L’Essentiel : Une société exploitant des arbres fruitiers a assigné un producteur allemand en raison de plants défectueux ayant causé des pertes. Le vendeur a contesté la compétence du juge français, invoquant une clause attributive de juridiction en faveur des tribunaux allemands, présente dans ses conditions générales de vente. Malgré la rédaction en allemand, cette clause était opposable à l’acheteur, qui avait été averti et n’avait pas contesté son existence. Selon l’article 23 du règlement « Bruxelles I », la compétence exclusive des tribunaux allemands était confirmée, rendant ainsi inapplicable la juridiction française dans ce litige commercial.
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Responsabilité du fait des produits défectueuxUne société exploitant des arbres fruitiers a commandé à un producteur allemand, des porte-greffes de type « prunus». Imputant aux plants qui lui avaient été fournis, la présence d’un virus qui a détruit une partie de son exploitation, l’acheteur a assigné le vendeur devant une juridiction française, en indemnisation de son préjudice, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, à titre principal, et de la garantie des vices cachés, à titre subsidiaire. Déclinatoire de compétenceLe vendeur a décliné avec succès la compétence du juge français, en application d’une clause attributive de compétence aux juridictions allemandes, figurant dans ses conditions générales de vente. Les trois documents établissant la relation contractuelle, soit la confirmation de commande, le bon de livraison et la facture, comportaient, au recto, une invitation en français à consulter les conditions de vente et de livraison et, au verso, la reproduction de l’intégralité des conditions générales de vente rédigées en langue allemande, dont un article stipulait une clause de compétence au profit des juridictions du siège social du vendeur. Clause attributive de juridiction en langue étrangèreNonobstant sa rédaction en langue étrangère, cette clause sur laquelle l’attention de l’acheteur avait été spécialement attirée, et qui n’avait pas été contestée, avait fait l’objet d’une acceptation tacite et était opposable à celui-ci (professionnel), ce qui excluait la compétence de la juridiction française. Article 23 du règlement n° 44/2001 du 22 décembre 2000A noter qu’en l’espèce, l’article 23 du règlement européen n° 44/2001 du 22 décembre 2000 dit « Bruxelles I » était pleinement applicable : si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un État membre, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État membre sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. La convention attributive de juridiction doit être conclue par écrit ou verbalement avec confirmation écrite. Les conditions générales de vente d’un professionnel sont opposables en matière commerciale si un écrit – bon de commande, bon de livraison ou facture – les a reproduites ou y a fait expressément référence. Visibilité de la clause attributive de juridictionPour être valable et opposable la clause attributive de juridiction doit avoir été connue et acceptée par la partie à qui elle est opposée. Ainsi, lorsqu’une clause attributive de juridiction est stipulée dans les conditions générales d’une partie, elle n’est valable et opposable à l’autre partie que si dans le texte même du contrat signé par les deux parties, un renvoi explicite est fait à ces conditions générales. Ce renvoi est susceptible d’être contrôlé par une partie faisant preuve d’une diligence normale. En l’espèce, les documents contractuels indiquaient tous la mention en français « regardez nos conditions de vente et de livraison ! ». Cette mention figurait certes tout en bas de ces écrits mais elle apparaissait d’autant plus lisible et compréhensible qu’un point d’exclamation la ponctuait, invitant ainsi le cocontractant à s’y référer. S’agissant d’un contrat dont le caractère commercial n’est pas contesté, conclu avec une société allemande, l’acheteur ne pouvait ignorer qu’une clause attributive de compétence figurait habituellement dans les conditions générales de vente et il lui appartenait de faire preuve de vigilance sur ce point. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la raison pour laquelle l’acheteur a assigné le vendeur devant une juridiction française ?L’acheteur a assigné le vendeur devant une juridiction française en raison de la présence d’un virus sur les porte-greffes de type « prunus » fournis par le vendeur. Ce virus a causé des dommages significatifs à son exploitation d’arbres fruitiers. Il a fondé sa demande sur deux bases juridiques : la responsabilité du fait des produits défectueux, qu’il a invoquée à titre principal, et la garantie des vices cachés, qu’il a utilisée comme argument subsidiaire. Cette situation met en lumière les enjeux liés à la qualité des produits agricoles et les recours possibles en cas de préjudice causé par des produits défectueux. Comment le vendeur a-t-il réussi à décliner la compétence du juge français ?Le vendeur a réussi à décliner la compétence du juge français en se basant sur une clause attributive de compétence qui stipulait que les juridictions allemandes seraient compétentes pour traiter les litiges. Cette clause était intégrée dans les conditions générales de vente du vendeur. Les documents contractuels, tels que la confirmation de commande, le bon de livraison et la facture, contenaient une invitation en français à consulter ces conditions, qui étaient rédigées en allemand au verso. Ainsi, le vendeur a pu prouver que l’acheteur avait été informé de cette clause et qu’il avait implicitement accepté les conditions générales de vente. Quelles sont les implications de l’article 23 du règlement n° 44/2001 pour cette affaire ?L’article 23 du règlement européen n° 44/2001, également connu sous le nom de « Bruxelles I », stipule que si les parties à un contrat conviennent d’un tribunal d’un État membre pour résoudre leurs différends, ce tribunal est compétent. Dans cette affaire, cet article était applicable car les parties avaient convenu d’une clause attributive de juridiction en faveur des tribunaux allemands. Cela signifie que la compétence des tribunaux allemands était exclusive, sauf si les parties avaient convenu autrement. La clause devait être acceptée par écrit, ce qui a été le cas ici, rendant ainsi la compétence des juridictions allemandes opposable à l’acheteur. Quelles conditions doivent être remplies pour qu’une clause attributive de juridiction soit valable ?Pour qu’une clause attributive de juridiction soit valable et opposable, elle doit être connue et acceptée par la partie à qui elle est opposée. Cela implique qu’un renvoi explicite aux conditions générales, où la clause est stipulée, doit être fait dans le texte même du contrat signé par les deux parties. Dans cette affaire, les documents contractuels comportaient une mention en français invitant l’acheteur à consulter les conditions de vente et de livraison. Bien que cette mention figurait en bas des documents, elle était suffisamment visible grâce à l’utilisation d’un point d’exclamation, ce qui a contribué à la reconnaissance de la clause par l’acheteur. Quel rôle joue la diligence de l’acheteur dans cette affaire ?La diligence de l’acheteur joue un rôle crucial dans cette affaire, car il lui incombe de vérifier les conditions générales de vente avant de conclure un contrat. Étant donné que l’acheteur était un professionnel, il était attendu qu’il fasse preuve de vigilance concernant les clauses qui pourraient affecter ses droits. Dans ce cas, l’acheteur ne pouvait ignorer qu’une clause attributive de compétence était généralement incluse dans les conditions générales de vente, surtout dans un contexte commercial avec une société allemande. Ainsi, sa négligence à cet égard a contribué à la décision de la juridiction de ne pas reconnaître la compétence du juge français. |
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