L’Essentiel : La société Allopneus a réussi à faire valoir ses droits d’auteur sur son site allopneus.com, qui répertorie les centres de montage de pneumatiques en France. En raison de la reproduction des caractéristiques de son site par Centrale Pneus, Allopneus a engagé une action en justice. Bien que les juges aient reconnu les investissements réalisés pour la constitution de sa base de données, ils n’ont pas retenu d’atteinte à celle-ci, faute d’extraction substantielle. En revanche, l’originalité de son site a été confirmée, justifiant ainsi la contrefaçon de droits d’auteur, selon l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle.
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En l’absence d’atteinte aux droits du producteur d’une base de données (annuaire de prestataires / catalogue de produits en ligne), il est toujours opportun de faire valoir la contrefaçon de site internet. En l’espèce, l’éditeur d’un site a obtenu la somme de 400 000 euros au titre de la contrefaçon de droit d’auteur de son site. Affaire AllopneusLa société Allopneus s’est prévalu avec succès de droits d’auteur (mais non de producteur de base de données) sur son site allopneus.com. Cette base portait sur les centres de montage de pneumatiques sur le territoire français. Ayant découvert que la société Centrale Pneus, qui exerce, comme elle, une activité de vente en ligne de pneumatiques, exploitait un site centralepneus.fr qui reproduirait les caractéristiques de son site internet, elle a, fait assigner cette société devant le TGI de Paris. Pas d’atteinte aux bases de donnéesLes premiers juges ont admis que la société Allopneus pouvait se prévaloir de la protection prévue à l’article L. 341-1 du code de la propriété intellectuelle en ce qu’elle justifiait des investissements nécessaires à la constitution et mise à jour de sa base de données. Le travail des salariés avait consisté en particulier à sélectionner et recruter les centres de montage, collecter les données, entretenir un contact avec les garages partenaires, proposer des prestations et collecter les informations relatives à chacune des prestations mises en place, vérifier, et mettre à jour les informations (un investissement de près de 500 000 euros). En revanche, l’atteinte à la base de données n’a pas été retenue en raison de l’absence d’extraction d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle de sa base de données (reproduction d’un double référencement ou d’une mention spécifique que pour 3 garages sur une base de 5000 centres de montage). La preuve n’était pas rapportée d’une reproduction d’une partie substantielle de la base de données invoquée. Contrefaçon de droits d’auteurL’originalité du site internet de la société Allopneus a été établie au-delà des choix opérés qui relevaient plus que d’un simple travail technique de mise en page graphique. Selon le principe applicable : la protection d’une œuvre est acquise sans formalité, du seul fait de la création d’une forme originale. Il incombe toutefois, à celui qui entend se prévaloir des droits de l’auteur, de rapporter la preuve d’une création déterminée à une date certaine et de caractériser l’originalité de cette création. La combinaison des éléments suivants a été jugée originale : — la charte graphique, qui renvoie à un logo, composée de couleurs arbitrairement choisies (blanc, bleu et gris avec touches d’orange) évoquant les activités de carrosserie avec en bas de chaque page un encadré avec plusieurs nuances de gris ; — l’architecture du site, notamment s’agissant du « zoning » constituant le schéma rudimentaire des pages clés d’un site internet et de leurs zones principales : menus, logos, textes, moteur de recherche, permettant de retrouver l’état d’esprit de l’entreprise ; — la combinaison d’éléments propres à l’architecture du site pour la présentation des produits (architecture de la liste, encarts de couleurs vives, bouton d’achat d’une couleur orange dégradée, fiches produits et organisation des produits), la mise en avant des avis, fondés sur les données fournies par la société Avis Vérifiés ; Par ailleurs, force est de constater que si certains des éléments qui composent le site allopneus.com peuvent être considérés comme connus et, pris séparément, comme appartenant au fonds commun de l’univers de sites de ventes en ligne et plus particulièrement de sites de vente en ligne de pneumatiques, en revanche, leur combinaison telle que revendiquée, dès lors que l’appréciation de la cour doit s’effectuer de manière globale, en fonction de l’aspect d’ensemble produit par l’agencement des différents éléments et non par l’examen de chacun d’eux pris individuellement, confère à ce site une physionomie particulière qui le distingue d’autres sites du même genre, quoique poursuivant par nature le même objectif d’optimisation des ventes, et qui traduit, au-delà d’un travail technique, un parti-pris esthétique certes limité mais empreint de la personnalité de son auteur. Il résulte de ces observations que la contrefaçon, définie à l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle, par la représentation, la reproduction ou l’exploitation de l’oeuvre faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit était caractérisée. Télécharger la décision |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le contexte de l’affaire Allopneus ?La société Allopneus a engagé une action en justice contre la société Centrale Pneus pour contrefaçon de droits d’auteur. Allopneus, qui gère le site allopneus.com, a constaté que Centrale Pneus reproduisait les caractéristiques de son site sur centralepneus.fr. Cette affaire met en lumière les enjeux de la protection des droits d’auteur dans le domaine des sites internet, en particulier pour les entreprises qui investissent dans la création et la mise à jour de leurs plateformes en ligne. Allopneus a réussi à prouver qu’elle avait investi près de 500 000 euros dans le développement de sa base de données, ce qui a renforcé sa position dans le litige. Quelles protections Allopneus a-t-elle pu invoquer ?Allopneus a pu se prévaloir de la protection des droits d’auteur, mais pas de celle du producteur de base de données. Les juges ont reconnu que la société avait effectué des investissements significatifs pour constituer et maintenir sa base de données, ce qui lui conférait des droits. Cependant, l’atteinte à la base de données n’a pas été retenue, car il n’y avait pas eu d’extraction substantielle des données. La reproduction d’informations concernant seulement trois garages sur un total de 5000 n’a pas été jugée suffisante pour constituer une atteinte. Comment l’originalité du site Allopneus a-t-elle été établie ?L’originalité du site allopneus.com a été établie par la combinaison de plusieurs éléments distinctifs. Les juges ont noté que la charte graphique, l’architecture du site et la présentation des produits contribuaient à son caractère unique. La charte graphique incluait des choix de couleurs spécifiques qui évoquaient les activités de l’entreprise. L’architecture du site, avec son zoning et ses zones principales, a également été considérée comme originale. De plus, la mise en avant des avis clients et l’organisation des produits ont été des éléments qui ont renforcé l’originalité du site. Quelles conclusions ont été tirées concernant la contrefaçon ?La cour a conclu que la contrefaçon, telle que définie par l’article L 122-4 du code de la propriété intellectuelle, était caractérisée. Cela signifie que la représentation, la reproduction ou l’exploitation de l’œuvre d’Allopneus avait été réalisée sans le consentement de l’auteur. Les juges ont souligné que, bien que certains éléments du site puissent être considérés comme appartenant au fonds commun des sites de vente en ligne, leur combinaison unique conférait à allopneus.com une physionomie distincte. Cette décision souligne l’importance de la protection des créations originales dans le domaine numérique et la nécessité pour les entreprises de défendre leurs droits d’auteur. |
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