Protection des marques de champagne

·

·

Protection des marques de champagne

L’Essentiel : La protection des marques de champagne soulève des questions complexes, notamment en matière de risque de confusion pour le consommateur. Dans une affaire récente, une marque communautaire a été contestée pour l’utilisation d’éléments typiques du champagne, tels que la forme champenoise et la couleur dorée. Les juges ont estimé que ces caractéristiques étaient usuelles et ne créaient pas de confusion avec la marque MOET & CHANDON. De plus, l’utilisation du terme « ICE » a été jugée descriptive, renforçant l’idée que le risque de confusion était faible. Ainsi, l’inspiration marketing d’une marque célèbre ne constitue pas en soi un acte de parasitisme.

Fond commun graphique du Champagne

En l’espèce, une marque communautaire a été déposée pour désigner en classe 33 les « vins mousseux, vins de Champagne ». La question était de savoir si la reprise de ces différents éléments propres au champagne pouvait créer pour le consommateur d’attention moyenne un risque de confusion sur l’origine des produits avec ceux de la marque MOET & CHANDON.

A cet égard, il a été jugé que les éléments suivants  sont usuels pour la présentation des bouteilles de Champagne : l’usage de la forme champenoise, la présence d’une coiffe, d’une collerette avec un écusson et l’usage de la couleur dorée qui sont des caractéristiques récurrentes des bouteilles de vin de Champagne, toutes marques confondues.

De même, s’agissant de la reprise du terme « ICE », associé à des boissons avec ou sans alcool dont la vocation est d’être servies fraîches, ce terme est plus descriptif que distinctif et sera perçu par le consommateur de tels produits davantage comme une modalité de consommation que comme un élément distinctif de la marque.  L’impact de ces éléments visuels dans l’évaluation du risque de confusion a été qualifié de faible.

Similitude des signes en présence

Aux termes de l’article 9 § 1 du règlement (CE) n°207/2009 du 26 février 2009, « la marque communautaire confère à son titulaire un droit exclusif. Le titulaire est habilité à interdire à tout tiers, en l’absence de son consentement, de faire usage dans la vie des affaires : (..) b) d’un signe pour lequel, en raison de son identité ou de sa similitude avec la marque communautaire et en raison de l’identité ou de la similitude des produits ou services couverts par la marque communautaire et le signe, il existe un risque de confusion dans l’esprit du public ; le risque de confusion comprend le risque d’association entre le signe et la marque ».

Afin d’apprécier la demande en contrefaçon, il y a lieu de rechercher si, au regard d’une appréciation des degrés de similitude entre les signes et entre les produits et/ou services désignés, il existe un risque de confusion comprenant un risque d’association dans l’esprit du public concerné, ce risque de confusion devant être apprécié au regard de l’impression d’ensemble produite par chacun des signes et/ou produits en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et du consommateur normalement attentif et raisonnablement averti, lequel en l’espèce doit être assimilé à un consommateur de boissons alcoolisées.

La recherche de l’impression d’ensemble produite sur le consommateur n’exonère cependant pas le juge saisi d’une action en contrefaçon, de procéder à un examen préalable et successivement de chacun des différents éléments qui compose le signe ou le produit.

Afin de déterminer si les produits sont similaires, il y a lieu de tenir compte de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre les produits. Ces facteurs incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire.

Absence de concurrence déloyale

Par une motivation audacieuse, les juge ont également considéré qu’en tout état de cause, le fait de vouloir s’inspirer d’une communication marketing d’une marque célèbre de vins de Champagne n’est pas en soi suffisant pour caractériser des agissements de parasitisme alors qu’il est établi que la société poursuivie justifie d’un budget marketing propre pour la promotion de ses vins mousseux d’environ 1, 5 million euros sur trois ans entre 2013 et 2015.

La société poursuivante ne peut davantage se prévaloir d’une imitation du conditionnement du produit pour caractériser des agissements de concurrence déloyale alors que ces faits ne sont pas distincts des faits de contrefaçon d’une marque tridimensionnelle et qu’il a été retenu  que le risque de confusion n’était pas caractérisé de telle sorte qu’aucune faute au sens de l’article 1382 du code civil n’a été jugée constituée.

Télécharger la décision

Q/R juridiques soulevées :

Quel était l’objet de la marque communautaire déposée ?

La marque communautaire a été déposée pour désigner, en classe 33, les « vins mousseux, vins de Champagne ». Cela signifie que la marque vise à protéger des produits spécifiques liés à l’industrie du champagne, qui est une catégorie de vins mousseux.

Cette question soulève des enjeux importants concernant la protection des marques et la possibilité de confusion pour le consommateur. En effet, la législation sur les marques vise à éviter que des produits similaires ne soient confondus par le public, ce qui pourrait nuire à la réputation des marques établies.

Quels éléments sont considérés comme usuels pour la présentation des bouteilles de Champagne ?

Il a été jugé que plusieurs éléments sont usuels dans la présentation des bouteilles de Champagne. Parmi ceux-ci, on trouve l’usage de la forme champenoise, la présence d’une coiffe, d’une collerette avec un écusson, ainsi que l’utilisation de la couleur dorée.

Ces caractéristiques sont récurrentes et communes à toutes les marques de vin de Champagne. Cela signifie que ces éléments ne sont pas suffisamment distinctifs pour créer un risque de confusion dans l’esprit du consommateur, car ils sont largement utilisés dans l’industrie.

Comment le terme « ICE » est-il perçu par les consommateurs ?

Le terme « ICE », lorsqu’il est associé à des boissons destinées à être servies fraîches, est considéré comme plus descriptif que distinctif. Les consommateurs le perçoivent davantage comme une modalité de consommation plutôt que comme un élément distinctif d’une marque.

Cela signifie que l’impact de ce terme dans l’évaluation du risque de confusion est faible. En d’autres termes, les consommateurs ne l’associent pas nécessairement à une marque spécifique, ce qui réduit le risque de confusion avec d’autres produits.

Quels critères sont utilisés pour évaluer le risque de confusion entre les marques ?

Pour évaluer le risque de confusion, il est nécessaire d’examiner plusieurs critères. Cela inclut l’identité ou la similitude entre les signes, ainsi que l’identité ou la similitude des produits ou services couverts par la marque communautaire.

L’évaluation doit se faire en tenant compte de l’impression d’ensemble produite par chaque signe et produit, ainsi que de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce. Cela implique de considérer le consommateur normalement attentif et raisonnablement averti, qui, dans ce contexte, est assimilé à un consommateur de boissons alcoolisées.

Quelles conclusions ont été tirées concernant la concurrence déloyale ?

Les juges ont conclu que le fait de s’inspirer d’une communication marketing d’une marque célèbre de vins de Champagne n’est pas suffisant pour caractériser des agissements de parasitisme. En effet, la société poursuivie a démontré qu’elle disposait d’un budget marketing propre pour promouvoir ses vins mousseux, d’environ 1,5 million d’euros sur trois ans.

De plus, la société poursuivante ne peut pas se prévaloir d’une imitation du conditionnement du produit pour établir des agissements de concurrence déloyale. Les faits de contrefaçon d’une marque tridimensionnelle ne sont pas distincts des allégations de concurrence déloyale, et le risque de confusion n’a pas été jugé caractérisé.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon