L’Essentiel : La protection d’un slogan publicitaire peut être assurée par l’action en parasitisme. Par exemple, la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS a été condamnée pour avoir utilisé le slogan « Gros Volumes Petits Prix », initialement exploité par la société CORA, entraînant des dommages de 100.000 euros. Le parasitisme se définit comme le fait de profiter indûment de la notoriété d’un concurrent, sans nécessiter un risque de confusion entre les produits. La société CORA a démontré son investissement dans ce slogan depuis 1989, justifiant ainsi sa spécificité et son association avec son image de marque auprès des consommateurs.
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La protection juridique d’un slogan publicitaire peut être acquise par le biais de l’action en parasitisme. Les juges ont ainsi condamné la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS pour actes de concurrence parasitaire en raison de la reprise du slogan «Gros Volumes Petits Prix» exploité par la société CORA (100.000 euros de dommages et intérêts). Conditions du parasitisme publicitaireLe parasitisme consiste, pour un opérateur économique, à se placer dans le sillage d’un autre en profitant indûment de sa notoriété ou de ses investissements ; le parasitisme résulte d’un ensemble d’éléments appréhendés dans leur globalité, indépendamment de tout risque de confusion ; ainsi, pour que soit retenu le grief de concurrence parasitaire, il n’est pas nécessaire d’établir un risque de confusion entre les produits concernés, cet élément étant une circonstance aggravante des agissements parasitaires, mais non un élément constitutif de ceux-ci, seul le trouble commercial provoqué par le comportement incriminé devant être pris en compte. Toutefois, le principe est, et demeure, celui de la libre concurrence de sorte que seul un comportement fautif caractérisé par des pratiques déloyales circonstanciées est susceptible de fonder une demande en réparation. Exploitation du slogan publicitaireLa société CORA justifie depuis 1989 utiliser de façon constante le slogan «Gros Volumes = Petits Prix» pour promouvoir des opérations ponctuelles publicitaires renouvelées chaque année ; elle justifie avoir déposé une marque sur ce slogan, traduisant ainsi sa volonté pérenne d’en protéger la spécificité au regard de ses opérations promotionnelles et avoir assuré une veille concurrentielle afin de mettre fin aux éventuelles imitations de ses concurrents (elle atteste l’avoir défendu à l’égard de Leclerc, Citroën et Auchan). Le concept d’originalité n’est pas un élément constitutif de la pratique de parasitisme, contrairement au droit des marques, car il suffit de démontrer la reproduction servile ou quasi-servile de données ou d’informations qui caractérisent l’entreprise par la notoriété et la spécificité qui s’y attachent, elles-mêmes résultant d’un travail intellectuel et d’un investissement propres. S’agissant de la spécificité du slogan en cause, si les mots utilisés ‘ gros’ ‘volumes’ ‘petits’ et ‘ prix’ sont banals et si l’utilisation de formules sans emploi de verbes est courante en matière publicitaire, il convient toutefois d’étudier le slogan dans sa globalité, sans en décomposer chacun des éléments ; les deux groupes de mots mis sur un pied d’équivalence ‘gros volumes’ et ‘petits prix’ ne font pas partie du langage courant et leur association, en l’espèce, confère au slogan un caractère propre. Présentée sous forme de mise en équivalence de deux groupes de mots de trois syllabes chacun, en apparence antithétiques, cette formule lapidaire et percutante résulte des efforts de promotion de la société CORA. Celle-ci ne prétend pas avoir le monopole du concept d’économie d’échelle mais d’une formule spécifique en traduisant l’impact dans la grande distribution. La société démontre par ailleurs la constance graphique du slogan juxtaposant l’expression «Gros volumes » sur l’expression «Petits Prix », l’emploi d’une calligraphie quasi-identique et l’utilisation majoritaire des couleurs jaune, rouge, blanc et bleu sur plusieurs décennies ; il en résulte la persistance d’une identité visuelle, les couleurs et caractères ayant peu évolué dans le temps. Ce slogan est aussi identifié comme spécifique à la société CORA par les consommateurs et par les opérateurs de la grande distribution. Preuve par Google SuggestCe slogan est bien connu du grand public ; la société CORA démontre que lorsqu’on saisit les termes « gros v » et « gros volumes petits prix », la fonction « Google Suggest » propose spontanément des propositions de recherche au premier desquelles « gros volumes Cora » ; ce résultat est le fruit d’une fonctionnalité du moteur de recherche qui sélectionne et propose des suggestions aux internautes, selon les recherches antérieures effectuées par ceux-ci, en fonction d’un algorithme qui met en évidence la popularité des termes de recherche; il témoigne ainsi de l’association du slogan à la société CORA dans l’esprit des consommateurs. La société démontre ainsi avoir investi depuis les années 1985 de façon constante dans la création et la promotion de ce slogan sur catalogues et par voie de publicités radiodiffusées ; si les frais de publication et de diffusion par voie radiophonique engagés de 1997 à 2011 à hauteur de 17 millions d’euros ne concernent pas exclusivement les frais de conception du slogan mais l’ensemble des frais des opérations publicitaires attachées à ce slogan, il convient de noter que les deux sont indissociables et que les dépenses publicitaires ont contribué au lancement du slogan et à sa réputation pas sa répétition inlassable sur toutes les opérations promotionnelles éponymes de la société depuis 25 ans. Copie servile de slogan publicitaireLa formule syntaxique utilisée par la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS, « Gros Volumes Petits prix » est identique ; la circonstance que le signe « + » ait disparu ne change rien à l’analyse, la juxtaposition de deux groupes de mots équivalant sur le plan syntaxique à un signe égal ; le graphisme et les couleurs utilisées sont quasi-identiques ; les couleurs des têtières de certaines pages intérieures du catalogue reprenant le slogan composées de lettres capitales blanches sur fond rouge, sont également identiques. La société CARREFOUR ne justifie pas avoir subi un impératif technique, commercial ou grammatical, l’obligeant à plagier la société CORA ; sa reprise du slogan ne peut être fortuite, de nombreuses façons d’exprimer la même idée pouvant être conçues par elle ; cette reprise lui a ainsi permis de réaliser des économies injustifiées en termes de création et de développement du slogan ; la preuve de sa volonté délibérée de se placer dans le sillage de la société CORA est donc rapportée ; ce faisant, la société CARREFOUR HYPERMARCHÉS a commis des actes de concurrence parasitaire. |
Q/R juridiques soulevées :
Qu’est-ce que le parasitisme publicitaire ?Le parasitisme publicitaire est une pratique où un opérateur économique tire profit de la notoriété ou des investissements d’un autre, sans y avoir droit. Cette notion repose sur l’idée que le comportement d’un concurrent peut causer un trouble commercial, même sans risque de confusion entre les produits. Pour qu’un acte soit qualifié de parasitaire, il doit être caractérisé par des pratiques déloyales, ce qui implique que la libre concurrence doit être respectée. Ainsi, le parasitisme se fonde sur l’exploitation indue de la réputation d’une autre entreprise, ce qui peut entraîner des actions en justice pour obtenir réparation. Comment la société CORA a-t-elle protégé son slogan ?La société CORA a utilisé le slogan « Gros Volumes = Petits Prix » de manière constante depuis 1989, en le déposant comme marque. Cette démarche montre sa volonté de protéger la spécificité de son slogan face à la concurrence. CORA a également mis en place une veille concurrentielle pour contrer les imitations, ayant déjà défendu son slogan contre d’autres entreprises comme Leclerc et Auchan. L’originalité n’est pas un critère essentiel pour établir le parasitisme, mais la reproduction servile du slogan, qui est le fruit d’un investissement intellectuel, est déterminante. Quels éléments caractérisent le slogan de CORA ?Le slogan de CORA, bien que composé de mots courants, acquiert une spécificité par son association unique des termes « gros volumes » et « petits prix ». Cette association, bien que simple, ne fait pas partie du langage courant et confère au slogan un caractère distinctif. La présentation graphique du slogan, avec une calligraphie quasi-identique et l’utilisation de couleurs spécifiques, contribue également à son identité visuelle. Les consommateurs et les acteurs de la grande distribution reconnaissent ce slogan comme étant propre à la société CORA, renforçant ainsi sa notoriété. Comment la société CORA a-t-elle prouvé la notoriété de son slogan ?CORA a utilisé des outils modernes comme Google Suggest pour démontrer la notoriété de son slogan. Lorsqu’on recherche « gros v » ou « gros volumes petits prix », les suggestions incluent « gros volumes Cora », ce qui montre l’association dans l’esprit des consommateurs. Cette fonctionnalité de Google repose sur un algorithme qui met en avant les termes populaires, témoignant ainsi de la reconnaissance du slogan par le public. CORA a également investi massivement dans la promotion de ce slogan, avec des dépenses publicitaires significatives, renforçant sa réputation au fil des années. Quelles sont les similitudes entre les slogans de CORA et CARREFOUR ?Le slogan utilisé par CARREFOUR, « Gros Volumes Petits Prix », présente des similitudes frappantes avec celui de CORA. La structure syntaxique est identique, et même l’absence du signe « = » ne change pas l’analyse, car les deux groupes de mots sont équivalents. Les éléments graphiques et les couleurs utilisés par CARREFOUR sont également très proches de ceux de CORA, ce qui renforce l’idée de copie. CARREFOUR n’a pas justifié cette reprise par un impératif technique ou commercial, ce qui suggère une volonté délibérée de profiter de la notoriété de CORA. Quelles conséquences a eu la décision judiciaire contre CARREFOUR ?La décision judiciaire a condamné CARREFOUR à verser 100.000 euros de dommages et intérêts à CORA pour actes de concurrence parasitaire. Cette décision souligne l’importance de protéger les slogans publicitaires et de respecter la propriété intellectuelle des entreprises. Elle établit également un précédent en matière de parasitisme, affirmant que la simple imitation d’un slogan peut entraîner des conséquences financières significatives. Cela incite les entreprises à être plus vigilantes dans la création de leurs slogans et à éviter toute forme de plagiat pour ne pas nuire à la concurrence loyale. |
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