L’Essentiel : La société Allopneus a réussi à faire valoir ses droits d’auteur sur son site allopneus.com, en raison de l’originalité de sa présentation et de son architecture. Bien que les juges aient reconnu les investissements significatifs pour constituer sa base de données, ils n’ont pas retenu d’atteinte à celle-ci, faute d’extraction substantielle. En revanche, la contrefaçon de droits d’auteur a été établie, car la combinaison unique d’éléments graphiques et fonctionnels du site conférait une identité distincte, dépassant le simple travail technique. Cette décision souligne l’importance de la protection des créations originales dans le domaine numérique.
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En l’absence d’atteinte aux droits du producteur d’une base de données (annuaire de prestataires / catalogue de produits en ligne), il est toujours opportun de faire valoir la contrefaçon de site internet. En l’espèce, l’éditeur d’un site a obtenu la somme de 400 000 euros au titre de la contrefaçon de droit d’auteur de son site. Affaire AllopneusLa société Allopneus s’est prévalu avec succès de droits d’auteur (mais non de producteur de base de données) sur son site allopneus.com. Cette base portait sur les centres de montage de pneumatiques sur le territoire français. Ayant découvert que la société Centrale Pneus, qui exerce, comme elle, une activité de vente en ligne de pneumatiques, exploitait un site centralepneus.fr qui reproduirait les caractéristiques de son site internet, elle a, fait assigner cette société devant le TGI de Paris. Pas d’atteinte aux bases de donnéesLes premiers juges ont admis que la société Allopneus pouvait se prévaloir de la protection prévue à l’article L. 341-1 du code de la propriété intellectuelle en ce qu’elle justifiait des investissements nécessaires à la constitution et mise à jour de sa base de données. Le travail des salariés avait consisté en particulier à sélectionner et recruter les centres de montage, collecter les données, entretenir un contact avec les garages partenaires, proposer des prestations et collecter les informations relatives à chacune des prestations mises en place, vérifier, et mettre à jour les informations (un investissement de près de 500 000 euros). En revanche, l’atteinte à la base de données n’a pas été retenue en raison de l’absence d’extraction d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle de sa base de données (reproduction d’un double référencement ou d’une mention spécifique que pour 3 garages sur une base de 5000 centres de montage). La preuve n’était pas rapportée d’une reproduction d’une partie substantielle de la base de données invoquée. Contrefaçon de droits d’auteurL’originalité du site internet de la société Allopneus a été établie au-delà des choix opérés qui relevaient plus que d’un simple travail technique de mise en page graphique. Selon le principe applicable : la protection d’une œuvre est acquise sans formalité, du seul fait de la création d’une forme originale. Il incombe toutefois, à celui qui entend se prévaloir des droits de l’auteur, de rapporter la preuve d’une création déterminée à une date certaine et de caractériser l’originalité de cette création. La combinaison des éléments suivants a été jugée originale : — la charte graphique, qui renvoie à un logo, composée de couleurs arbitrairement choisies (blanc, bleu et gris avec touches d’orange) évoquant les activités de carrosserie avec en bas de chaque page un encadré avec plusieurs nuances de gris ; — l’architecture du site, notamment s’agissant du « zoning » constituant le schéma rudimentaire des pages clés d’un site internet et de leurs zones principales : menus, logos, textes, moteur de recherche, permettant de retrouver l’état d’esprit de l’entreprise ; — la combinaison d’éléments propres à l’architecture du site pour la présentation des produits (architecture de la liste, encarts de couleurs vives, bouton d’achat d’une couleur orange dégradée, fiches produits et organisation des produits), la mise en avant des avis, fondés sur les données fournies par la société Avis Vérifiés ; Par ailleurs, force est de constater que si certains des éléments qui composent le site allopneus.com peuvent être considérés comme connus et, pris séparément, comme appartenant au fonds commun de l’univers de sites de ventes en ligne et plus particulièrement de sites de vente en ligne de pneumatiques, en revanche, leur combinaison telle que revendiquée, dès lors que l’appréciation de la cour doit s’effectuer de manière globale, en fonction de l’aspect d’ensemble produit par l’agencement des différents éléments et non par l’examen de chacun d’eux pris individuellement, confère à ce site une physionomie particulière qui le distingue d’autres sites du même genre, quoique poursuivant par nature le même objectif d’optimisation des ventes, et qui traduit, au-delà d’un travail technique, un parti-pris esthétique certes limité mais empreint de la personnalité de son auteur. Il résulte de ces observations que la contrefaçon, définie à l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle, par la représentation, la reproduction ou l’exploitation de l’oeuvre faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit était caractérisée. Télécharger la décision |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le contexte de l’affaire Allopneus ?La société Allopneus a engagé une action en justice contre la société Centrale Pneus pour contrefaçon de droits d’auteur. Allopneus, qui gère le site allopneus.com, a constaté que Centrale Pneus reproduisait les caractéristiques de son site sur son propre site, centralepneus.fr. Cette situation a conduit Allopneus à faire valoir ses droits d’auteur, bien qu’elle n’ait pas pu prouver une atteinte à sa base de données. L’affaire a été portée devant le Tribunal de Grande Instance (TGI) de Paris, où Allopneus a cherché à protéger son investissement et son originalité. Quelles protections Allopneus a-t-elle pu invoquer ?Allopneus a pu invoquer la protection des droits d’auteur en vertu de l’article L. 341-1 du code de la propriété intellectuelle. Les juges ont reconnu que la société avait réalisé des investissements significatifs pour constituer et mettre à jour sa base de données, notamment en sélectionnant et recrutant des centres de montage, en collectant des données et en entretenant des relations avec des garages partenaires. Cependant, la cour a déterminé qu’il n’y avait pas eu d’atteinte à la base de données, car aucune extraction substantielle n’avait été effectuée. La reproduction d’éléments spécifiques n’était pas suffisante pour établir une contrefaçon de la base de données, ce qui a conduit à une focalisation sur la contrefaçon de droits d’auteur. Comment l’originalité du site Allopneus a-t-elle été établie ?L’originalité du site allopneus.com a été établie par la combinaison de plusieurs éléments distinctifs. La cour a noté que la protection d’une œuvre est acquise sans formalité, simplement par la création d’une forme originale. Les éléments jugés originaux comprenaient la charte graphique, l’architecture du site, et la présentation des produits. Par exemple, la charte graphique incluait des couleurs spécifiques et un logo, tandis que l’architecture du site était conçue pour refléter l’esprit de l’entreprise. Ces éléments, bien que certains puissent être considérés comme communs dans le domaine des sites de vente en ligne, ont été jugés dans leur ensemble comme conférant une physionomie unique au site. Quelles conclusions ont été tirées concernant la contrefaçon ?La cour a conclu que la contrefaçon, telle que définie à l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle, était caractérisée. Cela signifie que la représentation, la reproduction ou l’exploitation de l’œuvre par Centrale Pneus avait été effectuée sans le consentement d’Allopneus. La combinaison des éléments du site allopneus.com, bien que certains soient connus, a été jugée suffisamment distincte pour constituer une œuvre originale. La cour a souligné que l’appréciation devait se faire de manière globale, tenant compte de l’agencement des différents éléments, ce qui a permis de conclure à la contrefaçon des droits d’auteur d’Allopneus. |
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