Des comportements et propos à connotation sexuelle tenus sur le lieu de travail justifient un licenciement pour faute. Notion de faute graveLa faute grave s’entend d’une faute d’une particulière gravité ayant pour conséquence d’interdire le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis. Les faits invoqués comme constitutifs de faute grave doivent par conséquent être sanctionnés dans un bref délai. La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l’employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d’apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s’ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l’éviction immédiate du salarié de l’entreprise. Comportements à connotation sexuelleAux termes de l’article L.1153-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des faits : 1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante; 2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. L’article L.1154-1 du même code prévoit qu’en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il incombe alors à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement. L’employeur est tenu d’une obligation de sécurité à l’égard de l’ensemble de ses salariés et dès qu’il est informé d’une telle situation, il est tenu au visa de l’article L1153-5 du code du travail de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir de tels faits, d’y mettre un terme et de les sanctionner. En matière prud’homale, la preuve est libreEn matière prud’homale, la preuve est libre, et les parties peuvent produire toutes pièces à l’appui de leur défense à la condition qu’elles soient licites et qu’elles soient soumises au principe de la contradiction. Il appartient aussi au juge d’apprécier la valeur probante et la portée de ces attestations ou courriers versés par les parties. Le juge ne peut, par principe, dénier toute valeur probante à une attestation ou un courrier émanant d’une personne liée à l’une des parties sans un examen préalable du contenu de l’attestation et des circonstances de l’espèce. La cour rappelle que les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité. En l’espèce, l’employeur justifiait des faits fautifs énoncés et de leur gravité empêchant la continuité de la relation de travail même durant le temps limité du préavis. ____________________________________________________________________________________________________________________ REPUBLIQUE FRANCAISE AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS COUR D’APPEL D’AMIENS 5EME CHAMBRE PRUD’HOMALE ARRET DU 09 JUIN 2021 N ° RG 19/05673 – N° Portalis DBV4-V-B7D-HNRT JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE CREIL DU 27 JUIN 2019 (référence dossier N° RG 17/00200) PARTIES EN CAUSE : APPELANT Monsieur I X né le […] de nationalité Française […] 60112 Milly-sur-Thérain Représenté, concluant et plaidant par Me Aurelien DAIME, avocat au barreau de COMPIEGNE ET : INTIMEE SASU AUCHAN HYPERMARCHE […] […] représentée, concluant et plaidant par Me Romain ZANNOU, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me BARAT Adeline, avocat au barreau de PARIS représenté par Me Jérôme LE ROY de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau d’AMIENS substitué par Me Marion MANDONNET, avocat au barreau d’AMIENS, avocat postulant DEBATS : A l’audience publique du 17 mars 2021, devant M. J K, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile et sans opposition des parties, ont été entendus : — M. J K en son rapport, — les avocats en leurs conclusions et plaidoiries respectives. M. J K indique que l’arrêt sera prononcé le 09 juin 2021 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile. GREFFIER LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE : M. J K en a rendu compte à la formation de la 5e chambre sociale, composée de : M. J K, Président de Chambre, Mme Fabienne BIDEAULT, Conseiller, Mme Agnès DE BOSSCHERE, Conseiller, qui en a délibéré conformément à la Loi. PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION : Le 09 juin 2021, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par M. J K, Président de Chambre, et Mme Isabelle LEROY, Greffier. * * * DECISION : Vu le jugement en date du 27 juin 2019 par lequel le conseil de prud’hommes de Creil, statuant dans le litige opposant monsieur I X à son ancien employeur la Sa Auchan a dit fondé sur une faute grave le licenciement prononcé, valide la convention forfait-jour, débouté le salarié de l’intégralité de ses demandes et l’a condamné à une indemnité de procédure (1000€) et aux dépens. Vu l’appel interjeté le 22 juillet 2019 par monsieur X à l’encontre de cette décision qui lui a été régulièrement notifiée. Vu la constitution d’avocat de la partie intimée, enregistrée au greffe le 10 octobre 2019. Vu les conclusions enregistrées au greffe le 2 septembre 2019 et régulièrement communiquées, par lesquelles la partie appelante, poursuivant l’infirmation du jugement, soutenant l’inopposabilité de la convention forfait-jour, et l’exécution d’heures supplémentaires non rémunérées, contestant la matérialité des faits fautifs énoncés, sollicite la condamnation de l’employeur au paiement des sommes reprises au dispositif de ses écritures à titre de rappel d’heures supplémentaires et congés payés, de contreparties obligatoires en repos et congés payés , d’indemnité de travail dissimulé, de dommages-intérêts pour non paiement du salaire intégral, de dommages-intérêts pour violation de la durée maximale de travail et du droit au repos, d’indemnité conventionnelle de licenciement, d’indemnité de préavis et congés payés, de rappel de salaire au titre de la mise à pied et congés payés, de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, de dommages-intérêts pour conditions vexatoires, et d’indemnité de procédure, la remise des documents de fin de contrat conformes à la décision à venir et ce sous astreinte, les sommes allouées portant intérêts au taux légal à compter de la saisine et ce avec capitalisation des intérêts et la condamnation de l’employeur aux dépens. Vu les conclusions en date du 24 décembre 2019 et régulièrement communiquées, aux termes desquelles la partie intimée, réfutant les moyens et l’argumentation de la partie appelante, aux motifs notamment du bien fondé du licenciement prononcé , et de la validité du forfait jour, sollicite la confirmation du jugement et la condamnation de l’appelant à une indemnité de procédure. Vu l’ordonnance de clôture du 18 février 2021 renvoyant l’affaire pour plaidoirie à l’audience du 17 mars 2021. Vu les conclusions transmises le 2 septembre 2019 par l’appelant et le 24 décembre 2019 par l’intimé auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d’appel. SUR CE, La société Auchan Hypermarché exploite des supermarchés et hypermarchés, elle emploie plus de 11 salariés et relève de la convention collective du commerce de détail et de gros à prédominance alimentaire. Monsieur X a été embauché à effet du 30 juillet 1996 en qualité de chef de rayon fruits et légumes par la société Docks de France – Ruche Picardie (sous l’enseigne commerciale Mammouth). Le 1er octobre 2000 son contrat de travail a été repris par la société Auchan. Il a occupé de décembre 2001 au 30 juin 2003 les fonctions de ‘ Ral Mag ‘ , puis de juillet 2003 au 31 janvier 2009, celle de responsable logistique, puis de chef de secteur jusqu’en octobre 2014 et enfin au dernier état de la relation contractuelle celle de responsable commerce – statut cadre – niveau 8. La rémunération mensuelle brute était fixée à 3470€. Convoqué à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement fixé au 27 février 2017 par lettre du 9 précédent, avec mise à pied conservatoire, monsieur X a été licencié pour faute grave par lettre recommandée avec avis de réception le 3 mars 2017. Contestant la légitimité de son licenciement et estimant ne pas avoir été rempli de ses droits au titre de l’exécution et de la rupture de son contrat de travail, monsieur X a saisi le conseil de prud’hommes de Creil qui par jugement du 27 juin 2019 dont appel s’est prononcé comme rappelé précédemment. – sur le licenciement : La teneur de la lettre de licenciement est la suivante : ‘ .. Nous faisons suite à l’entretien préalable qui s’est tenu le 27 février 2017, au cours duquel vous ne vous êtes pas fait assister et nous vous notifions par la présente votre licenciement pour faute grave pour les motifs repris ci-après. Depuis septembre 2016 vous exercez les fonctions de Responsable Commerce, statut cadre, niveau 8 sur une échelle de 1 à 9 et avez à ce titre la responsabilité, en tant que membre du comité de direction du secteur non alimentaire du magasin de M sur Oise. Au préalable, nous vous rappelons : – qu’en application de l’article L. 4122-1 du Code du travail, il appartient à chaque travailleur de prendre soin de la santé et de la sécurité des autres, personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail , – que, de ces dispositions générales, résulte l’obligation, pour chaque membre de l’encadrement, de mettre en oeuvre des méthodes de management adaptées et, plus généralement, d’adopter en toutes circonstances un comportement propre à préserver la santé de ses collaborateurs et des autres salariés de l’entreprise avec lesquels ses fonctions le mettent en relation, – qu’i1 incombe également à chaque membre de l’encadrement d’adopter un comportement quotidien en adéquation avec les valeurs de l’entreprise et d’être un exemple à suivre pour les équipes . Au cours du mois de janvier 2017 la direction des ressources humaines a été informée de l’existence d’une situation de souffrance au travail consécutive à des agissements de harcèlement sexuel. Les entretiens qui ont été menés à la suite de cette première alerte ont permis de mettre en lumière les éléments à l’origine de ces situations de souffrance au travail, à savoir de graves carences comportementales de votre part. Lors de l’entretien préalable , vous nous avez remis un document relatant vos cinq mois d’activité sur le magasin de M sur Oise, mettant notamment en avant les difficultés que vous rencontriez avec deux managers commerce sous votre responsabilité. Lors de ce même entretien, nous avons eu de cesse de vous recentrer sur les faits pour lesquels nous souhaitions entendre vos explications, à savoir des faits de harcèlement sexuel. II est en effet établi que vous avez à de multiples reprises tenu des propos et eu des comportements à connotation sexuelle auprès d’une salariée sous votre responsabilité hiérarchique directe. Ces agissements répétés ont eu pour effet de créer une situation de souffrance au travail, dans laquelle cette salariée s’est sentie humiliée, insultée et discréditée dans sa fonction de manager commerce en alternance. Les agissements répétés que nous vous reprochons sont les suivants : Le mardi 16 novembre 2016 vous avez tenu à cette salariée les propos suivants : ‘tu es jolie, tu peux intéresser pas mal de personnes dans le magasin, si je devais classer les plus belles filles du magasin tu serais largement dans top 10’. Le même jour vous avez évoqué devant elle, le fait que vous cherchiez de la lingerie pour votre femme. Dans le prolongement de cet échange, vous avez, à deux reprises, fait référence à des éléments à caractère pornographique : – en évoquant l’existence d’un site internet intitulé «youporn » , – en évoquant un événement de votre vie familiale en lien avec l’éducation de votre fils et la pornographie. Vous avez clos cet échange en évoquant le passé amoureux de cette salariée en lui préconisant de ne pas avoir de relations avec d’autres salariés du magasin sauf « pour une aventure » et vous avez lourdement insisté sur le fait qu’elle était ‘libre’ . II est intolérable d’imposer de tels propos au sein d’une communauté de travail. qui plus est à l’égard d’une collaboratrice en formation soumise à un lien de subordination. Dans la nuit du 30 novembre au 1er décembre 2016, au cours d’un inventaire, vous avez clairement manifesté votre attirance envers cette salariée : – en lui proposant à plusieurs reprises d’aller fumer une cigarette, – en insistant lourdement sur sa beauté physique , – en exprimant votre fierté d’être accompagné par une jolie fille et ainsi de faire jaser sur le magasin , – en lui proposant de faire un tour dans votre voiture BMW, – en lui indiquant que vous auriez aimé aller boire un café avec elle, – en la raccompagnant jusqu’à sa voiture tout en vous enquérant de la présence de camera de surveillance sur le parking, – en lui serrant la main en la caressant, – en l’ appelant après son départ pour vous renseigner sur le fonctionnement de sa chaudière et en lui indiquant que vous auriez aimé passer chez elle pour la dépanner. Le lendemain, le 1er décembre 2016, vous avez précisé que si cette dernière n’avait pas fonctionné, vous auriez fait demi-tour pour venir chez elle et la dépanner. Au cours du mois de décembre 2016, vous avez à plusieurs reprises appelé cette salariée sur son téléphone personnel et en dehors des heures de travail habituelles ce qui a eu pour effet de la déstabiliser plus encore et d’énerver son compagnon. Le lendemain, vous lui avez alors reproché de ne pas avoir répondu à ses appels. Le 17 décembre 2016, vous avez renouvelé votre proposition de venir prendre un café chez cette salariée. Enfin, et concernant toujours cette même salariée, vous avez multiplié des propos et comportements déplacés : – qu’elle est belle avec du rouge à lèvre ; – que son collier est si beau et qu’il lui va bien ; – que vous aimez bien les brunes ; – que sa braguette était restée ouverte ; – que vous aimeriez bien la voir en jupe ; – qu’elle devrait se déguiser en mère noël pour faire les animations ; – qu’elle ne devait pas pointer ses pauses lorsqu’elle allait fumer une cigarette avec vous ; – que vous vouliez échanger avec elle en dehors du lieu de travail au motif qu’elle vous perturbait . Plusieurs salariés du magasin se sont aperçus de votre comportement au regard de cette collaboratrice et se sont dit choqués par cette attitude indigne d’un responsable commerce. Du fait de votre comportement, plusieurs rumeurs ont couru sur une prétendue ‘promotion canapé’ qu’ aurait bénéficié cette salariée. Au regard de l’ensemble de ces éléments, nous ne pouvons que constater que vos agissements et votre comportement ont profondément déstabilisé cette salariée, qui s’est sentie humiliée, insultée et discréditée dans sa fonction de manager commerce en formation. Cette salariée a également exprimé avoir ressenti une peur croissante du fait de vos agissements répétés. En votre qualité de Responsable Commerce, il vous incombait d ‘adopter un comportement conforme aux exigences légales, en respectant les salariés. en animant au quotidien les valeurs de l’entreprise et en garantissant la considération et l’équité dans les comportements individuels et collectifs de travail. Nous ne pouvons que constater que votre attitude est en parfaite contradiction avec le rôle que nous attendons légitimement de vous. Les explications que vous avez avancées lors de l’entretien préalable ne nous ont pas permis de modifier noire appréciation des faits. Au vu de ce qui précède, votre maintien dans l’entreprise est donc impossible, et nous vous notifions votre licenciement pour faute grave. Votre contrat de travail prendra donc fin à la date d’envoi de la présente lettre et votre période de mise à pied à titre conservatoire qui a débuté le 9 février 2017 ne vous sera pas rémunérée … ‘ . A titre liminaire il n’appartient pas à la cour de porter un jugement de valeur sur le contenu des conclusions de l’appelant et notamment sur ses commentaires et affirmations péremptoires sur les faits énoncés, sur la valeur des pièces versées par l’employeur et sur la notion de harcèlement sexuel. La lettre de licenciement fixe les limites du litige. La faute grave s’entend d’une faute d’une particulière gravité ayant pour conséquence d’interdire le maintien du salarié dans l’entreprise même pendant la durée limitée du préavis. Les faits invoqués comme constitutifs de faute grave doivent par conséquent être sanctionnés dans un bref délai. La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l’employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d’apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s’ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour justifier l’éviction immédiate du salarié de l’entreprise. Aux termes de l’article L.1153-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des faits : 1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante. 2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un tiers. L’article L.1154-1 du même code prévoit qu’en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il incombe alors à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement. L’employeur est tenu d’une obligation de sécurité à l’égard de l’ensemble de ses salariés et dès qu’il est informé d’une telle situation, il est tenu au visa de l’article L1153-5 du code du travail de prendre toutes dispositions nécessaires en vue de prévenir de tels faits, d’y mettre un terme et de les sanctionner. Enfin la cour rappelle qu’en matière prud’homale, la preuve est libre, et les parties peuvent produire toutes pièces à l’appui de leur défense à la condition qu’elles soient licites et qu’elles soient soumises au principe de la contradiction. Il appartient aussi au juge d’apprécier la valeur probante et la portée de ces attestations ou courriers versés par les parties. Le juge ne peut, par principe, dénier toute valeur probante à une attestation ou un courrier émanant d’une personne liée à l’une des parties sans un examen préalable du contenu de l’attestation et des circonstances de l’espèce. La cour rappelle que les dispositions de l’article 202 du code de procédure civile ne sont pas prescrites à peine de nullité. En l’espèce, la cour considère que l’employeur justifie des faits fautifs énoncés et de leur gravité empêchant la continuité de la relation de travail même durant le temps limité du préavis. En effet, au vu des pièces et documents produits aux débats, l’employeur justifie qu’il a eu connaissance en janvier 2017 d’une situation de souffrance au travail concernant madame L M-Z par un mail de madame N C adressé à madame Y, (qualité de vie au travail), qu’il est établi que madame Z a été entendue par le service RH de Villeneuve d’Ascq, entretien au cours duquel elle a fait part des agissements dénoncés comme inappropriés de la part de monsieur X à son égard, confirmant les comportements et propos à connotation sexuelle retenus dans la lettre de licenciement. Cette salariée a réitéré ses accusations dans un compte rendu lié à son attestation du 3 janvier 2017. Il est établi que l’employeur a agi dans un délai restreint, la connaissance des faits dénoncés datant de janvier 2017 et la mise à pied conservatoire datant du 9 février 2017, l’employeur étant tenu de procéder à l’audition de la plaignante et à diligenter des investigations notamment en recueillant d’autres témoignages comme mesdames Y et C, le délai écoulé étant proportionné aux circonstances de la cause. Il résulte principalement de ces pièces, que le salarié mis en cause , qui était le supérieur hiérarchique de madame Z lui a tenu les propos suivants ‘qu’elle était jolie et qu’elle pouvait intéresser pas mal de personnes dans le magasin’ insistant sur son physique ‘ j’aimerai te voir en jupe ‘ ‘ tu es belle avec ton rouge à lèvres ‘, ‘la classant dans les plus belles filles’ , qu’au cours d’une discussion il a évoqué un site pornographique, évoquant le fait que son fils de 13 ans était tombé par hasard sur un film porno, qu’il n’avait pas voulu changer de chaîne , voulant avoir une conversation avec lui, alors même que l’entretien avec madame Z était de nature professionnelle, réitérant des allusions sur sa vie sentimentale par la suite, celle-ci précisant que ces remarques et ses allusions la mettaient mal à l’aise, se sentant humiliée et insultée et même avoir peur de ces agissements, nécessitant un suivi par le service qualité au travail pour la rassurer. Madame Z a maintenu que monsieur X avait l’habitude de lui caresser la main lorsqu’il la prenait, insistant à plusieurs reprises pour aller boire un café ensemble, l’appelant à trois reprises hors de ses horaires de travail (appels intervenus à minuit) , lui reprochant de ne pas avoir répondu , insistant pour venir chez elle. La cour constate que les dires de madame Z sont corroborés par le relevé du téléphone professionnel de monsieur X sur lesquels apparaissent ces appels et que les agissements de ce dernier ont été remarqués par d’autres salariés comme cela résulte des attestations de madame A et de monsieur B. L’employeur verse aussi l’attestation de madame C ayant recueillie les confidences de la jeune femme, rappelant qu’elle même avait été victime d’un tel comportement dans le passé. Ainsi la cour considère que monsieur X, âgé de 42 ans, a adressé à une salariée en formation en alternance placée sous son autorité, âgée de 20 ans, des remarques sur sa vie personnelle et sentimentale, a porté à plusieurs reprises des appréciations axées sur son physique en lui faisant des compliments sur sa façon de se vêtir et sur sa morphologie, l’incitant à porter une jupe, a eu des gestes et des propos déplacés, a cherché à s’imposer auprès d’elle même durant les temps de pause et a essayé de la contacter hors des horaires de travail. Ces actes non utilement contredits par le mis en cause constituent des faits de harcèlement sexuel dont les conséquences sont telles pour l’intégrité physique et psychique de la personne qui les subit qu’ils ne permettent pas le maintien de la relation de travail même dans le temps limité du préavis. En conséquence, par confirmation du jugement, il y a lieu de dire fondé sur une faute grave le licenciement prononcé et de débouter monsieur X de ses demandes indemnitaires à ce titre (indemnité de licenciement, indemnité de préavis et congés payés, rappel de salaire et congés payés pour la mise à pied et dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse). – conditions vexatoires du licenciement : La cour rappelle qu’un licenciement peut causer au salarié en raison des circonstances vexatoires qui l’ont accompagné un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi et dont il est fondé à demander réparation. Il appartient au juge de vérifier si la rupture du contrat de travail n’est pas intervenue dans des conditions de nature à causer un préjudice distinct de celui de la perte de l’emploi. Il appartient au salarié d’établir les circonstances vexatoires de son licenciement, le préjudice résultant de la perte de son emploi étant réparé par l’allocation de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. La cour constate que monsieur X ne produit aucun élément autre que ses propres dires pour caractériser ce préjudice distinct et qu’en conséquence il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a été débouté de ce chef de prétention. – sur la convention forfait-jours : Monsieur X soutient que la convention forfait-jours ne lui est pas opposable, que les dispositions de la convention collective régissant cette convention ont été censurées par la cour de cassation en ce qu’elles sont insuffisantes pour garantir le droit à la santé et au repos et que les nouvelles dispositions modifiant l’article 5.7.2 de la dite convention collective entrées en vigueur le 24 mai 2016 ne vaut que pour le futur et ne permettent pas de régulariser a posteriori une convention individuelle de forfait déclarée nulle. En application des articles L 3121-39 et L 3121-40 du code du travail, la mise en place d’une convention individuelle de forfait en jours est subordonnée à la conclusion d’une convention ou d’un accord collectif le prévoyant ainsi qu’à la rédaction d’un écrit. En l’espèce, contrairement à ce que soutenu par l’appelant, il n’est pas contesté que le salarié a signé le 15 novembre 2013 un avenant à son contrat de travail prévoyant la mise en place d’une convention de forfait jours et que l’accord d’entreprise du 10 avril 2013 institue le forfait annuel en jours dans l’entreprise à hauteur de 214 jours pour les cadres. L’article L 3121-46 du code du travail dans sa version applicable à l’espèce, dispose qu’un entretien individuel est organisé par l’employeur, avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l’année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l’organisation du travail dans l’entreprise, l’articulation entre l’activité professionnelle et la vie personnelle et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié. La tenue d’un entretien annuel a pour finalité non seulement d’évaluer quantitativement la charge de travail du salarié mais également ses répercussions sur son équilibre vie professionnelle- vie personnelle, équilibre qui ne peut se mesurer seulement à l’aune de relevés d’horaires. Le droit à la santé et au repos est un droit à valeur constitutionnelle. Il résulte des articles 151 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne se référant à la Charte sociale européenne et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, L. 3121-45 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, interprété à la lumière de l’article 17, §§ 1 et 4 de la directive 1993/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993, des articles 17, § 1, et 19 de la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de l’article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, des directives de l’Union européenne que les Etats membres ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur. La société Auchan rappelle sans être utilement contredit sur ce point qu’il existe au sein de l’entreprise un système de badgeuse qui lui permet de contrôler les horaires de chaque salarié, monsieur D attestant d’un contrôle régulier de sa part, précisant notamment que lors de l’exécution du mi-temps thérapeutique de monsieur X du 4 novembre 2014 au 12 avril 2015, le service RH avait constaté qu’il faisait plus d’heures par semaine que prévu, l’obligeant à lui faire un rappel à l’ordre, produisant les échanges de courriels sur ce point, et à être reçu par le responsable et l’assistante des ressources humaines, madame E et monsieur O, ceux-ci versant des attestations en ce sens, et l’attestation de madame F du service du personnel ayant assisté à l’entretien. L’employeur rappelle aussi qu’un outil informatique permettant le suivi quotidien de la charge de travail des salariés (dit i.Tempo) a été mis en place, chaque cadre en forfait-jours étant obligé de planifier et de renseigner précisément leurs jours prestés et leurs jours de repos, le système faisant apparaître les dates des journées ou demi-journées travaillées. La société Auchan soutient et justifie enfin que la charge de travail et l’amplitude de journées de travail de monsieur X faisaient l’objet d’un suivi et d’un contrôle par la mise en place de commission de temps de travail encadrement à laquelle le salarié participait et d’un bilan annuel de temps de travail des cadres soumis à forfait-jours, le temps de travail étant abordé systématiquement au cours des entretiens individuels annuels (cf paragraphe intitulé ‘suivi des conditions d’exercice et de l’activité professionnelle’). Il justifie aussi sans être utilement contredit que lors de la mise en place du mi-temps thérapeutique en lien avec le médecin du travail, la convention forfait jours a été suspendue et que le salarié était alors sous le régime d’un temps partiel, veillant à ce qu’il ne fasse que 21 heures par semaine, la convention reprenant force à l’issue de ce mi-temps. Ces éléments n’étant pas utilement contredits par le salarié appelant, par confirmation du jugement déféré, il y a lieu de dire opposable la convention forfait jours et de débouter monsieur X de ses demandes indemnitaires au titre d’heures supplémentaires effectuées (rappel de salaire, contrepartie en repos, indemnité de travail dissimulé, dommages-intérêts pour non paiement de l’intégralité du salaire). Monsieur X soutient que l’employeur a violé la durée maximale de travail et le droit au repos, soutenant avoir travaillé jusqu’à 16 heures par jour ou avoir des semaines type de 60 heures. Aux termes de l’avenant du contrat de travail, il appartient au salarié d’organiser son temps de travail dans le cadre du forfait sous réserve de respecter un repos quotidien de 12 heures entre deux journées de travail hebdomadaire et de 35 heures consécutives. Or l’employeur justifie en fournissant les relevés des badgeuses que le salarié n’a pas comme il prétend eu des journées ou de semaine de travail ne respectant pas les dispositions légales en la matière. Il est manifeste que les calculs du salarié sont erronés, n’intégrant pas les pauses méridiennes dont il n’excipe pas ne pas avoir pu les prendre, ne débadgeant pas, alors même que l’employeur verse les attestations de mesdames E et Coelho et de monsieur G en sens contraire et non utilement contredites, évoquant des pauses d’une durée comprise entre 1 heure et 2 heures et justifie des journées de plus de 12 heures les 1er décembre 2015, 3 juin 2016 et 8 juin 2016, celles-ci s’expliquant par la réalisation d’inventaires et ayant donné lieu à des majorations pour heures de nuit. En conséquence, par confirmation du jugement sur ce point, il convient de débouter l’appelant de chef de prétention. Au vu de ce qui a été jugé précédemment, il y a lieu de le débouter de sa demande de remise des documents de fin de contrat rectifiés et conformes et ce sous astreinte ainsi que de ses demandes d’intérêts au taux légal et d’anatocisme. — sur les frais irrépétibles et les dépens : Les mesures accessoires à ce titre prises par le premier juge seront confirmées. Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société intimée les frais irrépétibles exposés par elle en cause d’appel et il convient de condamner l’appelant à lui payer à ce titre la somme qui sera précisée au dispositif de l’arrêt. Monsieur X, partie succombante sera condamné aux dépens d’appel et sa demande d’indemnité de procédure sera rejetée. PAR CES MOTIFS. La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort, Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Creil du 27 juin 2019 en toutes ses dispositions. Y ajoutant. Condamne Monsieur I X à payer à la SA AUCHAN HYPERMARCHÉ la somme de 1500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Déboute Monsieur X de sa demande d’indemnité de procédure. Condamne Monsieur X aux dépens d’appel. LE GREFFIER, LE PRESIDENT |
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