L’Essentiel : M. [W] [T] a interjeté appel d’un jugement du conseil de prud’hommes de Cherbourg, qui s’est déclaré incompétent au profit du juge administratif. La notification de ce jugement, effectuée le 13 avril 2024, a laissé les dépens à la charge de M. [T]. Le 26 juin 2024, il a demandé à la cour d’appel de Caen d’assigner à jour fixe. Le 5 juillet, la présidente a requis des explications sur l’irrecevabilité de l’appel. Finalement, la cour a déclaré l’appel recevable, soulignant que l’absence de mentions sur le défenseur syndical dans la notification avait empêché le délai de recours de courir.
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Contexte de l’AffaireM. [W] [T] a interjeté appel le 21 juin 2024 d’un jugement rendu le 3 avril 2024 par le conseil de prud’hommes de Cherbourg, qui s’est déclaré incompétent au profit du juge administratif. Ce jugement a également laissé les dépens à la charge de M. [T]. Notification du JugementLa notification du jugement a été effectuée par lettre recommandée avec avis de réception, signée le 13 avril 2024. Demande d’Assignation à Jour FixeLe 26 juin 2024, M. [T] a soumis une requête à la Première Présidente de la cour d’appel de Caen pour être autorisé à assigner à jour fixe, en se référant aux articles 84 et 85 du code de procédure civile. Réponse de la Présidente de la ChambreLe 5 juillet 2024, la présidente de la chambre a demandé des explications à l’appelant concernant l’irrecevabilité de son appel. Constitution de la Société IntiméeLa société Compagnie des Fromages et Richesmonts s’est constituée partie le 22 juillet 2024. Conclusions d’IncidentLe 28 août 2024, M. [T] a déposé des conclusions d’incident, demandant que son appel soit déclaré recevable et que la procédure soit jointe à celle enregistrée sous le numéro RG 24/1151. Il a soutenu que la notification du jugement n’avait pas fait courir le délai de recours en raison de l’absence de mentions relatives aux modalités de représentation du défenseur syndical. Arguments de l’IntiméeL’intimée a fait valoir que la jurisprudence citée par M. [T] n’était pas applicable, car l’appelant n’avait pas été assisté par un défenseur syndical en première instance. Interprétation JuridiqueL’article L1453-4 du code du travail stipule que le défenseur syndical exerce des fonctions d’assistance ou de représentation devant les conseils de prud’hommes et les cours d’appel. Selon le conseil constitutionnel, le défenseur syndical choisi en première instance peut continuer à défendre devant la cour d’appel compétente. Conséquences de la NotificationPour que le délai de recours soit effectif, l’acte de notification doit indiquer le défenseur syndical qui peut représenter l’appelant. En l’espèce, l’acte de notification ne précisait pas le périmètre territorial des défenseurs syndicaux, ce qui a eu pour effet de ne pas faire courir le délai d’appel. Décision FinaleLa cour a déclaré l’appel formé le 21 juin 2024 recevable, sans qu’il y ait lieu à jonction avec l’affaire enregistrée sous le numéro RG 24/1151, cette dernière ayant été déclarée caduque. Les dépens de l’incident suivront la procédure au fond. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article L1453-4 du code du travail concernant le rôle du défenseur syndical ?L’article L1453-4 du code du travail stipule que « un défenseur syndical exerce des fonctions d’assistance ou de représentation devant les conseils de prud’hommes et les cours d’appel en matière prud’hommale. Le défenseur syndical intervient sur le périmètre d’une région administrative ». Cet article souligne l’importance du défenseur syndical dans le cadre des litiges prud’homaux, en précisant qu’il peut représenter les parties devant les juridictions compétentes. Il est essentiel que l’appelant soit informé des modalités de représentation par un défenseur syndical, notamment lors de la notification d’un jugement. En effet, la jurisprudence a établi que l’acte de notification doit indiquer clairement les droits de l’appelant concernant le choix d’un défenseur syndical, qu’il s’agisse de celui qui l’a assisté en première instance ou d’un autre défenseur territorialement compétent. Quelles sont les conséquences d’une notification de jugement incomplète sur le délai de recours ?La jurisprudence indique qu’un acte de notification d’un jugement de conseil de prud’hommes doit contenir des mentions précises pour faire courir le délai de recours. En l’espèce, l’absence de mention concernant le périmètre territorial des défenseurs syndicaux dans l’acte de notification a pour effet de ne pas faire courir le délai d’appel. Cela signifie que, même si l’erreur dans la notification n’a pas causé de préjudice à l’appelant, elle constitue une sanction autonome qui empêche le délai de recours de commencer à courir. Ainsi, dans le cas présent, la notification du jugement n’ayant pas respecté ces exigences, l’appel formé par M. [T] le 21 juin 2024 est déclaré recevable, car le délai d’appel n’a pas été déclenché. Quelles sont les implications de la décision de ne pas joindre l’affaire avec celle sous le numéro RG 24/1151 ?La décision de ne pas joindre l’affaire avec celle enrôlée sous le numéro RG 24/1151 repose sur le fait que la déclaration d’appel dans cette procédure a été déclarée caduque. Cela signifie que, pour des raisons procédurales, l’affaire ne peut pas être combinée avec une autre, ce qui pourrait avoir des implications sur la gestion des dossiers et le traitement des affaires par le tribunal. La jonction d’affaires est souvent envisagée pour des raisons d’économie de temps et de ressources, mais dans ce cas précis, la caducité de la déclaration d’appel empêche cette possibilité. Ainsi, chaque affaire continuera d’être traitée séparément, ce qui peut prolonger le processus judiciaire pour les parties concernées. Comment la jurisprudence influence-t-elle la recevabilité des appels en matière prud’homale ?La jurisprudence joue un rôle crucial dans la détermination de la recevabilité des appels en matière prud’homale, notamment en ce qui concerne les exigences de notification. L’arrêt rendu par la cour de cassation le 8 septembre 2021 a établi que la notification d’un jugement doit contenir des informations précises sur les modalités de représentation par un défenseur syndical. Cette décision a des conséquences directes sur la manière dont les jugements sont notifiés et sur les droits des appelants. En l’absence de ces mentions, comme dans le cas présent, le délai de recours ne court pas, rendant ainsi l’appel recevable même s’il est formé après la date limite habituelle. Cela souligne l’importance d’une notification conforme pour garantir le respect des droits des parties et la bonne administration de la justice. |
1ère chambre sociale
O R D O N N A N C E
RG N° 24/01540 – N° Portalis DBVC-V-B7I-HOEJ
Affaire :
Monsieur [W] [U], [N] [T]
Représenté par Me Emmanuel LEBAR, avocat au barreau de COUTANCES – N° du dossier E0005QRO
APPELANT
C/
S.C.A. COMPAGNIE DES FROMAGES ET RICHESMONTS
Représentée par Me Jacques DUBOURG, avocat au barreau de CAEN
INTIMEE
Le SEIZE JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,
Nous, L. DELAHAYE, Présidente de la première chambre sociale de la Cour d’Appel de CAEN, assistée de Mme GOULARD, greffier,
Ce jugement a été notifié par lettre recommandée avec avis de réception signé le 13 avril 2024.
Par requête reçue le 26 juin 2024, il a sollicité Mme la Première Présidente de la cour d’appel de Caen afin d’être au visa des articles 84 et 85 du code de procédure civile autorisé à assigner à jour fixe.
Le 5 juillet 2024, la présidente de la chambre a demandé à l’appelant de s’expliquer sur l’irrecevabilité de son appel.
La société Compagnie des Fromages et Richesmonts s’est constituée le 22 juillet 2024.
Par conclusions d’incident remises au greffe le 28 août 2024, M. [T] demande à ce que son appel soit déclaré recevable et que la procédure soit jointe avec celle enrôlée sous le numéro RG 24/1151. Il soutient que la notification n’a pas fait courir le délai de recours en ce qu’elle ne contient pas les mentions relatives aux modalités de représentation du défenseur syndical conformément à l’arrêt rendu le 8 septembre 2021 par la cour de cassation.
L’intimée fait valoir oralement que la jurisprudence invoquée n’est pas applicable dès lors que l’appelant n’était pas assisté en première instance par un défenseur syndical.
L’article L1453-4 du code du travail dispose que « un défenseur syndical exerce des fonctions d’assistance ou de représentation devant les conseils de prud’hommes et les cours d’appel en matière prud’hommale.
(‘.)
Le défenseur syndical intervient sur le périmètre d’une région administrative ».
Selon l’interprétation faite par le conseil constitutionnel (décision QPC n°2019-831 du 12 mars 2020), le défenseur syndical choisi en première instance peut continuer à défendre devant la cour d’appel compétente.
L’acte de notification d’un jugement de conseil de prud’hommes rendu en premier ressort doit ainsi pour faire courir le délai de recours indiquer que le défenseur syndical que peut constituer l’appelant est soit celui qui l’a assisté en première instance soit un défenseur syndical territorialement compétent pour exercer ses fonctions devant la cour d’appel concernée.
En l’occurrence, l’acte de notification du jugement ne précise pas le périmètre territorial des défenseurs syndicaux.
L’absence d’une mention ou une mention erronée dans l’acte de notification a pour effet de ne pas faire courir le délai d’appel, peu important que cette erreur n’ait causé aucun grief à l’appelant s’agissant d’une sanction autonome distincte de la nullité de la notification.
Dès lors, la notification du jugement n’ayant pas fait courir le délai d’appel, la tardiveté de l’appel formé le 21 juin 2024 ne peut être opposée à l’appelant.
Son appel est donc recevable.
Il n’y a pas lieu à jonction de l’affaire avec celle enrôlée sous le numéro RG 24/1151, la déclaration d’appel dans cette procédure ayant été déclarée caduque.
Dit l’appel formé le 21 juin 2024 recevable ;
Dit n’y avoir lieu à jonction ;
Dit que les dépens de l’incident suivront la procédure au fond.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
E. GOULARD L. DELAHAYE
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