Propriété foncière et prescription acquise : enjeux d’identité d’exploitant.

·

·

Propriété foncière et prescription acquise : enjeux d’identité d’exploitant.

L’Essentiel : La société exploitant un camping, désignée comme la société Les Ormeaux, ainsi que sa présidente, ont engagé une procédure judiciaire contre un vendeur et une vendeuse en revendication de la propriété de plusieurs parcelles cadastrées, fondée sur la prescription acquisitive trentenaire. La vendeuse conteste la décision de la cour d’appel qui a reconnu la société Les Ormeaux comme propriétaire, arguant que celle-ci ne pouvait revendiquer une possession antérieure à sa création. La cour d’appel a statué en faveur de la société, mais n’a pas répondu aux arguments de la vendeuse concernant l’absence de preuves sur la possession antérieure, violant ainsi les exigences procédurales.

Contexte de l’affaire

La société exploitant un camping, désignée comme la société Les Ormeaux, ainsi que sa présidente, ont engagé une procédure judiciaire contre un vendeur et une vendeuse en revendication de la propriété de plusieurs parcelles cadastrées. Cette action est fondée sur la prescription acquisitive trentenaire.

Arguments de la vendeuse

La vendeuse conteste la décision de la cour d’appel qui a reconnu la société Les Ormeaux comme propriétaire des parcelles en question. Elle soutient que la société ne pouvait pas revendiquer une possession remontant à 1988, car elle n’avait été créée qu’en 1990 et n’avait commencé à exploiter le camping qu’en 2008. De plus, elle affirme que la société n’a pas fourni de preuves concernant l’identité de l’exploitant antérieur.

Réponse de la cour d’appel

La cour d’appel a statué que la société Les Ormeaux avait acquis les parcelles litigieuses par prescription acquisitive, en se basant sur des attestations et un rapport d’expertise qui établissaient une possession continue depuis plus de trente ans. Cependant, la cour n’a pas répondu aux arguments de la vendeuse concernant l’absence de preuves sur la possession antérieure des parcelles.

Violation des exigences procédurales

En ne répondant pas aux conclusions de la vendeuse, la cour d’appel a manqué à son obligation de motivation des jugements, ce qui constitue une violation des exigences du code de procédure civile. La décision de la cour est donc remise en question en raison de ce défaut de réponse aux arguments présentés.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 455 du code de procédure civile dans le cadre de la motivation des jugements ?

L’article 455 du code de procédure civile stipule que :

« Tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs. »

Cet article impose aux juges l’obligation de motiver leurs décisions, ce qui signifie qu’ils doivent répondre aux arguments soulevés par les parties.

Dans le cas présent, la cour d’appel a été critiquée pour ne pas avoir répondu aux conclusions de la partie adverse, ce qui constitue une violation de cet article.

En effet, la partie défenderesse, en l’occurrence la société Les Ormeaux, a été accusée de ne pas justifier de l’existence d’auteurs ayant possédé les parcelles litigieuses entre 1988 et 2008.

La cour d’appel, en ne répondant pas à cet argument, a ainsi manqué à son obligation de motivation, ce qui pourrait entraîner l’annulation de sa décision.

Quelles sont les conditions de la prescription acquisitive trentenaire selon le droit français ?

La prescription acquisitive trentenaire est régie par l’article 2261 du code civil, qui dispose que :

« La possession d’un bien, pour être susceptible de prescription, doit être continue, non équivoque, publique et paisible. »

Pour qu’une personne puisse revendiquer la propriété d’un bien par prescription, elle doit prouver qu’elle a exercé des actes de possession sur ce bien pendant une durée de trente ans.

Dans cette affaire, la cour d’appel a retenu que la société Les Ormeaux et ses auteurs avaient possédé les parcelles litigieuses depuis plus de trente ans, en exploitant le camping sur ces parcelles.

Cependant, la question de savoir si cette possession était effectivement continue et non équivoque entre 1988 et 2008 a été soulevée par la partie adverse, ce qui a conduit à un débat sur la validité de la revendication de la société Les Ormeaux.

Comment la cour d’appel a-t-elle justifié sa décision concernant la possession des parcelles ?

La cour d’appel a justifié sa décision en se basant sur les attestations contenues dans l’acte de notoriété du 30 novembre 2018, qui indiquaient que la société Les Ormeaux et ses auteurs avaient possédé les parcelles depuis plus de trente ans.

Elle a également fait référence à un rapport d’expertise qui affirmait que la possession avait débuté en septembre 1987.

Ainsi, la cour a conclu à l’existence d’une occupation continue des parcelles par la société Les Ormeaux et ses auteurs, ce qui est un élément clé pour établir la prescription acquisitive.

Cependant, cette justification a été contestée par la partie adverse, qui a soutenu que la société Les Ormeaux ne pouvait pas prouver l’existence d’auteurs ayant possédé les parcelles entre 1988 et 2008, ce qui a conduit à une remise en question de la validité de la décision de la cour d’appel.

CIV. 3

CL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 février 2025

Cassation partielle

Mme TEILLER, président

Arrêt n° 80 F-D

Pourvoi n° P 23-21.057

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 6 FÉVRIER 2025

Mme [K] [V], domiciliée [Adresse 4], a formé le pourvoi n° P 23-21.057 contre l’arrêt rendu le 11 juillet 2023 par la cour d’appel de Poitiers (1re chambre civile), dans le litige l’opposant :

1°/ à la société Les Ormeaux, société par actions simplifiée,

2°/ à la société Hubeo, société à responsabilité limitée,

toutes deux ayant leur siège au [Adresse 5],

3°/ à M. [O] [V], domicilié [Adresse 2],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Choquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de Mme [V], de la SCP Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat des sociétés Les Ormeaux et Hubeo, après débats en l’audience publique du 7 janvier 2025 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Choquet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Proust, conseiller doyen, et Mme Maréville, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Poitiers, 11 juillet 2023), la société Les Ormeaux, qui a pour activité l’exploitation d’un camping, et la société Hubeo, sa présidente, ont assigné M. [O] [V] et Mme [K] [V] en revendication par la société Les Ormeaux de la propriété des parcelles cadastrées section AL n° [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 1] et [Cadastre 3], sur le fondement de la prescription acquisitive trentenaire.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

2. Mme [K] [V] fait grief à l’arrêt de dire que la société Les Ormeaux est propriétaire, par l’effet de la prescription acquisitive, des parcelles cadastrées section AL n° [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 1] et [Cadastre 3], d’ordonner la publication de l’arrêt au service de la publicité foncière et de rejeter ses demandes en annulation de l’acte de notoriété acquisitive dressé le 30 novembre 2018 et d’indemnité d’occupation, alors « que Mme [V] faisait valoir, dans ses conclusions régulièrement déposées le 16 avril 2022, que la société Les Ormeaux ne pouvait se prévaloir en 2018, par ses auteurs, d’une possession des parcelles litigieuses remontant à l’année 1988, dans la mesure où la société Les Ormeaux, anciennement dénommée Locaravane camping, avait été créée en 1990 et n’avait exploité le camping de [14] qu’à compter de 2008, et qu’elle ne produisait aucun élément pour justifier de l’identité de l’exploitant antérieur du camping, ni qu’il fût l’un de ses auteurs, ce dont il résultait qu’elle ne pouvait se prévaloir d’une possession des parcelles de Mme [V] antérieurement à l’année 2008 ; qu’en se bornant à affirmer que la société Les Ormeaux établissait l’existence d’une possession continue, non équivoque, publique et paisible et depuis plus de trente ans par elle et ses auteurs, à titre de propriétaire, des parcelles cadastrées AL n° [Cadastre 6], [Cadastre 7], [Cadastre 8], [Cadastre 9], [Cadastre 10], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13], [Cadastre 1] et [Cadastre 3] sises commune de Saint Palais sur Mer, sans répondre à ce moyen opérant, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 455 du code de procédure civile :

3. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs.

4. Pour dire que la société Les Ormeaux a acquis, par l’effet de la prescription acquisitive, les parcelles litigieuses, l’arrêt retient qu’il ressort des attestations contenues dans l’acte de notoriété du 30 novembre 2018 que la société Les Ormeaux et ses auteurs les ont possédées depuis plus de trente ans, en exploitant le camping Les Ormeaux sur l’assiette de celles-ci, et du rapport d’expertise que cette possession a débuté en septembre 1987, de sorte que la réalité d’une occupation continue depuis trente ans de ces parcelles par la société Les Ormeaux et ses auteurs est établie.

5. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme [K] [V], qui soutenait que la société Les Ormeaux ne justifiait pas de l’existence d’auteurs qui auraient possédé les parcelles litigieuses entre 1988 et 2008 et auxquels elle aurait pu joindre sa propre possession en faisant l’acquisition de ces parcelles, la cour d’appel n’a pas satisfait aux exigences du texte susvisé.


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon