Publicité et Alcool : La Cour d’appel de Paris limite les pratiques intrusives des alcooliers sur internet

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Publicité et Alcool : La Cour d’appel de Paris limite les pratiques intrusives des alcooliers sur internet

L’Essentiel : La Cour d’appel de Paris a récemment statué sur la publicité pour les boissons alcooliques, en particulier celle de la société Ricard. Selon l’article L. 3323-2 du Code de la santé publique, la publicité ne doit pas être intrusive ni destinée principalement à la jeunesse. Dans ce cas, les applications mobiles de Ricard, qui incitaient à partager des recettes sur Facebook, ont été jugées intrusives. Bien que ces applications n’aient pas été considérées comme s’adressant principalement aux jeunes, elles ont violé les règles en ne mentionnant pas les dangers de l’abus d’alcool, ce qui constitue une infraction légale.

L’usage de l’internet et des réseaux sociaux par les alcooliers pourrait connaître un frein important avec cette nouvelle décision de la Cour d’appel de Paris.
Selon l’article L. 3323-2 du Code de la santé publique (CSP), la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques, autorisée exclusivement sur les services de communication en ligne, ne doit pas, par son caractère, sa présentation ou son objet, apparaître comme principalement destiné à la jeunesse, ni revêtir un caractère intrusif.
Dans l’affaire soumise, le caractère intrusif (donc illégal) de la publicité de la société Ricard a été retenu à propos de la diffusion des applications mobiles « Ricard Mix Codes » et « Ricard 3 D ». Ces applications mobiles permettent notamment de visionner une bouteille de Ricard, en relief. Cette présentation, attractive, utilisant une forme d’image très en vogue, visant à promouvoir cette boisson alcoolique, et non accompagnée d‘une mention sanitaire, est contraire à la loi. Information importante, les applications mobiles sont bien des services de communication en ligne dès lors qu’elles nécessitent, au moins au stade de leur téléchargement, d’une connexion internet.
L’article 1er de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique précise que l’ »on entend par communication au public en ligne toute transmission, sur demande individuelle, de données numériques n’ayant pas un caractère de correspondance privée, par un procédé de communication électronique permettant un échange réciproque d’informations entre l’émetteur et le récepteur ».
Conformément à l’article L. 3323-4 du CSP, la publicité autorisée pour les boissons alcooliques est limitée à l’indication du degré volumique d’alcool, de l’origine, de la dénomination, de la composition du produit, du nom et de l’adresse du fabricant, des agents et des dépositaires ainsi que du mode d’élaboration, des modalités de vente et du mode de consommation du produit (..). Cette publicité peut comporter des références objectives relatives à la couleur et aux caractéristiques olfactives et gustatives du produit.
Lorsqu’elle est autorisée, la publicité en faveur de l’alcool doit être impérativement accompagnée d’un message à caractère sanitaire précisant que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé. La diffusion de toute publicité en faveur de boissons alcooliques en violation des dispositions légales constitue un trouble manifestement illicite, dont le juge des référés peut ordonner la cessation. A ce titre, le juge n’est pas lié par l’avis de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité.
L’article L. 3323-2 du Code de la santé publique autorise la propagande ou la publicité, directe ou indirecte, en faveur des boissons alcooliques dont la fabrication et la vente ne sont pas interdites et notamment autorisées sur les services de communication en ligne, à l’exclusion de ceux qui, par leur caractère, leur présentation ou leur objet, apparaissent comme principalement destinés à la jeunesse, ainsi que ceux édités par des associations, sociétés et fédérations sportives ou des ligues professionnelles au sens du code du sport, cela, sous réserve que la propagande ou la publicité ne soit ni intrusive ni interstitielle.
Une application mobile de cocktails développée par la société Ricard, interagissant avec Facebook a été considérée comme un mode de publicité intrusif. En effet, une fois l’application téléchargée par l’utilisateur, ce dernier est en droit de partager ou non des informations sur les recettes qu’il a téléchargées avec d’autres internautes. Par ailleurs, si ce dernier souhaite « partager avec son réseau d’amis Facebook » une recette, en cliquant sur le bouton « partager sur mon mur », apparaît sur son profil un message type (« J’ai découvert … vous aussi récupérez les Ricard Mix avec l’application Ricard Mix Codes. Disponible sur l’Appstore. »).
L’accord de l’utilisateur d’accès à ses données personnelles et l’autorisation donnée à la société Ricard, de publication sur Facebook en son nom, ne constituent pas un accord pour recevoir ou diffuser des messages au contenu dont il n’a pas préalablement connaissance et qu’il ne maîtrise pas. Les juges ont considéré que ces messages, à caractère intempestif, ne sauraient être assimilés à des correspondances privées.
Le texte de ces messages, adressés par la société Ricard sur le mur de l’utilisateur, consultables par ses « amis », et qui incite clairement à télécharger l’application Ricard Mix Codes, apparaît de manière inopinée et systématique, revêtant ainsi un caractère intrusif. Ce message, présenté sur un réseau social de convivialité est, en outre, clairement de nature à inciter le consommateur à absorber le cocktail « découvert » par un « ami » Facebook et, étant suivi de l’indication « Tout sur la société Ricard – Société, marques, saga, métiers…www.ricard.fr, tout autre alcool commercialisé par cette société ».
Diffusé sans la mention sanitaire légale, ce message contrevient également aux prescriptions de l’article L. 3323-4 du Code de la santé publique.
Toutefois les applications mobiles de la société Ricard n’ont pas été jugées comme s’adressant principalement à la jeunesse (ce qui aurait été sanctionné). Celles-ci étant interfacées avec Facebook, l’ANPAA, à l’origine des poursuites contre la société Ricard, soutenait que le réseau social était principalement utilisé par la jeunesse. Or, les conclusions d’une étude produite par la société Ricard établissaient que les possesseurs d’IPhone étaient constitués à 64% d’hommes âgés de 25 à 44 ans et qu’en France, au moins 58 % des utilisateurs de Facebook sont âgés de 25 ans ou plus. De plus, la société Ricard avait mis en place un filtre d’âge, pour l’accès à l’application en cause.

Mots clés : Publicite – Alcool

Thème : Publicite – Alcool

A propos de cette jurisprudence : juridiction :  Cour d’appel de Paris | Date : 23 mai 2012 | Pays : France

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la décision de la Cour d’appel de Paris concernant la publicité des alcooliers ?

La Cour d’appel de Paris a rendu une décision qui pourrait restreindre l’usage de l’internet et des réseaux sociaux par les alcooliers, en particulier en ce qui concerne la société Ricard.

Cette décision s’appuie sur l’article L. 3323-2 du Code de la santé publique, qui stipule que la publicité pour les boissons alcooliques ne doit pas être principalement destinée à la jeunesse ni être intrusive.

Dans le cas de Ricard, la publicité via ses applications mobiles a été jugée intrusive, car elle ne respectait pas ces critères.

Quelles sont les conditions légales pour la publicité des boissons alcooliques ?

Selon l’article L. 3323-4 du Code de la santé publique, la publicité pour les boissons alcooliques est strictement encadrée. Elle doit se limiter à des informations objectives telles que le degré d’alcool, l’origine, la dénomination, et d’autres caractéristiques du produit.

De plus, toute publicité autorisée doit impérativement inclure un message sanitaire avertissant que l’abus d’alcool est dangereux pour la santé.

La diffusion de publicités qui ne respectent pas ces conditions est considérée comme un trouble manifestement illicite, ce qui permet au juge des référés d’ordonner leur cessation.

Pourquoi la publicité de Ricard a-t-elle été jugée intrusive ?

La publicité de Ricard a été jugée intrusive en raison de la manière dont ses applications mobiles interagissaient avec les utilisateurs de Facebook.

Après le téléchargement de l’application, les utilisateurs pouvaient partager des recettes de cocktails, ce qui entraînait l’apparition de messages sur leur profil Facebook sans qu’ils aient un contrôle total sur leur contenu.

Ces messages, qui incitaient à télécharger l’application, ont été considérés comme intempestifs et non conformes aux règles de correspondance privée, ce qui a conduit à leur qualification d’intrusifs.

Comment la société Ricard a-t-elle tenté de se défendre contre ces accusations ?

Ricard a soutenu que ses applications mobiles ne s’adressaient pas principalement à la jeunesse, en présentant des données démographiques sur les utilisateurs d’iPhone et de Facebook.

Une étude a montré que 64 % des possesseurs d’iPhone étaient des hommes âgés de 25 à 44 ans, et que 58 % des utilisateurs de Facebook en France avaient 25 ans ou plus.

De plus, Ricard avait mis en place un filtre d’âge pour l’accès à ses applications, ce qui visait à respecter la législation en vigueur.

Quelles sont les implications de cette décision pour les alcooliers ?

Cette décision de la Cour d’appel de Paris pourrait avoir des conséquences significatives pour les alcooliers, en limitant leur capacité à utiliser les plateformes numériques pour promouvoir leurs produits.

Les restrictions sur la publicité intrusive et la nécessité d’inclure des messages sanitaires pourraient rendre plus difficile la création de campagnes marketing efficaces.

Les alcooliers devront donc adapter leurs stratégies de communication en ligne pour se conformer aux exigences légales, ce qui pourrait influencer leur visibilité et leur attractivité auprès des consommateurs.


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