L’Essentiel : Les annuaires de prestataires bénéficient d’une protection par le droit des bases de données, mais son efficacité est limitée. En cas de similitudes entre deux annuaires, la contrefaçon n’est pas toujours reconnue. Par exemple, un éditeur a vu son annuaire de centres de montage de pneus copié, mais la preuve d’extraction illicite n’a pas été jugée suffisante. Pour revendiquer la protection, l’éditeur doit démontrer des investissements substantiels, soutenus par des attestations précises. La notion de producteur de base de données implique que l’initiative et le risque des investissements doivent être clairement établis pour bénéficier de cette protection.
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Protection faillibleLes annuaires de prestataires sont éligibles à la protection par le droit des bases de données mais en pratique le dispositif légal ne semble pas avoir la portée espérée. Même en cas de similitudes constatées entre 2 annuaires, la contrefaçon ou la concurrence déloyale ne sera pas nécessairement retenue. Preuve de l’extraction illiciteEn l’espèce, l’éditeur d’un site avait référencé des milliers de centres de montage de pneus en France. Un site concurrent a repris une partie de la base de données ainsi constituée. Comme souvent, la preuve de l’extraction illicite a pu être apportée en raison de plusieurs similitudes et notamment de coquilles / fautes. Des exploitants de garages référencés en ligne avaient également affirmé n’avoir pas donné les informations figurant sur le site poursuivi. La reprise certaine de quelques coordonnées n’a pas emporté la conviction des juges face aux 5000 garages référencés en ligne. En d’autres termes, l’extraction d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle de la base de données de la société n’était pas établie. Prouver l’investissement substantielA noter que pour pouvoir revendiquer la protection du droit sui generis des bases de données, l’éditeur doit établir la réalité de ses investissements substantiels. A ce titre, des attestations extrêmement précises et circonstanciées de ses salariés (et qui respectent les formes prescrites par l’article 202 du code de procédure civile) peuvent suffire. En effet, indépendamment du lien de subordination avec l’employeur à l’origine de la création de la base de données, le travail d’un salarié (notamment sur une base de données) est un fait juridique dont la preuve peut être apportée par tous moyens. D’autres modes de preuve pourront être utilisés et notamment des attestations comptables ou du commissaire aux comptes qui pourront fournir des chiffres précis (ou pourcentage du travail salarié) sur la constitution, la vérification et la présentation de la base de données. Notion de producteur de base de donnéesL’article L.341-1 du code de la propriété intellectuelle dispose que le « producteur d’une base de données, entendu comme la personne qui prend l’initiative et le risque des investissements correspondants, bénéficie d’une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d’un investissement financier, matériel ou humain substantiel ». La Cour de justice de l’Union européenne saisie de diverses questions préjudicielles relatives à l’interprétation de l’article 7 de la directive 96/9 du 11 mars 1996 concernant la protection juridique des bases de données (dont est issu l’article L.341-1 du code de la Propriété Intellectuelle), a rendu plusieurs décisions le 9 novembre 2004 à la lumière desquelles doit être interprété le droit interne, et a notamment posé les principes suivants : La notion d’investissement lié à la vérification du contenu de la base de données doit être comprise comme visant les moyens consacrés, en vue d’assurer la fiabilité de l’information contenue dans ladite base, au contrôle de l’exactitude des éléments recherchés, lors de la constitution de cette base ainsi que pendant la période de fonctionnement de celle-ci ; La notion d’investissement lié à la présentation du contenu de la base de données concerne, pour sa part, les moyens visant à conférer à ladite base sa fonction de traitement de l’information, à savoir ceux consacrés à la disposition systématique ou méthodique des éléments contenus dans cette base ainsi qu’à l’organisation de leur accessibilité individuelle ; L’investissement lié à la constitution de la base de données peut consister dans la mise en oeuvre de ressources ou de moyens humains, financiers ou techniques, mais il doit être substantiel d’un point de vue quantitatif ou qualitatif ; L’appréciation quantitative fait référence à des moyens chiffrables et l’appréciation qualitative à des efforts non quantifiables, tels qu’un effort intellectuel ou une dépense d’énergie ; La notion d’investissement lié à l’obtention du contenu d’une base de données doit s’entendre comme désignant les moyens consacrés à la recherche d’éléments existants et à leur rassemblement dans ladite base. Elle ne comprend pas les moyens mis en oeuvre pour la création des éléments constitutifs du contenu d’une base de données. |
Q/R juridiques soulevées :
Quels sont les défis liés à la protection des annuaires de prestataires ?La protection des annuaires de prestataires par le droit des bases de données est confrontée à plusieurs défis. Bien que ces annuaires soient éligibles à cette protection, le cadre légal ne semble pas avoir l’impact escompté. En pratique, même si des similitudes entre deux annuaires sont constatées, cela ne garantit pas que la contrefaçon ou la concurrence déloyale sera reconnue par les tribunaux. Cela soulève des questions sur l’efficacité de la législation actuelle et sur la manière dont les droits des producteurs de bases de données peuvent être réellement défendus. Comment se prouve l’extraction illicite d’une base de données ?La preuve de l’extraction illicite d’une base de données peut être établie par l’identification de similitudes notables entre les bases de données concernées. Dans un cas spécifique, un éditeur a référencé des milliers de centres de montage de pneus, et un concurrent a copié une partie de cette base. Les similitudes, y compris des coquilles et des fautes, ont été des éléments clés pour établir la preuve. Cependant, la simple reprise de quelques coordonnées n’a pas suffi à convaincre les juges, qui ont jugé que l’extraction substantielle n’était pas prouvée. Quelles sont les exigences pour revendiquer la protection du droit sui generis ?Pour revendiquer la protection du droit sui generis des bases de données, l’éditeur doit démontrer qu’il a réalisé des investissements substantiels. Cela peut inclure des attestations précises de ses employés, qui doivent respecter les formes prescrites par le code de procédure civile. Ces attestations peuvent prouver le travail effectué sur la base de données, indépendamment du lien de subordination avec l’employeur. D’autres preuves, comme des attestations comptables, peuvent également être utilisées pour justifier les investissements. Quelle est la définition du producteur de base de données selon la loi ?Selon l’article L.341-1 du code de la propriété intellectuelle, le producteur d’une base de données est défini comme la personne qui prend l’initiative et le risque des investissements nécessaires à sa constitution. Cette protection s’applique lorsque l’investissement financier, matériel ou humain est substantiel. La Cour de justice de l’Union européenne a précisé que l’investissement doit être compris dans plusieurs dimensions, y compris la vérification et la présentation du contenu de la base de données. Quels types d’investissements sont considérés comme substantiels ?Les investissements considérés comme substantiels peuvent être à la fois quantitatifs et qualitatifs. L’investissement quantitatif fait référence à des ressources chiffrables, tandis que l’investissement qualitatif englobe des efforts non mesurables, comme l’effort intellectuel. L’investissement lié à la constitution de la base de données peut inclure des ressources humaines, financières ou techniques. De plus, l’obtention du contenu de la base de données implique des moyens consacrés à la recherche et à la collecte d’éléments existants, sans inclure la création de nouveaux éléments. |
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