Qualité de signature et régularité des mesures de soins psychiatriques : enjeux et implications.

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Qualité de signature et régularité des mesures de soins psychiatriques : enjeux et implications.

L’Essentiel : Le 10 décembre 2024, le juge des libertés a ordonné la mainlevée de l’hospitalisation complète de Monsieur [R] [V]. Cependant, le 20 décembre, le préfet de la Haute-Vienne a contesté cette décision, arguant que le secrétaire général avait la qualité pour signer l’arrêté d’admission en soins psychiatriques. L’audience à la cour d’appel de Limoges a vu le ministère public demander l’infirmation de l’ordonnance, tandis que le conseil de M. [V] plaidait pour sa confirmation. Finalement, la cour a infirmé l’ordonnance du 10 décembre, déclarant que la poursuite de l’hospitalisation était devenue sans objet.

Ordonnance du juge des libertés

Le 10 décembre 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Limoges a rendu une ordonnance qui a donné mainlevée de l’hospitalisation complète de Monsieur [R] [V]. Cette décision a été prise après avoir examiné la situation de M. [V], qui avait été hospitalisé à la suite d’un certificat médical établi par un psychiatre.

Recours du préfet

Le 20 décembre 2024, le préfet de la Haute-Vienne a formé un recours contre cette décision, soutenant que le secrétaire général du préfet, [G] [N], avait la qualité pour signer l’arrêté d’admission en soins psychiatriques de M. [V]. Le préfet a demandé l’annulation de l’ordonnance du 10 décembre et la prolongation de l’hospitalisation complète de M. [V].

Audience et conclusions

L’audience s’est tenue publiquement à la cour d’appel de Limoges, où M. [V] et son conseil ont été entendus. Le ministère public a conclu à l’infirmation de l’ordonnance, tandis que le conseil de M. [V] a plaidé pour sa confirmation, arguant que le moyen tiré du défaut de pouvoir de [G] [N] n’était pas soulevé d’office par le juge.

Recevabilité de l’appel

L’appel a été jugé recevable, ayant été introduit dans les formes et délais légaux. La cour a examiné la régularité de la procédure et a constaté que les arrêtés conférant des délégations de signature étaient valides, ce qui a conduit à l’infirmation de l’ordonnance du 10 décembre 2024.

Situation actuelle de M. [V]

Suite à la mainlevée de l’hospitalisation, M. [V] a été admis au centre hospitalier [7] à la demande d’un tiers le 11 décembre 2024. La mesure d’hospitalisation complète a été prolongée par une décision du juge des libertés le 19 décembre 2024, qui n’a pas fait l’objet de recours.

Décision finale

La cour a déclaré que la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète de M. [R] [V] était devenue sans objet, en raison de la superposition des mesures d’hospitalisation. L’ordonnance a été infirmée en ce qui concerne la qualité de [G] [N] pour signer l’arrêté d’admission et la mainlevée de l’hospitalisation complète. Les dépens ont été laissés à la charge du Trésor public.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité de l’appel formé par le préfet de la Haute-Vienne ?

L’appel formé par le préfet de la Haute-Vienne est déclaré recevable car il a été introduit dans les formes et délais légaux.

Selon l’article R. 411-1 du Code de la justice administrative, « les recours en appel doivent être formés dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision ».

Dans cette affaire, le préfet a formé son recours le 20 décembre 2024, soit dans le délai imparti après l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du 10 décembre 2024.

Ainsi, la cour d’appel a confirmé la recevabilité de l’appel, respectant les exigences procédurales établies par la loi.

La régularité de la procédure d’admission en soins psychiatriques est-elle respectée ?

La cour a jugé que la procédure d’admission en soins psychiatriques était régulière.

L’article L. 3211-12-11 du Code de la santé publique stipule que « le préfet peut prendre des mesures d’admission en soins psychiatriques sans consentement ».

De plus, l’article R. 3211-29 précise que « le préfet peut déléguer ses pouvoirs à un secrétaire général ».

Dans cette affaire, l’arrêté du 28 août 2024 a conféré à [B] [Y], sous-préfet, la délégation de signer des décisions en matière de soins psychiatriques.

L’arrêté du 27 octobre 2024 a également attribué à [G] [N] la délégation de signer en cas d’absence du préfet.

Ainsi, la cour a conclu que la procédure suivie était conforme aux dispositions légales, et a infirmé l’ordonnance du 10 décembre 2024 sur ce point.

Quelles sont les conséquences de la mainlevée de l’hospitalisation complète de M. [R] [V] ?

La mainlevée de l’hospitalisation complète de M. [R] [V] a été déclarée sans objet par la cour.

En effet, après la décision du juge des libertés et de la détention du 10 décembre 2024, M. [V] a été admis au centre hospitalier [7] le 11 décembre 2024 à la demande d’un tiers.

L’article L. 3211-2 du Code de la santé publique précise que « les soins psychiatriques peuvent être poursuivis dans un cadre approprié ».

La cour a noté qu’une décision du 19 décembre 2024 avait autorisé la poursuite de l’hospitalisation complète de M. [V], sans qu’aucun recours n’ait été formé contre cette décision.

Ainsi, la cour a estimé qu’il n’était pas pertinent de maintenir une mesure d’hospitalisation qui était devenue sans objet, et a donc déclaré la poursuite de l’hospitalisation complète comme telle.

Quelles sont les implications de la décision de la cour d’appel sur les droits de M. [R] [V] ?

La décision de la cour d’appel a des implications significatives sur les droits de M. [R] [V].

L’article 5 de la Convention européenne des droits de l’homme garantit le droit à la liberté et à la sécurité, stipulant que « toute personne a droit à la liberté et à la sécurité ».

En infirmant l’ordonnance du juge des libertés, la cour a réaffirmé que les procédures d’admission en soins psychiatriques doivent respecter les droits des individus concernés.

La cour a également souligné que M. [V] avait le droit de contester les décisions le concernant, et que toute mesure d’hospitalisation doit être justifiée et proportionnée.

Ainsi, la décision de la cour d’appel a permis de protéger les droits de M. [R] [V] tout en assurant que les procédures administratives soient conformes aux exigences légales.

N° 1

DOSSIER: N° RG 24/00098 – N° Portalis DBV6-V-B7I-BIUOB

COUR D’APPEL DE LIMOGES

Ordonnance du 02 janvier 2025 à 14 heures 30

MONSIEUR LE PREFET DE LA HAUTE-VIENNE

Madame Magalie ARQUIE, Conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence de la cour d’appel de Limoges, spécialement déléguée par le Premier Président dans l’affaire citée en référence, assistée de Madame Jeanne Raïssa POUSSIN, greffier, a rendu l’ordonnance suivante par mise à disposition au greffe,

ENTRE :

MONSIEUR LE PREFET DU DEPARTEMENT DE LA HAUTE-VIENNE, demeurant [Adresse 1] – [Localité 5]

Appelant d’une ordonnance rendue le 10 décembre 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Limoges à l’égard de M. [R] [V]

ET :

Monsieur [R] [V]

né le 9 juillet 1979 à de nationalité Française,

demeurant [Adresse 3], UDAF de la Haute-Vienne, [Localité 6]

bénéficiant d’une mesure de curatelle exercée par l’UDAF de la Haute-Vienne

Actuellement hospitalisé au centre hospitalier [7] à [Localité 8],

comparant, assisté de Me Pauline CASTILLE, avocat au barreau de LIMOGES

– MONSIEUR LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER [7], à [Localité 8],

non comparant

– MADAME LA PROCUREURE GENERALE, demeurant [Adresse 2] – [Localité 4], pris en la personne de Monsieur Thierry GRIFFET, avocat général,

non comparant mais ayant déposé des réquisitions écrites

– UDAF de la Haute-Vienne, demeurant [Adresse 3], [Localité 4],

en qualité de curateur de M. [R] [V],

non comparant

INTIMES

L’affaire a été appelée à l’audience publique du 2 janvier 2025 à 11 heures sous la présidence de Madame Magalie ARQUIE, Conseillère chargée du secrétariat général de la première présidence de la cour d’appel de Limoges, assistée de Jeanne Raïssa POUSSIN, greffier.

Vu l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Limoges du 10 décembre 2024 donnant mainlevée de l’hospitalisation complète de Monsieur [R] [V],

Vu le recours formé à l’encontre de cette décision par Monsieur le préfet du département de la Haute-Vienne, le 20 décembre 2025 à 14h47,

Vu l’avis du procureur général en date du 31 décembre 2024,

Il a été donné connaissance des réquisitions du ministère public au conseil de M. [V].

Après exposé de l’affaire, et après avoir entendu [R] [V] et son conseil à l’audience qui s’est tenue publiquement à la cour d’appel de Limoges, la décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe le 2 janvier 2025 à 14h30.

M. [R] [V] a fait l’objet de soins psychiatriques au centre hospitalier [7] à la suite du certificat médical établi le 29 Novembre 2024 par le docteur [T]; [C], psychiatre exerçant à [Localité 8].

Le maire de la commune de [Localité 8] a pris une décision provisoire, mesure confirmée par arrêté du préfet de la Haute-Vienne portant admission en soins psychiatriques sans consentement au cnetre hospitalier [7] le 30 novembre 2024, confirmé le 2 décembre 2024.

Dans le cadre du contrôle prévu par la loi n°2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Limoges a, par ordonnance du 10 décembre 2024, dit que [G] [N] n’avait pas qualité pour signer l’arrêt d’admission en soins psychiatriques d'[R] [V] du 30 novembre 2024 et donné mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète de M. [V] au centre hospitalier [7] de [Localité 8] à effet 24h après la notification de la décision à l’intéressé.

Le préfet de la Haute-Vienne a formé un recours à l’encontre de cette décision le 20 décembre 2024 et communiqué des pièces en soutenant que [G] [N], secrétaire général du préfet de la Haute-Vienne, avait bien qualité pour signer l’arrêté d’admission en soins psychiatrique de M. [R] [V], et sollicite l’annulation de l’ordonnance du 10 décembre 2024 et la prolongation de la mesure d’hospitalisation complète de M. [R] [V].

M. [V], son conseil, l’établissement, et le représentant de l’Etat dans le département de la Haute-Vienne ont été convoqués en vue de l’audience.

Les services de la préfecture de la Haute-Vienne et qu’ils ne seraient pas présents ni représentés à l’audience. Ils ont fait connaître que l’appel était maintenu.

A l’audience, M. [V] a indiqué se soumettre aux soins qui lui sont prodigués actuellement.

Maître CASTILLE conclut à la confirmation de l’ordonnance entreprise. Elle fait valoir que contrairement à ce qui est indiqué par le préfet de la Haute-Vienne, le moyen tiré du défaut de pouvoir de [G] [N] n’est pas relevé d’office par le juge, dès lors qu’elle l’a soulevée devant le juge des libertés et de la détention. Elle soutient encore qu’à la date du débat, les pièces produites ne permettaient pas d’affirmer que [G] [N] se voyait conférer le pouvoir de signer l’arrêté d’admission en soins psychiatriques de M. [V].

Sur question, Me CASTILLE n’a pas formé d’observations sur les pièces communiquées par la préfecture de la Haute-Vienne à l’occasion de la requête en appel.

Le ministère public a conclu à l’infirmation de l’ordonnance suivant les termes développés par l’autorité préfectorale.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

– Sur la recevabilité de l’appel :

L’appel, introduit dans les forme et délai légaux, est recevable.

– Sur la régularité de la procédure:

Il ressort notamment de l’arrêté du 28 août 2024 régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial le 29 août 2024 que [B] [Y], sous-préfet, directeur de cabinet, reçoit délégation de signature à l’effet de signer toute mesure de police administrative visant à maintenir l’ordre public et notamment les décisions en matière de soins psychiatriques sur décision du représentant de l’Etat prises en application du code de la santé publique.

En outre, l’arrêté du 27 octobre 2024 régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial le 28 octobre 2024 confère à [G] [N] secrétaire général de la préfecture, l’ensemble des attributions dévolues au préfet, en cas d’absence ou d’empêchement de ce dernier.

Il convient de relever par ailleurs que [G] [N] se voit attribuer par ce dernier texte délégation de signature pour les saisines du juge des libertés et de la détention en application des articles L 3211-12-11 et R 3211-29 du code de la santé publique.

La procédure est donc régulière et il convient d’infirmer sur ce point l’ordonnance du 10 décembre 2024 frappée d’appel.

– Sur le fond:

Il convient de rappeler que dans les suites de la mainlevée effective de la mesure d’hospitalisation de M [R] [V] en exécution de la décision du juge des libertés et de la détention du 10 décembre 2024, son curateur, sur saisine de l’UDAF de la Haute-Vienne, M. [V] a été admis au centre hospitalier [7] à la demande d’un tiers le 11 décembre 2024 et qu’actuellement, la mesure d’hospitalisation complète de M. [V] se poursuit dans ce nouveau cadre, une décision du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Limoges du 19 décembre 2024 n’ayant fait l’objet d’aucun recours dans le délai imparti, ayant autorisé la poursuite de l’hospitalisation complète de M. [V].

Compte tenu de ces éléments, et afin d’éviter une superposition de mesures d’hospitalisation qui ne ferait pas sens, il sera retenu que la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète objet du recours est devenue sans objet.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire,

DÉCLARONS recevable le recours introduit par M. Le préfet de la Haute-Vienne à l’encontre de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Limoges du 10 décembre 2024;

INFIRMONS l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Limoges du 10 décembre 2024 en ce qu’elle a dit que [G] [N] n’avait pas qualité pour signer l’arrêté d’admission en soins psychiatriques sous contrainte pour [R] [V] du 20 novembre 2024 et en ce qu’elle a donné mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète de M. [R] [V];

Au fond, DISONS que la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète de M. [R] [V] est devenue sans objet ;

LAISSONS les dépens à la charge du Trésor public.

DISONS que la présente ordonnance sera notifiée à :

– M. [R] [V],

– L’UDAF de la Haute-Vienne,

– Me Pauline CASTILLE,

– Mme la Procureure Générale,

– M. le Préfet de la Haute-Vienne,

– M. le directeur du centre hospitalier [7].

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Jeanne Raïssa POUSSIN Magalie ARQUIE


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