L’Essentiel : Monsieur [R] [V] a obtenu un jugement le 30 mai 2023 autorisant l’expulsion de Monsieur [O] [D] et de Madame [H] [W]. Un commandement de quitter les lieux a été signifié le 27 septembre 2023. En réponse, les occupants ont assigné Monsieur [R] [V] le 14 novembre 2023, demandant l’annulation du commandement et une indemnisation de 2.000 euros. Lors de l’audience du 7 mars 2024, le juge a statué sur la validité du commandement, mais a suspendu ses effets en raison d’une ordonnance de référé du 12 décembre 2023, condamnant Monsieur [R] [V] aux dépens.
|
Contexte de l’affaireMonsieur [R] [V] a obtenu un jugement le 30 mai 2023 autorisant l’expulsion de Monsieur [O] [D] et de Madame [H] [W] de leur domicile. Suite à ce jugement, un commandement de quitter les lieux a été signifié aux occupants le 27 septembre 2023. Demande des occupantsEn réponse, Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] ont assigné Monsieur [R] [V] le 14 novembre 2023, demandant l’annulation du commandement de quitter les lieux, ainsi qu’une indemnisation de 2.000 euros. Ils ont également sollicité un sursis à statuer en attendant la décision de la Cour d’appel de Saint-Denis concernant l’exécution provisoire du jugement du 30 mai 2023. Réouverture des débatsL’affaire a été réexaminée lors d’une audience le 7 mars 2024, où le titre exécutoire a été transmis. Les parties ont ensuite présenté leurs conclusions lors d’une audience le 19 septembre 2024. Arguments des occupantsMonsieur [O] [D] et Madame [H] [W] soutiennent que Monsieur [R] [V] n’avait pas la qualité pour agir en tant que nu-propriétaire et que le commandement de quitter les lieux devait être annulé. Ils ont également mentionné l’ordonnance de référé du 12 décembre 2023, qui a suspendu l’exécution provisoire du jugement initial. Arguments de Monsieur [R] [V]De son côté, Monsieur [R] [V] a demandé le rejet des demandes des occupants, affirmant que le commandement de quitter les lieux était valide et qu’il avait signé le bail en tant que propriétaire. Il a contesté la légitimité de la demande de suspension des effets du commandement, arguant que l’ordonnance de référé n’avait pas été notifiée. Décision du juge de l’exécutionLe juge a statué sur la validité du commandement de quitter les lieux, concluant que les arguments des occupants concernant l’absence de qualité à agir de Monsieur [R] [V] étaient infondés. Cependant, il a également reconnu l’effet opposable de l’ordonnance de référé du 12 décembre 2023, suspendant ainsi les effets du commandement de quitter les lieux. Conséquences de la décisionEn conséquence, le juge a suspendu le commandement de quitter les lieux délivré le 27 septembre 2023 et a condamné Monsieur [R] [V] aux dépens, tout en rappelant que le jugement bénéficiait de l’exécution provisoire de plein droit. |
Q/R juridiques soulevées :
Sur la validité du commandement de quitter les lieuxLe commandement de quitter les lieux délivré par Monsieur [R] [V] doit respecter certaines conditions de validité, conformément aux dispositions de l’article R 412-1 du code des procédures civiles d’exécution. Cet article stipule que : “Lorsque l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, le commandement d’avoir à libérer les locaux contient, à peine de nullité, en plus des mentions prévues à l’article R. 411-1, la reproduction des articles L. 412-1 à L. 412-6.” De plus, l’article R 411-1 précise que : “Le commandement d’avoir à libérer les locaux prend la forme d’un acte d’huissier de justice signifié à la personne expulsée et contient à peine de nullité : Dans le cas présent, Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] n’ont pas soulevé de moyens de nullité visés par ces articles. Concernant l’absence de qualité à agir de Monsieur [R] [V], il est important de noter que ce dernier a signé le bail d’habitation avec les demandeurs, ce qui établit sa qualité de propriétaire. Ainsi, le contrat de bail est valide et la procédure d’expulsion qui en découle est également légitime, rendant le moyen de nullité non fondé. Sur l’arrêt de l’exécution provisoire par ordonnance de référéL’article 514-3 du code de procédure civile stipule que : “En cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.” L’article 514-6 précise que : “Lorsqu’il est saisi en application des articles 514-3 et 514-4, le premier président statue en référé, par une décision non susceptible de pourvoi.” Il est établi que le premier président de la Cour d’appel de Saint-Denis a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement rendu le 30 mai 2023. Cette ordonnance, bien qu’elle n’ait pas été notifiée, a force de chose jugée conformément à l’article 500 du code de procédure civile, car elle n’est pas susceptible d’aucun recours suspensif d’exécution. Ainsi, cette ordonnance est opposable à Monsieur [R] [V], ce qui entraîne la suspension des effets du commandement de quitter les lieux délivré le 27 septembre 2023. Sur les demandes accessoiresLes demandes accessoires formulées par les parties doivent être examinées à la lumière des décisions précédentes. Étant donné que Monsieur [R] [V] a été débouté de ses demandes, il est logique que les dépens soient à sa charge, conformément aux principes généraux du droit procédural. Le juge a donc décidé de condamner Monsieur [R] [V] aux dépens, ce qui est en accord avec l’article 700 du code de procédure civile, qui permet de condamner une partie à payer les frais d’avocat de l’autre partie. En conclusion, le juge de l’exécution a suspendu les effets du commandement de quitter les lieux, débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, et a condamné Monsieur [R] [V] aux dépens. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
MINUTE N°
1ERE CHAMBRE
AFFAIRE N° RG 23/03827 – N° Portalis DB3Z-W-B7H-GQXC
NAC : 5AD
JUGEMENT DU JUGE DE L’EXÉCUTION
le 21 novembre 2024
DEMANDEURS
Monsieur [O] [D]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représenté par Me Julien LAURENT, substitué par Me Dévaguy MARDAYE, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [H] [W]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Julien LAURENT, substitué par Me Dévaguy MARDAYE, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DÉFENDEUR
Monsieur [R] [V]
[Adresse 1]
[Localité 4]
représenté par Me Laurent BENOITON, substitué par Me Philippe BARRE, avocats au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
*****************
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
LORS DES DÉBATS
Le juge de l’exécution : Cécile VIGNAT, Vice-présidente
Greffier : Dévi POUNIANDY
Audience publique du 19 septembre 2024
LORS DU DÉLIBÉRÉ
Jugement contradictoire du 21 novembre 2024, en premier ressort.
Prononcé par mise à disposition par Madame Cécile VIGNAT, Vice-présidente, assistée de Mme Dévi POUNIANDY, Greffière
Copie exécutoire délivrée le 21 novembre 2024 à Me Laurent BENOITON, Me Julien LAURENT
Expédition délivrée le 21 novembre 2024 aux parties
Se prévalant d’un jugement contradictoire rendu le 30 mai 2023 par le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint [G] ayant notamment autorisé l’expulsion de Monsieur [O] [D] et de Madame [H] [W] de la maison située [Adresse 2] [Localité 3] à défaut de départ volontaire, Monsieur [R] [V] leur a fait signifier un commandement de quitter les lieux le 27 septembre 2023.
Par assignation en date du 14 novembre 2023, Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] ont fait citer Monsieur [R] [V] à l’audience du 7 décembre 2023 aux fins de voir :
– annuler le commandement de quitter les lieux délivré le 27 septembre 2023 à la demande de Monsieur [R] [V] faute pour ce dernier d’avoir qualité à agir
– condamner Monsieur [R] [V] à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
A titre subsidiaire : ordonner le sursis à statuer dans l’attente de la décision du premier président de la Cour d’appel de Saint-Denis saisi aux fins d’arrêter l’exécution provisoire ordonnée par le jugement rendu par défaut par le tribunal judiciaire de Saint-Denis en date du 30 mai 2023 et de l’arrêt de la Cour d’appel de Saint-Denis.
A titre infiniment subsidiaire : accorder à Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] un délai de 12 mois à compter de la décision à intervenir pour quitter les lieux.
L’affaire a fait l’objet d’une réouverture des débats à l’audience du 7 mars 2024 pour transmission du titre exécutoire, à savoir le jugement du 30 mai 2023 du juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Saint [G].
Après renvois, l’affaire a été évoquée à l’audience du 19 septembre 2024.
Les parties, représentées par leur conseil respectif, reprennent l’entier bénéfice de leurs dernières conclusions.
Aux termes de leurs conclusions n°2, Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] demandent au juge de l’exécution de :
A titre principal :
– annuler le commandement de quitter les lieux délivré le 27 septembre 2023 à la demande de Monsieur [R] [V] faute pour ce dernier d’avoir qualité à agir
– condamner Monsieur [R] [V] à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les dépens.
A titre subsidiaire :
– constater que par ordonnance de référé en date du 12 décembre 2023, le premier président de la Cour d’appel de Saint Denis a arrêté l’exécution provisoire dont était assorti le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection
– suspendre les effets du commandement de quitter les lieux délivré le 27 septembre 2023
A titre infiniment subsidiaire : accorder à Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] un délai de 12 mois à compter de la décision à intervenir pour quitter les lieux.
Au soutien de leurs demandes, Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] estiment que Monsieur [R] [V] n’avait aucune qualité pour signer le bail en sa qualité de nu-propriétaire, les usufruitiers qui ont seuls qualité étant Monsieur [G] et Madame [P] [V]. De même, c’est le nu-propriétaire qui a fait délivrer le commandement de quitter les lieux alors qu’il n’avait pas qualité pour le faire, de sorte que le commandement de quitter les lieux doit être annulé faute de qualité à agir de Monsieur [R] [V]. Les demandeurs soulignent que l’arrêt de l’exécution provisoire prononcé par le premier président de la Cour d’appel de Saint Denis a pour conséquence de suspendre les effets du commandement de quitter les lieux. Ils s’estiment parfaitement légitimes à solliciter très subsidiairement des délais pour quitter les lieux, évoquant la précarité de leur situation avec encore un enfant à charge.
Aux termes de ses conclusions n°2, Monsieur [R] [V] demande au juge de l’exécution de :
– débouter Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] de leur demande de nullité du commandement de quitter les lieux
– déclarer irrecevable la demande de Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] formulée au titre du sursis à statuer et subsidiairement les en débouter car sans objet
– débouter Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] de leurs demandes de délais supplémentaires
A titre reconventionnel :
– condamner solidairement Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] à verser à Monsieur [R] [V] la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
Au soutien de sa défense, Monsieur [R] [V] fait valoir que le commandement de quitter les lieux est parfaitement valide, précisant que sa qualité n’a jamais été remise en cause dans la mesure où c’est lui qui a signé le bail d’habitation le 1er mars 2015 et c’est en exécution du jugement qu’il a pu faire délivrer le commandement de quitter les lieux. La demande de suspension des effets du commandement de quitter les lieux ne peut par ailleurs se fonder sur l’ordonnance du premier président de la Cour d’appel de Saint Denis suspendant les effets de l’exécution provisoire en l’absence de signification de cette ordonnance qui n’est donc pas dans l’ordonnancement juridique. Enfin, s’agissant de la demande de délais supplémentaire, Monsieur [R] [V] souligne que Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] ne démontrent pas en quoi leur relogement ne pourrait avoir lieu dans des conditions normales et ne justifient pas des recherches entreprises.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, il convient de se reporter à leurs écritures et observations orales, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
L’affaire a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe à la date du 21 novembre 2024.
Sur la validité du commandement de quitter les lieux
Selon les dispositions de l’article R 412-1 du code des procédures civiles d’exécution, “Lorsque l’expulsion porte sur un lieu habité par la personne expulsée ou par tout occupant de son chef, le commandement d’avoir à libérer les locaux contient, à peine de nullité, en plus des mentions prévues à l’article R. 411-1, la reproduction des articles L. 412-1 à L. 412-6.
Par dérogation au précédent alinéa, les articles L. 412-3 à L. 412-6 ne sont pas reproduits pour l’application de l’article L. 412-7.
Les articles L. 412-1 à L. 412-6 ne sont pas reproduits pour l’application de l’article L. 412-8.”
Selon l’article R 411-1 du même code “Le commandement d’avoir à libérer les locaux prend la forme d’un acte d’huissier de justice signifié à la personne expulsée et contient à peine de nullité :
1° L’indication du titre exécutoire en vertu duquel l’expulsion est poursuivie ;
2° La désignation de la juridiction devant laquelle peuvent être portées les demandes de délais et toutes contestations relatives à l’exécution des opérations d’expulsion ;
3° L’indication de la date à partir de laquelle les locaux devront être libérés ;
4° L’avertissement qu’à compter de cette date il peut être procédé à l’expulsion forcée du débiteur ainsi qu’à celle de tout occupant de son chef.
Ce commandement peut être délivré dans l’acte de signification du jugement.”
Force est de constater que Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] ne font valoir dans le cadre du présent litige aucun moyen de nullité visé par les articles précités.
Concernant l’absence de qualité à agir de Monsieur [R] [V] au motif qu’il ne serait que le nu-propriétaire, ce moyen, par ailleurs non établi, est totalement inopérant dans la mesure où Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] ont bien signé le bail d’habitation avec ce dernier en sa qualité de propriétaire le 1er mars 2015 ce qu’ils n’ont d’ailleurs jamais contesté devant le premier juge.
En tout état de cause, Monsieur [R] [V] avait toute les apparences d’un propriétaire de sorte que le contrat de bail est parfaitement valable de même que la procédure d’expulsion qui en est la conséquence lorsque la résiliation du bail aux torts exclusifs des locataires est prononcée ce qui résulte du jugement en date du 30 mai 2023.
Il convient de rejeter ce moyen de nullité non fondé.
Sur l’arrêt de l’exécution provisoire par ordonnance de référé du premier président en date du 12 décembre 2023
Selon l’article 514-3 du code de procédure civile, “En cas d’appel, le premier président peut être saisi afin d’arrêter l’exécution provisoire de la décision lorsqu’il existe un moyen sérieux d’annulation ou de réformation et que l’exécution risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.”
L’article 514-6 du même code précise que “Lorsqu’il est saisi en application des articles 514-3 et 514-4, le premier président statue en référé, par une décision non susceptible de pourvoi.”
Si conformément à l’article 502 du code de procédure civile, une décision de justice n’acquiert force exécutoire qu’après avoir été régulièrement notifiée, cette notification n’a d’intérêt que pour faire courir les voies de recours.
En l’espèce, il est établi que par ordonnance de référé du 12 décembre 2023, le premier président de la Cour d’appel de Saint-Denis a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire attachée au jugement rendu le 30 mai 2023 par le juge des contentieux de la protection.
Contrairement à ce que soutient Monsieur [R] [V] et quand bien même elle n’a pas été notifiée, cette ordonnance de référé rendue par le premier président a force de chose jugée conformément à l’article 500 du code de procédure civile, dans la mesure où elle n’est susceptible d’aucun recours suspensif d’exécution.
Cette ordonnance de référé du12 décembre 2023 est en conséquence parfaitement opposable à Monsieur [R] [V].
En conséquence, il convient de suspendre les effets du commandement de quitter les lieux délivré à Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] le 27 septembre 2023.
Sur les demandes accessoires
Les dépens seront à la charge de Monsieur [R] [V], partie succombante.
Le juge de l’exécution statuant par jugement contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en premier ressort,
Suspend les effets du commandement de quitter les lieux délivré à Monsieur [O] [D] et Madame [H] [W] le 27 septembre 2023 ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;
Condamne Monsieur [R] [V] aux dépens ;
Rappelle que le présent jugement bénéficie de l’exécution provisoire de plein droit,
LA GREFFIERE LE JUGE DE L’EXECUTION
Laisser un commentaire