

1°) la résidence principale, une résidence secondaire présentant un caractère de stabilité ou tout autre lieu où le travailleur se rend de façon habituelle pour des motifs d’ordre familial et le lieu du travail. Ce trajet peut ne pas être le plus direct lorsque le détour effectué est rendu nécessaire dans le cadre d’un covoiturage régulier ;

2°) le lieu du travail et le restaurant, la cantine ou, d’une manière plus générale, le lieu où le travailleur prend habituellement ses repas, et dans la mesure où le parcours n’a pas été interrompu ou détourné pour un motif dicté par l’intérêt personnel et étranger aux nécessités essentielles de la vie courante ou indépendant de l’emploi.

Il ressort de la déclaration d’accident du travail, du questionnaire renseigné par l’employeur et du courrier de réserves que la société a déclaré que les horaires du salarié, le jour de l’accident, étaient de 8h15 à 11 heures.

Toutefois, ce-dernier produit une attestation de son second employeur, la société [6], qui indique qu’il travaille pour elle du lundi au samedi de 6 h à 9 h.

Ainsi, M. [K] ne pouvait commencer à travailler chez [3] le lundi dès 8h15, ce qui conforte ses allégations suivant lesquelles ses horaires étaient de 9h ou 9h30 jusque 12h ou 12h10, selon que l’on tienne compte ou non du temps nécessaire pour se changer.

Il en résulte que l’accident de la circulation qui est survenu à 12h30, dans un temps proche de la fin du poste, dans une rue située à proximité du domicile de l’assuré, soit sur le trajet lieu de travail/domicile, constitue un accident de trajet au sens de l’article sus-visé.

La caisse est en conséquence condamnée à le prendre en charge et le jugement est infirmé.

2/ Sur les frais du procès

La caisse qui perd le procès est condamnée aux dépens et déboutée de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Il est équitable qu’elle indemnise M. [K] de ses frais non compris dans les dépens en lui versant la somme de 2 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, contradictoirement, en dernier ressort :

Infirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Rouen du 19 avril 2024 ;

Statuant à nouveau :

Dit que M. [S] [K] a été victime d’un accident de trajet le 20 septembre 2021 ;

Ordonne à la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 7] [Localité 5] [Localité 4] de le prendre en charge au titre de la législation sur les risques professionnels ;

Condamne la caisse aux dépens de première instance et d’appel ;

La condamne à payer à M. [K] la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

La déboute de sa demande fondée sur les mêmes dispositions.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


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